SCOTT, WILLIAM DUNCAN, agent des terres et fonctionnaire, né en novembre 1861, probablement le 7, à Dundas, Haut-Canada, fils de James Scott, constructeur et manufacturier, et de Margaret McEwan ; décédé célibataire le 27 janvier 1925 à Ottawa.

William Duncan Scott était issu de pionniers presbytériens écossais de Dundas. En 1925, l’Ottawa Evening Citizen ferait observer : « le vieux bien de famille des Scott, “Craigleith”, est l’un des beaux coins du district, avec ses 15 acres de jardin et de verger vallonnés ». Formé à la Dundas High School, Scott entreprit des études en vue de devenir avocat, mais en 1881, il renonça à cette profession et partit pour le Manitoba, où la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique l’engagea comme agent foncier. Ainsi commença-t-il une carrière de plus de 40 ans dans le domaine de l’immigration et de la colonisation.

En janvier 1889, Scott entra au bureau de l’immigration du Manitoba à Toronto en qualité de commis. En octobre 1890, il prit la direction du programme manitobain d’immigration dans le centre et l’est du Canada. Le slogan suivant figurait dans l’en-tête du papier à lettres de son bureau : Help to keep Canadians in Canada (Faites votre part pour que les Canadiens restent au Canada). Il allait promouvoir la province de l’Ouest en Ontario, au Québec, dans les Maritimes et même au Michigan, en assistant à des dizaines d’assemblées d’instituts de fermiers et de pique-niques de cultivateurs. Son travail consistait à convaincre les éventuels colons qu’il valait la peine d’acheter une terre au Manitoba, où la plus grande partie des terres gratuites étaient déjà prises, au lieu de chercher des concessions statutaires gratuites plus loin dans l’Ouest, et aussi que, « en s’établissant au Manitoba, ils ne quitt[aient] pas la civilisation, mais [allaient] dans une contrée dotée de tout le nécessaire en fait d’églises, d’écoles, de routes, etc. ». Quand il accueillait des nouveaux venus à l’arrivée des navires à vapeur à Halifax ou à Montréal, il devait contrer la propagande qui leur disait qu’ils ne trouveraient pas de travail au Manitoba et qu’ils y « gèleraient en hiver ».

Clifford Sifton, ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de sir Wilfrid Laurier*, recommanda au ministre de l’Agriculture, Sydney Arthur Fisher, de nommer Scott à la commission chargée de préparer le stand du Canada à l’Exposition universelle qui aurait lieu à Paris en 1900. Enthousiasmé par sa nomination, qui entra officiellement en vigueur le 1er janvier 1899, Scott assura à Sifton : « Je puis faire honneur à notre contrée de l’Ouest et à votre gouvernement. » Le stand remporta un franc succès. Par la suite, Scott ferait la promotion du Canada à des expositions tenues à Glasgow, à Londres, à Wolverhampton et à Cork. En outre, il supervisa la construction de la grande arche de céréales canadiennes érigée à Whitehall pour le couronnement d’Édouard VII en 1902. Le 5 janvier de l’année suivante, Sifton lui confia la surintendance de l’immigration au ministère de l’Intérieur. Scott exerça cette fonction jusqu’au 20 février 1919 et devint alors sous-ministre adjoint d’un nouveau ministère, l’Immigration et la Colonisation.

L’exposé le plus complet de la pensée de Scott se trouve dans le texte publié par lui en 1913 pour Canada and its provinces : « Immigration and population ». On aura également un aperçu de ses idées en consultant ses réponses au comité permanent de la Chambre des communes sur l’agriculture et la colonisation, qui l’interrogea de temps à autre de 1905 à 1911. Ses déclarations reflétaient fidèlement les positions du gouvernement. L’objectif de celui-ci était d’encourager la venue de « fermiers, [d’]ouvriers agricoles et [de] domestiques » des États-Unis, de la Grande-Bretagne et du nord de l’Europe. Pour concevoir la publicité, il importait de déterminer « comment mettre le Canada en valeur dans les pays dont le dominion [pouvait], en raison de leurs conditions climatiques, attendre des colons d’un type qui lui conviendra[it] ». En 1905, à l’opposition qui prétendait que le Canada recevait la « lie de la civilisation », Scott rétorqua : « ce sont des gens bien qui viennent chez nous ». Par la suite, il fit valoir que, de 1900 à 1907, le Canada avait accueilli 7 000 colons de plus qui venaient des îles Britanniques que les États-Unis. Dans le cas des « étrangers », la politique gouvernementale – Scott le garantissait à ses détracteurs – consistait à « essayer de les disséminer le plus possible ». Il allait même jusqu’à dire : « nous mettons ces étrangers sur des terres où l’on ne pourrait pas placer des colons de langue anglaise » – sur « les terres les plus pauvres ».

En son temps, Scott était reconnu pour avoir orchestré les années d’immigration record au Canada avant la Première Guerre mondiale, et en particulier l’accroissement de la population de l’Ouest. Toutefois, des auteurs plus récents l’ont associé à des mesures de restriction et de déportation, et surtout à l’application stricte des changements apportés à la Loi de l’immigration avec la quasi-unanimité des parlementaires dans les années 1906 à 1910. En fait, l’opposition accusait le gouvernement de ne pas être assez restrictif et de ne pas soumettre les candidats à l’immigration à une inspection assez sévère, ce qui entraînait des pourcentages inutilement élevés de déportation. Scott répondait que la politique avait été modifiée en 1910 dans le but d’exclure les « indésirables », c’est-à-dire, entre autres, les « physiquement, mentalement ou moralement inaptes », les personnes « peu aptes à s’assimiler » et celles qui risquaient d’augmenter la congestion urbaine. Certains règlements entravaient expressément l’immigration en provenance de l’Asie ainsi que de l’Europe du Sud et de l’Est. Pour défendre ces limitations, Scott mit au point un argument bizarre : la politique d’hospitalité pratiquée dans les années précédentes avait en fait découragé des gens dont la venue était souhaitable, car ils voyaient que « tout un chacun pouvait entrer », alors que les nouvelles restrictions rendaient le Canada attrayant pour eux puisque, désormais, ils avaient confiance « que l’admission de nouveaux colons se fai[sait] avec les précautions nécessaires ». D’après Scott, la prédisposition « à s’assimiler et à adopter les mœurs canadiennes […devait] être l’ultime critère selon lequel on jugera[it] de l’à-propos d’accepter les immigrants, peu importe leur catégorie ». Il était essentiel de séparer « “le bon grain de l’ivraie” parmi les multitudes qui cherch[aient] à gagner les rives [du Canada] ».

En 1911, le dossier de l’immigration chinoise passa du ministère de l’Industrie et du Commerce au ministère de l’Intérieur. Le 2 octobre, Scott se vit confier une fonction supplémentaire, celle de contrôleur en chef de l’immigration chinoise. Comme son titre l’indiquait, l’intention du gouvernement était de restreindre cette immigration. La chose devait se faire en limitant davantage les mouvements des immigrants chinois, en réduisant, parmi ceux inscrits dans des établissements d’enseignement, le nombre de bénéficiaires d’une exemption de la capitation de 500 $ et en appliquant aux candidats à l’immigration la règle du « voyage sans escale » [V. Harnam Kaur*]. En dépit de ces mesures, le nombre de nouveaux arrivants chinois continuait d’atteindre des sommets. En 1915, le gouvernement conservateur de sir Robert Laird Borden* interdit donc aux artisans et ouvriers, qualifiés ou non, de débarquer dans les ports de la Colombie-Britannique, ce qui provoqua une forte baisse des arrivées. Seuls étaient admis les marchands, leur famille et les étudiants inscrits dans des établissements de haut savoir. Le gouvernement libéral de William Lyon Mackenzie King* donna un caractère officiel à cette politique d’exclusion en faisant adopter en 1923 la Loi de l’immigration chinoise.

Pour des raisons de santé, William Duncan Scott quitta la fonction publique le 30 juin 1924. L’hiver suivant, il eut un rhume qui dégénéra en une pneumonie à laquelle s’ajoutèrent d’autres complications. Sa mort survint le 27 janvier 1925. Fonctionnaire compétent et respecté, il avait beaucoup contribué à l’application de la politique gouvernementale d’immigration, qui était fortement teintée de discrimination raciale, et il l’avait fait en évitant la polémique. Il avait aussi été, pour reprendre les termes des nécrologies, « un homme des plus bienveillants, aimé de tous les gens de sa connaissance », qui avait « servi avec zèle, dans l’anonymat, mais avec distinction ».

David J. Hall

William Duncan Scott est l’auteur d’« Immigration and population » paru dans Canada and its provinces : a history of the Canadian people and their institutions [...], Adam Shortt et A. G. Doughty, édit. (23 vol., Toronto, 1913–1917), 7 : 517–590.

BAC, MG 27, II, D15 ; MG 30, C62.— Globe, 27 janv. 1925.— Manitoba Free Press, 28 janv. 1925.— Ottawa Citizen, 27–29 janv. 1925.— Ottawa Evening Journal, 27–29 janv. 1925.— Ruth Cameron, « The wheat from the chaff : Canadian restrictive immigration policy, 1905–1911 » (mémoire de m.a., univ. Concordia, Montréal, 1976).— Canada, dép. du Secrétariat d’État, The civil service list of Canada [...] (Ottawa), 1918 ; Chambre des communes, Journaux, 1905–1910/1911 ; Parl., Doc. de la session, 1904–1925.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 3.— Ninette Kelley et Michael Trebilcock, The making of the mosaic : a history of Canadian immigration policy (Toronto, 1998).— Valerie Knowles, Strangers at our gates : Canadian immigration and immigration policy, 1540–1997 (éd. rév., Toronto, 1997).— P. S. Li, The Chinese in Canada (Toronto, 1988).— Manitoba, Legislative Assembly, Sessional papers, 1889–1899.— Barbara Roberts, Whence they came : deportation from Canada, 1900–1935 (Ottawa, 1988).

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David J. Hall, « SCOTT, WILLIAM DUNCAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/scott_william_duncan_15F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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