PEARSE, BENJAMIN WILLIAM, arpenteur, homme politique et fonctionnaire, né le 19 janvier 1832 dans le Devon, Angleterre ; en 1862, il épousa Mary Letitia Pemberton (décédée en 1872), cousine de Joseph Despard Pemberton*, puis, le 8 juin 1876, Sara Jane (Jennie) Palmer (décédée en 1954), et ils eurent une fille ; décédé le 17 juin 1902 à Victoria.

Selon un contemporain de William Benjamin Pearse, les parents de ce dernier avaient veillé à ce qu’il reçoive « une éducation et une formation morale [...] des plus soignées ». De 1849 à 1851, le jeune Benjamin William travailla comme stagiaire chez John George Cockburn Curtis, ingénieur civil à Londres. Au début de l’année 1851, après voir lu une offre d’emploi d’assistant qu’avait fait paraître dans le Times de cette ville Joseph Despard Pemberton, l’ingénieur et l’arpenteur de la Hudson’s Bay Company à l’île de Vancouver, il posa sa candidature et fut choisi. Il avait alors 19 ans. Il quitta Londres en mai et arriva au fort Victoria (Victoria) en novembre. À la fin de son apprentissage l’année suivante, il devint arpenteur général adjoint, poste qu’il conserverait après son transfert, en 1855, de la Hudson’s Bay Company à l’administration coloniale de l’île de Vancouver.

Conservateur en politique, Pearse devint un membre important de l’élite qui dirigeait la colonie, le « family-company compact », et participa à ses diverses activités politiques, sociales, militaires et économiques. En 1854, il signa une pétition demandant le renvoi du radical Robert John Staines* de son poste d’instituteur et d’aumônier de la colonie. Plus tard, il s’opposerait au gouverneur Arthur Edward Kennedy*, qui connaissait maints problèmes avec l’Assemblée de la colonie. Homme cultivé, particulièrement intéressé par l’histoire naturelle et la théologie, Pearse s’occupa également des arts. En 1855, il devint membre du premier ensemble musical formé à l’ouest des Rocheuses et, deux ans plus tard, il participa à une production théâtrale mettant en scène des fonctionnaires et des commis de la Hudson’s Bay Company. Dans le domaine militaire, il aida en 1864 à mettre sur pied le Victoria Rifle Volunteer Corps pour contrer la menace de raids féniens en provenance des États-Unis. En qualité d’arpenteur général adjoint, il prit part à la vente des terres de la couronne dans la partie sud de l’île de Vancouver. Les transactions furent peu nombreuses au début, mais Pearse, qui avait lui-même acheté des terres, put en tirer une petite fortune pendant la ruée vers l’or du fleuve Fraser en 1858. On l’accuserait plus tard, ainsi que Pemberton, d’avoir profité de son droit de regard sur la vente de ces terres pour s’enrichir.

Pearse, qui faisait fonction d’arpenteur général pendant les nombreux séjours de Pemberton en Angleterre (celui-ci était devenu arpenteur général de l’île en 1859), lui succéda en 1864, quand il prit sa retraite. Membre d’office des conseils exécutif et législatif de l’île de Vancouver de 1863 à 1866, il fit aussi partie du bureau général de l’Éducation de la colonie et, en 1864, devint président du bureau responsable des phares (il le resterait durant sept ans). De l’union de l’île de Vancouver et de la Colombie-Britannique en 1866 jusqu’à l’entrée de la nouvelle colonie dans le Canada en 1871, il fut arpenteur général adjoint sous la direction de Joseph William Trutch, qu’il remplaça à plusieurs reprises, et il semble avoir été particulièrement responsable de la section de l’île de Vancouver au bureau des Terres et des Travaux publics. En 1870, il devint président adjoint du Female Immigration Board, présidé par l’évêque George Hills*.

En août 1871, soit un mois après l’entrée de la Colombie-Britannique dans la Confédération, Pearse obtint le poste de commissaire en chef des Terres et des Travaux et arpenteur général de la province. Au même moment, Trutch, qui était devenu lieutenant-gouverneur, le nomma au premier Conseil exécutif, qui tint lieu de gouvernement jusqu’à ce que Trutch convoque des élections à l’automne. Le 14 novembre, Pearse fut cependant remplacé comme commissaire en chef des Terres et des Travaux par un député de l’Assemblée législative, Henry Holbrook. Il demeura arpenteur général jusqu’au 7 octobre 1872, date à laquelle il démissionna pour devenir chef du bureau de la Colombie-Britannique au ministère fédéral des Travaux publics ; c’est ainsi qu’il fut chargé des premières constructions fédérales à l’ouest des Rocheuses.

En mai 1879, Thomas Robert McInnes et Arthur Bunster, respectivement députés de New Westminster et de Vancouver, accusèrent Pearse, à la Chambre des communes, de faire du maquignonnage et d’avoir construit le British Columbia Penitentiary de New Westminster « sur un marécage ». Dans le Daily Colonist de Victoria, Pearse rétorqua que ces accusations constituaient une « diffamation grossière » et que le pénitencier avait été construit sur les terres les plus sèches et avec les meilleurs matériaux que l’on pouvait trouver, et à un coût inférieur au montant prévu. Le Daily Colonist qualifia les accusations d’« inexcusables », et le Globe de Toronto attribua le scandale au fait que Pearse avait refusé de « déshonorer ses hautes fonctions en nommant des « pions » incompétents à des postes de responsabilité dans [son] département ». Innocenté par une enquête officielle, Pearse donna néanmoins sa démission en juillet 1880. Il se souviendrait plus tard des relations entre la Colombie-Britannique et le dominion avec une certaine amertume. Ainsi, en 1900, il ferait remarquer dans le Daily Colonist que, depuis 1871, Ottawa avait traité la province « d’une façon très mesquine », y prélevant des impôts tout en construisant ailleurs « des quais, etc., dans de misérables coins perdus, pour obtenir des votes ».

Pearse avait néanmoins continué à maintenir son rang. Avec d’autres anglicans, dont son compatriote du Devon Henry Pering Pellew Crease, il s’était porté en 1874 à la défense d’Edward Cridge, ancien aumônier de la Hudson’s Bay Company, dans la querelle doctrinale qui opposait celui-ci à l’évêque Hills ; il était ensuite passé, avec beaucoup d’anciens membres du « family-company compact », à l’Église épiscopale réformée, fondée alors par Cridge. Dans le domaine musical, il fut membre fondateur du Victoria Amateur Orchestra en 1879. En 1885, pendant qu’il était à la retraite, il participa à la formation de la Victoria Musical Society.

Dans les années 1880 également, Pearse consolida ses attaches impériales. À l’instar de presque toute l’élite de la colonie, qui agissait comme si le Canada n’existait pas, il avait maintenu des liens avec des gens et des institutions de Grande-Bretagne. À l’occasion d’un séjour en Angleterre en 1889, il fit campagne en faveur de la fédération impériale, organisa une section de l’Impérial Fédération League à Great Yarmouth, ville natale de sa seconde femme, et donna des conférences à Londres, à Lewes et à Plymouth. Le Daily Colonist, qui s’intéressait à lui, écrivit que Pearse « fouettait les énergies chancelantes des partisans de la fédération impériale en Grande-Bretagne ». Plus tard, en 1897, Pearse fonderait à Victoria une section de la belliciste British Empire Navy League de Londres, qui s’était donné comme mission de démontrer que l’Empire ne pourrait survivre que s’il conservait la suprématie des mers.

Pearse mourut de cancer en 1902 à l’âge de 70 ans. Sa fortune, qui s’élevait à 178 000 $, consistait en propriétés à Victoria et en des actions d’une valeur de 73 000 $, principalement dans l’Albion Iron Works de Victoria et dans l’Esquimalt Water Works Company. Selon son testament, qui témoignait bien de son attachement à l’Empire et de son esprit charitable, il léguait de l’argent à des foyers pour gouvernantes âgées et infirmes en Angleterre, au foyer pour jeunes garçons du docteur Thomas John Barnardo à Londres, ainsi qu’au British Columbia Protestant Orphans’ Home et à l’Old Men’s Home de Victoria. Il laissait également 10 000 $ pour la création d’une chaire de sciences naturelles dans le cas où l’on construirait un collège ou une université à Victoria, projet qu’il chérissait depuis les années 1870. Quelques semaines seulement après sa mort, le conseil d’administration du Victoria College était formé pour gérer cet argent. Affilié à la McGill University, le collège reçut ses premiers étudiants en 1903.

Benjamin William Pearse, homme mince, aux yeux clairs, aux sourcils broussailleux et à la barbe noire, prisait la compagnie des femmes. En 1900, il avait fait cette réflexion : « les dames [du milieu du siècle] étaient comme aujourd’hui, charmantes, et beaucoup d’entre elles étaient belles. On sait à quel point elles ont poussé vers le bien ceux qui ont accepté leur influence ; de ceux qui, hélas, s’y sont soutraits, qu’y a-t-il à dire maintenant ? »

Richard Mackie

Le levé de la région de Nanaimo, en Colombie-Britannique fait par Benjamin William Pearse en 1859 a donné lieu à la publication de deux rapports, une version de sept pages incluse dans G.-B., Emigration Commissioners, Vancouver’s Island ; survey of the districts of Nanaimo and Cowichan valley (Londres, 1859), et une version de deux pages publiée sous le titre General report on the country round Nanaimo ([Victoria ?, 1860]). Les notes personnelles de Pearse sur le levé et son document intitulé « Official notes country round Nanaimo ; field book, 1859 » sont conservées aux Nanaimo Centennial Museum Arch., Nanaimo, C.-B. À titre de vice-président du Female Immigration Board de la Colombie-Britannique, Pearse a publié un imprimé d’une page intitulé « Assisted immigration » (Victoria, 1870) ; on peut consulter un exemplaire de ce document aux BCARS.

AN, RG 10, 3596, dossier 1241 (mfm aux BCARS).— BCARS, Add. mss 120 ; Add. mss 1912, box 9 ; Add. mss 1950, box 142 ; A/E/C86/C86/P312 ; C/AA/30.1 M/58, 25 avril 1854 ; C/AA/30.73J/2 ; C/AB/30.7J/8A, 16 nov. 1871 ; C/AB/30.7M ; D–19, B. W. Pearse file ; EB/M45 ; EB/P31 ; GR 983, particulièrement Pearse à Walkem, 17 oct. 1872 ; GR 1069, 1.156 ; GR 1169 ; GR 1304, file 1902/2541 ; GR 1372, F 15/22 ; F 542/2 ; F 867/25 ; F 914/5 ; F 955/23 ; F 956/3 ; F 9057 ; K/L/P31.— City of Victoria Arch., City clerk’s office, Ser. 11, 8 sept. 1877, 29 août 1879.— PAM, HBCA, A.10/30 : f.396.— PRO, CO 305/15 (mfm aux BCARS).— Ross Bay Cemetery (Victoria), Tombstone inscription.

Daily Colonist (Victoria), 1864–1880, 24 mars 1889, 1893–1900, 17–18 juin, 12–13 juill., 15 août 1902.— Globe, 20 août 1879.— H. R. Boutilier, « Vancouver’s earliest days », BCHQ, 10 (1946) : 151–170. —A. T. Bushby, « The journal of Arthur Thomas Bushby, 1858–1859 », Dorothy Blakey Smith, édit., BCHQ, 21 (1957–1958) : 83–198.— Canada, Dép. des Travaux publics, General report of the minister of public works from 30th June, 1867, to 1st July, 1882 (Ottawa, 1883).— Annuaire, Victoria, 1868.— Chad Evans, Frontier theatre : a history of nineteenth-century theatrical entertainment in the Canadian far west and Alaska (Victoria, 1983), 16s.— « Extracts from the Public Works reports, British Columbia, 1865–66 », Annuaire, C.-B., 1877–1878 : 114–124.— Fort Victoria letters, 1846–1851, Hartwell Bowsfield, édit., introd. de M. A. Ormsby (Winnipeg, 1979).— « Hon. Benjamin William Pearse », Northwestern Rev. of Seattle (Seattle, Wash.), 1 (1891), n° 5 : 35 (exemplaire conservé aux City of Victoria Arch.).— F. W. Howay, « Early settlement on Burrard Inlet », BCHQ, 1 (1937) : 101–114.— Journals of colonial legislatures of Vancouver Island and B.C. (Hendrickson), 1.— R. D. McIntosh, A documentary history of music in Victoria, British Columbia (Victoria, 1981).— Rosemary Neering, The story of the University of Victoria and its origin in Victoria College (Victoria, 1988).— Scholefield et Howay, British Columbia, 4 : 1070–1073.— Oliver Wells, General report on the Cowichan valley ([Victoria ?, 1860]).

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Richard Mackie, « PEARSE, BENJAMIN WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/pearse_benjamin_william_13F.html.

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Auteur de l'article:    Richard Mackie
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
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