CHRISTIAN, WASHINGTON, ministre baptiste, né vers 1776, probablement en Virginie ; décédé le 3 juillet 1850 à Toronto.
On possède peu de données sur les premières étapes de la vie de Washington Christian : sa naissance, son ordination au sein de la congrégation baptiste Abyssinian de New York, son œuvre de ministre itinérant en Nouvelle-Angleterre et son installation à York (Toronto) en 1825. Lui-même de race noire, il exerça son ministère dans cette ville auprès d’une petite congrégation de Noirs et de Blancs. Premier pasteur baptiste, semble-t-il, à officier régulièrement dans la capitale haut-canadienne, il eut dès 1827 un lieu de réunion permanent : les locaux de la St George’s Lodge. À compter de 1834, ses fidèles – apparemment tous des Noirs à ce moment – purent se rassembler rue March (rue Lombard), dans une petite église neuve à charpente de bois que l’on appelait la « chapelle des nègres ». Thomas Rolph* écrivait d’ailleurs en 1836 : les « gens de couleur [...] ont [...] une église qui est beaucoup fréquentée ». Un an plus tard, le nombre des fidèles s’élevait à 66, comme l’indique un rapport de Christian à la Haldimand Association, la plus proche organisation baptiste, qui regroupait les congrégations voisines de la baie de Quinte. Dans les années 1820, la majorité de ses ouailles étaient probablement des descendants d’esclaves emmenés au Canada entre 1763 et 1793 ; pour sa part Rolph croyait qu’ils étaient de fait arrivés plus tard, « la plupart après avoir échappé à l’esclavage ». La construction de l’église de la rue March avait coïncidé avec l’afflux de Noirs partis des États-Unis après les désordres qui avaient agité l’Ohio en 1829.
En 1841, Christian érigea une nouvelle église à l’intersection des rues Queen et Victoria. Après un séjour en Jamaïque en 1843–1844, il pouvait annoncer : « grâce à la générosité des baptistes de la Jamaïque, l’église est libre de dettes ». Ce voyage révèle aussi la place qu’occupaient les Antilles dans l’esprit des Noirs haut-canadiens. Le pasteur établit par la suite une école du dimanche, une société de tempérance pour les jeunes et une bibliothèque ; Christian demeura, jusqu’à sa mort en 1850, responsable de la congrégation, qui prit le nom de First Baptist moins d’une décennie plus tard.
Christian se dévouait pour la cause baptiste en général. Membre respecté de la Haldimand Association, il jouait un rôle important dans ses délibérations et prêchait souvent à ses assemblées d’ouverture. À la fin des années 1840, on l’invita aux assemblées de l’Amherstburg Association, dans le sud-ouest de la province, et en 1848 on le nomma membre à vie de cet organisme. De plus, son appartenance à l’American Baptist Missionary Convention, organisation parrainée par la congrégation Abyssinian, lui permettait de conserver des liens avec les États-Unis. Dans le Haut-Canada, il remporta un succès remarquable dans la fondation de congrégations baptistes parmi les communautés noires de la presqu’île du Niagara, en particulier celles de St Catharines (1838) et de Hamilton (1847). En 1847, il fit une grande tournée des établissements noirs situés entre Chatham et Sandwich (Windsor). On ne peut guère douter, comme l’a affirmé l’historienne Dorothy Shadd Shreve, qu’il « fonda plus de congrégations baptistes au Canada que tout autre ministre baptiste de couleur ». Plein d’énergie et de force morale, Christian était un prédicateur émouvant qui faisait courir les foules. Un observateur notait, après l’avoir entendu à Whitby en 1837 : « la vérité qui sortait de sa bouche rejoignait bien des cœurs et remplissait de larmes bien des yeux ».
Washington Christian eut cependant à souffrir des querelles qui divisaient sa congrégation torontoise, car les administrateurs, qui détenaient les titres de propriété, tentaient de s’immiscer dans la conduite des affaires de la congrégation. Selon le révérend William P. Newman, rédacteur en chef du Provincial Freeman and Weekly Advertiser, ils traitèrent « le vieil homme si durement qu’il mourut pratiquement de chagrin ». Assurément, son existence s’acheva dans la pauvreté. On l’inhuma d’abord dans le Potter’s Field, et 12 ans plus tard on transféra son corps au Necropolis, aux côtés de celui de sa femme Ann.
Les informations sur Washington Christian sont rares et souvent non justifiées. Quelques-uns des ouvrages cités plus bas, par exemple, affirment sans preuves qu’il était antillais. Une photographie de Christian est reproduite dans D. G. Hill, The freedom-seekers : blacks in early Canada (Agincourt [Toronto], 1981).
Canadian Baptist Arch., McMaster Divinity College (Hamilton, Ontario), Amherstburg Regular Baptist Assoc., minutes, 1841–1879.— Haldimand Baptist Assoc., Minutes (Cobourg, Ontario, et al.), 1837–1851.— Long Point Baptist Assoc., Minutes (London, Ontario), 1837–1841.— Thomas Rolph, A brief account, together with observations, made during a visit in the West Indies, and a tour through the United States of America, in parts of the years 1832–3 ; together with a statistical account of Upper Canada (Dundas, Ontario, 1836).— Provincial Freeman and Weekly Advertiser (Chatham, Ontario), 24 nov. 1855.— A history of the Amherstburg Regular Missionary Baptist Association ; its auxiliaries and churches [...], Dorothy Shadd Shreve, édit. (Amherstburg, Ontario, 1940).— J. K. Lewis, « Religious life of fugitive slaves and rise of coloured Baptist churches, 1820–1865, in what is now known as Ontario » (thèse de b.d., McMaster Divinity College, 1965).— Robertson’s landmarks of Toronto, 4.— W. J. T. Sheffield, « Background and development of Negro Baptists in Ontario » (thèse de b.d., McMaster Divinity College, 1952).— D. G. Simpson, « Negroes in Ontario from early times to 1870 » (thèse de ph.d., Univ. of Western Ontario, London, 1971).— R. W. Winks, The blacks in Canada : a history (Montréal, 1971).— F. H. Armstrong, « The Toronto directories and the Negro community in the late 1840’s », OH, 61 (1969) : 111–119.— J. K. A. Farrell [O’Farrell], « Schemes for the transplanting of refugee American Negroes from Upper Canada in the 1840’s », OH, 52 (1960) : 245–249.— D. G. Hill, « Negroes in Toronto, 1793–1865 », OH, 55 (1963) : 73–91.— Fred Landon, « The Negro migration to Canada after the passing of the Fugitive Slave Act », Journal of Negro Hist. (Washington), 5 (1920) : 22–36.
En collaboration, « CHRISTIAN, WASHINGTON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/christian_washington_7F.html.
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Année de la publication: | 1988 |
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