HEMMING, EDWARD JOHN, avocat, gentleman farmer, homme politique, magistrat rémunéré et fonctionnaire, né le 30 août 1823 à Londres, troisième fils de Henry Keene Hemming, agent d’immeuble, et de Sophia Wirgman, Suédoise ; décédé le 17 septembre 1905 à Knowlton, Québec.
Edward John Hemming passe son enfance dans un milieu petit-bourgeois londonien. En 1839, ses études terminées à la Clapham Grammar School de Londres, il s’embarque, comme aspirant de marine, sur un navire de l’East India Company avec l’intention de voir le monde. De retour en 1845, il poursuit, en Irlande, des études pratiques et scientifiques en agriculture. À l’occasion de l’Exposition universelle, tenue à Londres en 1851, il remporte un prix pour son travail intitulé On the neglect of chemistry by practical farmers [...], qui sera publié à Londres en 1853.
Cette exposition est pour Hemming l’occasion de rencontrer un cousin germain, Christopher Dunkin*, avocat demeurant à Montréal, qui l’invite à entrer dans son bureau comme étudiant en droit. Dès l’automne de 1851, Hemming se retrouve au cabinet Béthune and Dunkin et s’inscrit en droit au McGill College. En 1855, il décroche une licence en droit civil, sortant le premier de sa promotion ; le 7 mai, il est admis au Barreau du Bas-Canada. Il obtiendra, en 1871, un doctorat en droit civil de son alma mater.
À l’été de 1855, Hemming retourne en Angleterre pour épouser sa cousine Sophia Louisa Robinson, fille d’un marchand de Londres, qu’il ramène aussitôt à Montréal. Il ouvre peu après un cabinet en association avec Alexander Hutchison Lunn et, à l’automne, il se voit mandaté par le gouvernement de la province du Canada pour compiler, sous l’autorité de Gustavus William Wicksteed, greffier en loi de l’Assemblée législative, toutes les lois en vigueur depuis la Conquête jusqu’à 1855, en vue de préparer un index devant servir à la refonte des lois de la province. On lui doit également un inventaire et une codification de la documentation de la bibliothèque des avocats de Montréal et de la bibliothèque du Barreau du Bas-Canada, publié en 1857 sous forme de catalogue toujours en usage.
En 1858, Hemming participe activement à la campagne électorale dans la circonscription de Drummond et Arthabaska, à l’issue de laquelle son cousin est élu député en battant Jean-Baptiste-Éric Dorion*. Hemming accepte alors d’agir comme secrétaire de Dunkin et s’installe, avec sa femme et leur jeune enfant, à Drummondville, chef-lieu du comté de Drummond depuis 1830. La ferme, avec résidence, nommée Oatland, qu’il achète de la succession du révérend George McLeod Ross*, ressemble à une ferme expérimentale. Tout en exerçant sa profession d’avocat, Hemming dirige son établissement en faisant appliquer par les fermiers à son service les connaissances scientifiques qu’il possède en agriculture. Ses tentatives d’améliorer les rendements en avoine et en blé de ses grands espaces (152 acres) semblent couronnées de succès. Il possède également des animaux de boucherie et un magnifique verger. Il devient bientôt un grand propriétaire terrien grâce à l’acquisition de nombreuses terres en friche dans les cantons de Wickham et de Simpson, dont certaines contiennent du minerai de fer en surface, ce qui lui permettra un commerce lucratif de bois et de minerai avec les forges de John McDougall* à Drummondville.
Mais, en 1867, le brillant juriste, dont on écoute avec grand plaisir les plaidoiries toujours préparées avec soin, aussi bien en français qu’en anglais, et qui possède, dit-on, la plus importante clientèle de la région, décide de faire le saut en politique active. Candidat conservateur dans Drummond et Arthabaska, aux premières élections provinciales tenues après la Confédération, il a l’appui d’une bonne majorité de la population canadienne-française. Il promet des routes pour améliorer le commerce et favoriser l’implantation d’industries, ainsi que la remise en vigueur du projet de construction d’un chemin de fer que Dunkin avait dû abandonner, faute d’argent. Il remporte une victoire éclatante.
À l’Assemblée, Hemming se révèle un travailleur acharné et assidu. Il se prononce sur de nombreux projets de loi – il ne manque qu’un seul vote durant les quatre sessions de son mandat – et en présente lui-même un grand nombre, autant d’intérêt public que privé. Chargé de la rédaction de textes juridiques devant servir, entre autres, à la refonte du Code municipal et à l’amélioration des lois sur le commerce et l’industrie, il y met beaucoup de son temps. Nommé président du comité chargé d’étudier la question des chemins de fer au Québec, il fait des recommandations et des interventions en Chambre en faveur des chemins à lisses de bois, qui incitent le gouvernement, en 1869, à adopter un projet de loi autorisant leur construction. Grâce à cette mesure, les régions de colonisation, qui ne peuvent alors se payer de véritables chemins de fer, pourront communiquer plus facilement avec les grandes lignes ferroviaires existantes. L’une des premières compagnies à se former dans ce but est la Compagnie du chemin à lisses des comtés de Richelieu, Drummond et Arthabaska, dont le réseau reliant Sorel, Drummondville et Acton (Acton Vale) permettra au comté de Drummond de sortir de l’isolement qui paralysait son commerce et son industrie [V. Louis-Adélard Senécal*].
Aux élections de 1871, Hemming est cependant délogé de son poste de député par Wilfrid Laurier*, qui a utilisé toutes sortes de supercheries pour le battre aux élections. Deux ans plus tard, il accepte le poste de magistrat rémunéré qu’on lui offre pour le district d’Arthabaska. Démis de ses fonctions en 1878, il retourne à la pratique du droit à Drummondville. Nommé en 1887 protonotaire pour le district d’Arthabaska, il devient par la suite syndic du barreau du même district, puis en est élu bâtonnier, en 1890. Trois ans plus tard, il est fait conseiller de la reine et, en 1894, il devient shérif adjoint du district d’Arthabaska. Entre-temps, pour répondre à une requête pressante du Parti conservateur, il a brigué les suffrages dans Mégantic aux élections provinciales de 1881, mais il a été défait par George Irvine*. À l’occasion d’un discours prononcé en 1897 devant le barreau local, il dira en riant que jamais un homme en ce pays n’a obtenu autant de postes publics que lui, n’en a autant refusés et n’a été démis aussi souvent de ses fonctions.
Hemming participe aussi à la vie publique sur le plan local. Il remplit les fonctions de maire de la municipalité du canton de Wickham (1867–1868, 1872–1873), et du village de Drummondville (1886–1887), et celles de préfet du comté de Drummond à deux reprises. Marguillier de la paroisse anglicane St George de Drummondville durant 18 ans, il devient secrétaire-trésorier du corps des syndics formé en vue de la reconstruction du temple détruit par le feu en 1863. Connu pour son zèle religieux, il est, à partir de 1862, et durant plus de 30 ans, délégué aux synodes diocésains et provinciaux de l’Église d’Angleterre. Il fait également partie du comité protestant du Conseil de l’instruction publique de la province, où il travaille à l’instauration de l’enseignement religieux dans les écoles protestantes. Enfin, Hemming se retrouve à la direction de la Société d’agriculture du comté de Drummond dont il préside à plusieurs reprises les destinées.
Après une carrière aussi bien remplie, Hemming quitte Drummondville, peut-être parce qu’il est fortement endetté. S’étant départi de toutes ses terres, il vend, en 1899, à William Mitchell, son magnifique domaine d’Oatland et s’en va à Knowlton, juste au bout de la ligne de chemin de fer qu’il a jadis tracée ; il y meurt six ans plus tard, après une courte maladie.
Homme de taille moyenne, aux cheveux bruns et au visage soucieux, Hemming avait le geste brusque et une voix forte et pénétrante qui lui donnaient un air de dureté. La surdité dont il souffrait et qui s’accentua d’année en année, au point de devenir totale, l’a sûrement affecté tant dans l’orientation de sa carrière que dans ses activités professionnelles postérieures, mais ne l’a pas empêché d’être un homme d’action, utile à sa famille et à la société qu’il voulait servir.
Homme de droite, Edward John Hemming ne pouvait être que conservateur en politique ; il sut par contre se montrer progressiste. Sa pensée philosophique a peu bougé durant sa vie : certains de ses biographes l’ont dit vieux jeu, parce qu’il croyait fermement en la Bible et, de ce fait, rejetait carrément le darwinisme, l’éducation laïque ou la prohibition. Si on lui parlait de libre-échange, il s’affirmait protectionniste, disant que cette politique ne pourrait fonctionner tant et aussi longtemps que le système social, fondé sur la famille (chacune ayant son propre intérêt), n’aurait pas regroupé toutes les familles pour n’en faire qu’une. Quant au principe de la souveraineté du peuple, il le croyait non fondé, affirmant que l’autorité vient d’en haut et non d’en bas. Il était même réfractaire aux principes d’économie politique d’Adam Smith car, disait-il, il y aura toujours des riches et des pauvres dans nos sociétés. Toute sa vie, Hemming a conservé l’assurance tranquille d’avoir bien servi Sa Majesté dans une colonie où il fallait, selon lui, apporter les insignes bienfaits de la culture anglaise.
Edward John Hemming est le compilateur du Catalogue of the Advocates’ Library and library of the Bar of Lower Canada [...] ([Montréal], 1857).
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Maurice Milot, « HEMMING, EDWARD JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/hemming_edward_john_13F.html.
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Auteur de l'article: | Maurice Milot |
Titre de l'article: | HEMMING, EDWARD JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
Année de la révision: | 1994 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |