CLEMO, EBENEZER, auteur, homme d’affaires et inventeur ; né vers 1830, probablement à Londres ; décédé vers 1860, vraisemblablement à Morristown, New Jersey.
Ebenezer Clemo venait sans aucun doute d’Angleterre ; son nom de famille est d’origine cornouaillaise et, dans ses écrits, il mentionne son arrivée au Canada, tout en se qualifiant lui-même de « sujet britannique ». Dans une courte notice biographique, qui constitue la principale source d’information sur Clemo, un de ses contemporains, Henry James Morgan*, indique qu’il était « natif de Londres, en Angleterre, et qu’il vint au Canada en 1858 ». Clemo avait reçu une bonne éducation : il se décrivait comme un chimiste et les romans qu’on lui attribue démontrent quelque familiarité avec les ouvrages de nombreux écrivains britanniques.
Selon Morgan, Clemo était sans le sou à son arrivée au Canada et il chercha du travail « comme messager » auprès de l’éditeur montréalais John Lovell*. Ce dernier, « connaissant son expérience, l’engagea pour écrire une couple de livres sur la vie canadienne ». The life and adventures of Simon Seek ; or Canada in all shapes, paru sous le pseudonyme de Maple Knot, fut publié par Lovell en décembre 1858 et attribué à Clemo par ses contemporains. Histoire de pauvres Londoniens qui immigrent au Canada, Simon Seek reflète probablement les propres expériences de Clemo. La même année, Lovell lança une vigoureuse campagne en vue de la vente du second roman attribué à Clemo, Canadian homes ; or the mystery solved [...]. Lovell l’annonça dans plusieurs journaux, dont la plupart en firent une critique favorable. Traduit par Henri-Émile Chevalier* et publié à Montréal en 1859, le Foyer canadien ou le Mystère dévoilé [...] eut droit lui aussi à une large publicité et à de nombreuses critiques. Dans sa réclame, Lovell prétendit qu’il en avait publié 30 000 exemplaires en anglais et 20 000 en français, à 0,25 $ l’unité, soit la moitié du prix de Simon Seek.
Le Foyer canadien raconte l’histoire d’un autre groupe d’immigrants anglais qui, arrivés à Toronto au milieu de l’hiver, s’aperçoivent qu’il n’y a pas d’emploi en raison de l’absence d’un tarif protectionniste visant à encourager les manufactures canadiennes. Les efforts de Lovell pour promouvoir ce roman soulignaient son importance comme publication. « Imprimé à Montréal à partir de caractères fondus par [...] la Montreal Type Foundry » et sur du papier fabriqué au Bas-Canada, le Foyer canadien était un roman à thèse qui s’inscrivait dans une campagne mise de l’avant par Lovell, William Weir* et d’autres personnes en vue de l’adoption d’un tarif protectionniste qui pourrait sortir le Canada de sa « grande faiblesse commerciale » par « l’établissement et l’encouragement de ses propres manufactures ». En plus de faire la publicité des romans de Clemo, Weir, qui était secrétaire de la Tariff Reform Association établie à Toronto en 1858, s’associa avec lui. À la mi-décembre 1858, Clemo était installé à Toronto et, l’année suivante, la Weir and Clemo, firme de « commissionnaires et de représentants de manufacturiers », avait ses bureaux au 18, rue Wellington Ouest. Compte tenu du fait que Weir, éditeur du Canadian Merchants’ Magazine [...], fit mention dans le numéro de juin 1859 qu’« un écrivain de talent » avait apporté sa contribution à la revue « depuis les tout derniers mois », il se peut que Clemo ait également collaboré à l’entreprise.
Cependant, en janvier 1860, le magazine et l’entreprise avaient fermé leurs portes, et les associés étaient retournés à Montréal. Le 10 janvier, Clemo demandait dans une pétition au gouverneur général sir Edmund Walker Head* des lettres patentes pour « un nouveau procédé de production de Pâte, pour la fabrication de papier et de parchemin, à partir de la paille et d’autres substances végétales » ; Weir certifiait la description de l’« invention ». On accorda le brevet le 27 janvier, et, apparemment, Clemo se rendit de nouveau à Toronto peu après.
Le 18 juin, à New York, Clemo témoigna sous serment qu’il était le « premier inventeur » du « procédé » qu’il avait fait breveter auparavant au Canada. Puis il partit pour Washington où, le lendemain, sa demande de brevet américain était reçue. Le 22 juin, il en amenda la description, sur la requête de l’United States Patent Office, qui délivra un brevet le 10 juillet. Clemo demanda qu’on expédie son courrier aux bons soins de George Brown*, député à l’Assemblée législative de la province du Canada, à Toronto, et il quitta Washington.
Il est impossible de vérifier ce que furent ensuite les activités de Clemo. Puisque Weir obtint le 2 octobre un brevet canadien pour ce qui semble être une amélioration de l’invention de Clemo, ce dernier était probablement décédé à ce moment-là. Morgan indique qu’il mourut en 1860, à l’âge de 30 ans, à Morristown, où il « install[ait] la machinerie pour la fabrication du [...] papier ». Andrew Learmont Spedon, un autre écrivain contemporain, fit aussi mention de la mort du « pauvre [et] infortuné » Clemo, dans son ouvrage Rambles among the Blue-Noses [...], publié en 1863.
Infortuné ou non, Ebenezer Clemo eut des liens avec des « Canadiens célèbres » de son temps. Il inventa un procédé de fabrication du papier qui parut assez prometteur pour être breveté dans deux pays. Bien qu’il soit aujourd’hui oublié comme romancier, Clemo fit deux contributions intéressantes, quoiqu’un peu particulières, à la littérature canadienne de fiction du milieu du xixe siècle. Enfin, dans son exploration des « mystères » comme celui du tarif protectionniste, il souleva des questions et débattit des théories qui sont encore pertinentes à la pensée économique canadienne.
Ebenezer Clemo a écrit, sous le pseudonyme de Maple Knot, The life and adventures of Simon Seek ; or Canada in all shapes (Montréal et Toronto, 1858) et Canadian homes ; or the mystery solved, a Christmas tale (Montréal et Toronto, 1858), traduit par Henri-Émile Chevalier sous le titre de le Foyer canadien ou le Mystère dévoilé, nouvelle du jour de Noël (Montréal et Toronto, 1859).
Canada Patent Office Library (Ottawa), Canada Patent 1045, Ebenezer Clemo, 27 janv. 1860 ; 1148, William Weir, 2 oct. 1860.— National Arch. (Washington), RG 241, Patented application file, no 29059.— Daily British Whig, 14 déc. 1858, 6–17 janv. 1859.— Daily Spectator and Journal of Commerce, 14, 30 déc. 1858.— Montreal Gazette, 29 déc. 1858–4 janv. 1859.— L’Ordre (Montréal), 17 déc. 1858–14 janv. 1859.— Le Pays, 11 déc. 1858–25 janv. 1859.— Quebec Mercury, 4–8 janv. 1859.— Transcript (Montréal), 11–29 déc. 1858.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 2 : 349.— Morgan, Bibliotheca Canadensis, 77 ; Sketches of celebrated Canadians, 766.— Toronto directory, 1859–1860.— A. L. Spedon, Rambles among the Blue-Noses ; or reminiscences of a tour through New Brunswick and Nova Scotia, during the summer of 1862 (Montréal, 1863).— William Weir, Sixty years in Canada (Montréal, 1903).— « A new Canadian novel », Canadian Merchants’ Magazine and Commercial Rev. (Toronto), 3 (avril-déc. 1858) : 476.— M. J. Edwards, « The case of Canadian homes », Littérature canadienne (Vancouver), no 81 (été 1979) : 147–154.— « To our readers », Canadian Merchants’ Magazine and Commercial Rev. (Toronto), 4 (janv.–juin 1859) :400–401.
Mary Jane Edwards, « CLEMO, EBENEZER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/clemo_ebenezer_8F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
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