DUPLEIX SILVAIN (parfois Sylvain), JEAN-BAPTISTE, négociant et juge colonial, né en 1721 à La Baleine (Baleine Cove, Nouvelle-Écosse), cinquième fils de Claude Duplaix (Duplex Silvain) et de Catherine de Gonillon ; il épousa le 24 février 1753, à Louisbourg, île Royale (île du Cap-Breton), Geneviève Benoist, et ils eurent 14 enfants ; décédé en France en 1796, ou plus tard.

Négociant et capitaine de navire, Claude Duplaix quitta Québec, où il était né, pour Plaisance (Placentia, Terre-Neuve) en 1710. Lors de la cession de Terre-Neuve et de l’Acadie à la Grande-Bretagne, en 1713, il s’en alla à l’île Royale, où il mourut vers 1721. Élevé par son beau-père, Michel Daccarrette*, qui était aussi son oncle, Jean-Baptiste Dupleix Silvain travailla pour l’entreprise de Daccarrette de 1737 à la mort de ce dernier, au combat, pendant le siège de Louisbourg en 1745.

Au cours de ce siège, Dupleix Silvain servit bravement dans la milice de la ville (il le fera de nouveau en 1758) et, après la chute de la forteresse, fut déporté à La Rochelle. En 1747, il y mit sur pied une association de commerce, dont la formation fut ratifiée à Louisbourg en octobre 1749, avec Philippe Leneuf de Beaubassin et Blaise Lagoanere. Tous trois au nombre des héritiers de Michel Daccarrette, ils s’étaient associés en partie pour acquérir les biens de ce dernier et administrer ses affaires. Grâce à un arrangement définitif, en 1754, les associés prirent en main les marchandises, les biens personnels et les navires de Daccarrette ; les autres héritiers reçurent les immeubles et terrains, à l’exception des postes de pêche acquis à la pointe de Rochefort et à La Baleine, que les associés retinrent pendant encore une année. Au bout de trois ans, les biens immobiliers devaient retomber dans un fonds commun. Les associés s’étaient préalablement entendus avec Jeanne de Picot, veuve de Léon Brethous, principal créancier de la succession de Daccarrette, ce qui leur aurait permis de faire d’autres réclamations contre la succession, mais ils semblent n’avoir jamais exercé ce droit.

Pendant qu’ils assuraient leurs intérêts dans la succession de Daccarrette, les associés montèrent une entreprise de pêche et d’expédition maritime et trafiquèrent avec la France, Saint-Domingue (île d’Haïti) et Québec. Au début des années 1750, avec Antoine Rodrigue, ils exploitèrent, mal à ce qu’il semble, le contrat de fourniture des viandes destinées à la forteresse de Louisbourg, se brouillant finalement avec Rodrigue au sujet du partage des dépenses. En 1753, ils soumissionnèrent sans succès les travaux de fortification de Louisbourg. Au milieu des années 1750, l’association paraît avoir été dirigée par Dupleix Silvain et Leneuf de Beaubassin ; mort avant 1754, Lagoanere avait été remplacé par ses enfants, dont aucun n’eut de rôle marquant dans l’entreprise.

Malgré les difficultés du début, la compagnie prospéra, à en juger par ce que les associés prétendirent avoir abandonné lors de la chute de Louisbourg, en 1758 : une part dans les biens de Daccarrette sis tant à l’intérieur que près de la ville et trois autres postes de pêche acquis à la pointe de Rochefort et à La Baleine. En 1753, lors de son mariage à Geneviève Benoist, nièce d’Antoine Rodrigue, Dupleix Silvain avait évalué sa part dans l’entreprise à plus de 20 000# ; en 1758, il l’évaluait à 71 000# sur un total de 215 000#. La compagnie, disait-on, avait gagné 150 000# au cours de son existence et, en janvier 1757, Leneuf de Beaubassin affirmait que l’exploitation des pêcheries de l’entreprise était la base du commerce de la colonie.

Les associés, toutefois, avaient connu des difficultés avant 1758. Ils avaient consenti des crédits à des expéditions de pêche qui avaient fait faillite et ils eurent du mal avec leurs créanciers français. De 1755 à 1758, ils avaient perdu au moins sept navires, de même que l’argent représentant leur part dans un navire armé en course, des cargaisons embarquées sur d’autres navires que les leurs et huit chaloupes de pêche à La Petite Brader (Little Bras d’Or, Nouvelle-Écosse). À leur arrivée en France, après la capitulation de 1758, les associés (Dupleix Silvain, Leneuf de Beaubassin et les héritiers Lagoanere) assumèrent à parts égales la responsabilité de leurs dettes et convinrent de payer à leurs créanciers 50 p. cent de leur dû, soit 43 000#. Pour s’acquitter de sa quote-part, Dupleix Silvain s’embarqua en 1763 pour les îles Saint-Pierre et Miquelon, où il monta une entreprise de pêche. En 1778, il avait recouvré une partie de sa fortune : il possédait trois habitations de pêche, cinq goélettes et deux chaloupes, et, chaque année, il employait de 80 à 100 hommes. Il était retourné en France pour un court laps de temps, en 1769, en vue de tenter un nouvel arrangement avec ses créanciers, ses associés, décédés insolvables, n’ayant pas éteint leurs dettes.

Déporté de Saint-Pierre en 1778, Dupleix Silvain repartit de France pour les îles en 1783 avec une pension de 150# et un poste de juge de la juridiction et de lieutenant (par commission) de l’Amirauté. Ses affaires semblent avoir été en bon ordre, malgré quelques réclamations ultérieures de ses créanciers relatives à l’époque où il était à Louisbourg. Ses fonctions lui valaient 6 000# par année, et peut-être a-t-il, pendant un certain temps, fait des affaires sous le nom de ses enfants. En 1787, il avait remboursé 10 500# des anciennes dettes de la compagnie.

De 1789 à la prise des îles Saint-Pierre et Miquelon par les Britanniques en 1793, Dupleix Silvain se trouva, malgré lui, mêlé aux luttes de factions qui mirent aux prises les autorités militaires avec quelques négociants des îles, agitation qui fut assimilée aux grandes luttes révolutionnaires dans la métropole. Fait prisonnier par les Britanniques pour la quatrième fois en 1793 et gardé en captivité pendant 28 mois, il refit surface à nouveau à Saint-Malo en février 1796 et se vit accorder une petite pension. On sait que son fils aîné faisait des affaires à Bayonne en 1802.

T. J. A. Le Goff

AN, Col., B, 110, f.3 ; 117, f.192v. ; 174, f.271v. ; 181, ff.360v., 403 ;183, f.156 ; C12, 2, f.147 ; 3, f.81 ; 8, ff.9, 42 ; 14, f.49 ; 16, ff.16, 40 ; 17, ff.18–18v., 20, 30 ; E, 159 (dossier Dupleix Silvain) ; 356 (dossier Rodrigue) ; Section Outre-mer, G1, 414 ; 415 ; 467, pièces 21, 24, 28–30 ; G3, 479 (extrait du registre des baptêmes, mariages et sépultures de l’église de La Baleine) ; 2 042, 19 déc. 1753 ; 2 044, 16 déc. 1755 ; 2 047/1, 16 oct. 1749 ; 2 047/2, 16 déc. 1752, 24 févr. 1753.— J.-Y. Ribault, Les îles Saint-Pierre et Miquelon des origines à 1814 (Saint-Pierre, 1962), 95, 98–109 ; La pêche et le commerce de la morue aux îles Saint-Pierre et Miquelon de 1763 à 1793, Congrès national des soc. savantes, Section d’hist. moderne et contemporaine, Actes du quatre-vingt-onzième congrès, Rennes, 1966 (3 vol., Paris, 1969), I : 251–292 ; La population des îles Saint-Pierre et Miquelon de 1763 à 1793, Revue française d’hist. d’outre-mer (Paris), LIII (1966) : 45.

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T. J. A. Le Goff, « DUPLEIX SILVAIN (Sylvain), JEAN-BAPTISTE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/dupleix_silvain_jean_baptiste_4F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
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