MURRAY, HUGH, zouave pontifical, né à Montréal le 30 avril 1836, fils de Hugh Murray et de Henrietta Horan, décédé à Manresa ou à Bilbao, Espagne, en février 1874.
C’est à Québec, au petit séminaire, que l’Irlandais Hugh Murray fit ses études classiques. Il y fut probablement attiré par son oncle, l’abbé Edward John Horan, alors professeur dans cette institution. Bachelier ès arts en 1856, on le retrouve ensuite étudiant à la faculté de médecine, mais l’Annuaire de l’université Laval [...] nous apprend qu’il avait déjà discontinué ses études médicales avant la rentrée de 1857.
Atteint dans ses sentiments les plus intimes par la mort de son père et de sa mère, qu’il perdit à quelques mois d’intervalle la même année, il songea un moment à devenir prêtre, mais le chagrin et un travail constant affaiblirent sa santé, à tel point qu’il dut renoncer aux études théologiques.
En 1859 il était attaché à la rédaction du Journal of Education [...] (Montréal) qui paraissait depuis deux ans sous la direction du surintendant de l’Instruction publique, Pierre-Joseph-Olivier Chauveau*. Murray occupait encore cet emploi, lorsque parvint au Canada la nouvelle du désastre survenu à Castelfidardo, le 18 septembre 1860, quand la petite armée pontificale, commandée par Christophe-Louis-Léon Juchault de Lamoricière, fut vaincue par les troupes piémontaises. Les ultramontains canadiens en furent atterrés : « Le Piémont, avec une audace sans nom, écrivait Cyrille Boucher dans l’Ordre du 5 octobre suivant, a envahi les États pontificaux contre tous les droits humains et divins. » Pour sa part, le rédacteur en chef du Courrier du Canada (Québec), le légitimiste français Auguste-Eugène Aubry, prophétisait dans son journal, le 5 novembre 1860, que « l’unité italienne », n’ayant « jamais existé », « n’existera jamais ».
C’est pour s’opposer aux progrès de « l’usurpation sacrilège » du roi Victor-Emmanuel II qu’était née, en mars 1860, l’œuvre des zouaves, au cours d’une entrevue secrète entre le rédemptoriste belge Victor-Auguste Dechamps, le général français Juchault de Lamoricière et Mgr Xavier de Mérode, ministre belge des armes pontificales. Des pays catholiques, affluèrent à Rome des jeunes gens désireux de mettre leur valeur au service de Pie IX. L’Ordre du 13 février 1861 apprenait à ses lecteurs que le premier Canadien français à prendre « l’engagement comme zouave dans les troupes pontificales » s’appelait Benjamin Testard* de Montigny, « avocat à Montréal, ancien élève de l’Université Laval ».
Hugh Murray écrivit alors à son oncle Horan, qui lui tenait lieu de père, pour lui demander l’autorisation, qui fut immédiatement accordée, de suivre l’exemple de Montigny. Le 31 juillet 1861 il se trouvait à Rome et endossait l’uniforme du zouave pontifical. Le 21 novembre 1866, il fut nommé sergent de seconde classe.
C’est à Mentana (Italie), lors de la victoire franco-pontificale sur les garibaldiens, le 3 novembre 1867, que Murray se distingua vraiment par son courage et se trouva au nombre des 57 blessés, outre les 24 morts, que comptait, après l’action, la colonne pontificale.
Porté à l’ordre du jour du régiment, il recevait bientôt la croix de chevalier de Pie IX et était promu sous-lieutenant le 4 avril 1868. Les zouaves canadiens le gratifièrent d’un sabre dont la lame portait l’inscription suivante : « Au sous-lieutenant Murray, Chevalier de Pie IX, premier officier canadien, ses compatriotes. »
Rentré au Canada, Murray, après s’être remis d’une grave intervention chirurgicale, offrit ses services au Veuillot du journalisme américain, James Alphonsus McMaster, propriétaire et rédacteur en chef du New York Freeman’s Journal. Mais le journaliste Murray ne tarda pas à délaisser l’écritoire pour reprendre son uniforme de zouave. Son royal camarade aux zouaves pontificaux, don Alfonso de Bourbon, avait mis son épée au service de son frère, don Carlos, qui s’était proclamé roi d’Espagne sous le nom de Charles VII, mais qui avait à conquérir son trône sur un prince du Piémont, Amédée Ier, choisi par les Cortès. Puisqu’il s’agissait de lutter encore une fois, d’une certaine façon, contre le Piémont, Hugh Murray accourut, durant l’été 1873, en Espagne, où, ayant bientôt obtenu le grade de capitaine, il commanda en second un corps de 400 volontaires espagnols, hollandais et belges.
Les zouaves carlistes guerroyèrent durant deux ans contre les troupes libérales d’Amédée de Savoie, puis d’Alphonse XII, se signalant dans une infinité d’actions d’éclat qui les firent particulièrement redouter. C’est au cours de l’une d’elles que Murray devait trouver une mort glorieuse en février 1874, soit durant le siège de Manresa, soit sous les murs de Bilbao.
Avec lui disparaissait « le type parfait du zouave pontifical », dont il faut louer sans réserve la générosité de l’engagement et le courage déployé au service de la papauté, mais à propos duquel l’on doit également admettre que la perspicacité politique n’était pas à la hauteur de l’ardeur guerrière. En effet, Murray ne comprit jamais la complexité du problème national italien, semblable sur ce point à ses camarades et aux ultramontains, qu’ils fussent d’Europe ou d’Amérique.
L’Opinion publique (Montréal), 19 mars, 9 avril 1874.— Annuaire de l’université Laval pour l’année académique 1856–1857 (Québec, 1856) ; 1858–1859 (Québec, 1858).— Catalogue des officiers et des élèves du séminaire de Québec, 1851–1852 (Québec, 1852) ; 1852–1853 (1853) ; 1853–1854 (1854) ; 1854–1855 (1855) ; 1855–1856 (1856).— Georges Cerbelaud-Salagnac, Les zouaves pontificaux (Paris, 1963).— Paolo Dalla Torre, L’anno di Mentana. Contributo ad una storia dello Stato pontifzcio nel 1867 (Milan, 1968), 314.— G.-A. Drolet, Zouaviana : étape de trente ans, 1868–1898 [...] (2e éd., Montréal, 1898).— Édouard Lefebvre de Bellefeuille, Le Canada et les zouaves pontificaux ; mémoire sur l’origine, l’enrôlement et l’expédition du contingent canadien à Rome, pendant l’année 1868 [...] (Montréal, 1868).— Roberto di Nolli, Mentana (Rome, 1865).— Elio Lodolini, I volontari del Canadà nell’ esercito pontificio (1868–1870), Rassegna storica del Risorgimento (Rome), LVI (1969) : 641–687.
Philippe Sylvain, « MURRAY, HUGH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/murray_hugh_10F.html.
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Auteur de l'article: | Philippe Sylvain |
Titre de l'article: | MURRAY, HUGH |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1972 |
Année de la révision: | 1972 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |