CUILLERIER, MARIE-ANNE-VÉRONIQUE, religieuse hospitalière de Saint-Joseph, annaliste, née à Montréal le 13 novembre 1680, fille de René Cuillerier* et de Marie Lucault, décédée à Montréal le 21 janvier 1751.

Marie-Anne-Véronique Cuillerier entra chez les religieuses hospitalières de Saint-Joseph de Montréal en 1694 et elle fit profession en 1696. Elle remplit, de 1725 à 1747, l’office de secrétaire, poste qui lui permit d’être en relation avec les maisons françaises et qui lui valut de continuer les annales de sœur Marie Morin*. Ses lettres et ses annales constituent des documents de grande qualité. Sœur Cuillerier, par le choix de certains détails, par ses commentaires pathétiques, par ses explications des événements, donne une information de première main sur les difficultés quotidiennes de la vie en Nouvelle-France ainsi que sur la mentalité religieuse des habitants du pays, face aux événements.

C’est dans une grande perspective biblique que sœur Cuillerier, remémorant l’événement, place l’attaque de la ville de Québec par sir William Phips* en 1690 : « Comme josué a été le seul qui ai vu le cours du soleil arêté en sa faveur, de même le paüs peut dire êstre le seul qui ay vu le cours ordinaire du flux et reflux de la Mer s’aretter vingt quatre heur pour empêcher les ennemis daprocher de Québec avant que le cecours qui lui venait de Monrealle fut arrivé. »

Parlant du tremblement de terre de 1732, elle écrit : « Ce fut le 16 septembre à onze heure et card que la première secousse se fit entendre et sentir : elle abaty dabor 567 cheminée fendy presque tout les mures des maisons [...] rien de plus terrible que de voir les cloche et les maisons fléchir comme des rausau et branler aussy fort que sy its avaient étez de charte [...] Les prières publique ne fléchirent la miséricorde du Seigneur qui c’est contanté de tenir tout son peuple en alarmes pendant plus de neuf mois. Les brouissements s’estant toujours fait entandre pandans ce long espace de temps les dames firent vœux de laisser les panier et les vanité mais il y en eu quelqu’un qui suivant la légerreté naturelle au sexe nentendans plus que de petits tremblement se crurent en suretez et reprirent leurs ajustement Dieu san vangea et en fit entandre un semblable au premier la nuit du 25 doctobre au 26. »

Attentive aux détails réalistes et pittoresques, sœur Cuillerier sait rendre tragiques des événements qui sont peu connus. Par exemple, en 1746, elle parle d’une « nué de chenilles envoyé par la justice du Seigneur ou par quelques malices comme le disent les habitans de québec de mauvais chrétien ». Quand « ces malheureuses bêtes moururent il y en avait un demit pieds dans les campagnes et la mousse quelles avait faites pendant quelles avaient mangé était si affreuse que Ion enfonçait dedans jusqua demit jambes [...] cela ne les empêchait pas d’antrer dans les maisons et de se mettre sur les enfants qu’il mangeait on fut obligée de faire des échafaux pour sauver ses petits inocents. elles allaient comme des affamée trouver le monde dans leurs lits ».

On comprend, au récit de ces malheurs et de bien d’autres, tels que les épidémies, les incendies, que sœur Cuillerier écrive : « Je puisserois mes cher Sr toutes les exprestions sy je voulois vous dire la vive douleur ou nous nous trouvames nous néstions plus a nous et nos larmes arosois jour et nuit notre pain et nos lits ». Elle ajoute avec une pointe d’humour : « Pour comble de bonheur la récolte a manqué et presque tout le monde manque de pain nous sommes obligés de manger du blé d’inde deux fois le jour. »

En 1747, sœur Cuillerier est remplacée à son poste de secrétaire par sœur Catherine Porlier. L’histoire de la communauté ne nous renseigne pas sur les dernières années de sa vie ni sur sa mort survenue le 21 janvier 1751.

Hélène Bernier

AHSJ, Annales de sœur Marie Morin, 1697–1725 ; Annales de sœur Véronique Cuillerier, 1725–1747 ; Déclarations de nos anciennes Mères pour constater la profession religieuse et le décès de nos sœurs.— Archives des religieuses hospitalières de Saint-Joseph (La Flèche, France), Lettres de sœur Véronique Cuillerier.— Mondoux, LHôtel-Dieu de Montréal.

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Hélène Bernier, « CUILLERIER, MARIE-ANNE-VÉRONIQUE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/cuillerier_marie_anne_veronique_3F.html.

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Auteur de l'article:    Hélène Bernier
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
Date de consultation:    28 novembre 2024