MARSAN, ISIDORE-JOSEPH-AMÉDÉE, professeur, régisseur de ferme, conférencier agricole et administrateur scolaire, né le 19 juillet 1844 à Saint-Roch-de-l’Achigan, Bas-Canada, fils d’Isidore Marsan, dit Lapierre, cultivateur, et de Félonise Poitras ; le 11 juillet 1871, il épousa à L’Assomption, Québec, Marie-Elmire-Ernestine Viger, et ils eurent 12 enfants, dont 8 lui survécurent ; décédé le 25 avril 1924 à ce dernier endroit.
Isidore-Joseph-Amédée Marsan fait ses études classiques au collège de L’Assomption de 1859 à 1866. Il entreprend ensuite un stage de clerc en droit, puis décide de s’inscrire à l’école d’agriculture de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, sur les conseils du notaire Louis Archambeault*, député de L’Assomption et futur commissaire de l’Agriculture et des Travaux publics dans les cabinets de Pierre-Joseph-Olivier Chauveau* (1867–1873) et de Gédéon Ouimet* (1873–1874). Après avoir fréquenté l’établissement durant un an, il commence sa carrière dans l’enseignement à la nouvelle école d’agriculture de L’Assomption, ouverte à l’automne de 1867 par les autorités du collège de L’Assomption et subventionnée par le gouvernement provincial [V. Pierre-Urgel Archambault*]. Il est déjà en poste quand il obtient, le 11 mars 1868, de la Chambre d’agriculture du Bas-Canada, un brevet de capacité comme professeur d’agriculture. En plus de cette matière, il enseigne la géométrie et l’arithmétique. En 1876, il se voit aussi confier la gérance de la ferme du Portage, domaine de 200 arpents attaché à l’école d’agriculture ; il abandonnera cette charge au mois d’octobre 1895. Il doit cumuler les deux fonctions parce que les crédits alloués par le gouvernement sont insuffisants pour payer un régisseur. Son salaire global est alors de 800 $ sur un budget annuel de 2 000 $. Le personnel de l’école comprend aussi un directeur, un directeur adjoint, un professeur d’anglais, un de droit rural, un autre d’art vétérinaire, un chef de pratique et un chef d’atelier. L’enseignement vise avant tout à former les fils de cultivateurs, de 15 ans et plus, à une pratique raisonnée de l’agriculture et à répandre par eux les connaissances agricoles dans les campagnes ; le cours est de deux ans pour ceux qui possèdent une instruction suffisante. Toutefois, la volonté du gouvernement libéral de Félix-Gabriel Marchand* de centraliser l’enseignement de l’agriculture à Sainte-Anne-de-la-Pocatière (La Pocatière) et à Oka amène la fermeture de l’école en 1899. Durant ses 32 ans d’existence, 626 élèves ont fréquenté l’établissement où Marsan a été l’unique professeur d’agriculture.
En plus de sa charge d’enseignant, Marsan a accepté diverses responsabilités, tant à l’échelle locale et régionale que provinciale. Ainsi, il a été marguillier, conseiller municipal et pro-maire de L’Assomption, et secrétaire-trésorier de la Société d’agriculture du comté, assumant cette dernière tâche durant 46 ans ; il sera également secrétaire-trésorier de la commission scolaire de la ville à compter de 1907. En 1868, à titre de professeur d’agriculture, il est devenu membre d’office de la Chambre d’agriculture du Bas-Canada, mise sur pied par le gouvernement en 1852 pour assister le commissaire de l’Agriculture et des Travaux publics, et il a siégé jusqu’en 1896 au Conseil d’agriculture qui l’a remplacée. Enfin, il a été nommé conférencier agricole en 1892, puis secrétaire des juges du concours du Mérite agricole en 1900 ; il occupera ce dernier poste jusqu’à son décès. Appelé par ses fonctions à visiter les diverses régions de la province de Québec, il a acquis sur la nature des sols et l’état de l’agriculture de la province une somme de connaissances dont ont bénéficié ses étudiants.
Au début de l’année scolaire 1903–1904, Marsan se joint au personnel de l’école d’agriculture d’Oka, fondée par les pères trappistes en 1893 [V. Pierre Oger*]. Recruté comme conférencier, il devient professeur en titre puis directeur scientifique en 1908, au moment où l’école accède au rang d’institut affilié à la succursale de l’université Laval à Montréal. Malgré son statut universitaire, l’Institut agricole d’Oka n’est pas en mesure d’offrir de très bonnes conditions de travail à son personnel. À défaut de logement sur place, les professeurs laïques doivent s’installer au village situé à environ deux milles. Marsan, à titre de directeur scientifique, est payé directement par le département de l’Agriculture.
Professeur et directeur jusqu’en 1921, Marsan devait former, avec ses collègues, la première génération d’agronomes de la province de Québec. D’après le témoignage de ses anciens étudiants, il possédait un grand talent de pédagogue. Conférencier intéressant à écouter, il était persuasif et émaillait ses exposés d’exemples recueillis au cours de ses visites de cultivateurs dans toute la province. Dans un souci de rendre son enseignement concret, il amenait également ses classes en excursion sur le terrain à Oka et dans les environs. Il était enfin très accessible.
Homme de science, Marsan demeurait cependant attaché à une vision traditionnelle de l’agriculture. Tout en favorisant l’exploitation intensive du sol par le renouvellement des méthodes de culture, il souhaitait que la famille tende à l’autarcie en produisant le plus possible sur la ferme les articles consommés à la maison plutôt que de les acheter au magasin. Il croyait également que l’agriculture devait améliorer la vie familiale.
Le professeur Isidore-Joseph-Amédée Marsan s’est dévoué pendant plus d’un demi-siècle sans avoir eu une juste rétribution pour les services qu’il a rendus à la province. Il a obtenu des titres – premier doctorat en sciences agricoles au Québec en 1916, qui lui a été décerné par l’université Laval, diplôme de très grand mérite spécial de l’ordre du Mérite agricole en 1921 –, mais on dit qu’il est mort pauvre. Un monument a été érigé à sa mémoire en face du collège de L’Assomption en 1926.
ANQ-M, CE605-S12, 19 juill. 1844 ; S14, 11 juill. 1871.— Le Devoir, 25 avril 1924.— BCF, 1922.— Georges Boulanger, « Gloire à M. I. J. A. Marsan », le Journal d’agriculture (Montréal), 30 (1926–1927), no 4 : 56.— J.-C. Chapais, « Notes historiques sur les écoles d’agriculture dans Québec », Rev. canadienne (Montréal), 70 (janv.–juin 1916) : 426–434, 520–527 ; « le Premier Docteur es-sciences agricoles canadien-français », le Journal d’agriculture et d’horticulture illustré (Montréal), 20 (1916), no 1 : 1s.— École d’agriculture de L’Assomption, Rapport [...] au Conseil d’agriculture P.Q. pour l’année 1876–1877 (s.l., [1877 ?]).— « J. A. Marsan, 1844–1924 », le Journal d’agriculture, 27 (1923–1924), no 11 : 161, 174.— Bruno Jean, les Idéologies éducatives agricoles (1860–1890) et l’Origine de l’agronomie québécoise (Québec, 1977).— Père Louis-Marie, l’Institut d’Oka : cinquantenaire, 1893–1943 ; école agricole, institut agronomique, école de médecine vétérinaire ([Oka, Québec, 1944]).— J.-C. Magnan, le Monde agricole (Montréal, 1972), 52s.— Réjean Olivier, la Petite Histoire du collège de L’Assomption : chroniques parues dans le Joliette-Journal de janvier à juin 1980 (L’Assomption, Québec, 1980).— Québec, Assemblée législative, Débats, 1924 : 333–339.
Jacques Saint-Pierre, « MARSAN, ISIDORE-JOSEPH-AMÉDÉE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/marsan_isidore_joseph_amedee_15F.html.
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