GAUDRON DE CHEVREMONT, CHARLES-RENÉ, commis au bureau de la Marine, notaire royal, juge seigneurial, né le 5 juillet 1702 à Linas (dép. de l’Essonne, France), fils de Nicolas Gaudron, maître de poste, et de Marie Gohel ; il épousa, le 7 janvier 1730, Marie-Bénigne Derome qui lui donna dix enfants ; décédé en France avant avril 1745.
Charles-René Gaudron de Chevremont arriva au Canada en 1726 ; il venait y remplir un des postes de secrétaire du gouverneur Charles de Beauharnois. Il fit carrière au service de l’État et bénéficia de la protection du gouverneur dans toutes ses entreprises. Lorsque Gilles Hocquart* arriva dans la colonie, en 1729, il confia à Gaudron la charge d’écrivain au bureau de la Marine. Trois ans plus tard, le 27 juillet 1732, il lui accorda une commission de notaire royal à Montréal et le même-jour il ajouta à sa charge d’écrivain celle de commis. Même si ces nominations s’imposaient, c’est probablement à Beauharnois que Gaudron dut d’avoir été choisi. Une fois établi à Montréal, Gaudron fut nommé, le 16 avril 1734, par les directeurs du séminaire de Québec, juge de la cour seigneuriale nouvellement créée à l’île Jésus ; il semble qu’il ait occupé cette charge pendant deux ans.
Peu après son arrivée au Canada, Gaudron commença à s’endetter tant en France qu’au Canada. Il semble avoir tâté du commerce sous une forme ou sous une autre. Sa situation financière n’est pas mentionnée dans les documents, mais son contrat de mariage, qui date de 1729, laisse supposer que ses moyens étaient modestes. En 1733 il laissa passer l’occasion de devenir lieutenant particulier de la juridiction royale de Montréal, préférant à la charge bien mal rémunérée de juge ses honoraires de notaire.
Un incendie survenu à Montréal en 1734 [V. Marie-Joseph-Angélique*] détruisit la maison qu’il avait louée de la veuve de François Poulin* de Francheville, mais il réussit à préserver ses documents officiels de la destruction. Son émouvant appel afin de se faire accorder des dédommagements pour les pertes subies s’élevant à 6 000#, et aussi sa demande pour l’obtention d’un brevet d’écrivain reçurent de flatteuses recommandations de la part de Beauharnois et d’Hocquart, mais le ministre de la Marine, Maurepas, opposa un ferme refus à sa double requête ainsi qu’à toutes les autres de même nature qui lui parvinrent par la suite. Maurepas ne voulait pas augmenter le nombre de postes au Canada ni dédommager les particuliers des pertes par le feu, craignant par là d’établir un coûteux précédent.
En sa qualité de notaire royal à Montréal, Gaudron comptait parmi sa clientèle les familles les plus respectables de la ville. Le répertoire de Gaudron comprend un grand nombre de contrats d’engagement pour l’Ouest. Sa charge de commis au bureau de la Marine consistait à tenir le registre des recettes et débours du magasin du roi, à contrôler la réception, la livraison, la conservation et la qualité des munitions et provisions du roi et à consigner avec exactitude les expéditions à destination des postes du roi. L’obligation qui était sienne de poursuivre les gens en dette avec la couronne était probablement, de tous ses devoirs, celui qui lui apportait le moins de satisfaction.
Au printemps de 1738, Hocquart envoya Gaudron vérifier les livres des gardes-magasin du roi aux forts Niagara (près de Youngstown, N.Y.) et Frontenac (Kingston, Ont.). Le roi se réservait le produit du commerce de ces forts, mais les bénéfices avaient accusé un déclin si rapide que le ministre en était venu à soupçonner de malversations Pierre Pépin, dit Laforce, garde-magasin à Niagara. Gaudron examina les comptes des dix dernières années et procéda à l’inventaire de la marchandise. Sur la foi du rapport de Gaudron, Hocquart conclut que Pépin était un homme honnête, coupable seulement de négligence, et il attribua la baisse des bénéfices à la compétition accrue que livraient les Anglais établis à Chouaguen (Oswego). Ceux-ci avaient du rhum en quantité illimitée à offrir aux Indiens et, pour entrer en concurrence, Pépin devait vendre sa marchandise à perte. L’enquête de Gaudron soulignait l’insuffisance d’hommes instruits et expérimentés en service au Canada, et elle a pu constituer un facteur important dans la décision prise en 1742 de l’abandon par le roi de l’exploitation du commerce aux forts Niagara et Frontenac et de l’affermage de celui-ci au plus offrant.
Un an après avoir mené cette enquête, en 1739, Gaudron de Chevremont retourna en France, apparemment avec l’espoir d’y rester. Peu de temps avant de revenir au Canada en 1740, il rendit visite à Pierre Hazeur* de L’Orme, chanoine et agent à Paris du chapitre de la cathédrale de Québec, qui trouva en lui un homme aimable et intelligent, entretenant des opinions différentes sur Beauharnois et sur Hocquart. Il se peut que l’intendant ait éprouvé un certain mécontentement à la lecture du compte rendu de Gaudron sur le commerce à Niagara ; quoi qu’il en soit, dans son rapport sur les fonctionnaires en service dans la colonie, en 1740, il accuse Gaudron de s’être acquitté de manière superficielle de ses fonctions de commis au bureau de la Marine et de s’être affairé à bien d’autres choses sans lien avec les divers devoirs de sa charge. Il comptait le remercier dès qu’il pourrait trouver un candidat plus apte, et c’est ce qu’il fit en 1741 ; entre temps il lui confia la tâche d’inspecteur de commerce.
Gaudron de Chevremont protesta auprès de Maurepas et sollicita la demi-solde pour subvenir aux besoins de sa nombreuse famille. Malgré la recommandation de Beauharnois, Maurepas accepta la décision de Hocquart et refusa à Gaudron la pension qu’il sollicitait, se fondant sur le motif que les pensions étaient réservées aux fonctionnaires que l’âge ou les infirmités obligeaient à prendre leur retraite. Heureusement pour Gaudron, le gouverneur se révéla un protecteur dans les actes aussi bien que dans les paroles ; en 1742 Beauharnois en fit son procureur et l’envoya en France s’occuper de ses affaires personnelles. Sa femme et deux de ses enfants l’y rejoignirent en 1744.
En avril 1745, dans une lettre à Beauharnois, Maurepas signala qu’il croyait que Charles-René Gaudron de Chevroment était mort quelque temps auparavant.
AD, Yvelines (Versailles), État civil, Linas, 11 déc. 1695, 5 juill. 1702.— AN, Col., B, 63, ff.474v. –475v. ; 64, ff.420v.s. ; 72, ff.364s. ; 74, ff.434s. ; 76, ff.421s. ; 81, f.280v. ; Col., C11A, 53, pp. 206, 213, (copies aux APC) ; 60, f.38v. ; 61, ff.250–251, 252–253 ; 73, ff.300, 306–309v. ; 75, f.167v. ; 77, ff.106v., 117s. ; 79, f.138v. ; 81, ff.134–135v., 178–179v. ; 82, f.275 ; Col., D2D, 1 : Col., E, 81.— ANQ, Greffe de Jacques Barbel, 21 oct. 1733 ; Greffe de J.-É. Dubreuil, 20 nov. 1739 ; NF, Documents de la juridiction de Montréal, X : 7–8.— ANQ-M, Greffe de C.-R. Gaudron de Chevremont, 1732–1739 (V. A. Roy, Inv. greffes not., XII : 5–55).— ASQ, Séminaire, XXV : 14.— P.-G. Roy, Inv. ord. int., II : 87, 127s., 218s., 220, 244s.— Tanguay, Dictionnaire.— P.-G. Roy, Les secrétaires des gouverneurs et intendants de la Nouvelle-France, BRH, XLI (1935) : 87s.
S. Dale Standen, « GAUDRON DE CHEVREMONT, CHARLES-RENÉ », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/gaudron_de_chevremont_charles_rene_3F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1974 |
Année de la révision: | 1974 |
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