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BURSTALL, JOHN, marchand de bois, né vers 1832 à Hessle, Angleterre, fils de William Burstall ; le 3 septembre 1861, il épousa à Québec Fanny Bell Forsyth, fille aînée de James Bell Forsyth*, et ils eurent deux garçons et cinq filles ; décédé en février 1896 en Angleterre.
John Burstall reçoit en Angleterre une instruction et une éducation qui le préparent à devenir commerçant. Il débarque à Québec dans les années 1850 pour faire son apprentissage auprès de ses oncles Edward et Henry Burstall, importants exportateurs de produits forestiers établis dans cette ville depuis le début des années 1830. En 1857, John devient l’associé d’Edward ; Henry s’est retiré des affaires depuis deux ans. L’accession de John au titre d’associé survient à un bien mauvais moment. En octobre 1857, la firme se retrouve dans une position financière précaire : la principale constituante de son réseau d’affaires, la Harrison, Watson and Company, de Hull, en Angleterre, est en faillite. Les notes et les traites émises s’élèvent à près de 800 000 $. Edward Burstall est personnellement responsable de créances évaluées à 200 000 $ et sa firme enregistre un passif d’environ 300 000 $. Ce revers d’importance a des retombées extrêmement néfastes sur la communauté commerciale canadienne. Plusieurs marchands de Québec sont affectés par cette faillite, ne serait-ce que par la panique bancaire qu’elle provoque. Les contrecoups sont également perceptibles en amont, particulièrement dans la région de l’Outaouais, où la faillite de Burstall entraîne celle de plusieurs producteurs et négociants de bois.
Afin de se protéger de ses créanciers, Edward Burstall transfère à son frère Henry sa villa de Sillery, de même que ses actions dans la Compagnie d’entrepôt de Québec, entreprise qui permet aux actionnaires de disposer d’une anse à Lévis où le bois destiné à l’exportation est amené. On négocie une composition commerciale. La compagnie d’Edward sort de l’impasse en garantissant un paiement de 10s pour une livre. Pour un temps, Henry assume la direction de la E. Burstall and Company. Il permet la reprise des activités commerciales tout en assainissant les finances. Au début des années 1860, Edward se libère de ses dettes et reprend le commerce à son nom.
Jusqu’à ce moment, John Burstall a eu peu de responsabilités autres que celles qui sont usuelles dans le commerce d’expédition de ses oncles. Au début de 1860, son rôle devient un peu plus important à cause du retrait définitif de Henry. En 1862, il quitte son oncle Edward et s’associe à Henry Stanley Smith, de Liverpool, sous la raison sociale de John Burstall and Company. Son centre d’intérêt demeure l’expédition et l’entreposage du bois. Contrairement à ses oncles, qui ont spéculé souvent dans la construction navale au cours des années 1840 et de la décennie suivante, John ne manifeste aucun intérêt marqué pour ce secteur de la production ; tout au long de sa carrière, ses acquisitions vont se limiter à quelques navires.
Les entreprises de John et d’Edward Burstall sont indépendantes l’une de l’autre. Ils ont chacun leur bureau et un chargé d’affaires qui s’occupe des transactions courantes en leur absence. Ils s’approvisionnent à des scieries différentes qu’ils financent parfois, en partie ou en totalité, comme dans le cas des entreprises de George Benson Hall* et de Henry Atkinson. Néanmoins, Edward et John Burstall se rendent mutuellement service. Grâce aux relations d’Edward, John devient actionnaire de la Compagnie d’entrepôt de Québec au même titre que son comptable Frederick Billingsley, qui en est le secrétaire. La John Burstall and Company dispose ainsi d’un lieu d’entreposage et elle est propriétaire d’un quai sur lequel sont érigés quelques bâtiments qu’elle loue à d’autres marchands.
En 1869, le capital de la John Burstall and Company est de 305 000 $ dont 165 000 $ ont été souscrits par John. À l’aube des années 1870, l’entreprise est donc en excellente santé financière. John vit alors dans la somptueuse résidence de son oncle Edward à Sillery, que sa femme a achetée ; le couple l’habitera jusqu’à sa destruction par le feu en 1879. En 1874, John Burstall consolide sa position commerciale à Liverpool : il s’associe à William Henry Robinson, de la Harrison, Robinson and Company. Burstall et Robinson investissent près de 460 000 $ dans l’entreprise. À Québec, la firme possède un navire à vapeur, deux barges, neuf petits bateaux et une anse à bois. La John Burstall and Company traverse presque aisément la crise des années 1870. Certes, elle enregistre des pertes substantielles, en particulier sur les exportations de chêne, mais cette situation affecte peu sa politique d’achat. Elle profite de la conjoncture pour se procurer à bas prix des quantités impressionnantes de bois dans la vallée de l’Outaouais. Malgré le décès de Robinson en mars 1875, l’entreprise québécoise continue de tisser des liens étroits avec les Harrison, de Liverpool. En 1876, Burstall s’associe avec James père, James fils et Thomas Harrison. Cette association est renouvelée l’année suivante. À Québec, Frederick Billingsley et Henry Talbot Walcot se joignent à Burstall dans la compagnie, qui fonctionne toujours sous la même raison sociale. C’est sans doute l’affiliation avec les Harrison qui permet à cette dernière de limiter les dégâts, malgré une nette régression de ses ressources financières entre 1875 et 1879.
La John Burstall and Company est d’abord une firme d’agents. Elle agit souvent pour le compte de marchands métropolitains qui affrètent à son intention des navires qui viennent chercher des cargaisons de bois destinées à être vendues sur le marché britannique. Les chartes-parties constituent le fondement de cette activité commerciale. Elles précisent l’expéditeur, les agents maritimes, l’armateur et l’affréteur, elles spécifient le nom du capitaine, du navire, sa nationalité, son port d’attache, son ordre de route et déterminent la nature, la quantité et la qualité du bois transporté de même que la destination. Ces contrats fixent également le temps alloué au voyage aller et retour, les délais accordés au chargement et au déchargement et les pénalités en cas de violation de l’une des différentes clauses. Dans la métropole, les affréteurs et les armateurs de la John Burstall and Company sont la plupart du temps des marchands de Hull, de Newcastle upon Tyne, de Londres et de Liverpool. Vers les années 1870, ils nolisent de plus en plus souvent des voiliers norvégiens ou suédois pour transporter le bois vers le marché britannique. Au Canada, la firme de Burstall utilise un réseau d’agents qu’elle a établis à Sault-au-Mouton, aux Escoumins, à Betsiamites et à Trois-Rivières, où se fait aussi le chargement des navires. À partir du milieu des années 1880, elle a également un important bureau à Montréal pour contrer le coût croissant de la manutention et du chargement du bois au port de Québec. Loin d’être centralisée, la structure du réseau de distribution du bois est éclatée surtout dans le cas des intervenants. Elle l’est également en ce qui a trait aux techniques employées pour mieux répondre à la demande du marché. Lorsque les aires de travail sont insuffisantes, les surplus de bois sont dirigés vers d’autres anses, d’où l’on procède au chargement. Cette pratique est usuelle tout comme les nombreux services que les marchands de bois québécois se rendent entre eux. Selon les circonstances, les uns et les autres agissent comme armateurs, agents maritimes, entreposeurs ou fournisseurs de matières premières.
Entre les années 1870 et 1890, le problème de l’entreposage du bois persiste toujours. La John Burstall and Company y remédie par une nouvelle association commerciale. En 1877, Billingsley et Walcot forment une société avec les frères William Henry et Charles Edward Knight. L’entente, d’une durée de cinq ans, permet aux associés d’utiliser l’anse Spencer, où l’on trouve plusieurs maisonnettes, un hôtel, une étable, une forge, une machine à confectionner les lattes, des ancres, des chaînes et des estacades. Au cours des années 1880, la John Burstall and Company change encore d’aire d’entreposage. En 1885, elle loue pour cinq ans l’anse Woodfield à proximité de la résidence familiale de Burstall.
Malgré une augmentation des ressources financières de l’entreprise, qui se chiffrent entre 250 000 $ et 300 000 $ tout au long des années 1880, les associés se désistent les uns après les autres. En 1886, Walcot se retire après avoir assumé la direction du bureau de Londres pendant un certain temps. Quatre ans plus tard, c’est au tour des Harrison. John Burstall ne peut plus compter que sur Billingsley. Un marché plus restreint en Angleterre affecte d’ailleurs la croissance de la compagnie. Ses ressources financières diminuent proportionnellement. Évaluées entre 150 000 $ et 200 000 $ en 1895, elles se situent, quatre ans plus tard, entre 75 000 $ et 100 000 $. Même si le fils de John, John Forsyth Burstall, prend la relève durant les premières décennies du xxe siècle, c’est la fin d’une ère, celle de la voile et des barons du bois.
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Jean Benoit, « BURSTALL, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/burstall_john_12F.html.
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Auteur de l'article: | Jean Benoit |
Titre de l'article: | BURSTALL, JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |