LECOQ, CHARLES (baptisé Isaïe-Marie-Charles), prêtre, sulpicien, professeur et supérieur, né le 4 novembre 1846 à Nantes, France, fils d’Isaïe Lecoq, ouvrier de chantier naval, et de Rose-Angèle Maunoury ; décédé le 6 avril 1926 à Montréal.

Charles Lecoq fit de brillantes études classiques au lycée impérial de Nantes de 1855 à 1863, et poursuivit sa formation au séminaire de Nantes, tenu par les sulpiciens, jusqu’en 1868. Ordonné diacre le 19 décembre 1868, mais n’ayant pas encore atteint l’âge pour pouvoir être ordonné prêtre, il fit sa solitude (noviciat des sulpiciens) en 1869–1870, suivie de l’ordination presbytérale le 24 septembre 1870.

La carrière de Lecoq débuta en France comme professeur de philosophie au séminaire d’Issy-les-Moulineaux, où il enseigna de 1870 à 1876. Il y acquit la réputation d’excellent professeur, d’une orthodoxie scrupuleuse et rejetant le cartésianisme. Il montra aussi un courage exceptionnel durant les troubles de la Commune en 1871, tandis que les communards occupèrent le séminaire en avril et mai, obligeant les sulpiciens à fuir la canonnade et à se réfugier dans un bâtiment au fond du domaine.

Désigné pour la mission, Lecoq arriva à Montréal le 19 août 1876, chargé d’organiser la section « philosophie », autonome, formée d’étudiants du petit séminaire de Montréal (à l’est), mais non intégrée au grand séminaire (à l’ouest), dans le grand bâtiment commencé en 1854. Il fut le supérieur de ce séminaire de philosophie jusqu’en 1881, date où il fut nommé supérieur du grand séminaire. Il s’acquitta de cette fonction jusqu’en 1903 tout en continuant de donner des cours (diaconales et droit canon, entre autres). En avril 1878, le grand séminaire était devenu la faculté de théologie de l’université Laval à Montréal ; il fut donc également le doyen de cette faculté de 1882 à 1904. Les séminaristes l’estimaient beaucoup pour sa vie exemplaire, sa pensée théologique si nette et son dévouement paternel. Par leur contenu et leur conviction, les conférences de Lecoq, nourries d’une vaste érudition en connaissances religieuses et profanes, élevaient tout sujet à des dimensions spirituelles étonnantes.

Pendant les 22 ans où il dirigea le grand séminaire, Lecoq réalisa plusieurs projets d’envergure. Ainsi, en 1894, il fit déménager le séminaire de philosophie dans un nouveau bâtiment, chemin de la Côte-des-Neiges. En 1900, il amorça la reconstruction de la chapelle du grand séminaire, chef-d’œuvre de l’architecte Jean-Omer Marchand*, et fit agrandir ce dernier, à l’ouest, de 1900 à 1902.

Le 3 décembre 1902, Lecoq fut élu supérieur de la Compagnie de Saint-Sulpice à Montréal, succédant à Louis-Frédéric Colin*, décédé en novembre. Il eut à justifier, en 1907, les coûts de la reconstruction de la chapelle du grand séminaire. Il fut secrétaire du Premier Concile plénier de Québec tenu en 1909. À la demande de l’archevêque de Montréal, Mgr Paul Bruchési*, il organisa la fondation de l’école sacerdotale Saint-Jean-l’Évangéliste (1911), petit séminaire au sens strict. Il présida également à la construction de la Bibliothèque Saint-Sulpice (qui deviendrait la Bibliothèque nationale du Québec), érigée selon les plans de l’architecte Eugène Payette, rue Saint-Denis, et ouverte au public en 1915.

Lecoq fut le dernier sulpicien de nationalité française à diriger Saint-Sulpice au Canada. Ses confrères canadiens réclamant plus de postes administratifs, il accepta humblement le mandement du conseil général de Paris, en 1908, qui imposait « un nombre égal de Canadiens et de Français » dans les deux conseils d’administration (soit celui des 12 assistants et celui des 4 consulteurs). La transition se fit au temps jugé opportun par Lecoq et, à sa démission pour maladie grave en 1917, le Canadien Narcisse-Amable Troie* fut élu comme successeur.

Retraité, Lecoq devint ensuite le supérieur ecclésiastique des Sœurs de la charité de l’Hôpital Général de Montréal (sœurs grises). En tant que directeur spirituel, il s’attacha plusieurs âmes : plus de 850 lettres en témoignent. Deux maladies assombrirent les dernières années de sa vie : le diabète et une névrite faciale du trijumeau, dont il souffrait depuis 1914, et qui le fit hospitaliser maintes fois. Il occupait ses loisirs à traduire directement du grec et à annoter le Nouveau Testament.

Charles Lecoq fut un prêtre d’une valeur exceptionnelle qu’ont soulignée tous les éloges publiés après sa mort : talent brillant servi par une mémoire prodigieuse et une large culture humaniste, jugement théologique compétent et sûr, pauvreté quasi absolue, humilité profonde, union ardente avec Dieu et charité inlassable pour son prochain. Il ne fut cependant ni un grand orateur ni un administrateur d’envergure ; sa réputation, encore vivante, consiste à avoir été prêtre jusqu’à la moelle des os, partout et toujours.

Alcide Laplante

Arch. de la Compagnie de Saint-Sulpice (Paris), Dossier 18 C 3 (corr. passive de M. Garriguet) ; Sect. N, dossier Vigourel.— Arch. départementales, Loire-Atlantique (Nantes, France), État civil, Nantes, 6 févr. 1843, 4 nov. 1846.— Arch. du séminaire de Saint-Sulpice (Montréal), Voûte 2, armoire 6, boîte 127 (consulteurs) ; armoire 7, tiroirs 148–149, cartons 66–68 (lettres et fascicules d’œuvres manuscrites).— L’Action catholique (Québec), 8 avril 1926.— Le Devoir, 7–8 avril 1926, 2 déc. 1939.— J.-B.-A. Allaire, Dictionnaire biographique du clergé canadien-français (6 vol., Montréal et Saint-Hyacinthe, Québec, 1908–1934).— Émile Boucher, « l’Œuvre sulpicienne de la formation cléricale, les supérieurs du grand séminaire », le Séminaire (Montréal), 22 (1957) : 317–328.— Ægidius Fauteux, Monsieur Lecoq : souvenirs d’un ancien séminariste (Montréal, 1927).— Barthélemi Gattet, « M. Charles-I. Lecoq, p.s.s. », le Séminaire, 5 (1940) : 48s.— Henri Gauthier, Une âme sacerdotale : Charles Lecoq, prêtre de Saint-Sulpice, 1846–1926 (Montréal, 1939).— Bruno Harel, « le Grand Séminaire de 1840 à 1940 : une période d’établissement et de rayonnement », dans le Grand Séminaire de Montréal de 1840 à 1990 : 150 années au service de la formation des prêtres, sous la dir. de Rolland Litalien (Montréal, 1990), 93–103.— Josette Michaud et Bruno Harel, le Séminaire de Saint-Sulpice de Montréal ([Montréal], 1990).— Les Prêtres de Saint-Sulpice au Canada : grandes figures de leur histoire (Sainte-Foy, Québec, 1992), 360–364.

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Alcide Laplante, « LECOQ, CHARLES (baptisé Isaïe-Marie-Charles) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lecoq_charles_15F.html.

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Année de la publication:    2005
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