OSGOOD, THADDEUS, ministre congrégationaliste et éducateur, né le 24 octobre 1775 à Methuen, Massachusetts, fils de Josiah Osgood et de Sarah Stevens ; décédé célibataire le 19 janvier 1852 à Glasgow, Écosse.

On sait très peu de chose de la vie de Thaddeus Osgood avant qu’il ne devienne tanneur, à part le fait qu’il était le dernier enfant d’une famille nombreuse et dévote. Au cours d’un des mouvements de revivalisme évangélique qui balayèrent la Nouvelle-Angleterre au tournant du siècle, il se sentit animé du désir de « consacrer le reste de sa vie au service de son Rédempteur ». De 1799 à 1803, il fréquenta le Dartmouth Collège, à Hanover, dans le New Hampshire, suivit les cours de théologie de différents ministres congrégationalistes et, en 1804, reçut l’autorisation de prêcher. C’est en 1808, à North Wilbraham, au Massachusetts, qu’il fut ordonné ministre congrégationaliste.

Osgood œuvra d’abord comme prédicateur itinérant ; cette activité le conduisit dans les Canadas en 1807, et il adopta ces deux colonies comme principal champ de mission pour le reste de sa vie. Tout en restant congrégationaliste, il mit toujours l’accent sur les aspects non confessionnels de son œuvre. Son but était d’enseigner les « pures vérités de la Bible » à tous, et particulièrement à ceux pour qui le message du salut n’était pas facilement accessible. Osgood poursuivit son objectif en utilisant une série de moyens adoptés par le mouvement évangélique du xixe siècle pour favoriser le progrès religieux et moral du genre humain.

Bien qu’au début Osgood se soit occupé surtout de distribuer des tracts religieux, son intérêt se porta de plus en plus sur le problème de l’analphabétisme. En 1812, il se rendit en Angleterre dans le but de trouver de l’aide pour un projet visant à promouvoir l’éducation dans les colonies grâce à un système selon lequel des élèves choisis parmi les grands remplissaient la tâche de moniteurs et assuraient l’instruction des plus jeunes [V. Joseph Lancaster*]. Il remporta un vif succès ; en effet, il obtint l’appui de nombreux membres du mouvement évangélique anglais qui parrainèrent son retour à Québec, en 1814, comme représentant du Committee for Promoting the Education of the Poor in Upper and Lower Canada. Il commença d’abord par fonder une école non confessionnelle, la Québec Free School, mais ni le clergé catholique ni le clergé anglican, avec à leur tête les évêques Joseph-Octave Plessis* et Jacob Mountain*, ne voyaient d’un bon œil une instruction qui n’était pas accompagnée d’un enseignement confessionnel. Leur hostilité, combinée à la concurrence venant d’une école de garnison nouvellement créée, mit fin à l’entreprise naissante en 1817. Osgood contribua à l’organisation d’une deuxième école, qui ouvrit ses portes à Kingston la même année sous les auspices de la Midland District School Society. Cependant, le plan original qui prévoyait un enseignement non confessionnel ne resta en vigueur qu’une’ année ; après le départ du premier instituteur, l’école passa graduellement sous la direction des anglicans. Les tentatives pour créer d’autres écoles connurent encore moins de succès.

Par la suite, Osgood reprit pendant quelques années les occupations qui étaient plus habituellement celles d’un missionnaire, quoiqu’il ait commencé aussi à s’intéresser à un phénomène qui prenait de l’ampleur, celui des écoles du dimanche. À Stanstead, au Bas-Canada, et à York (Toronto), il mit sur pied des écoles du dimanche indépendantes, et, au nom de la Sunday School Union Society of Canada, à la fondation de laquelle il avait collaboré au début des années 1820, il forma des associations non confessionnelles d’écoles du dimanche à Québec, à Montréal, à Kingston, à York, ainsi que dans d’autres localités. L’enseignement régulier continua de le préoccuper au plus haut point cependant, et, en 1825, il traversa de nouveau l’Atlantique pour tenter d’obtenir de l’aide du mouvement évangélique anglais. Une fois de plus, il trouva de puissants appuis, et, l’année suivante, il revint dans les colonies accompagné de deux instituteurs, en tant que représentant, cette fois, de la Society for Promoting Education and Industry in Canada, qui avait été fondée à Londres avec sa collaboration.

Contrairement à ce qui s’était passé lors de sa première tentative, Osgood gagna des gens influents à son nouveau projet, à la fois dans le Haut et le Bas-Canada, dont le gouverneur lui-même, lord Dalhousie [Ramsay*]. À Kingston, cependant, l’instituteur nommé par Osgood fut renvoyé moins d’un an après son arrivée pour « conduite inconvenante », et l’école fut fermée. La section montréalaise de la société tenta de créer une école non confessionnelle pour les enfants indiens, à Caughnawaga (Kahnawake, Québec), mais elle échoua devant l’opposition non dissimulée du prêtre de l’endroit, Joseph Marcoux, et de Mgr Jean-Jacques Lartigue*. À part une école à Châteauguay et un refuge à Montréal, deux établissements qui restèrent ouverts quelque temps, peu de réalisations virent le jour. Différents projets d’externats, d’écoles du dimanche, de bibliothèques de prêt et d’hospices réussirent à enthousiasmer l’élément anglais, mais leur défaut fut de ne pas tenir compte des particularités des colonies sur le plan de l’organisation pratique ou des sentiments religieux propres à chaque secte. La piété particulière dont faisait preuve Osgood agaçait beaucoup de colons, et il ne savait pas donner suite à ses idées dans les faits, en plus d’être peu scrupuleux quand il s’agissait de rendre compte des fonds publics ou d’utiliser des noms bien connus. Chose plus grave encore, ses projets reposaient sur le principe d’une action conjuguée de tous les chrétiens, principe auquel s’opposait de plus en plus le sentiment d’appartenance à une confession.

Les difficultés l’assaillant de toutes parts au Canada, Osgood regagna la Grande-Bretagne en 1829 ; là, il commença, entre autres activités, à réunir des fonds pour différents nouveaux projets dans les colonies. À la fin de 1835, il était de retour dans les Canadas, et, l’année suivante, il fonda à Montréal la Friendly Union, qui visait « la suppression du vice et la promotion des connaissances utiles ». Le problème de plus en plus grave de la pauvreté dans les villes et de l’ignorance était devenu un nouveau défi pour son apostolat.

Un grand nombre de ministres non conformistes de Montréal, dont Henry Esson, Robert L. Lusher*, William Taylor* et Henry Wilkes*, appuyèrent sans réserve la Friendly Union. En 1837, un édifice appelé parfois le Bethel fut érigé pour permettre la tenue de services religieux et abriter une école du dimanche ; moins d’un an après son ouverture, un petit externat y était installé, dont le but initial était de combiner un enseignement non confessionnel pour les pauvres avec des travaux manuels élémentaires. Au cours des 15 années qui suivirent, cependant, le Bethel servit surtout de refuge à ceux qui n’avaient que les rues de la ville pour toute demeure. Pendant le reste de sa vie, Osgood continua de concentrer ses efforts à Montréal, sans cesser pour autant de prêcher et d’effectuer des tournées d’un bout à l’autre de la Grande-Bretagne et de l’Amérique du Nord afin de se procurer des fonds. Il mourut au moment où il s’apprêtait à mener sa septième campagne en Grande-Bretagne pour recueillir des fonds destinés à sa mission canadienne.

Thaddeus Osgood voua toute son existence au bien-être de son prochain, mais cet engagement ne donna que peu de réalisations durables. Ceci est attribuable, en partie, à ses excentricités personnelles et au penchant qu’il avait à passer précipitamment d’une bonne cause à une autre. Toutefois, ses appels à la conscience du mouvement évangélique du xixe siècle trouvèrent un écho dans la conviction, de plus en plus répandue en Grande-Bretagne et dans les colonies, que le sentiment religieux pouvait légitimement se manifester dans de nouvelles formes d’action humanitaire. De plus, sa carrière montre la variété de moyens utilisés par ceux qui s’occupaient de bienfaisance au xixe siècle. La succession des causes philanthropiques adoptées par Osgood est un reflet de l’institutionnalisation progressive des préoccupations sociales dans la société canadienne.

W. P. J. Millar

Les principaux ouvrages de Thaddeus Osgood sont : The Canadian visitor, communicating important facts and interesting anecdotes respecting the Indians and destitute settlers in Canada and the United States of America (Londres, [1829]) ; A brief extract from the journal of Thaddeus Osgood, minister of the gospel, with some anecdotes and remarks on men and occurrences, during a residence of six years in England [...] (Montréal, 1835) ; et A brief extract from the journal of Thaddeus Osgood, during his last visit to Great Britain and Ireland, with some interesting anecdotes and friendly hints (Montréal, 1841). En outre, il a écrit nombre de brochures et de tracts. De même que les autres sources relatives à sa vie et à son rouvre, ces écrits sont tellement dispersés dans des bibliothèques et des collections d’archives qu’il est à peu près impossible d’en dresser la liste. Voici quelques exemples de ce genre d’écrits : un imprimé publié à Montréal en 1829 sous forme de lettre ouverte, et dans lequel il se présente lui-même et explique en quoi consistait sa mission lors de sa visite en Angleterre cette année-là (une copie est disponible aux UCA, London Missionary Soc., selected papers (mfm) ; An affectionate appeal, on behalf of seamen and emigrants in Canada, by an agent of the Friendly Union of Montreal (in-plano, [Montréal, 1845] ; copie à la McGill Univ. Libraries (Montréal), Dept. of Rare Books and Special Coll., Lawrence Lande coll.) ; et Canada must be protected or assisted, or lost to the British crown ; the Queen and legislature are entreated to consider, what Lord Durham and others have said respecting that interesting colony (Londres, s.d. ; copie aux APC).

Les principales collections de manuscrits utilisés dans la préparation de la biographie d’Osgood sont : APC, MG 24, B1, 2 : 146–147, 225–226, 258–261, 358–359, 510–511 ; 3 : 215–216 ; 11 : 436–438 ; 29, Thaddeus Osgood, état des recettes et des dépenses, 16 mai 1815 ; D8 : 2998–2999, 3019–3024 ; RG 4, A1 : 33593–33595 ; 185 : 45 ; 405 : 10–11 ; B30, 4 : 1 ; C1, 266, no 2691 ; 270, no 58 ; RG 5, C1, 112, file 6173 (un récit autobiographique daté du 28 juill. 1843) ; PRO, CO 42/210, Report of the meeting of the committee for promoting education and industry in Canada, 19 juill. 1826 ; 42/305, particulièrement Osgood à Labouchère, 27 févr. 1839 ; QUA, Midland District School Soc., Board of Trustees, minutes ; SOAS, Council for World Mission Arch., London Missionary Soc., corr., Canada, folder no 8, 15 mars, 20 mai 1815, 14 févr., 14 mars 1816 (mfm aux UCA) ; SRO, GD45/3/82 (mfm aux UCA) ; et UCA, London Missionary Soc., selected papers, Soc. for Promoting Education and Industry in Canada, An appeal from Canada (feuillet, Montréal, 1829) ; The Union Building of Canada, for the accommodation of the charitable and religious societies (feuillet, Montréal, 1829) (mfm).

Les sources imprimées pertinentes sont : Central Auxiliary Soc. for Promoting Education and Industry in Canada, First et Second annual report [...] (Montréal, 1827 ; 1829) ; Doc. hist. of education in U.C. (Hodgins), 1 : 89–93 ; Joseph Lathrop, Damnable heresies defined and described, in a sermon, preached at North Wilbraham, June 15, 1808 ; at the ordination of Rev. Thaddeus Osgood, to the office and work of evangelist (Springfield, Mass., [1808]) ; « Rev. Mr. Osgood, of Canada », Christian Guardian, 28 janv. 1852, un article annonçant son arrivée en Angleterre juste avant son décès ; et T. C. Orr, « Rev. T. Osgood », Christian Guardian, 25 févr. 1852, une lettre sur la mort d’Osgood. Les journaux de la colonie qui ont fait référence à Osgood d’un façon particulière sont : le Pilot (Montréal), 9 nov. 1850, 21 oct. 1851 ; la Gazette de Québec, 19, 26 oct. 1809, 5, 12 oct., 28 déc. 1815, 4 janv. 1816 ; le Quebec Mercury, 1805–1829 ; et le Register (Montréal), 6 nov. 1845.

Mon article, « The remarkable Rev. Thaddeus Osgood : a study in the evangelical spirit in the Canadas », Hist. sociale (Ottawa), 10 (1977) : 59–76, est le seul écrit exhaustif sur Osgood. D’autres études relatives à Osgood ou traitant d’un aspect de sa vie sont : G. T. Chapman, Sketches of the alumni of Dartmouth College, from the first graduation in 1771 to the present lime, with a brief history of the institution (Cambridge, Mass., 1867), 112–113 ; Judith Fingard, « English humanitarianism and the colonial mind : Walter Bromley in Nova Scotia, 1813–1825 », CHR, 54 (1973) : 123151 ; et « Grapes in the wilderness » : the Bible Society in British North America in the early nineteenth century », Hist. sociale, 5 (1972) : 5–31 ; Allan Greer, « The Sunday schools of Upper Canada », OH, 67 (1975) : 174175 ; B. F. Hubbard, « Materials for our church history ; no ii », Canadian Independent (Toronto), 13 (1866–1867) : 282–286 (les détails relatés dans cet article confirment et amplifient le récit d’Osgood sur ses premières années) ; G. W. Spragge, « Monitorial schools in the Canadas, 1810–1845 » (thèse de d.paed., Univ. of Toronto, 1935) ; et J. D. Wilson, « No blanket to be worn in school » : the education of Indians in early nineteenth-century Ontario », Hist. sociale, 7 (1974) : 293–305.  [w. p. j. m.]

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W. P. J. Millar, « OSGOOD, THADDEUS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/osgood_thaddeus_8F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
Année de la révision:    1985
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