LABELLE, CHARLES (baptisé Charles William), avocat, musicien, professeur, auteur et directeur de revues, né le 15 août 1849 à Champlain, New York, fils de Charles Labelle et de Marie Dubois ; le 5 juin 1872, il épousa à l’église Notre-Dame de Montréal Marie-Louise Derome, et ils eurent sept enfants dont deux seront musiciens, Adrienne et Gustave ; décédé le 21 mai 1903 à Montréal.
Charles Labelle naît aux États-Unis, mais il passe son enfance à Montréal. On sait peu de chose de sa jeunesse et de ses études musicales sinon qu’après avoir été initié à la musique par son père, ébéniste de carrière, il aurait été nommé dès l’âge de 12 ans responsable de la classe de solfège et organiste de la Congrégation de la Sainte-Vierge au petit séminaire de Montréal, où il poursuit ses études classiques de 1861 à 1869. Malgré ses dispositions pour la musique, Labelle opte pour une carrière en droit. Après un stage de clerc au bureau de sir George-Étienne Cartier*, François-Pierre Pominville et Louis Bétournay*, il est reçu avocat en 1873. Il aurait exercé sa profession jusque vers 1887, d’abord seul puis en société avec François-Xavier-Anselme Trudel* et Louis-Olivier Taillon* (1874–1875), et avec Benjamin-Antoine Testard de Montigny.
Labelle ne délaisse pas pour autant la musique durant ces années. Il étudie le chant et l’accompagnement avec Madame Petipas, participe à des concerts d’amateurs en qualité de chanteur et occupe ses premiers postes de maître de chapelle à Saint-Jacques (1873–1875) et à Saint-Henri (1876–1879). À ce dernier endroit, il doit, en plus, organiser des représentations musicales et dramatiques afin d’être payé. Ce n’est que vers 1880 qu’il se rend en Europe poursuivre sa formation. On ne peut toutefois affirmer qu’il étudie auprès du célèbre professeur de chant Romain Bussine. On croit, en fait, qu’à ce moment-là Labelle cherchait davantage à se perfectionner dans l’enseignement plutôt que dans le chant. Malgré un talent scénique indéniable dans le répertoire léger de l’opérette et de la romance, sa voix, « petite et légèrement voilée » d’après Guillaume Couture*, ne lui permettait pas d’envisager une carrière à l’opéra.
À son retour, Labelle est à nouveau engagé comme maître de chapelle à Saint-Jacques (1881–1884), puis à Notre-Dame (1884–1891). Là, il est remercié plusieurs mois avant la fin de son contrat, en même temps que l’organiste, car on veut nommer à leur place des musiciens qui sauront mettre en valeur le nouvel orgue et assurer la solennité des cérémonies. Sa destitution et son remplacement par Guillaume Couture soulèvent de vives réactions, à preuve les lettres et les articles parus dans les journaux, la démission de plusieurs choristes et une requête de citoyens adressée à l’archevêque de Montréal Édouard-Charles Fabre*. On évoque unanimement un sentiment d’injustice à l’endroit du musicien qui « possède l’art musical à un degré au moins égal à Monsieur Couture ». Peut-être découragé par l’inflexibilité des autorités religieuses, mais surtout poussé par la nécessité de se trouver une autre source de revenus, Labelle se rend à Boston où, selon l’Étendard de Montréal, « la place laissée vacante par le décès de M. Calixte Lavallée [Calixa Lavallée*] lui est offerte ». Mais il revient rapidement à Montréal, où la fabrique de la nouvelle paroisse Saint-Louis-de-France l’engage comme maître de chapelle. Il conservera ce poste jusqu’à son décès et étendra les activités de la chorale qu’il a fondée en dehors du service religieux. Il avait fait de même auparavant avec le chœur de Notre-Dame, en plus de diriger le chœur des Montagnards, en 1888 tout au moins, et de fonder la Société philharmonique canadienne-française, en 1889. Cette dernière chorale mixte devait disparaître après moins de deux ans d’activité en raison, selon le chroniqueur Frédéric Pelletier, d’une indiscipline et d’une incapacité des choristes à « se plier à la volonté d’un artiste, si énergique et doué qu’il fût ».
Parallèlement à la direction chorale, Labelle se consacre à l’enseignement du chant et du solfège, auprès de ses choristes, en privé, et dans plusieurs établissements scolaires, dont le petit séminaire de Montréal, le couvent et l’académie des Sœurs des Saints-Noms de Jésus et de Marie, dans le quartier Hochelaga, à Montréal, et le collège Sainte-Marie-de-Monnoir, à Marieville (1891–1903). La publication d’un Petit Traité de solfège, en 1892, approuvé par le Conseil de l’instruction publique de la province de Québec et adopté par plusieurs grands établissements d’enseignement, et son engagement comme professeur de solfège et responsable de la chorale au nouveau conservatoire de la Société artistique canadienne en 1895 attestent la compétence de celui qui était alors considéré, selon le journal le Samedi, comme « un des professeurs les plus populaires de Montréal, un des plus estimés aussi ».
Il est plus difficile de juger des réalisations du chroniqueur et du critique musical sur la foi de quelques articles seulement, parus notamment dans l’Album musical (1882–1884) et dans l’Écho musical (1888), deux revues dont Charles Labelle était le directeur. De même, on ne peut, à partir de témoignages seulement, se prononcer sur sa réputation de compositeur de mérite, aucune de ses œuvres n’ayant apparemment été publiée. Principalement actif dans les domaines du chant choral religieux et de l’enseignement de la musique, Labelle a contribué au développement du goût musical à Montréal. Vers 1895, son apport à la cause musicale était même reconnu à l’étranger puisqu’il devenait membre d’honneur de l’Institut populaire de France.
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Vivianne Émond, « LABELLE, CHARLES (baptisé Charles William) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/labelle_charles_13F.html.
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
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