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GIBAULT (Gibaut), PIERRE, prêtre catholique et missionnaire, baptisé le 7 avril 1737 à Montréal, l’aîné des enfants de Pierre Gibault et de Marie-Joseph Saint-Jean ; décédé le 16 août 1802 à New Madrid (Missouri).
On ne sait pas grand-chose de la jeunesse de Pierre Gibault ; il fréquenta probablement le collège des jésuites à Québec. En 1759, il se rendit à Detroit et à Michillimakinac (Mackinaw City, Michigan), peut-être comme engagé d’une compagnie de traite. Le 19 mars 1768, après deux ans d’études théologiques au séminaire de Québec, il fut ordonné prêtre par Mgr Briand* et, au début de juin, muni des pouvoirs d’un vicaire général, il partait pour le pays des Illinois, accompagné de sa mère et de sa sœur, même si cela contrariait beaucoup son évêque. Il allait assister Sébastien-Louis Meurin, d’un âge déjà avancé et unique prêtre catholique à desservir la région entre Michillimakinac et La Nouvelle-Orléans, depuis le départ précipité de Jacques-François Forget* Duverger et l’expulsion des jésuites en 1764.
Ayant établi sa résidence officielle à Kaskaskia (Illinois), le village principal, Gibault visita régulièrement tous les établissements français disséminés entre Vincennes (Indiana) et Sainte-Geneviève (Missouri). Pendant quelques années, les paroissiens de Kaskaskia lui furent dévoués, mais ils en vinrent à s’irriter de ses nombreuses visites dans d’autres établissements. Sous le Régime français, l’État avait subventionné l’Église, mais une fois la région passée sous l’autorité britannique, les fidèles eurent à subvenir davantage aux besoins de leur pasteur au moyen de la dîme. Ils s’impatientèrent et se mirent à le critiquer. De fausses accusations portées contre lui furent envoyées à Québec ; quoique injustifiées, elle le tourmentèrent jusqu’à sa mort.
Si Gibault mérite une place dans l’histoire, c’est pour le rôle qu’il joua dans la prise du pays des Illinois par George Rogers Clark. En 1778, ce dernier reçut mission du gouverneur de la Virginie d’envahir l’Ouest et, le 4 juillet, il entrait dans Kaskaskia. Des porte-parole du village, dont Gibault, acceptèrent de coopérer avec les envahisseurs, et Clark promit de laisser le village en paix. Il s’empara des villages voisins puis, projetant d’avancer sur Vincennes, il consulta Gibault. D’après Clark, le missionnaire déclara qu’« il s’en chargerait et qu’il ne doutait pas de pouvoir gagner cette localité aux intérêts américains sans qu’[il se donnât] le mal d’y faire entrer des troupes ». Gibault et Jean-Baptiste Laffont, médecin, passèrent un jour ou deux à examiner cette conjoncture avec les habitants de Vincennes qui jurèrent alors d’être loyaux aux Américains. En outre, Gibault transmit les salutations de Clark à Tobacco’s Son, chef des Peanquishas ; cette tribu des Miamis demeura, par la suite, neutre ou amicale. Or, les initiatives du missionnaire lui attirèrent la colère des autorités britanniques : Henry Hamilton*, lieutenant-gouverneur de Detroit, estimait qu’il fallait le pendre. Le 29 juin 1780, Mgr Briand, qui avait déjà condamné toute collaboration avec les rebelles, le suspendit de ses fonctions ecclésiastiques et lui enleva tous ses pouvoirs. Gibault n’a peut-être jamais reçu la lettre de son évêque. En tout cas, il continua de desservir les établissements du pays des Illinois et, plus tard, nia toute complicité avec les rebelles. Cependant, les Américains l’appellent parfois le prêtre patriote.
À l’arrivée d’autres missionnaires, Gibault alla s’installer à Sainte-Geneviève, de l’autre côté du fleuve, en 1780. Il tombait sous la juridiction civile de la couronne espagnole et sous l’autorité ecclésiastique de l’évêque de Santiago de Cuba. Peut-être mal à l’aise dans cette situation, il retourna à Vincennes cinq ans après. En 1788, il demanda son rappel à Québec, mais Mgr Hubert* refusa ; « après les idées désavantageuses qu’a conçu de lui le Gouvernement, je ne puis prudemment consentir à son retour », écrivit l’évêque de Québec. L’année suivante, Gibault retourna à Kaskaskia, car tous les prêtres qui étaient venus dans la vallée du Mississippi étaient repartis pour une raison ou une autre.
En 1787, aux termes de la Northwest Ordinance, le gouvernement américain étendait sa juridiction dans cette vallée et les résidents devaient légitimer leur droit à la terre qu’ils occupaient. Pierre Gibault présenta une pétition demandant que l’on reconnût son droit privé à la terre sur laquelle se trouvaient l’église et le presbytère de Cahokia (Illinois). Malgré l’accord du président George Washington, l’évêque américain nouvellement nommé, John Carroll, s’y opposa, objectant que cette terre appartenait à l’Église. Pour Gibault, ce fut le comble. Il alla s’installer à New Madrid, village récemment fondé, et devint citoyen espagnol en 1793. De 1792 à sa mort, il fut pasteur de la paroisse Saint-Isidore (Immaculée-Conception).
Des statues de bronze plus grandes que nature, représentant Pierre Gibault, ont été érigées à Sainte-Geneviève, Mo., et à Vincennes, Ind. Une bibliographie complète de tout ce qui concerne la vie de Gibault apparaît dans l’ouvrage de J. P. Donnelly, Pierre Gibault, missionary, 1737–1802 (Chicago, 1971).
AAQ, 7 CM, VI.— Archdiocese of St Louis, Chancery Office (St Louis, Mo.), Reg. de la paroisse de Conception de Notre Dame des Cascaskiae.— George Rogers Clark papers [...] [1771–1784], J. A. James, édit. (2 vol., Springfield, Ill., 1912–1926), 1.— J. F. McDermott, « The library of Father Gibault », Mid-America (Chicago), 17 (1935) : 273–275.
Joseph P. Donnelly, « GIBAULT (Gibaut), PIERRE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/gibault_pierre_5F.html.
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Auteur de l'article: | Joseph P. Donnelly |
Titre de l'article: | GIBAULT (Gibaut), PIERRE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |