Provenance : Bibliothèque et Archives Canada/MIKAN 2837307
CHAMBERS, EDWARD THOMAS DAVIES, directeur d’école, journaliste, auteur et fonctionnaire, né le 26 juin 1852 à Saffron Walden, Angleterre, fils aîné d’Edward Thomas Chambers et de Louisa Percy Davies ; le 3 janvier 1872, il épousa à Valcartier, Québec, Margaret Jamieson, et ils eurent quatre fils et une fille ; décédé le 5 octobre 1931 à Québec.
Mieux connu sous les initiales E. T. D., Edward Thomas Davies Chambers reçut une formation d’enseignant en Angleterre et immigra au Canada en 1870 avec ses parents, ses frères (dont le plus jeune, prénommé Ernest John*) et au moins une sœur. Son père deviendrait directeur d’une école à Montréal. Chambers dirigea l’école modèle de St Andrews (Saint-André-d’Argenteuil), puis occupa un poste similaire dans une école secondaire à Granby.
Chambers délaissa rapidement l’enseignement pour se consacrer au journalisme. Afin de promouvoir des idées progressistes dans le comté d’Argenteuil, il collabora à la mise sur pied d’un hebdomadaire, le Progress de St Andrews, qui donnait de l’information sur des sujets comme la construction ferroviaire et l’immigration, et qui faisait la promotion d’entreprises locales. Ce petit périodique, publié d’août 1874 à janvier 1875, fut remarqué par des journalistes de Québec et, vers 1876, Chambers se joignit à l’équipe éditoriale du Saturday Budget de Québec, publication commerciale hebdomadaire du Daily Telegraph, dont il devint rédacteur en chef l’année suivante. Vers 1878, il accepta le poste de rédacteur adjoint au journal concurrent, le Morning Chronicle, organe d’allégeance plutôt conservatrice.
La période la plus marquante dans la carrière journalistique de Chambers fut peut-être celle où, à titre de correspondant, il couvrit la rébellion du Nord-Ouest de 1885 [V. Louis Riel*] ; il était alors accompagné de son frère Ernest John. La plupart du temps, ses articles traitaient de questions d’intérêt local, en particulier de politique municipale et provinciale. En mai 1897, il succéda à George Stewart* au poste de rédacteur en chef du Morning Chronicle. Peu après que le journal eut changé de mains, vers la fin de 1898, Chambers commença à travailler comme journaliste indépendant. Sauf durant de courtes périodes où il fut rédacteur au mensuel North American Notes and Queries (de juin 1900 à mars 1901) et au Quebec Daily Mercury (1902–1903), il serait correspondant parlementaire pour le compte de plusieurs journaux jusqu’en 1911. Il présida la tribune de la presse à l’Assemblée législative de 1906 à 1908. Au cours de ses presque 40 années en tant que journaliste et rédacteur en chef, il acquit le respect de ses lecteurs, tout comme celui de ses collègues.
Chambers était engagé dans divers aspects de la vie communautaire. Il fut conseiller municipal du quartier Saint-Louis à Québec de 1884 à 1894 et maire suppléant pendant une partie de ces dix années. Il participa aux activités de la Literary and Historical Society of Quebec et en assuma la présidence en 1919–1920. Éminent franc-maçon et membre de plusieurs loges maçonniques, il deviendrait grand maître de la Grand Lodge of Quebec, grand maître dans l’Ancient and Accepted Scottish Rite et membre du Royal Order of Scotland.
Grâce à ces activités et à son expérience journalistique, Chambers acquit une remarquable compréhension du patrimoine de la ville et de son tissu social, politique et économique. Ses publications, notamment The port of Quebec : its facilities and prospects : the past, present and future of Quebec’s shipping trade (Québec, 1890) et Quebec, ancient and modern […] (Montréal, [1891]), témoignent de son enthousiasme à promouvoir la ville de Québec comme centre économique de première importance en Amérique du Nord. Membre du comité organisateur des fêtes du tricentenaire de Québec en 1908 [V. Albert Henry George Grey*], il contribua à donner à la ville une image de marque sur les plans historique et culturel.
Ce fut dans ses guides touristiques populaires que Chambers exerça le mieux son talent de promoteur. Rédigés dans un style qui rappelait les récits de voyage d’une époque antérieure, mais adaptés à la sensibilité de ses contemporains, The St. Louis Hotel guide to Quebec (New York et Montréal, 1892) et The guide to Quebec (Québec, 1895) faisaient l’éloge des traditions de la ville et de la province, et en décrivaient les ambitions pour le xxe siècle. Un autre groupe de publications, destiné aux sportifs, comprenait notamment Quebec, Lake St. John, and the new route to the far-famed Saguenay ([Québec ?, 1893 ?]), The angler’s guide to eastern Canada […] (Québec, 1898) et The […] sportsman’s […] companion […] ([Québec], 1899), ouvrage qu’il écrivit conjointement avec Louis-Zéphirin Joncas*. Ses guides, comme ceux d’autres auteurs, donnaient librement une image stéréotypée des peuples amérindiens, ainsi que des classes ouvrière et agricole canadiennes-françaises, à l’aide de descriptions pittoresques et romantiques. De plus, Chambers s’attira la critique de membres de l’élite intellectuelle, dont Phillippe-Baby Casgrain et André-Napoléon Montpetit, pour sa façon de définir l’héritage culturel du Canada français et de se l’approprier.
Sans se laisser décourager par les jugements négatifs, Chambers en vint à réaliser une synthèse de ses deux principales passions – l’écriture et le plein air – qui finit par lui valoir une certaine reconnaissance internationale. Ses articles sur les sports de plein air, en particulier la pêche à la ligne, parurent dans Fishing Gazette (Londres), American Angler (New York), Harper’s Magazine (New York), Rod and Gun in Canada (Montréal), Field and Stream (New York) et nombre d’autres publications. On l’invita à écrire des textes sur le Canada et la province de Québec pour des guides touristiques étrangers, tels le guide pour voyageurs européens de la maison d’édition Karl Baedeker, The Dominion of Canada […] (Leipzig, Allemagne, 1894), et Fishing at home & abroad de sir Herbert Eustache Maxwell (Londres, 1913). Son livre le plus connu demeure The ouananiche and its Canadian environment (New York, 1896) qui, sur fond d’histoire naturelle, fait une promotion dynamique de la ouananiche, variété d’eau douce du saumon de l’Atlantique (Salmo salar) considérée comme l’emblème de la pêche sportive au Québec. Chambers partagea ses connaissances sur la faune et la flore à titre de secrétaire-trésorier de la North American Fish and Game Protective Association, de directeur de l’Association de la province de Québec pour la protection du poisson et du gibier, et de représentant du Canada aux réunions de l’American Ornithologists’ Union et des sociétés Audubon.
En 1911, le gouvernement de la province de Québec reconnut l’expérience de Chambers en lui offrant un poste d’agent spécial au département de la Colonisation, des Mines et des Pêcheries. À ce titre, il parcourut la province pour veiller au respect de la réglementation concernant le poisson et le gibier, chercha à améliorer les conditions de travail des pêcheurs de la Côte-Nord du Saint-Laurent et encouragea l’élevage du renard comme activité commerciale dans les campagnes. Pour la collection Canada and its provinces […], dirigée par Adam Shortt et Arthur George Doughty et publiée à Toronto de 1913 à 1917, il rédigea des articles sur le gouvernement de la province de Québec, sur son système de taxation et de revenus, sur son industrie forestière et sur ses pêcheries. En 1915, quand Ottawa décida de céder à l’administration provinciale la plupart de ses établissements de pisciculture, Chambers devint le superviseur en chef des écloseries de la province de Québec. Il supervisa la participation de cette dernière à un échange de poissons, à l’échelle de l’Amérique du Nord, qui commença en 1921 ; ce programme fit introduire beaucoup d’espèces non indigènes, telle la truite arc-en-ciel (Oncorhynchus mykiss), dans les écosystèmes d’eau douce de la province. Il conserva son poste de superviseur jusqu’à sa mort, mais sa santé déclinante le força à rester à la maison à partir de 1927.
Quand il était journaliste, Edward Thomas Davies Chambers mit en place un réseau politique et social qui, allié à sa connaissance approfondie des attentes des touristes et du fonctionnement interne de la bureaucratie gouvernementale, lui permit de jouer un rôle de premier plan dans l’organisation naissante de la pêche sportive au Québec et présageait l’exploitation de l’environnement comme source de revenus touristiques par la province. La promotion qu’il fit des sports de plein air réservés à une élite fortunée et son application de lois réglementant la chasse transformèrent l’accès traditionnel du citoyen ordinaire à ces ressources naturelles ; enfin, son introduction de nouvelles espèces de poissons laissa au Québec un héritage environnemental dont on ne mesure pas toutes les répercussions.
Les publications d’Edward Thomas Davies Chambers que nous avons mentionnées dans le texte, ainsi que de nombreuses autres qu’il a rédigées pour le gouvernement de la province de Québec, sont énumérées dans le Répertoire de l’ICMH.
BAnQ-Q, CE301-S84, 3 janv. 1872 ; E5, Arrêtés en conseil, 1911, no 237 ; TL31, S1, SS1, 1902–1909.— Chronicle-Telegraph (Québec), 5 oct. 1931.— Progress (St Andrews [Saint-André-d’Argenteuil], Québec), 1874–1875.— Le Soleil, 5 oct. 1931.— Annuaire, Québec, 1875–1931.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— J. Hamelin et al., la Presse québécoise.— A.-N. Montpetit, les Poissons d’eau douce du Canada (Montréal, 1897).— Québec, Parl., Doc. de la session, 1907–1929, rapports généraux du ministre de la Colonisation, des Mines et des Pêcheries de la prov. de Québec, 1905–1928.— The Quebec tercentenary commemorative history, Frank Carrel et Louis Feiczewicz, édit. et compil., introd. par A. G. Doughty (Québec, 1908).
Darin Kinsey, « CHAMBERS, EDWARD THOMAS DAVIES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/chambers_edward_thomas_davies_16F.html.
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Auteur de l'article: | Darin Kinsey |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2014 |
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