BROWN, ADA MARY (Courtice), éducatrice, réformatrice sociale et fonctionnaire, née le 4 novembre 1860 près de Bloomfield, Haut-Canada, fille de Stephen Keyes Brown, fermier, et d’Eliza Jane White ; le 24 octobre 1888, elle épousa à Toronto Andrew Cory Courtice, et ils eurent un fils et une fille ; décédée le 24 août 1923 dans cette ville et inhumée à Prince Albert, Ontario.
Fille unique de quakers humanistes et pieux, Ada Mary Brown naquit à la ferme de son grand-père maternel et grandit près de Pickering, en Ontario. Après des études au Pickering College et à l’Ontario Ladies’ College de Whitby, elle enseigna la musique. En 1886 ou en 1887, à la suite d’une scission dans la communauté quaker de Pickering, sa famille s’installa à Toronto. Bien que, par la suite, elle-même et ses parents aient quitté la Société des amis, sa foi, caractérisée par un attachement à la réforme philanthropique et morale, continuerait d’inspirer ses actes.
En 1888, Ada Mary Brown épousa Andrew Cory Courtice, ministre de l’église méthodiste Parliament Street, où elle était soliste. Des affectations subséquentes les menèrent à London, à Montréal et à Kingston. Fervent socialiste chrétien, partisan de la tempérance et plus tard pacifiste, Courtice fut nommé en 1894 rédacteur en chef d’un périodique méthodiste, le Christian Guardian. Ada Mary et lui-même retournèrent alors à Toronto avec leurs enfants.
Ada Mary et Andrew Cory Courtice (démis de son poste de rédacteur en chef en 1902) envisagèrent tôt de fonder leur propre école. Pour s’y préparer, Ada Mary rencontrait souvent la spécialiste des jardins d’enfants Adaline Augusta Hughes et son mari, l’inspecteur d’écoles James Laughlin Hughes*, qui lui firent connaître des théories pédagogiques progressistes. En 1907, les Courtice ouvrirent, avenue Howard, une école dont le but était de favoriser le développement « physique, mental et moral » de chaque élève et de promouvoir « la connaissance de soi, la maîtrise de soi et une vie saine ». Un an plus tard, ils fondèrent, avenue Beech, le Balmy Beach College and School of Music and Art. Après la mort de son mari, survenue le 10 novembre 1908, Ada Mary Brown Courtice dirigerait cet établissement durant dix ans.
Mme Courtice avait de la détermination et de la ressource. La paix ainsi que le vote et l’avancement des femmes faisaient partie des diverses causes qu’elle défendait. Elle appartenait à un certain nombre d’organisations de réforme, notamment le National Council of Women of Canada et le Local Council de Toronto. De 1905 à 1913, elle fut convocatrice du comité permanent du National Council sur la paix et l’arbitrage. Même si elle obtint peu de succès en tentant de créer des sous-comités dans les conseils locaux de tout le pays, elle resta une pacifiste convaincue. Pendant la Première Guerre mondiale, elle s’opposerait à la conscription.
Parmi les modes de progrès social auxquels s’intéressa Ada Mary Brown Courtice, l’aide aux enfants par l’amélioration de l’éducation et de la vie familiale fut celui auquel elle consacra le plus d’énergie. Elle connaissait presque certainement le mouvement en faveur de la création de cercles domestiques et scolaires. En Ontario, ces organismes étaient associés aux jardins d’enfants ou prenaient la forme de ligues artistiques et de cercles de mères. La plupart d’entre eux mettaient l’accent sur les activités sociales, les sports et les collectes de fonds. Mme Courtice fonda un cercle de mères au Balmy Beach College and School of Music and Art. En 1914, elle adhéra au comité éducatif du Toronto Local Council et, avec son appui, brigua les suffrages au Toronto Public School Board (la plus haute instance municipale accessible à une femme). Cependant, elle subit la défaite. Dans son programme, elle proposait d’utiliser les écoles comme centres communautaires, d’améliorer les terrains de jeux et l’éducation physique, de mettre davantage l’accent sur l’enseignement technique et d’établir de meilleurs moyens de prévenir l’usage du tabac et la consommation d’alcool chez les garçons.
Le 12 février 1916, à une assemblée du Local Council, le Toronto Home and School Council vit le jour à la suite d’une proposition d’Ada Mary Brown Courtice. Cette dernière en fut élue présidente et Adaline Augusta Hughes, présidente honoraire. Ce conseil, qui regroupait aussi bien des instituteurs et des administrateurs scolaires que des parents, se distingua par l’accent qu’il mit, dès ses débuts, sur l’action politique et la réforme éducative. Ses objectifs étaient de créer un centre pour les cercles domestiques et scolaires de la ville, d’étudier des questions pédagogiques et de former « un comité en prévision des élections municipales ». Il ne craignait pas de critiquer les écoles et de revendiquer des changements. Il favorisait les candidatures féminines aux élections scolaires, soutenait les institutrices, appuyait l’expansion des programmes de jardins d’enfants, d’économie domestique et d’hygiène scolaire et prônait des mesures d’assistance aux pauvres. Dans une allocution au conseil, Mme Courtice déclara que celui-ci était en mesure « de susciter davantage l’intérêt pour la qualité de la vie familiale et scolaire que la plupart des organismes ». « C’est, ajoutait-elle, parce que le foyer et l’école sont les assises du caractère individuel et national que nous avons foi en notre mouvement. »
En janvier 1917, avec l’appui du conseil, Ada Mary Brown Courtice et la docteure Caroline Sophia Brown* se firent élire au conseil scolaire. Durant quatre ans, Mme Courtice plaida pour que le français, l’agriculture, l’économie domestique et la formation manuelle soient inscrits au programme d’études et pour que les écoles soient réaménagées de manière à favoriser le jeu et la gymnastique. En outre, elle exerça des pressions pour que des installations spéciales soient mises à la disposition des élèves handicapés ou ayant des difficultés d’apprentissage. Deux exemples illustrent sa ténacité. En 1917, elle défia le président du conseil scolaire, qui défendait un directeur soupçonné d’avoir embrassé une élève. L’année suivante, elle soutint sans relâche une institutrice, Freda Held, qui, en ce temps de guerre, se faisait insulter parce qu’elle était d’ascendance allemande.
En mai 1919, Ada Mary Brown Courtice convoqua une réunion sous les auspices du Toronto Home and School Council afin de discuter de l’à-propos de former un organisme provincial. Il en résulta une vague coalition d’associations domestiques et scolaires, de cercles de mères et de ligues scolaires et artistiques qui prit le nom d’Ontario Federation of Home and School Associations. Dès 1920, la fédération comprenait aussi des représentants des instituteurs, des inspecteurs et des instituts pour femmes. Elle obtint une subvention du département provincial de l’Éducation et devint une section de l’Ontario Educational Association.
Mme Courtice quitta la présidence du conseil de Toronto en 1920 et assuma la fonction de secrétaire d’organisation à l’Ontario Federation. Dans son rapport annuel de 1921–1922, elle insista sur le fondement démocratique de la collaboration entre les familles et les écoles : « Nous défendons un type d’éducation qui n’a encore jamais été prôné par un mouvement du peuple, pour le peuple et par le peuple […] les gens du voisinage doivent identifier et étudier eux-mêmes leurs problèmes et être en mesure de gagner l’opinion publique au progrès. » Battue aux élections scolaires de janvier 1921 au cours d’une vague réactionnaire, Mme Courtice se consacra ensuite à l’expansion des cercles domestiques et scolaires locaux. En février, le conseil de Toronto créa un comité d’éducation familiale dont elle accepta d’être la convocatrice. Ce comité diffusait des listes de livres utiles, produisait des brochures à l’intention des mères et distribuait de la documentation sur divers sujets, dont la préparation scientifique d’un budget familial et l’équilibre souhaitable entre le travail, le repos et les loisirs.
Ada Mary Brown Courtice succomba à un cancer de l’intestin en 1923. L’Ontario comptait alors environ 270 associations domestiques et scolaires. Toutefois, moins d’une décennie plus tard, ces organismes – issus d’un mouvement de femmes de la classe moyenne voué à réformer la société par l’amélioration de l’éducation des enfants – seraient moins des instruments de contestation du système scolaire que des moyens d’adapter des pratiques établies.
AO, RG 80-5-0-165, nº 14443 ; RG 80-8-0-911, nº 4675.— BAC, RG 31, C1, 1901, Toronto, Ward 4, div. 4 : 9 (mfm aux AO).— Globe, 11 nov. 1908.— L. M. Burgoyne, A history of the home and school movement in Ontario ([Toronto, 1934 ?]).— Canadian annual rev., 1916 : 425.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898).— T. [A.] Crowley, « Ada Mary Brown Courtice : pacifist, feminist and educational reformer in early twentieth-century Canada », Études d’hist. et de politique ([Lennoxville, Québec]), 1 (1980) : 76–114 ; « Parents in a hurry : the early home and school movement in Ontario », Hist. sociale (Ottawa), 19 (1986) : 323–342.— Kari Delhi, « For intelligent motherhood and national efficiency : the Toronto Home and School Council, 1916–1930 », dans Gender and education in Ontario : an historical reader, Ruby Heap et Alison Prentice, édit. (Toronto, 1991), 147–163.— Alison Prentice et al., Canadian women : a history (Toronto, 1988), 183.— T. P. Socknat, Witness against war : pacifism in Canada, 1900–1945 (Toronto, 1987).— Veronica Strong-Boag, « Peace-making women : Canada, 1919–1939 », dans Women and peace : theoretical, historical and practical perspectives, Ruth Roach Pierson, édit. (Londres, 1987), 170–191.— Toronto Home and School Council, Year-book, 1927/1928.
Nancy Kiefer, « BROWN, ADA MARY (Courtice) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/brown_ada_mary_15F.html.
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Auteur de l'article: | Nancy Kiefer |
Titre de l'article: | BROWN, ADA MARY (Courtice) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
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