CAMPBELL, ROBERT, ministre presbytérien, botaniste, éducateur et auteur, né le 21 juin 1835 près de Perth, Haut-Canada, septième fils de Peter Campbell, fermier et conseiller presbytéral dans l’Église presbytérienne, et de Margaret Campbell ; le 29 décembre 1863, il épousa à Fergus, Haut-Canada, Margaret Macdonnell, sœur de Daniel James Macdonnell*, et ils eurent sept fils, dont trois moururent avant l’âge adulte, et trois filles, dont l’une mourut à 24 ans ; décédé le 15 mars 1921 à Montréal.

Les parents de Robert Campbell immigrèrent de l’Écosse en 1817 et s’installèrent près de Perth la même année. Bon élève, le jeune garçon put recevoir une formation classique à l’école publique du lieu grâce à un instituteur irlandais cultivé. Après une expérience de conversion en 1852, il commença à se préparer au sacerdoce. En 1856, il obtint du Queen’s College de Kingston une licence ès arts (avec mention très bien dans toutes les matières) et, plus tard dans l’année, il prit la direction de la Queen’s College School. La poursuite de ses études lui permit de recevoir une maîtrise ès arts de Queen’s en 1858. Bien que le consistoire de Bathurst l’ait autorisé à prêcher en 1860, il partit visiter les Îles britanniques et l’Europe. Il devait déjà avoir une réputation de prédicateur puisque, à son retour, il reçut des invitations de plusieurs assemblées de fidèles. Son choix se porta sur la congrégation St Andrew à Galt (Cambridge). Ordonné le 10 avril 1862, il fut installé dans cette paroisse le jour même. Au bout de quatre ans, il accepta l’invitation d’une église réputée de Montréal, St Gabriel Street. Il y resterait jusqu’à sa retraite en 1909, soit un total de 43 années. De 1909 à sa mort, il détint le titre de ministre émérite.

Bien qu’il ait été de doctrine calviniste, Campbell adhérait à l’Église d’Écosse plutôt qu’à sa contrepartie, l’Église libre. Les deux paroisses qu’il desservit, à Galt et à Montréal, appartenaient au synode de l’Église presbytérienne du Canada, affiliée à l’Église d’Écosse. Prendre en charge l’église St Gabriel Street représentait toute une gageure. Le révérend Henry Esson* avait fait entrer cette congrégation dans l’Église libre à la suite de la scission de 1843 [V. Robert Burns*], mais non sans que cela provoque de nombreux départs. L’église et le presbytère étaient revenus au synode de l’Église d’Écosse en 1864. Campbell héritait donc non seulement d’une chaire naguère prestigieuse, mais aussi d’un passé de dissensions et d’un groupe d’adeptes fortement réduit. Il se mit à la tâche avec confiance et enthousiasme. À sa nomination, de 40 à 80 familles fréquentaient l’église. Dès 1875–1876, elle regroupait 196 familles et 358 fidèles, ce qui la classait, pour le nombre, au quatrième rang des congrégations presbytériennes de Montréal.

Fier de ses origines écossaises, Campbell participa à la fondation de la Celtic Society of Montreal en 1883. Sa formation philosophique s’était inscrite dans la tradition écossaise du sens commun, dont il épousait le réalisme. Imperméable à l’idéalisme philosophique qui gagnait les établissements presbytériens de haut savoir, il n’avait guère bonne opinion du libéralisme théologique qui allait de pair avec ce courant de pensée. Son conservatisme s’étendait au domaine sociopolitique, mais il n’avait pas pour autant une confiance absolue dans le capitalisme triomphant de son époque. Du point de vue doctrinal, il était conservateur sans être réactionnaire. Malgré ses louanges sur la Confession de Westminster, à laquelle il adhérait, il émettait parfois des réserves sur cette profession de foi. Il était d’accord avec certaines conclusions de la critique historique des Saintes Écritures. C’était un évangélique, non un partisan du christianisme culturel. Il soutenait que « tout enfant baptisé au sein de l’Église a autant besoin de régénération spirituelle que n’importe quel Hindou ou Hottentot ». Dans une certaine mesure, il était inclassable : ni tout à fait assez à la page pour les théologiens libéraux de son temps ni assez conservateur pour satisfaire la stricte orthodoxie calviniste.

Campbell était à la fois un adepte de l’œcuménisme et un fervent presbytérien écossais. À ce premier titre, il n’hésitait pas à reconnaître comme de bons témoins du christianisme les membres des confessions qu’il qualifiait d’« évangéliques » : les anglicans, les baptistes, les congrégationalistes et les méthodistes. Pour lui, l’Église catholique avait aussi une place dans la chrétienté, et il avait même de bons mots pour les unitariens. À propos des Juifs, il disait : « Au delà de [la crucifixion du Christ], il faut placer le fait que notre grand rédempteur était Juif et que les chrétiens doivent les principales sources de leur religion à ce peuple remarquable. » Résolument attaché malgré tout au presbytérianisme écossais, Campbell soutint l’union des diverses branches du presbytérianisme en 1875, mais s’opposa à la fusion des confessions écossaises et anglaises au pays, qui se concrétisa par la création de l’Église unie du Canada en 1925. La bataille qu’il mena pour faire entériner l’union des Églises presbytériennes par le Parlement québécois en 1875 mit sa solide constitution à rude épreuve. De même, en dépit de son grand âge, il serait à l’avant-garde de la lutte contre l’union interconfessionnelle.

Parallèlement à son œuvre pastorale, Campbell fut longtemps administrateur du Queen’s College et, durant deux années scolaires (1880–1882), il y fut maître de conférences sur l’histoire de l’Église. Ses écrits attestent sa connaissance de sujets d’actualité tels le socialisme, l’évolution et la critique historique de la Bible. En 1887, Queen’s lui conféra un doctorat honorifique en théologie. Dès que l’union de 1875 rendit la chose possible, il servit le collège presbytérien de Montréal (auparavant, ce collège de théologie était affilié à l’Église libre) en qualité de membre du conseil d’administration, fonction qu’il exerça jusqu’en 1883. En outre, il y enseigna l’histoire de l’Église en 1904–1905 et en 1916. Sauf en 1894–1895, il appartint au conseil collégial de cette maison d’enseignement de 1883 jusqu’à sa mort. De tous les conseillers, il fut l’un de ceux qui resta le plus longtemps et qui exerça la plus grande influence.

De 1892 à son décès, Campbell fut greffier principal (secrétaire) de l’assemblée générale de l’Église presbytérienne du Canada. C’est le secrétaire qui a le dernier mot lorsqu’il s’agit des subtilités des pratiques des Églises presbytériennes de tradition écossaise. Ses adversaires comme ses amis reconnaissaient d’emblée que Campbell faisait preuve d’un talent consommé dans l’exercice de cette fonction. L’autre poste élevé dans la hiérarchie presbytérienne est celui de modérateur de l’assemblée générale. Campbell eut l’honneur de l’occuper en 1907.

Campbell fut un grand personnage public, surtout sur la scène montréalaise. Il figura parmi les membres fondateurs du St Lawrence Curling Club et en fut aumônier. En outre, il œuvra au sein de la Prisoners’ Aid Society et d’autres organismes de bienfaisance. Bien connu des législateurs, il exerça des pressions, notamment par des articles, relativement à de nombreux dossiers touchant l’Église.

Féru de botanique, Campbell recueillait des spécimens floraux au pays et à l’étranger. Ses randonnées contribuèrent sans doute à sa vitalité quasi légendaire. Actif à la Société d’histoire naturelle de Montréal, il publia 17 articles dans le périodique de celle-ci, le Canadian Record of Science, dont il fut rédacteur en chef durant un certain nombre d’années. En 1895, il devint président de la société.

Sans être extraordinaire, la production littéraire de Campbell était respectable pour un ministre paroissial consciencieux. On se souvient surtout de son History of the Scotch Presbyterian Church […]. Paru à Montréal en 1887, cet ouvrage méticuleux de plus de 800 pages contient une foule de courtes biographies de fondateurs du presbytérianisme à Montréal. On le consulte encore aujourd’hui. Relations of the Christian churches to one another […], publié à Toronto en 1913, plaide vigoureusement, mais de manière charitable, contre l’union des Églises. Parmi ses ouvrages plus courts, les mieux connus sont On the union of Presbyterians in Canada (Montréal, 1871) et The pretensions exposed […] (Montréal, 1878), virulent opuscule contre les ministres qui prétendaient représenter la véritable Église d’Écosse. Le ton de Union or co-operation […] (Montréal, [1906?]) est moins agressif. Campbell fit paraître bon nombre d’articles dans des revues ecclésiastiques. Le prestigieux Catholic Presbyterian de Londres et de New York publia en 1879 un texte de lui intitulé « Rise and progress of the Presbyterian Church in Canada ».

Toutes les sources l’affirment, Robert Campbell débordait d’optimisme et d’énergie. Manifestement, rien ne venait à bout de son enthousiasme, et sa faculté de garder espoir jusque dans les pires défaites avait quelque chose d’agaçant. Il poursuivait avec confiance son travail d’évangélisation dans sa paroisse de l’extrémité est de la ville même si, une fois bien établis comme membres de l’Église, bon nombre de ses fidèles avaient tendance à aller s’installer à l’extrémité ouest de Montréal, plus prospère. Il se retira du pastorat à l’âge de 74 ans, mais continua d’avoir de multiples engagements. Le dernier jour de sa vie active, soit le 28 février 1921, il prit part à une assemblée du consistoire de Montréal, comme il le faisait depuis 53 ans. Il avait l’intention d’aller, le soir même, à une assemblée de la Société d’histoire naturelle de Montréal (dont il était président honoraire). Il s’y rendait lorsque le tramway dans lequel il se trouvait fit une embardée. Blessé, il en mourut deux semaines plus tard. Son décès priva l’Église presbytérienne du Canada de l’un de ses plus éminents diplomates d’expérience, la communauté chrétienne du Québec d’un religieux à l’esprit ouvert et la communauté scientifique du Canada d’un observateur attentif de la nature.

Dan Shute

On trouve dans Science and technology biblio. (Richardson et MacDonald) une liste de plusieurs articles sur la botanique que Robert Campbell a publiés dans le Canadian Record of Science (Montréal) et dans le Canadian Horticultural Magazine (Montréal). Quelques-uns de ces articles ainsi que les ouvrages mentionnés dans la biographie et d’autres écrits de Campbell figurent dans le Répertoire de l’ICMH.

AO, RG 80-27-2, 79 : 112.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— N. K. Clifford, The resistance to church union in Canada, 1904–1939 (Vancouver, 1985) ; « Robert Campbell, the defender of Presbyterianism », dans Called to witness : profiles of Canadian Presbyterians [...], W. S. Reid et J. S. Moir, édit. (4 vol. parus, [Toronto et Hamilton, Ontario], 1975– ), 1 : 53–66.— [James Croil], A historical and statistical report of the Presbyterian Church of Canada, in connection with the Church of Scotland, for the year 1866 (Montréal, 1867).— Église presbytérienne du Canada, General Assembly, Acts and proc. (Toronto), 1921–1922.— G. C. Heine, A brief sketch of the life and work of the Rev. Robert Campbell, d.d., minister of St. Gabriel Church, Montreal (Montréal, 1922).— Ephraim Scott, « The late Rev. Robert Campbell, d.d. », Presbyterian Record (Montréal) 46 (1921) : 104–106.— Hew Scott et al., Fasti ecclesiæ scoticanæ : the succession of ministers in the Church of Scotland from the Reformation (nouv. éd., 11 vol. parus, Édimbourg, 1915– ) : 7.— Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell).

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Dan Shute, « CAMPBELL, ROBERT (1835-1921) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/campbell_robert_15F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
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