DE MILLE, JAMES (sa famille orthographiait DeMill, mais il signa ses ouvrages De Mille et utilisa cette orthographe à partir de 1865), écrivain et professeur, né à Saint-Jean, N.-B., probablement le 23 août 1833, troisième enfant des loyalistes Nathan Smith DeMill et Elizabeth Budd, décédé à Halifax le 28 janvier 1880 à l’âge de 47 ans.

Nathan DeMill était un commerçant prospère, un armateur et un marchand de bois de Saint-Jean, N.-B. C’était un homme aux principes fermes ; comme il s’abstenait de toute boisson alcoolique, ses contemporains l’avaient surnommé « DeMill, le buveur d’eau ». Il quitta l’Église d’Angleterre pour adhérer à la doctrine baptiste et fut un membre actif du conseil d’administration d’Acadia College, qui avait reçu sa charte en 1841. James De Mille et ses frères commencèrent leurs études à Horton Academy, à Wolfville, et les terminèrent à Acadia College. Leur vie de pensionnat, réelle ou imaginaire, est racontée dans une excellente série de livres pour garçons : The « B.O.W.C. » Series. Le récit, qui se déroule au bassin des Mines et aux alentours, tout en décrivant de grands événements survenus dans les provinces maritimes, comme l’incendie de Miramichi, raconte les ave ratures des « Frères de la Croix blanche ». La série fut publiée entre 1869 et 1873.

James reçut son diplôme d’Acadia College en 1849. L’année suivante, lui et son frère aîné, Elisha Budd DeMill, entreprirent un voyage d’un an. Ils se rendirent à Boston par mer, puis remontèrent à Québec par voie terrestre et là s’embarquèrent pour l’Angleterre sur l’un des bateaux de leur père. Ils parcoururent l’Angleterre et l’Écosse à pied, traversèrent en France, puis séjournèrent plusieurs mois en Italie. Cette année de voyage marqua profondément James-la plupart de ses nombreux romans reflètent une connaissance de lieux, de peuples et de langues autres que les siens – et il conserva toute sa vie un grand amour de l’Italie.

À son retour en Amérique du Nord, il poursuivit ses études à Brown University, à Providence dans le Rhode Island, où il obtint une maîtrise ès arts en 1854. Vinrent ensuite quelques années fertiles en événements mais remplies de déceptions. Il se rendit à Cincinnati pour liquider une entreprise minière établie un peu à la légère, dans laquelle Acadia College avait placé de l’argent ; en 1856, en compagnie d’un associé, il fonda à Saint-Jean une librairie qui fit faillite et laissa beaucoup de dettes. Enfin, son père subit également des revers de fortune.

James De Mille épousa en 1859 Elizabeth Ann Pryor, fille de John Pryor*, premier président d’Acadia College. Il fut nommé professeur d’études classiques à Acadia College en 1860 et commença ainsi une remarquable carrière comme professeur au cours de laquelle il devint un érudit. C’est lui qui institua le programme d’études classiques spécialisées et on a dit qu’il encourageait ses étudiants à employer le latin dans la conversation courante. Il enseignait aussi l’italien aux étudiants qui voulaient l’apprendre. Le premier de ses ouvrages, Martyrs of the Catacombs, écrit en 1858 et dont l’action se passe dans la Rome du Ier siècle, parut en 1864.

En 1865, De Mille alla s’installer à Halifax où il devint professeur d’histoire et de rhétorique à Dalhousie College après avoir refusé, la même année, le poste de surintendant de l’Instruction publique de la Nouvelle-Écosse. Quand il fut installé à Halifax, il revint à l’Église d’Angleterre, à laquelle son père avait tout d’abord appartenu, et il publia une brochure sur l’histoire des débuts de cette Église. Il passa le reste de sa vie à Halifax où sa réputation de professeur ne fit que grandir et où il fit paraître en moyenne deux livres par année. Il est évident que c’est par nécessité qu’il écrivait. Il y était sans doute contraint par les dettes qu’il avait contractées quand il était dans les affaires. À la même époque, il écrivit aussi The elements of rhetoric (1878), un manuel bien composé et présenté avec goût.

Avant d’être édités sous forme de volumes par Harper, Appleton et d’autres éditeurs de New York ou de Boston, les romans de James De Mille parurent en feuilletons dans des revues américaines. La majorité de ces romans montrent que l’auteur travaillait à la hâte et cherchait à satisfaire les lecteurs de romans populaires, avides de mystères et de grandes aventures. Une de ses premières œuvres, Helena’s household, qu’il avait eu le temps d’écrire avec soin, suscita beaucoup d’admiration car on considérait qu’elle donnait une image exacte de la vie familiale dans l’antiquité romaine. Dans presque tous ses romans, De Mille manie agréablement l’humour et la parodie ; il observe avec justesse les travers particuliers et les caractéristiques nationales de chaque peuple. Son conte amusant, The Dodge Club, publié en 1869, et précurseur en quelque sorte de Innocents abroad de Mark Twain, est une splendide caricature des voyageurs américains (auxquels le titre fait allusion) aux prises avec des situations typiquement européennes ; il y a, notamment, une scène magnifique dans laquelle un sénateur fait la cour à une comtesse en lui disant une poésie d’Isaac Watt. Sa seconde série de livres pour garçons, The young Dodge Club, exploita également la même veine. Dans Lady of the ice, il s’amuse tout autant des travers des jeunes officiers en garnison à Québec. Une œuvre posthume, A strange manuscript found in a copper cylinder, publiée sous le couvert de l’anonymat et probablement inachevée, a connu un grand succès comme satire à la manière de Swift. Et un long poème mystique intitulé Behind the veil, édité par Archibald MacMechan*, parut en 1893.

James De Mille devait être un homme charmant extrêmement intelligent, doué de talents artistiques et littéraires de premier ordre. L’anecdote voulant qu’au cours de ses excursions de pêche en compagnie d’un autre professeur de Dalhousie College, le latin ait été de rigueur parce qu’il considérait que c’était là la seule langue qui pouvait ne pas « profaner les mystères » de la pêche, illustre bien le genre de souvenir que l’on se rappelait à son sujet parmi ses étudiants et ses amis. Les intérêts de De Mille étaient variés : pour ses quatre enfants, il fit une traduction de l’œuvre d’Homère, qu’il illustra de façon charmante ; il possédait des livres écrits dans une douzaine de langues, allant du sanscrit à l’islandais ; il se montrait très inquiet de l’avenir de l’enseignement universitaire dans sa province.

De Mille a généralement été trop oublié. Pendant sa vie, il fut un des rares écrivains canadiens qui atteignirent la notoriété, mais de nos jours, il est peut-être surtout connu grâce à son poème Sweet maiden of Passamaquoddy, qui parut d’abord dans le roman feuilleton Minnehaha Mines et qui a été depuis inclus dans plusieurs anthologies. Bien que la plupart de ses écrits offrent peu d’intérêt, sauf comme illustrations des récits d’aventures du xixe siècle, quelques-uns, comme The Dodge Club, méritent d’être réimprimés et lus. Ses livres pour garçons feraient encore les délices des jeunes lecteurs.

Minerva Tracy

Plusieurs auteurs diffèrent d’opinion sur la date de naissance de James De Mille. On dit généralement qu’il naquit en 1836, mais alors il eut été trop jeune pour entrer à Acadia College en 1849, cette institution exigeant 15 ans comme âge minimum. Par ailleurs, l’année 1833 est gravée sur sa pierre tombale et Archibald MacMechan, qui connaissait la famille De Mille, mentionne la même. Voilà pourquoi nous avons choisi l’année 1833.  [m. t.]

Parmi les œuvres de James De Mille, citons : The « B.O.W.C. » : a book for boys (Boston, 1869) ; Behind the veil, a poem (Halifax, 1893) ; The boys of Grand Pré School (Boston, 1871) ; A comedy of terrors (Boston, 1872) ; The Dodge Club ; or, Italy in 1859 (New York, 1869) ; The early English Church (Halifax, 1877) ; The elements of rhetoric (New York, 1878) ; The lady of the ice (New York, 1870) ; Minnehaha Mines, The dominion : true humorist (Saint-Jean, N.-B.), 16 avril 1870 ; An open question, a novel (New York, 1873) ; A strange manuscript found in a copper cylinder (New York, 1889 ; Toronto, 1910) ; Professor De Mille’s inaugural address, Dalhousie Gazette (Halifax) 15 nov. 1873.

Dalhousie University Library (Halifax), Special Collections, James De Mille, Family correspondence and business papers, 1856–1880 ; Journal of Elisha B. De Mille, 1850–1851 ; Notebook of James De Mille when attending Brown University ; Manuscripts of several of James De Mille’s works.— Catalogue of the officers and students of Acadia College, Nova Scotia (Halifax), 1861–1862, 3s., 9, 20 ; 1863–1864, 11.— L. J. Burpee, Who’s who in Canadian literature, James De Mille, Canadian Bookman (Toronto), VIII (1926) : 203–206.— R. W. Douglas, James De Mille, Canadian Bookman, IV (1922) : 39–44.— A. M. MacMechan, De Mille, the man and the writer, Canadian Magazine (Toronto), XXVII (1906) : 404–416.— George Patterson, More studies in Nova Scotian history (Halifax, 1941), 120–148.

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Minerva Tracy, « DE MILLE, JAMES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/de_mille_james_10F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
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