DES VŒUX, sir GEORGE WILLIAM, gouverneur de Terre-Neuve, né le 22 septembre 1834 à Baden-Baden (Allemagne), fils du révérend Henry Des Vœux et de Fanny Elizabeth Hutton ; le 24 juillet 1875, il épousa à Londres Marion Denison Pender, et ils eurent sept enfants, parmi lesquels deux garçons et deux filles parvinrent à l’âge adulte ; décédé au même endroit le 15 décembre 1909.

Fils d’un ministre anglican d’ascendance huguenote qui avait de solides relations, William Des Vœux fit ses études à la Charterhouse de Londres et au Balliol College d’Oxford. Lorsqu’il fut dans sa troisième année d’université, son père le plaça abruptement devant l’alternative suivante : continuer jusqu’à l’obtention de son diplôme et devenir ministre du culte, ou aller tout de suite chercher fortune dans les colonies. Déjà convaincu que toutes les religions étaient « plus ou moins dans l’erreur », Des Vœux immigra au Canada en 1856. Il obtint une licence ès arts à la University of Toronto deux ans plus tard, puis étudia le droit et fut reçu au barreau en 1861. Comme il n’aimait pas l’aspect routinier du travail juridique, il s’arrangea en 1863 pour trouver, grâce à un ami, un poste de magistrat rémunéré en Guyane britannique (Guyana). Ainsi commença sa carrière d’administrateur colonial, qui allait durer 30 ans.

Les six années que Des Vœux passa en Guyane britannique affectèrent sa santé en permanence. Il se trouva de plus mêlé à une série de disputes avec les planteurs et le gouverneur. Aussi fut-il heureux d’être nommé, en 1869, administrateur et secrétaire de la colonie de Sainte-Lucie. Il resta attaché au gouvernement de cette île jusqu’en 1880, même s’il fut gouverneur provisoire de Trinidad en 1877–1878 et des îles Fidji en 1878–1879. Il accepta le poste de gouverneur des Bahamas en 1880 mais ne s’y rendit jamais. Il retourna plutôt aux Fidji, où il fut gouverneur six ans et reçut le titre de chevalier en 1883. À Londres, au début de 1886, il apprit que le poste de gouverneur de Terre-Neuve était vacant. Comme il tenait à quitter les tropiques, il se résigna à subir une baisse de traitement et posa sa candidature, qui fut acceptée.

La nomination de Des Vœux ne fit pas l’unanimité. La vacance avait été causée par la mort de sir John Hawley Glover*, l’année précédente, et le ministère des Colonies avait d’abord décidé de le remplacer par sir Ambrose Shea, homme politique terreneuvien qui avait manifesté de bonnes qualités de diplomate. De nombreux personnages influents de la colonie, dont le premier ministre, Robert Thorburn, s’étaient dressés contre ce choix. Devant leurs objections, le ministère des Colonies avait écarté toutes les candidatures locales et nommé Des Vœux. Lorsque le nouveau gouverneur débarqua à St John’s, en avril, la population, déçue que Shea ait été évincé, l’accueillit très froidement.

Des Vœux arrivait dans une période difficile. Les élections de 1885 avaient opposé les groupes confessionnels et soulevé des passions et des ressentiments qui ne s’étaient pas encore éteints. Thorburn dirigeait un gouvernement exclusivement protestant, et l’opposition était entièrement catholique. Athée avoué, Des Vœux se donna pour mission de raccommoder la situation. Chaque dimanche, il allait dans une église différente – l’historien Daniel Woodley Prowse* nota plus tard que son « air imposant et rébarbatif » ne plaisait pas et que bien des fidèles étaient offensés. Il usa de son influence et de ses bons offices pour faciliter la fusion du gouvernement et des partis d’opposition à l’été de 1886. En outre, il encouragea Shea et Thorburn à tempérer leur hostilité mutuelle et, si l’on en croit son propre témoignage, il noua des relations amicales avec la hiérarchie catholique aussi bien qu’anglicane.

Des Vœux eut moins de succès lorsqu’il tenta de convaincre le gouvernement d’accepter le projet d’accord anglo-français qui aurait autorisé la flotte de grande pêche française à se procurer de l’appât sur la côte sud de la colonie. Le gouvernement parlait au nom des marchands, qui étaient vigoureusement francophobes et insistaient pour que Terre-Neuve interdise la vente d’appât à la flotte française en guise de représailles pour l’envahissement, par la France, de leurs domaines traditionnels, à savoir les marchés de poisson salé de l’Europe méridionale. En discutant de cette question avec le cabinet, Des Vœux acquit la conviction que la colonie avait de fort bonnes raisons de demander l’autorisation d’appliquer une loi qui régirait la vente d’appât. Il défendit vigoureusement la position du cabinet devant le ministère des Colonies, et ses dépêches eurent probablement quelque influence sur le gouvernement impérial, qui, en 1887, permit la présentation du projet de loi sur la vente d’appât, malgré la crainte justifiée de la réaction de la France.

Ces interventions rendirent Des Vœux passablement populaire à St John’s, et, bien qu’il ait trouvé la colonie plutôt primitive, il s’y plaisait car il était en meilleure santé et pouvait s’adonner à la pêche. Il hésita donc lorsqu’on lui offrit le poste de gouverneur de Hong-Kong, au printemps de 1887, mais comme il s’agissait d’une promotion et d’une hausse notable de traitement, il accepta. Sa santé le força à prendre un congé en 1890 et à démissionner l’année suivante, ce qu’il fit à contrecœur devant l’insuffisance de sa pension et l’absence de reconnaissance officielle pour sa longue carrière. Le titre de chevalier commandeur de l’ordre du Bain lui avait été refusé en 1890 – ses états de service ne présentant « rien d’exceptionnellement bon », notait le secrétaire d’État aux Colonies, lord Knutsford – mais il eut la consolation de recevoir la grand-croix de l’ordre de Saint-Michel et Saint-Georges trois ans plus tard. Même si sa santé s’était de nouveau améliorée, il demeura à la retraite jusqu’à sa mort, en 1909 ; il eut donc tout le loisir de rédiger ses mémoires dans le détail.

Sir George William Des Vœux ne craignit jamais de dire ce qu’il pensait ni de manifester son indépendance, et malgré des circonstances difficiles, il se révéla l’un des meilleurs gouverneurs de Terre-Neuve. Lorsqu’il quitta St John’s, sir Robert Herbert, du ministère des Colonies, écrivit qu’« il a[vait] remarquablement réussi à gagner la confiance et les bonnes grâces des ministres et de la population ».

James K. Hiller

Ce récit de la vie et de la carrière de Des Vœux s’inspire dans une large mesure de son autobiographie, My colonial service in British Guiana, St. Lucia, Trinidad, Fiji, Australia, Newfoundland, and Hong Kong, with interludes (2 vol., Londres, 1903).  [j. k. h.]

PRO, CO 194/209–210.— Arch. privées, R. E. P. Cecil, 6e marquis de Salisbury (Hatfield, Angleterre), papiers de R. A. T. Gascoyne-Cecil, 3e marquis de Salisbury, Knutsford à Salisbury, 22 avril 1890.— DNB.— Hiller, « Hist. of Nfld ».— D. W. Prowse, « My colonial service by Sir G. William DesVœux [...] », Nfld Quarterly, 3 (1903–1904), no 2 : 11–12.— T.-N., House of Assembly, Journal, 1887, app. : 677–681, 689–699.

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James K. Hiller, « DES VŒUX, sir GEORGE WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/des_voeux_george_william_13F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
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