DAVID, ELEAZAR (Eleazer) DAVID, officier de cavalerie, avocat et fonctionnaire, né le 8 juin 1811 à Montréal, fils aîné de Samuel David, marchand en vue de cette ville, et de Sarah Hart, fille d’Aaron Hart*, de Trois-Rivières, décédé le 1er février 1887 à Coaticook, Québec.
Issu de parents appartenant à deux des familles juives les plus éminentes du Bas-Canada, Eleazar David David fit des études de droit et fut inscrit au barreau en 1832. Il exerça à Montreal et devint conseiller juridique de la synagogue Spanish and Portuguese. À partir des années 1820, il servit dans la Royal Montreal Cavalry et, lorsque la rébellion éclata en 1837, il était capitaine en premier. Son plus jeune frère, Moses Samuel David, servit sous ses ordres comme cornette et comme adjudant, alors qu’un autre frère, le docteur Aaron Hart David, futur doyen de la faculté de médecine du Bishop’s College, fut aide-médecin des Montreal Rifles.
À la bataille de Saint-Charles-sur-Richelieu, David commandait 20 cavaliers qui jouaient le rôle de porteurs de dépêches et de patrouilleurs. Sa maîtrise du français et de l’anglais et son ingéniosité firent de lui un précieux collaborateur des autorités militaires. Son cheval fut tué sous lui, et les services de David furent cités dans des dépêches de sir John Colborne* qui le promut au rang de major peu de temps après la bataille. À la bataille de Saint-Eustache, le 14 décembre, David prit le commandement de 95 cavaliers de la Royal Montreal Cavalry et des Queen’s Light Dragoons nouvellement mis sur pied.
Après la rébellion, David se remit à exercer le droit et poursuivit son ascension dans l’establishment militaire provincial. En octobre 1839, on le nomma sous-adjudant général auxiliaire. Cependant, en mai 1840, il perdit sa réputation au point de vue social, professionnel et militaire en s’enfuyant avec Eliza Locke Walker, épouse de Henry William Harris, capitaine du 24e régiment de l’armée britannique. David et Mme Harris avaient noué une liaison au début de 1838 et, lorsqu’ils s’enfuirent aux États-Unis, ils emmenèrent avec eux le bébé de celle-ci, âgé d’un mois ; plus tard, David reconnut l’enfant. Puis suivirent dix ans d’exil aux États-Unis, en France, en Italie et aux Antilles.
David revint à Montréal en 1850 avec Eliza, qui était devenue sa femme après la mort de Harris en 1849, et leurs cinq enfants. On l’accueillit comme un fils prodigue. Il reprit son rang de major de la Royal Montreal Cavalry, la pratique du droit et son poste de conseiller juridique à la synagogue. Pendant un certain temps, il exerça en association avec le futur juge Thomas Kennedy Ramsay, mais ils se querellèrent, probablement au sujet des arrangements financiers de leur association, et se séparèrent après un procès. De 1858 à 1863, David fut greffier et trésorier de la Maison de la Trinité à Montréal. Promu lieutenant-colonel de la Royal Montreal Cavalry en 1860, il fut nommé adjudant général adjoint de la cavalerie en 1866, en dépit d’une accusation portée par les cavaliers selon laquelle il les avait tournés en ridicule en leur donnant des ordres erronés pendant un exercice. Cette accusation s’avéra par la suite malveillante et sans fondement.
David avait toujours été dépensier et négligent quant aux questions d’argent et, dans les années 1860, il était sans le sou. Sa fortune personnelle avait été vraisemblablement dilapidée au cours des dix années passées à l’étranger, et il semble qu’à son retour à Montréal il subit de fortes contraintes financières occasionnées par plusieurs poursuites judiciaires intentées contre lui pour non-paiement de billets à ordre. Ses difficultés atteignirent leur point culminant en 1873, année où il fut reconnu coupable d’avoir détourné des fonds du Montreal Decayed Pilots Fund, sorte de caisse de retraite pour les pilotes. Cette caisse lui avait été confiée à l’époque où il était trésorier de la Maison de la Trinité. Il fut condamné à deux ans de prison, ce qui poussa sa cousine, Fanny David, fille d’Abraham Joseph, à dire de lui sur un ton amer qu’il était « un sujet d’irritation pour [sa] famille ». À sa libération, survenue vers 1876, il se retira avec sa famille à Coaticook où il vécut jusqu’à sa mort. Des 11 enfants nés de son union avec Eliza, quatre filles seulement lui survécurent. Son épouse mourut à Coaticook en 1896.
La conduite de David pendant la rébellion lui permit de passer à l’histoire comme un officier distingué. La réputation que lui valurent sa fuite avec l’épouse d’un autre homme et son implication dans une fraude le mit à deux reprises au ban de la société montréalaise. Cependant, l’affection, la fidélité et le respect soutenu accordés à David pendant sa longue vie témoignent d’un homme à qui on a beaucoup pardonné, dont on attendait beaucoup et dont on a beaucoup reçu.
APC, MG 24, 161 ; RG 8, I (C ser.), 749 : 40 ; 1 272 : 180 ; RG 9, I, C4, 12 ; C7, 1 ; C8, 6.— Musée McCord (Montréal), Hale family papers ; Military papers, Misc. no 2, M5 728.— Spanish and Portuguese Synagogue (Montréal), Minutes of the meetings of trustees, 1832–1873.— « Items relating to congregation Shearith Israel, New York », American Jewish Hist. Soc., Pubs. (Baltimore, Md.), 27 (1920) : 76.— Gazette, 24 oct. 1839, 19 mai 1840, 3 févr. 1877, 1er août 1896.— J.-J. Beauchamp, Répertoire général de jurisprudence canadienne [...] (4 vol., Montréal, 1914–1915), I : 675.— Collection des décisions du Bas-Canada (35 vol., Montréal, 1857–1891), VI : 295.— Michel Mathieu, Rapports judiciaires révisés de la province de Québec [...] (28 vol., Montréal, 1891–1903), XXIII : 279s.— Montreal directory, 1856–1862.— The Jew in Canada : a complete record of Canadian Jewry from the days of the French régime to the present time, A. D. Hart, édit. (Toronto et Montréal, 1926), 503.— Sack, Hist. of the Jews in Canada (1945), 123, 138.— Un Israélite du Canada [ ], « Les Israélites au Canada », Arch. israélites de France (Paris), 3 (1842) : 295s.
Elinor Kyte Senior, « DAVID, ELEAZAR (Eleazer) DAVID », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/david_eleazar_david_11F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
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