RYERSE, AMELIA (Harris), écrivain et auteur d’un journal, née en février 1798 à Port Ryerse, Haut-Canada, fille de Samuel Ryerse*, loyaliste, et de Sarah Underhill, décédée le 19 mars 1882 à London, Ontario.
Les parents d’Amelia Ryerse immigrèrent au Canada en provenance des États-Unis peu après la Révolution américaine ; ils se rendirent d’abord au Nouveau-Brunswick puis s’établirent en 1794 à Long Point, dans le comté de Norfolk, Haut-Canada. Il semble qu’Amelia ne suivit pas d’autres cours réguliers que ceux qui lui furent dispensés avant 1812, durant une année ou plus, dans une école de Niagara Falls. Son père, qui avait commandé une compagnie de volontaires du New Jersey pendant la guerre d’Indépendance, dirigea la milice du comté de Norfolk peu de temps après son arrivée au Canada ; on le nomma plus tard lieutenant-colonel et lieutenant du comté. En 1810, pour des raisons de santé, il abandonna ces fonctions et les autres postes qu’il occupait et mourut victime de la tuberculose en juin 1812. En mai 1814, les troupes américaines attaquèrent la ferme des Ryerse et incendièrent tous les bâtiments à l’exception de la maison principale.
Le 28 juin 1815, Amelia Ryerse épousa John Harris, sous-officier dans la marine royale, qu’elle connaissait depuis moins de six semaines. On raconte qu’un jour, se trouvant avec une autre jeune fille de 17 ans au milieu d’un groupe de colons qui avaient rencontré un bateau appartenant à une équipe qui effectuait la reconnaissance du port entre Long Point et Turkey Point – bateau sur lequel travaillait Harris –, elle aurait dit en désignant celui-ci du doigt : « Voici l’homme que je vais épouser. » Quinze jours après le mariage, Harris apprit de sir Edward Campbell Rich Owen qu’il avait été affecté à une étude hydrographique des Grands Lacs sous la direction du capitaine William Fitz William Owen*. Il alla prendre son poste à Kingston et, durant les deux années suivantes, jusqu’au moment où il prit sa retraite à la demi-solde le 1er septembre 1817, sa jeune femme s’occupa des affaires du ménage au quartier général de l’équipe hydrographique, qui servait de résidence aux officiers ; elle contribua également à dresser les cartes des régions étudiées. En 1817, le couple et son premier enfant s’établirent non loin de Port Ryerse, sur un terrain qu’Amelia Ryerse avait acquis à titre de fille d’un loyaliste. Ils demeurèrent à cet endroit jusqu’en 1834, puis ils allèrent habiter Eldon House, à London. Harris était trésorier du district de London depuis 1821 et, lorsque l’administration centrale du district fut déplacée de Vittoria à London en 1826, il trouva plus commode de s’installer dans cette ville plutôt que de voyager entre sa résidence et son lieu de travail.
Après le décès de son mari, survenu en 1850, Amelia Harris s’occupa principalement de ses enfants. En 1859, ils étaient tous établis. Ses trois fils étaient avocats, et ses sept filles encore en vie avaient épousé de bons partis. Six d’entre elles étaient mariées à des Anglais, dont quatre officiers des régiments britanniques qui avaient tenu garnison à London. Cette grande famille entretenait une correspondance régulière qui a été conservée. En 1857, John, le fils aîné, passa l’été en Angleterre, et sa mère lui écrivit toutes les semaines. Il semble bien que celle-ci prit peu à peu l’habitude de prendre des notes quotidiennement en vue de rédiger ces lettres, et ceci l’amena, le 12 septembre 1857, à commencer un journal qu’elle tint durant presque 25 ans, c’est-à-dire jusqu’à quelques semaines de son décès, ne sautant que 325 des quelque 9 000 jours de cette période. Son plus long silence, qui dura environ quatre mois en 1861, lors d’une grave maladie, est compensé par le fait que sa bru, Sophia Howard (fille d’Egerton Ryerson), qui habitait Eldon House à cette époque, rédigea elle aussi un journal, soit du 1er septembre 1860 au 31 décembre 1861.
La valeur du journal d’Amelia Harris n’est pas tant historique ou sociologique que littéraire. Comme Eldon House constituait un lieu de réunions sociales, ce document nous renseigne, bien entendu, sur bon nombre de membres des principales familles de London et sur des personnages éminents tels qu’Edward Blake*, George Brown*, John Alexander Macdonald* et Egerton Ryerson. S’ajoutant aux lettres d’Amelia et d’autres membres de sa famille, le journal trace un portrait détaillé d’une famille prospère du xixe siècle. Toutefois, sa véritable importance tient au regard particulier que l’auteur jette sur les événements racontés, à la clarté et à l’objectivité des études de caractère et au style vivant dans lequel sont décrits des incidents en apparence insignifiants ; la ressemblance avec l’œuvre de Jane Austen est frappante. Bien qu’elle n’eût guère fréquenté l’école, Amelia Harris connaissait fort bien la littérature anglaise, l’histoire et la théologie, et elle possédait une intelligence supérieure. Son talent se manifeste non seulement dans son journal et dans sa correspondance, mais aussi dans un autre ouvrage littéraire de premier plan qu’elle rédigea.
En 1861, à la demande de son cousin Egerton Ryerson, elle écrivit des « notes historiques » relatant l’immigration de son père et la vie qu’il avait menée jusqu’en 1810. En 1879, elle prolongea le récit jusqu’à l’époque de mai 1814 ; cet ajout comprenait également la naissance et la jeunesse d’Amelia Ryerse, ainsi que l’attaque de la ferme. Après révision, le texte fut incorporé à l’ouvrage de Ryerson, The loyalists of America [...]. Aux yeux de Charles Bruce Sissons*, « ces trente pages égaient la narration prosaïque du second volume de Ryerson et présentent un compte rendu des débuts de la colonisation du Haut-Canada qui est aussi fidèle et intéressant que tout ce que l’on peut trouver ailleurs ».
Amelia Ryerse est l’auteur de « Historical memoranda by Mrs. Amelia Harris, of Eldon House, London, Ontario [...] », publié dans Egerton Ryerson, The loyalists of America and their times : from 1620 to 1816 (2e éd., 2 vol., Toronto et Montréal, 1880 ; réimpr., New York, 1970), II : 228–256 ; réimprimé dans Loyalist narratives from Upper Canada, J. J. Talman, édit. (Toronto, 1946), 109–148. La UWO possède les journaux d’Amelia Ryerse.
Egerton Ryerson, My dearest Sophie ; letters from Egerton Ryerson to his daughter, C. B. Sissone, édit. (Toronto, 1955), xxxiii–xxxvi.— R. [S.] Harris, « The beginnings of the hydrographic survey of the Great Lakes and the St. Lawrence River », Historic Kingston, no 14 (1965) : 24–39.— L. H. Tasker, « The United Empire Loyalist settlement at Long Point, Lake Erie », OH, 2 (1900).
Robin S. Harris, « RYERSE, AMELIA (Harris) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/ryerse_amelia_11F.html.
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Auteur de l'article: | Robin S. Harris |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |