ROLPH, THOMAS, chirurgien, auteur et fonctionnaire, né en 1801 ou 1802 à Londres ; il épousa une prénommée Frances ; décédé le 17 février 1858 à Portsmouth, Angleterre.
On ne sait rien des origines familiales et sociales de Thomas Rolph, ni de son éducation. En 1823, il reçut un diplôme d’apothicaire de la Society of Apothecaries de Londres, mais rien ne prouve qu’il ait obtenu d’autres diplômes en médecine. En 1832, il quitta l’Angleterre pour un court voyage dans les Antilles et aux États-Unis avant de se rendre dans le Haut-Canada. Il y arriva à l’été de 1833 et s’installa à Ancaster où il commença à exercer comme chirurgien le 13 août. Entre 1834 et 1837, il acheta et vendit des lopins de terre dans les cantons de Brooke et d’Ancaster. En juillet 1838, il fut nommé chirurgien du 1er régiment de milice de Gore et, en décembre, chirurgien du 6e bataillon provisoire. En mai 1840, le College of Physicians and Surgeons of Upper Canada lui remboursa sa cotisation parce qu’il n’avait « produit aucun diplôme lui permettant d’être élu membre ». Il faut, par conséquent, considérer avec scepticisme le titre de chirurgien de Rolph.
Rolph acquit une certaine réputation comme défenseur de l’aide à l’émigration de la Grande-Bretagne au Canada, selon la théorie préconisée par sir Robert John Wilmot-Horton et par Edward Gibbon Wakefield*. En 1836, il exposa ses idées dans A brief account, together with observations, made during a visit in the West Indies, and a tour through the United States of America, in parts of the years 1832–3 ; together with a statistical account of Upper Canada. Ce livre et d’autres documents indiquent que Rolph voyagea beaucoup dans le Haut-Canada, car il décrit en détail de nombreuses caractéristiques des villes, des villages et des cantons de la province. Il dépeint le Haut-Canada comme un endroit plein d’attraits pour des émigrants britanniques possédant un capital et pour des ouvriers agricoles qui devraient travailler dur et s’attendre à mener une vie difficile.
Rolph commença à promouvoir l’émigration au cours du voyage qu’il fit en Grande-Bretagne avec l’évêque catholique Alexander McDonell*, qui s’intéressait à la question depuis quelques années. Ils partirent en juin 1839 et, en septembre, ils présentèrent à lord John Russell au ministère des Colonies un plan d’émigration systématique sur une grande échelle avec l’aide du gouvernement. Ce dernier rejeta ce plan, comme il le fit pour beaucoup d’autres, en raison des coûts.
Rolph demeura en Grande-Bretagne jusqu’en juillet 1840. Il y voyagea, fit des discours et écrivit en tant qu’organisateur non officiel de l’émigration au Canada. Il participa à la création de sociétés qui, avec des propriétaires fonciers, devaient fournir aux émigrants indigents les moyens d’aller au Canada. En décembre 1839, la Central Agricultural Society of Great Britain and Ireland le nomma membre honoraire et secrétaire correspondant en Amérique du Nord britannique. En février 1840, la Highland and Agricultural Society of Scotland (association de propriétaires fonciers) le nomma membre honoraire de son comité de l’émigration et le North American Colonial Committee le nomma secrétaire honoraire. Il fit partie de la délégation de ce comité qui rencontra Russell afin de demander l’aide du gouvernement concernant l’émigration, aide que Russell refusa d’accorder.
Les journaux canadiens rapportèrent dans leur moindre détail toutes ces actions et firent ainsi de Rolph un personnage de premier plan à son retour en septembre 1840. Il prononça des discours au cours de dîners offerts en son honneur et, par la suite, participa à la mise sur pied de sociétés d’immigration locales. En octobre, on fonda à Toronto un organisme central de coordination, la Canadian Emigration Association, chargé d’accumuler des renseignements sur des terres et des emplois et de les envoyer aux sociétés d’émigration britanniques ou de les mettre à la disposition des immigrants à leur arrivée. L’association délégua Rolph dans les îles Britanniques, à titre de représentant.
L’importance de Rolph impressionna tellement le gouverneur en chef lord Sydenham [Thomson*] qu’il le nomma « agent d’émigration pour les Canadas », en décembre 1840. Rolph séjourna dans les îles Britanniques de janvier à août 1841 et revint au Canada en septembre. En février 1842, le gouverneur sir Charles Bagot* le nomma de nouveau agent d’émigration officiel. Rolph retourna en Grande-Bretagne mais, en juillet, le secrétaire d’État aux Colonies, lord Stanley, critiqua dans une lettre à Bagot les entreprises de Rolph et lui conseilla de mettre fin à son mandat. Il donna comme raison que Rolph avait imprudemment encouragé les émigrants indigents en leur donnant l’espoir qu’ils recevraient une aide gouvernementale. Ni le gouvernement britannique ni le gouvernement canadien n’avaient l’intention d’aider les émigrants sans le sou ; en fait, le Canada voulait qu’on les décourage. Rolph quitta la Grande-Bretagne en août et cessa d’être agent d’émigration au Canada en décembre.
Une autre raison motivait le mécontentement des autorités à l’endroit de Rolph : le rôle qu’il jouait dans la British American Association for Emigration and Colonization depuis 1841. Cette association commerciale projetait d’acheter des terres en Amérique du Nord britannique et d’encourager l’émigration des pauvres selon la théorie de Wakefield. Elle s’effondra au début de 1843, faute d’avoir pu obtenir l’approbation des gouvernements canadien et britannique et d’avoir pu réunir le capital prévu.
Rolph séjourna au Canada de septembre 1841 à mars 1842, puis d’août à novembre 1842. Il prononça des discours sur son travail et justifia son rôle dans la British American Association for Emigration and Colonization. En octobre 1842, l’Assemblée législative adopta la résolution de lui verser £500 pour les services rendus au cours de son emploi sous le gouvernement de Bagot. Le mois suivant, Rolph regagna l’Angleterre mais, en août 1843, il était de retour au Canada.
Dès 1839, Rolph avait aussi adressé sans succès des pétitions au ministère des Colonies pour deux autres causes. Il cherchait à obtenir des garanties contre la déportation aux États-Unis des esclaves fugitifs se trouvant dans le Haut-Canada, ainsi qu’une disposition particulière du gouvernement pour leur instruction. L’autre cause qu’il défendait, c’était la demande des ursulines et des sulpiciens du Bas-Canada concernant la restitution des biens confisqués par les Britanniques. De même, Rolph préconisa, à partir de 1841, l’émigration volontaire des Noirs du Canada à Trinidad, où les planteurs de canne à sucre cherchaient des ouvriers pour remplacer leurs esclaves libérés. Pour une courte période, en 1843, il agit même à titre d’agent d’émigration dans le Haut-Canada pour le gouverneur de Trinidad.
Rolph quitta le Canada à la fin de 1843 et n’y revint probablement jamais. En 1844, il publia son ouvrage le plus connu : Emigration and colonization ; embodying the results of a mission to Great Britain and Ireland, during the years 1839, 1840, 1841, and 1842 [...]. Ce dernier comprend des descriptions détaillées de ses voyages dans les îles Britanniques et le Haut-Canada, des comptes rendus de discours (les siens et d’autres) et certains rapports des sociétés qu’il créa ou aida à créer. Ce livre, qui représente quelque peu une épreuve d’endurance, même pour les ardents admirateurs de Rolph, permit aussi à son auteur de se justifier et de défendre ses actions. En janvier 1845, Rolph était installé à Portsmouth où il exerça comme chirurgien jusqu’à ce qu’il meure subitement le 17 février 1858. La veille, il aurait vu la pierre tombale d’une jeune femme, qui portait l’inscription suivante : « Tuée par le docteur Thomas Rolph ». À dix heures ce soir-là, il était devenu « insensible » et le lendemain matin il mourait d’une « grave apoplexie ».
Les opinions sur Thomas Rolph divergent. L’historien H. I. Cowan le considère comme un personnage peu important dans la colonisation, qui chercha à s’enrichir en vendant des terres, alors que l’historien W. S. Shepperson croit que Rolph fit beaucoup pour encourager l’émigration des Écossais. Il est difficile de discerner la vérité parce qu’on ne peut prendre les affirmations de Rolph pour argent comptant. Malgré l’accroissement de l’émigration dans les îles Britanniques de 1839 à 1842, de trop nombreux facteurs intervinrent pour pouvoir attribuer à Rolph une grande partie du mérite. Le plus qu’on puisse dire catégoriquement en faveur de Rolph, c’est qu’il suscita l’intérêt des éventuels émigrants d’Angleterre et d’Écosse pour le Canada.
Thomas Rolph est l’auteur de : A brief account, together with observations, made during a visit in the West Indies, and a tour through the United States of America, in parts of the years 1832–3 ; together with a statistical account of Upper Canada (Dundas, Ontario, 1836), dont une seconde édition parut sous le titre de A descriptive and statistical account of Canada : shewing its great adaptation for British emigration ; preceded by an account of a tour through portions of the West Indies and the United States (Londres, 1841). Parmi les autres ouvrages de Rolph, citons : Canada v. Australia ; their relative merits considered in an answer to a pamphlet, by Thornton Leigh Hunt, Esq., entitled Canada and Australia (Londres, 1839) ; Colonisation : a natural, safe and effectual mode of relief for national distress (Londres, 1847) ; Comparative advantages between the United States and Canada, for British settlers, considered in a letter, addressed to Captain Allardyce Barclay, of Ury (Londres, 1842) ; The emigrant’s manual : particularly addressed to the industrious classes and others who intend settling abroad ; together with The memoranda of a settler in Canada [...] (Londres, s.d.) ; et Emigration and colonization ; embodying the results of a mission to Great Britain and Ireland, during the years 1839, 1840, 1841, and 1842 [...] (Londres, 1844). D’autres ouvrages sont répertoriés dans British Museum general catalogue.
AO, RG 1, C-III-4, 10 : 12 ; RG 53, sér. 2–2, 3.— GRO (Londres), Death certificate, Thomas Rolph, 17 févr. 1858.— PRO, CO 42/467 ; 42/468 ; 42/497 ; 43/98 ; 43/101 ; 43/102 ; 43/144–145 (copies aux APC).— Wentworth Land Registry Office (Hamilton, Ontario), Alphabetical index to deeds, Ancaster Township (mfm aux AO, GS 1394).— Arthur papers (Sanderson).— Debates of the Legislative Assembly of United Canada (Abbott Gibbs et al.), 2.— Morgan, Bibliotheca Canadensis.— Canniff, Medical profession in U.C.— H. I. Cowan, British emigration to British North America ; the first hundred years (éd. rév., Toronto, 1961).— W. S. Shepperson, British emigration to North America ; projects and opinions in the early Victorian period (Minneapolis, Minn., 1957).— J. K. A. Farrell [O’Farrell], « Schemes for the transplanting of refugee American negroes from Upper Canada in the 1840’s », OH, 52 (1960) : 245–249.
Wesley B. Turner, « ROLPH, THOMAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/rolph_thomas_8F.html.
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
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