CASHMAN, ELLEN (aussi connue sous les noms de Nellie Pioche et d’Irish Nellie), mineuse, prospectrice, philanthrope et femme d’affaires, née vers 1845 près de Queenstown (Cobh, république d’Irlande), fille de Fanny Cashman ; décédée célibataire le 4 janvier 1925 à Victoria.

Comme des milliers d’autres immigrants catholiques irlandais aux abois, Ellen Cashman débarqua à Boston vers 1860 avec sa mère et sa sœur. Par la suite, elles continuèrent leur chemin vers l’ouest et élurent domicile à San Francisco en 1869. À partir de là, Ellen et sa mère, gagnées par la fièvre des mines d’argent, se mirent bientôt en route pour les campements de mineurs du Nevada et s’arrêtèrent à Virginia City, au filon Comstock et à Pioche. En 1872, dans cette localité, elles ouvrirent une pension, la Miner’s Boarding House. Jusqu’à la fin de sa vie, Ellen Cashman exploiterait une petite entreprise pour financer ses activités minières. Après une seule année à Pioche, elle repartit, cette fois pour le lointain district aurifère de Cassiar, dans le nord de la Colombie-Britannique, avec un groupe de 200 prospecteurs du Nevada où elle était la seule femme. Une fois arrivée, raconta-t-elle par la suite à des reporters, elle « [se] consacr[a] tour à tour au travail minier et à la tenue d’une pension pour mineurs ». Elle exploita cette pension tout l’été de 1873 puis, à l’automne, elle s’installa à Victoria, où l’hiver était plus clément.

Tandis qu’elle attendait la fin de l’hiver, Ellen Cashman apprit qu’une pénurie de vivres et une épidémie de scorbut s’étaient déclarées dans un campement du district de Cassiar. Résolue à agir, elle convainquit six hommes de l’accompagner dans une expédition de secours qui s’annonçait périlleuse. Durant 77 jours, elle-même et ses compagnons avancèrent péniblement dans la neige et survécurent à des avalanches, à des températures extrêmes et à des tempêtes de toute sorte. Parvenue à destination, elle soigna les victimes du scorbut et distribua des vivres et du matériel. Au cours des deux ans qu’elle passa dans le district de Cassiar, elle aida les Sisters of St Ann à recueillir des fonds pour construire le St Joseph’s Hospital à Victoria [V. Salomée Valois*]. À cause de son héroïque expédition hivernale et de son dévouement, on la surnommait l’Ange du mineur ou l’Ange du Cassiar. En outre, sa personnalité haute en couleur et sa vivacité d’esprit séduisaient les journalistes, qui suivraient ses activités durant de nombreuses années. (Une bonne partie de l’information à son sujet est difficile à vérifier, car les histoires varient énormément d’un journal à l’autre.)

Ellen Cashman quitta le district de Cassiar en 1876, fit la tournée des campements de mineurs de l’Ouest américain et arriva en 1879 à Tucson, dans le territoire de l’Arizona, où elle fit de la prospection et ouvrit le Delmonico Restaurant. Toutefois, le boom de Tucson tirait à sa fin et, au bout de quelques mois, elle descendit jusqu’au nouveau campement de mineurs d’argent de Tombstone. Là, elle finança ses activités minières avec une série de commerces, par exemple un magasin de bottes et chaussures, une épicerie, un restaurant, une pension et un hôtel.

Comme elle l’avait fait en Colombie-Britannique, Ellen Cashman partageait son temps entre ses entreprises, ses activités minières et des œuvres de bienfaisance. Elle amassa des fonds pour établir le St Mary’s Hospital à Tucson en 1880 ainsi qu’une église catholique, un hôpital et une première école publique à Tombstone entre 1880 et 1885. Dans cette localité, elle milita aussi à l’Irish National Land League, qui aidait les familles nécessiteuses des mineurs irlandais. Après la mort de sa sœur Frances en 1884, elle joua quelque temps le rôle de mère auprès de ses cinq nièces et neveux. Toujours, elle serait reconnue pour son grand cœur. Les mineurs malchanceux pouvaient presque invariablement trouver chez elle le gîte et le couvert même s’ils n’avaient pas de quoi payer. Ceux qui n’avaient pas les moyens d’entreprendre une nouvelle prospection pouvaient souvent négocier avec elle de l’argent ou des provisions en échange d’un pourcentage sur leurs profits éventuels. Elle aurait pu finir ses jours dans l’aisance, mais la prospérité qui avait gagné Tombstone s’acheva en 1886, ce qui entraîna la faillite de ses entreprises. L’année suivante, elle entama une tournée de prospection qui la mena dans d’autres eldorados. Elle irait notamment au Nouveau-Mexique, en Idaho, au Wyoming, au Mexique, en Afrique du Sud et dans de nouveaux campements de l’Arizona.

En 1897, à son hôtel de Yuma (Arizona), Ellen Cashman entendit parler des impressionnantes quantités d’or que l’on découvrait dans le territoire du Yukon, au Canada [V. Shaaw Tláa*]. Incapable de résister à l’appel du Klondike, elle déclara en septembre à l’Arizona Daily Citizen de Tucson qu’elle partirait dès qu’elle aurait organisé un groupe de prospecteurs et amassé 5 000 $. Dès février 1898, avec deux compagnons, elle était à Victoria à rassembler du matériel et à planifier le trajet vers le nord. À un journaliste du Daily Colonist de Victoria qui lui demandait ce qu’une dame prospecteur pourrait bien porter pour un voyage pareil, elle fit cette réponse qu’il trouva choquante : « Je m’habille […] à peu près comme un homme : un pantalon épais et des bottes de caoutchouc. Évidemment, quand je fréquente des étrangers, je mets un long manteau de caoutchouc. Il n’est pas question de [porter des] jupes là-haut dans le nord, comme bien des femmes vont le constater avant d’atteindre les régions aurifères. » Fait intéressant, toutes les images qui subsistent d’Ellen Cashman la montrent en jupe longue et chemisier, tenue tout à fait convenable pour une femme de l’époque.

Ellen Cashman faisait partie des très nombreux chercheurs d’or – au moins 30 000 – qui prirent d’assaut Dawson au début de l’été de 1898. Comme bien d’autres, elle arrivait trop tard pour jalonner une concession sur le meilleur territoire. Celle qu’elle acheta sur le ruisseau Bonanza lui rapporta plus de 100 000 $, mais l’argent lui filait entre les doigts : « J’ai dépensé jusqu’au dernier sou pour acheter d’autres concessions et prospecter la contrée. J’ai sillonné tout le district avec mon équipage de chiens ou en raquettes pour trouver des concessions riches. » Ellen Cashman était un cas d’exception : en 1901, seulement 1 % des mineurs du Yukon étaient des femmes. La plupart d’entre elles, semble-t-il, établissaient des concessions uniquement afin de grossir les avoirs familiaux. Pour financer ses activités minières pendant son séjour à Dawson, Ellen Cashman tint un restaurant, puis une épicerie au Donovan Hotel. Il s’agissait de l’un des deux commerces exploités par des femmes à Dawson en 1901 (les 27 autres appartenaient à des hommes et étaient souvent des entreprises familiales).

Après avoir quitté Dawson, Ellen Cashman alla chercher de l’or jusqu’en Alaska, d’abord à Fairbanks en 1905 puis en 1907 dans la région de Koyukuk, où elle fit de la prospection et de l’exploitation minière jusque passé l’âge de 75 ans. Au printemps de 1924, elle contracta une double pneumonie et fut hospitalisée à Fairbanks. Décidée à retourner « mourir chez [elle] », elle entra au St Joseph’s Hospital à Victoria en octobre. Elle y mourut en janvier 1925 et fut inhumée au cimetière de la baie Rock.

Charlene Porsild

AN, RG 31, C1, 1901, Dawson City, Yukon.— Arizona Hist. Soc., Southern Arizona Div. (Tucson), photographies d’Ellen Cashman, y compris le négatif nº 1847.— Sisters of St Ann Arch. (Victoria), photographie d’Ellen Cashman.— Arizona Daily Citizen (Tucson), 15 sept. 1897.— Daily Arizona Citizen (Tucson), 29 juill. 1879.— Daily Colonist (Victoria), 15 févr. 1898, 11 janv. 1925.— Ely Record (Pioche, Nev.), 4 sept. 1872.— Annuaire, San Francisco, 1869.— Don Chaput, Nellie Cashman and the North American mining frontier (Tucson, 1995).— Suzann Ledbetter, Nellie Cashman : prospector and trailblazer (El Paso, Tex., 1993).— M. J. Maier, Klondike women : true tales of the 1897–98 gold rush ([Athens, Ohio], 1989).— C. [L.] Porsild, Gamblers and dreamers : women, men, and community in the Klondike (Vancouver, 1998).— Sally Zanjani, A mine of her own : women prospectors in the American west, 1850–1950 (Lincoln, Nebr., 1997)

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Charlene Porsild, « CASHMAN, ELLEN (Nellie Pioche, Irish Nellie) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/cashman_ellen_15F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
Année de la révision:    2005
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