LE BLANC, ISIDORE, capitaine, propriétaire de navire, marchand et homme politique, né le 30 novembre 1837 à Arichat, au Cap-Breton, Nouvelle-Écosse, fils de Pierre (Peter) Le Blanc et de Barbara Landry ; le 9 janvier 1860, il épousa au même endroit Séraphine Babin, fille du capitaine Simon Babin, et ils eurent trois fils et trois filles qui atteignirent l’âge adulte ; décédé le 26 juin 1919 à Arichat.
Le grand-père d’Isidore Le Blanc, Mathurin Le Blanc, né à Grand-Pré, en Nouvelle-Écosse, échappa à la Déportation et s’établit à Arichat vers 1775, attiré comme beaucoup d’autres Acadiens par la présence du grand établissement de pêche des Robin, célèbre famille jersiaise [V. Charles Robin*]. Suivant les traces de son grand-père et de son père, Isidore devint marin. Il fréquenta l’école d’Arichat et fit son premier voyage en mer à l’âge de 14 ans. Pendant plus de 20 ans, sa carrière de capitaine marchand l’amena en Europe, aux États-Unis, en Amérique du Sud et aux Antilles. Il pilota plusieurs navires de guerre français entre Halifax et Arichat, et sur le Saint-Laurent. En 1870, il ouvrit un magasin général à Arichat d’où il approvisionna des navires pendant une dizaine d’années. Tout en dirigeant son commerce, il continuait à acheter et à vendre des bateaux. En 1875, par exemple, il fit construire un trois-mâts de 410 tonneaux, le County of Richmond, « le plus grand vaisseau jamais construit dans la partie sud du Cap-Breton ».
Le Blanc fut nommé juge de paix en 1866, une bonne indication de son rang social et financier. Il commença à s’intéresser de plus en plus à la politique et se présenta, mais sans succès, comme candidat libéral aux élections provinciales de 1871. Il fut élu à la Chambre d’assemblée, à titre de candidat indépendant, aux élections générales de 1878. Il siégea dans l’opposition pendant quatre ans, mais devint membre du gouvernement après que les libéraux eurent remporté la victoire aux élections de 1882. Nommé au Conseil exécutif le 18 février 1883, Le Blanc fut ainsi le premier Acadien à faire partie du gouvernement de la Nouvelle-Écosse. Il représenta avec énergie et éloquence le comté de Richmond jusqu’à la dissolution de la Chambre en 1886. Il ne tenta pas de se faire réélire, mais il fut nommé au Conseil législatif en mars 1887 et y resta jusqu’à sa mort.
Originaire d’un comté où les Acadiens formaient la majorité, Le Blanc défendit à plusieurs reprises le droit des enfants acadiens à une éducation dans leur langue. Le 17 avril 1879, il s’adressa à l’Assemblée en français (événement rarissime dans toute l’histoire de cette Chambre) pour renforcer ses arguments. En mars 1880, il soutint avec vigueur l’instauration d’une prime aux pêcheurs en faisant un portrait détaillé de la situation désastreuse de la pêche dans sa région. Toujours préoccupé par les questions de transport, il se montra visionnaire lorsqu’il proposa, le 19 mars 1886, la construction d’un pont-levis pour relier l’île Madame, où se trouvait Arichat, au Cap-Breton. Le projet ne se réalisa qu’en 1916, trois ans avant sa mort.
Quoique moins actif sur la scène politique à compter des années 1890, Le Blanc continua à s’intéresser à l’avenir économique de l’île Madame et aux causes acadiennes. Après la fondation de l’Évangéline en 1887 [V. Valentin Landry], il servit d’agent du journal à Arichat. « Ce vieux et vénérable compatriote », comme le juge Pierre-Amand Landry l’appelait, fut élu vice-président pour le Cap-Breton à la quatrième Convention nationale des Acadiens qui eut lieu à Arichat du 15 au 16 août 1900. Le Blanc prit la parole deux fois au cours du congrès pour exprimer son espoir dans l’avenir de la langue française au Cap-Breton et pour inciter les jeunes à s’instruire et à suivre l’exemple des grands orateurs comme Pierre-Amand Landry et sir Wilfrid Laurier.
Isidore Le Blanc décéda intestat quelques mois avant son quatre-vingt-deuxième anniversaire. De son vivant, il avait assisté à la montée et au déclin de la prospérité d’Arichat en tant que port de mer et centre de construction navale. Comme beaucoup de capitaines marchands de sa génération, il avait vu ses enfants quitter l’île Madame pour se faire une vie ailleurs. Homme aux talents multiples, Le Blanc fit sa marque sur la scène politique et joua un rôle important dans l’industrie maritime de sa région natale.
L’Évangéline (Weymouth Bridge, N.-É), 23 août 1900, 22 janv. 1903.— Le Moniteur acadien, 23 août 1900.— Canadian biog. dict.— Philippe Doucet, « la Politique et les Acadiens », dans l’Acadie des Maritimes : études thématiques des débuts à nos jours, sous la direction de Jean Daigle (Moncton, N.-B., 1993), 299–340.— Legislative Assembly of N.S. (Elliott).— N.-É., House of Assembly, Debates and proc., 1879–1886.— J. P. Parker, Cape Breton ships and men (Aylesbury, Angleterre, 1967 ; [2e] éd., Toronto, 1980).— Sally Ross, « Majorité ou minorité : le cas de l’île Madame », Soc. hist. acadienne, Cahiers (Moncton), 23 (1992) : 143–157.
Sally Ross, « LE BLANC, ISIDORE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/le_blanc_isidore_14F.html.
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Auteur de l'article: | Sally Ross |
Titre de l'article: | LE BLANC, ISIDORE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1998 |
Année de la révision: | 1998 |
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