MACDONELL, ALEXANDER, prêtre et évêque catholique, né le 1er novembre 1833 dans le canton de Lochiel, Haut-Canada, fils de James McDonell, fermier, et de Christina Macdonald ; décédé le 29 mai 1905 à Montréal et inhumé à Alexandria, Ontario.

Alexander Macdonell naquit dans l’une des plus anciennes communautés catholico-écossaises de l’Amérique du Nord britannique. Encore adolescents, ses parents, de langue gaélique, avaient quitté l’Écosse pour se fixer vers 1828 dans le canton de Lochiel, partie du comté de Glengarry, dans le haut Saint-Laurent. La dévotion des Highlanders de Glengarry à l’Église catholique marqua de manière indélébile le jeune Alexander, homonyme d’Alexander McDonell*, qui avait fait œuvre de pionnier dans la collectivité et était devenu évêque. Macdonell, qui parlait l’anglais, le français et le gaélique, fréquenta l’école publique du lieu, puis entra en 1857 au collège de Bytown à Ottawa [V. Joseph-Henri Tabaret*]. Au bout de trois ans, il alla faire trois années de théologie au Regiopolis College de Kingston. En décembre 1862, il reçut les ordres et fut installé dans le diocèse de Kingston.

Tant que Macdonell desservit des paroisses, il ne connut pas la controverse. Vicaire à Gananoque durant six mois après son ordination, il passa en juin 1863 dans sa paroisse natale, St Alexander, dans Lochiel, et y exerça son ministère pendant 16 ans. En 1879, on l’affecta à la paroisse St Finnan à Alexandria, centre agricole et ferroviaire en plein essor. Il se distingua par son « sens des affaires » en faisant rebâtir l’église paroissiale, qui fut terminée en 1883 et presque entièrement payée en 1890. D’ailleurs, ce fut en partie à cause de son « discernement » et de ses qualités de financier que Macdonell accéda en septembre 1886 au vicariat général du diocèse de Kingston.

Macdonell devint évêque en 1890, à la suite de violentes luttes dans l’est de l’Ontario. En 1886, en réponse aux requêtes de la hiérarchie de la province de Québec, Rome avait élevé le diocèse d’Ottawa au rang d’archidiocèse [V. Joseph-Thomas Duhamel]. Ce diocèse s’étendait des deux côtés de la rivière des Outaouais, et les prélats canadiens-français avaient réclamé que Rome en change le statut dans l’espoir de le protéger des visées expansionnistes des évêques catholiques anglophones de l’Ontario, qui cherchaient à accroître leur emprise sur sa portion ontarienne. En juillet 1889, alerté par des rumeurs selon lesquelles les comtés de Stormont et Glengarry s’ajouteraient à l’archidiocèse d’Ottawa, Mgr James Vincent Cleary*, de Kingston, exigea, au nom des évêques ontariens, la création d’un « diocèse écossais » dans l’est de l’Ontario. Six mois plus tard, en janvier 1890, Rome prit ces deux comtés et en fit le diocèse d’Alexandria, en décrétant qu’il dépendrait du nouvel archevêché de Kingston. Macdonell, qui occupait une fonction bien établie et était un Écossais pure laine, parut tout désigné pour en devenir le premier évêque. Son élévation eut lieu le 18 juillet et sa consécration, le 28 octobre.

Macdonell établit son siège épiscopal dans la paroisse St Finnan. Peuplé de 21 550 catholiques et fait de 10 paroisses desservies par 12 prêtres, son diocèse était l’un des plus petits au pays. Au moins une fois, Macdonell demanda à Rome de l’agrandir parce que, avec aussi peu de diocésains, il ne pouvait pas récolter de quoi financer ses projets. Malgré le refus de Rome et une poussée démographique à peine perceptible, il réussit à faire construire plusieurs édifices l’Hôtel-Dieu et le St Paul’s Home for the Aged Poor à Cornwall, le couvent des Sœurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs à Alexandria et un palais épiscopal.

Bien que, de 1891 à 1901, la population catholique du diocèse soit demeurée relativement stationnaire, la proportion de Canadiens français augmenta de 27 %, en grande partie à cause des naissances et du remplacement de colons anglophones par des francophones. En 1892, Macdonell réitéra la décision que Mgr Cleary avait prise à propos de la paroisse de La Nativité de Cornwall, à savoir que cette paroisse se définirait « par la langue » plutôt que par des « limites territoriales ». De toute évidence, cependant, il n’y avait pas de prêtre canadien-français auquel on aurait pu confier cette paroisse, et de toute façon, Macdonell souhaitait éviter d’en nommer un par crainte que cela n’engendre un sentiment nationaliste. Par conséquent, à la grande déception des laïques, les premiers desservants de La Nativité furent des prêtres nés en France ou des Celtes bilingues. Les choses se passèrent différemment dans la paroisse épiscopale d’Alexandria. En 1895, Macdonell répondit aux requêtes que présentaient depuis longtemps les francophones de cette paroisse en demandant à l’archevêque de Montréal, Édouard-Charles Fabre*, de lui envoyer un curé francophone. Après la nomination du père Joseph-Élie Poitras, les francophones réclamèrent une paroisse bien à eux. L’évêque refusa et les pétitions continuèrent. Macdonell alla jusqu’à congédier Poitras, puis son successeur.

L’animosité qui éclata périodiquement entre catholiques et protestants de l’Ontario dans les années 1890 et au début des années 1900, stimulée notamment par la montée du nationalisme canadien-français dans les comtés situés le plus à l’est, en vint à se cristalliser autour de la langue d’enseignement. Dans ce débat, Macdonell exprima ouvertement les préoccupations d’un fort nombre de catholiques anglophones. S’en tenant à la lettre de la réglementation scolaire de l’Ontario, il refusait que les écoles séparées de son diocèse offrent de l’enseignement en français. En décembre 1901, P.-A. Huot et Alexandre Lalonde, d’Alexandria, lui présentèrent une pétition dans laquelle 94 signataires réclamaient qu’il ouvre une école séparée de langue française. L’école française, affirmaient les pétitionnaires, était le seul moyen de préserver le « lien » entre les jeunes canadiens-français et leur famille, de leur permettre de « comprendre les commandements de leurs parents » et de les rendre aptes à « tirer profit de l’enseignement religieux » donné à l’église. Macdonell ne se laissa pas fléchir. Pour lui, ces pétitions étaient d’inspiration nationaliste et insultaient les contribuables catholico-écossais, qui avaient fondé les écoles séparées et payaient la plus grande partie des taxes. Macdonell ne faisait pas mystère de sa conviction que l’anglais était la langue de la province et que le français n’était « nullement essentiel aux citoyens de l’Ontario, que ce [fût] dans leur vie sociale, religieuse ou communautaire ». Il exposa ce point de vue au délégué apostolique Diomede Falconio, à qui les francophones avaient fait appel, et, conscient de la supériorité numérique des catholiques anglophones dans le diocèse, il continua d’exiger que l’enseignement se donne uniquement en anglais dans les écoles séparées.

Macdonell manifesta beaucoup moins de détermination lorsqu’il s’agit de régler d’autres problèmes dans son diocèse, surtout ceux qui mettaient en cause ses prêtres. En 1897, 480 laïques réclamèrent dans une pétition le renvoi d’un prêtre de Williamstown qui était « grossier ». De 1897 à 1902, un tiers des fidèles quittèrent la paroisse à cause de ce prêtre ; en plus, la rumeur courait qu’il s’était livré à des voies de fait. Pourtant, Macdonell se contenta de croire que les fautes dont il était question étaient « sans gravité » et ne fit rien. Par ailleurs, en 1900, des paroissiens de St Raphael se plaignirent que leur prêtre était constamment ivre. Macdonell hésita à le muter par crainte que le scandale ne poursuive le coupable, étant donné la petite taille du diocèse. Ses atermoiements eurent pour seul effet de prolonger cette triste affaire. Il fallut l’intervention du délégué apostolique pour que Macdonell se décide enfin à agir, à l’automne de 1900. Son inaptitude à faire régner la discipline dans son clergé, ou du moins à donner l’impression qu’il tentait des efforts dans ce sens, lui aliéna une partie de ses ouailles.

Au moment de prendre des mesures relativement au prêtre de la paroisse St Raphael et à celui de Williamstown, Mgr Alexander Macdonell se mit à souffrir de « troubles internes ». Au bout de presque trois ans de maladie, il entra à l’Hôtel-Dieu de Montréal, où il mourut en 1905 de complications résultant probablement du diabète. On transporta sa dépouille à Alexandria. Des centaines d’Écossais du comté de Glengarry, tant protestants que catholiques, vinrent rendre un dernier hommage à celui qu’ils qualifiaient d’homme « bon » et « estimé ».

Mark G. McGowan

AN, MG 29, D61 : 5214.— AO, RG 22, Ser. 194, reg.N : 488–492.— Arch. of the Archdiocese of Kingston, Ontario, Alexander Macdonell, curriculum vitæ, 11 août 1884.— Arch. of the Diocese of Alexandria-Cornwall (Cornwall, Ontario), « Biography of Alexander MacDonell » (s.d.) ; George Corbet à Pietro Di Maria, 2 avril 1925 ; « General history ».— Arch. of the Roman Catholic Archdiocese of Toronto, L (papiers Lynch), AD01.136.— Archivio della Propaganda Fide (Rome), Scritture riferite nei Congressi, America settentrionale, 120 : ff.323r–105v (rapport du diocèse d’Alexandria, 16 sept. 1895 ; exemplaire aux Arch. of the Diocese of Alexandria-Cornwall, Corr. file, D 5/111) ; 146, 28 avril, 8 juin 1898.— Archivio Segreto Vaticano (Rome), Delegazione apostolica del Canadà, 88, dossiers 18, 36.— Catholic Record (London, Ontario), 17 juin 1905.— Catholic Register, 1er, 8 juin 1905.— Freeholder (Cornwall), 31 oct. 1890, 2 juin 1905.— Gazette (Montréal), 30 mai 1905.— Glengarrian (Alexandria, Ontario), 2 juin 1905.— Globe, 1er juin 1905.— La Presse, 29, 31 mai 1905.— Le Canada ecclésiastique [...] (Montréal), 1891, 1905, 1907.— Canadian annual rev. (Hopkins), 1905 : 606.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898).— Robert Choquette, De la controverse à la concorde : l’Église d’Alexandria-Cornwall (Ottawa, 1990) ; l’Église catholique dans l’Ontario français du dix-neuvième siècle (Ottawa, 1984), 269–73.— Évêques catholiques du Canada, 1658–1979, André Chapeau et al., compil. (Ottawa, 1980).— J.-A. Foisy, le Catholicisme en Ontario ; quelques statistiques (Ottawa, 1918).— Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell), 1.

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Mark G. McGowan, « MACDONELL, ALEXANDER (1833-1905) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/macdonell_alexander_13F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
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