LORIMIER, JEAN-BAPTISTE DE (connu sous le nom de Jean-Baptiste, chevalier de Lorimier), interprète, fonctionnaire et juge de paix, baptisé le 5 mai 1786 à Caughnawaga (Kahnawake, Québec), deuxième fils de Claude-Nicolas-Guillaume de Lorimier* et de Louise Schuyler ; le 26 novembre 1827, il épousa à Saint-Régis (Akwesasne, Québec) Marguerite Rousseau ; décédé le 4 octobre 1845 à Montréal.
Jean-Baptiste de Lorimier descendait d’une grande famille canadienne qui avait une longue tradition militaire ; le patriote Chevalier de Lorimier appartenait à une autre branche de cette famille. En mai 1810, Jean-Baptiste obtenait à Caughnawaga un poste d’interprète pour le département des Affaires indiennes, probablement grâce à l’influence de son père, qui était depuis 1775 agent résidant pour le même organisme et au même endroit. Comme sa mère était une Iroquoise de Caughnawaga, il avait des liens étroits avec cette communauté. À compter du 26 septembre 1812, il fut interprète et lieutenant à Lac-des-Deux-Montagnes (Oka) puis, le 11 mai 1813, on le promut capitaine et agent résidant à Saint-Régis. Un peu plus de deux semaines après, le département des Affaires indiennes l’envoyait à la frontière du Niagara, avec d’autres fonctionnaires et un détachement de guerriers indiens du Bas-Canada, afin de participer à la lutte contre les Américains.
Parvenus dans la presqu’île du Niagara au début de juin, Lorimier et quelque 300 Indiens placés sous le commandement général de son beau-frère, le capitaine Dominique Ducharme*, se joignirent à la centaine d’Agniers de la rivière Grand que dirigeait le capitaine William Johnson Kerr. Ensemble, ils assurèrent la défaite de l’expédition du lieutenant-colonel Charles Boerstler près de Beaver Dams (Thorold, Ontario) le 24 juin [V. James FitzGibbon*]. Au cours de cet engagement, Lorimier commanda les Indiens de Saint-Régis.
Lorimier demeura dans la région de Niagara pendant encore deux mois, car les Américains continuaient de harceler les troupes britanniques et les miliciens canadiens à partir du fort George (Niagara-on-the-Lake, Ontario), qui était tombé entre leurs mains. Le 17 août, des soldats américains accompagnés d’une poignée d’Iroquois de New York eurent raison du petit détachement de surveillance qu’il commandait. Grièvement blessé, il passa le reste de l’année 1813 en captivité. Avant qu’il soit échangé, au début de 1814, les commandements britannique et américain avaient eu quelques démêlés concernant les conditions de sa captivité. Dans une dépêche du 8 septembre 1813, le major général Francis de Rottenburg* avait fait allusion à « l’ignominieux traitement infligé au capitaine Lorimier ». Toute sa vie, Lorimier allait subir les séquelles de ses blessures et de sa détention.
Le 8 août 1814, Lorimier devint capitaine dans les Embodied Indian Warriors, unité nouvelle dont son père était le surintendant adjoint. Jusqu’à la fin de l’année, il fit partie des patrouilles en canot chargées de protéger les flottilles qui se rendaient aux postes britanniques des lacs Supérieur, Michigan et Huron ; sa connaissance de divers dialectes indiens le rendait particulièrement utile. À la fin de la guerre, il réintégra ses fonctions à Saint-Régis. Comme les Indiens de l’endroit avaient formulé des griefs à la suite de querelles de propriété sur les réserves et avaient accusé leurs voisins blancs de les avoir trompés, il fit partie en juin 1815 d’une commission qui étudia ces questions.
L’année suivante, on affecta Lorimier à l’expédition de lord Selkirk [Douglas*] à la rivière Rouge. Il était présent lorsque celui-ci prit le fort William (Thunder Bay, Ontario) à la North West Company, en août 1816. Envoyé dans l’Est avec quelques-uns des Nor’Westers qui devaient comparaître en justice dans le Haut-Canada, il faillit se noyer dans le lac Supérieur quand une tempête subite fit chavirer son canot, causant la mort de Kenneth MacKenzie* et de huit autres occupants. Le 18 juillet 1817, à la colonie de la Rivière-Rouge (Manitoba), il servit de témoin, avec l’interprète métis Louis Nolin et quatre autres personnes, à la signature d’un traité entre Selkirk et cinq chefs cris et sauteux, dont Peguis*. Au printemps de 1818, Selkirk, qui avait une haute opinion de lui, recommanda qu’il escorte les missionnaires catholiques Joseph-Norbert Provencher* et Sévère Dumoulin* jusqu’à la colonie. Provencher le décrivit comme « un garçon gai, aimable, poli [et] honnête ». Sir John Johnson*, surintendant général des Affaires indiennes, nota que l’expérience de Lorimier le préparait bien à cette mission et veilla à ce que d’autres assument temporairement ses fonctions au département.
Lorimier ne put échapper au conflit de plus en plus aigu qui opposait la North West Company et la Hudson’s Bay Company. En juillet 1817, des fonctionnaires gouvernementaux firent enquête pour déterminer s’il avait fait des gestes répréhensibles pendant l’expédition de Selkirk. Même s’il certifia n’avoir de lien direct avec aucune des deux compagnies, on l’accusa en mars 1819, avec plusieurs autres, d’avoir conspiré pour anéantir la traite entre la North West Company et les Indiens. Sans doute inspirées par l’amertume qui régnait au moment de l’expédition de Selkirk, ces accusations furent apparemment levées par la suite et n’eurent aucun effet sur la carrière de Lorimier. Il conserva son poste au département des Affaires indiennes jusqu’à sa retraite, en 1832. En octobre 1821, il avait été nommé juge de paix dans le district de Montréal.
Jean-Baptiste de Lorimier passa la dernière partie de sa vie dans la quiétude et la respectabilité. Il laissa une succession d’environ 6 000#. Sans être spectaculaire, sa carrière fut significative. Il représente bien le groupe de Canadiens d’ascendance sang-mêlé qui servirent le département des Affaires indiennes à divers titres, et avec compétence, à la fin du xviiie siècle et au début du xixe. Quoiqu’il ait dû ses premières affectations à l’influence de sa famille, il finit par se tailler, grâce à son courage et à sa connaissance des langues, une carrière relativement honorable.
ANQ-M, CE1-25, 5 mai 1786 ; CE1-51, 26 nov. 1827, 7 oct. 1845.— APC, RG 8, I (C sér.), 230, 256–258, 363, 679, 688B, 692, 1168, 1170–1171, 1203 1/2A, 1218, 1224 ; RG 10, A3, 488–491, 497 ; A6, 627, 633.— Documents relating to northwest missions, 1815–1827, G. L. Nute, édit. (St Paul, Minn., 1942).— Alexander Morris, The treaties of Canada with the Indians of Manitoba and the North-West Territories, including the negotiations on which they were based, and other information relating thereto (Toronto, 1880 ; réimpr., 1971).— La Gazette de Québec, 11 mars 1819, 25 oct. 1821.— Morice, Dict. hist. des Canadiens et des Métis.— Officers of British forces in Canada (Irving).— E. J. Devine, Historic Caughnawaga (Montréal, 1922).— Rich, Fur trade (1967).— Sulte, Hist. de la milice.— É.-Z. Massicotte, « la Famille de Lorimier notes généalogiques et historiques », BRH, 21 (1915) 10–16, 33–45.
Douglas Leighton, « LORIMIER, JEAN-BAPTISTE DE (Jean-Baptiste, chevalier de Lorimier) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lorimier_jean_baptiste_de_7F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
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