CROFTON, FRANCIS BLAKE, bibliothécaire et auteur, né le 17 juillet 1842 à Crossboyne (république d’Irlande), dernier fils du révérend William Crofton et de Melesina (Milinises) Woodward ; le 12 décembre 1872, il épousa à Québec Emma Catherine Bradshaw, et ils eurent deux fils et deux filles ; décédé le 23 octobre 1911 dans le district de Southsea à Portsmouth, Angleterre.

Francis Blake Crofton fit ses études à la Royal School de Dungannon (Irlande du Nord), puis, grâce à une bourse royale, il entra au Trinity College de Dublin, où il obtint en 1863 un diplôme avec spécialisation en anglais et en humanités. Arrivé au Canada l’année suivante, il fut durant un an professeur suppléant d’humanités au Bishop’s College de Lennoxville, dans le Bas-Canada. Ensuite, il s’installa à New York, où il collabora pendant dix ans à des périodiques et journaux américains, dont le Round Table, le St. Nicholas et la National Quarterly Review, ainsi qu’à l’Union Jack de Londres et à la Canadian Monthly and National Review de Toronto. Il donnait aussi des leçons à des fils de familles riches pour les préparer à l’université.

En 1875, Crofton sollicita le poste de maître d’anglais à l’école normale provinciale de Truro, en Nouvelle-Écosse. Sa candidature fut refusée, mais il se fixa quand même à Truro vers 1877. Quand l’Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse annonça qu’elle cherchait un bibliothécaire, en 1882, il se présenta avec 13 autres candidats. « Aucun [des 14] n’avait d’expérience pratique. » On le choisit, mais, en raison de son inexpérience, on le nomma, le 3 janvier 1883, gardien de la bibliothèque, en lui disant que sa nomination au poste de bibliothécaire serait confirmée un an plus tard. Effectivement, elle le fut le 3 janvier 1884.

Crofton était en poste depuis un an à peine lorsque, après avoir reçu une lettre de son prédécesseur, John Thomas Bulmer*, un journal local publia une nouvelle embarrassante. Des journaux de valeur, dont la Nova Scotia Historical Society avait confié la garde à la bibliothèque de l’Assemblée, avaient servi à emballer du poisson et de la viande au marché. Crofton avait chargé le messager de la bibliothèque, W. Coleman, de se débarrasser de certains exemplaires que la bibliothèque avait en double en les vendant à des fournisseurs et à des barbiers. Cependant, il ignorait que Coleman avait chapardé dans la collection permanente pour se faire de l’argent. On cria à la « spoliation de la bibliothèque », on déclara que cette histoire était « trop épouvantable pour être vraie », et l’on réclama la démission de Crofton. Une fois que les commissaires de la bibliothèque eurent examiné soigneusement l’affaire, Crofton fut exonéré de tout blâme et Coleman congédié, mais l’incident continua de susciter la controverse dans la presse pendant quelque temps. Crofton dut finir par rentrer dans les bonnes grâces de la société historique, car son nom figure souvent dans les procès-verbaux. D’ailleurs, il en fut secrétaire d’administration de 1888 à 1902 et y présenta des communications.

Crofton n’avait pas reçu de formation en bibliothéconomie, mais il semblait avoir un sens inné de l’organisation et de l’administration des bibliothèques. Mécontent du catalogue manuscrit que lui avait laissé Bulmer, il entama la création d’un fichier d’auteurs, de matières et de titres. Terminé en 1889, ce nouveau catalogue fut publié deux ans après et mis à jour régulièrement jusqu’à ce que Crofton prenne sa retraite en 1906. Sa correspondance avec ses pairs, notamment R. Edward Gosnell*, bibliothécaire provincial de la Colombie-Britannique, révèle un désir sincère de favoriser la collaboration entre bibliothèques. Crofton fut également l’un des premiers à prôner l’échange systématique de documents gouvernementaux, notamment avec la Library of Congress. Le fait qu’il ait été vice-président de l’International Library Conférence et que cet organisme l’ait invité à présenter une communication à sa deuxième assemblée, tenue à Londres en juillet 1897, atteste que sa réputation dépassait les frontières.

Atteint de névrite, Crofton quitta son poste le 30 septembre 1906 ; l’Assemblée lui avait garanti une pension. Trois ans plus tard, il quitta la Nouvelle-Écosse pour un climat moins rigoureux, celui de Southsea, en Angleterre. Il mourut à cet endroit.

D’après sa correspondance et ses divers écrits, Crofton avait la plume facile et l’esprit de repartie, mais ne supportait pas la médiocrité. Ses publications portaient sur des sujets disparates. On lui doit une étude savante sur Thomas Chandler Haliburton*, Haliburton, the man and the writer [...], parue en 1889 à Windsor, en Nouvelle-Écosse, un recueil de poésie, Sombre tints, publié en 1904 à Halifax, une satire légère, The bewildered querists and other nonsense, parue à New York en 1875, deux récits de voyage et d’aventure publiés à Londres en 1881 sous le titre The major’s big-talk stories, ainsi que Hairbreadth escapes of Major Mendax [...] (Philadelphie, 1889), qui rappelle beaucoup les aventures du baron de Munchausen. Fervent impérialiste, Crofton plaida la cause de la fédération impériale dans des articles de journaux et de revues qui furent rassemblés par la suite en deux opuscules.

Francis Blake Crofton était érudit, avait l’esprit irlandais et venait des « vieux pays ». Ces atouts l’aidèrent à la bibliothèque de l’Assemblée législative, qui prit de l’expansion sous sa direction. Ils lui garantirent aussi l’accès aux cercles littéraires et mondains du Halifax de la fin du xixe siècle. Crofton était membre du Royal Nova Scotia Yacht Squadron et du prestigieux Halifax Club où, dit-on, il jouait au whist de manière exceptionnelle. Lorsqu’il démissionna de son poste en 1906, les commissaires de la bibliothèque firent son éloge ainsi : « Un gentleman [ayant] de l’éducation et de grands talents littéraires qui a exercé ses fonctions avec intelligence, goût et sens de l’histoire. »

Shirley B. Elliott

Les articles de Francis Blake Crofton sur la fédération impériale ont été publiés sous forme d’opuscules sous les titres For closer union : some slight offerings to a great cause (Halifax, 1897) et Is it too late ? [...] (Londres, [1897 ?]) ; ce dernier a paru sous le couvert de l’anonymat avec la mention « by an Irish-Canadian ».

Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, Geneal. Soc. (Salt Lake City, Utah), International geneal. index.— N.-É., Legislative Library (Halifax), Legislative Library, letter-books, 18831906 ; Nova Scotia Library, board of commissioners, minutes, 18831906.— PANS, MG 20, 211 : 197 ; MG 100, 128, no 14.— South Mayo Family Research Soc. (Ballinrobe, république d’Irlande), File information concerning the Crofton family.— Acadian Recorder, 24 oct. 1911.— Morning Chronicle (Halifax), 24 oct. 1911.— Morning Chronicle (Québec), 13 déc. 1872.— Morning Herald (Halifax), 31 janv., 2, 18 févr. 1885.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— Dominion Illustrated (Montréal), 7 (1891) : 95.— Encyclopedia Canadiana, K. H. Pearson et al., édit.([éd. rév.], 10 vol., Toronto, 1975).— N.-É., Legislative Library, Annual report of library commissioners and librarian (Halifax), 18841906.

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Shirley B. Elliott, « CROFTON, FRANCIS BLAKE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/crofton_francis_blake_14F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
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