KEESEEKOOWENIN (Kesekoinin, Kitche kah me win, qui signifie « homme du ciel » ou « chef du ciel », baptisé Moses Burns), chef sauteux, né vers 1818 dans la région de la rivière Bow (Alberta), fils du chef Okanase (Michael Cardinal) et d’une sang-mêlé probablement dénommée Burns dont l’ancêtre venait des Orcades ; il épousa une Cardinal, et ils eurent trois fils et sept filles ; décédé le 10 avril 1906 dans la réserve Keeseekoowenin, près d’Elphinstone, Manitoba, et inhumé au même endroit.

Le père de Keeseekoowenin, le chef Okanase, dont le nom signifie « petit os », appartenait à la lignée des Cardinal dont l’histoire est intimement liée à celle de la traite des fourrures et qui, partie du Québec, progressa lentement vers l’ouest jusqu’aux Rocheuses. Au fil des générations, ses membres épousèrent généralement des autochtones ou des sang-mêlé. Comme c’était la coutume parmi les autochtones influents, Okanase avait plusieurs épouses. Avec sa femme stonie, il eut au moins trois fils, Louis O’Soup*, St Paul (peut-être Jean-Baptiste Lolo*), et Mekis (Eagle) ; avec sa femme métisse, George, John, William et Antoine Bone. Quant aux frères de Keeseekoowenin issus de la même mère, ils s’appelaient Yellowhead (Wabaso, Blonde) et Baptiste Bone (Baptiste Okanase). Au moins cinq des fils d’Okanase furent des chefs influents dans les Prairies, et sa lignée existe encore.

Margaret, sœur du chef Okanase, épousa un trafiquant de la Hudson’s Bay Company, George Flett. Peu après que celui-ci eut été muté au fort Garry (Winnipeg), en 1822, le chef Okanase et sa bande quittèrent la rivière Bow pour les contreforts sud-ouest du mont Riding (Manitoba). La bande était prospère sous son autorité progressiste ; elle faisait de la chasse, du piégeage et de la traite avec deux postes de la compagnie, le fort Ellice (Fort Ellice) et Riding Mountain House. Quand Okanase mourut, vers 1870, son fils Mekis lui succéda.

Le 21 août 1871, à Manitoba House, Mekis signa le traité no 2, qui attribuait à sa bande une réserve dans la région des rivières Turtle et Valley, près du lac Dauphin, mais en 1875, la bande demanda et obtint que la réserve soit plutôt située près de l’endroit où se trouve aujourd’hui Elphinstone. Le 9 septembre 1875, aux lacs Qu’Appelle (lacs The Fishing, Saskatchewan), des articles du traité qui touchaient la bande furent renégociés dans le cadre d’une adhésion au traité no 4. Comme Mekis venait de mourir, ce furent Keeseekoowenin et Baptiste Bone qui signèrent ce traité au nom de la bande. O’Soup, qui s’opposait fermement à la relocalisation de la réserve, alla s’installer sur le territoire actuel de la Saskatchewan ; Yellowhead aussi partit vers l’ouest.

La chasse et la pêche étaient bien meilleures au nord-est, près du mont Riding, région que la bande avait longtemps parcourue. Comme ce territoire situé en bordure de la rive ouest du lac Clear appartenait à la couronne, le gouvernement fédéral en autorisa l’accès aux résidents de la réserve. Le 3 juillet 1896, un arrêté en conseil donna un caractère officiel à cette coutume et créa la réserve du lac Clear, que la bande agrandit vers 1904 en achetant 320 acres. Les résidents de la réserve d’origine considéraient Keeseekoowenin comme leur chef et ne se rendaient à la réserve du lac Clear qu’à l’occasion, tandis qu’environ un quart de la bande y vivait en permanence sous l’autorité de Baptiste Bone. Le département des Affaires indiennes administrait les deux réserves comme s’il s’était agi d’une seule ; dans les registres, Keeseekoowenin figurait comme chef des deux réserves et Baptiste Bone comme simple conseiller.

En raison de l’ascendance des Cardinal et d’une mission catholique. située près de Riding Mountain House, la bande avait absorbé certains aspects de la foi catholique. Sur son lit de mort, le chef Okanase avait prédit qu’un chef religieux viendrait bientôt vivre au milieu de la bande et il avait pressé son peuple de l’écouter. Vers 1873, le révérend George Flett, fils du trafiquant de la Hudson’s Bay Company, et de Margaret, la sœur d’Okanase, fonda la mission Okanase sur la réserve originale, où ses cousins l’accueillirent chaleureusement. Les membres de la bande ne tardèrent pas à se convertir au presbytérianisme. Ce fut Keeseekoowenin qui résista le plus longtemps, mais finalement, Flett le baptisa Moses Burns. Cependant, ceux du lac Clear demeuraient catholiques, et un écart se créa peu à peu entre les deux groupes. Des fonctionnaires, des représentants des Églises et des journalistes contribuèrent à creuser davantage ce fossé : selon eux, la communauté la plus nombreuse correspondait à l’idéal du fermier autochtone et chrétien alors que la plus petite, celle des chasseurs et pêcheurs du lac Clear, était restée primitive. Cette situation peinait beaucoup Keeseekoowenin, qui voulait que son peuple profite des avantages du christianisme et de l’instruction tout en conservant les meilleurs aspects de son mode de vie traditionnel. À compter de 1906, il eut une source d’inquiétude supplémentaire : on disait, dans les milieux politiques, que la réserve du lac Clear serait progressivement fermée. Effectivement, le parc national du mont Riding fut créé en 1929, ce qui donna lieu à une revendication territoriale.

On dit que Keeseekoowenin avait un physique magnifique ; il mesurait plus de six pieds et excellait à la course. C’était aussi un chasseur de bison, un trappeur et un fermier hors pair. Tout en étant un chrétien sincère, il conservait la foi de ses ancêtres dans le Grand Esprit, révérait la nature et défendait les cérémonies du pow-wow. Ce mélange de croyances traditionnelles et chrétiennes s’harmonisait avec les enseignements de Flett.

L’histoire des enfants de Keeseekoowenin ne fut pas moins haute en couleur que celle de ses ancêtres. Harriet Burns épousa Glen Campbell* ; ensemble, ils animèrent la scène sociale pendant les années où il siégea aux Parlements de Winnipeg et d’Ottawa. Solomon Burns se distingua comme conseiller presbytéral et chef religieux. Victoria Burns épousa Walter Scott qui, avec son frère à elle, David, joua un rôle important dans le fameux voyage que Campbell fit au Yukon pendant la ruée vers l’or du Klondike. Keeseekoowenin, qui était devenu aveugle peu avant de mourir à l’âge de 88 ans, eut pour successeur son demi-frère George Bone.

Peter Lorenz Neufeld

AN, RG 10, 3706, dossier 18, 809 ; 3939, dossier 121, 698-696 ; 7764–7766 ; D10.— Arch. privées, P. L. Neufeld (Winnipeg), Corr., 26 mars 1989 ; Entrevue avec Walter A. Scott (Rapid City, Manitoba), petit-fils de Keeseekoowenin, 2 oct. 1988 ; Lettre de Randall Barnhart, Centre de la recherche historique et de l’étude des traités, dép. des Affaires indiennes, Ottawa, 26 juill. 1979.— EUC, Manitoba and Northwestern Ontario Conference Arch. (Winnipeg), J. A. Donaghy, « Okanase Indian mission » ; « The work of the early Presbyterian Church among the Indians in Canada from its inception to the present ».— Manitoba Morning Free Press, 29 oct. 1897.— Minnedosa Tribune (Minnedosa, Manitoba), 21 mars 1895, 6 août 1981.— [J. W.] G. MacEwan, Metis makers of history (Saskatoon, Saskatchewan, 1981).— P. L. Neufeld, « The notable Michael Cardinal family », Indian Record (Winnipeg), janv. 1986 : 20–21 ; « Painful affairs ; Indians played role in Manitoba park history », Western People (Saskatoon), 15 août 1985 : 7s.— R. B. Sparling, Reminiscences of the Rossburn pioneers (Rossburn, Manitoba, 1951).— W. [J. S.] Traill, In Rupert’s Land ; memoirs of Walter Traill, Mac Atwood, édit. (Toronto, 1970).

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Peter Lorenz Neufeld, « KEESEEKOOWENIN (Kesekoinin, Kitche kah me win), baptisé Moses Burns », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/keeseekoowenin_13F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
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