BLISS, JOHN MURRAY, avocat, officier de milice, fonctionnaire, homme politique, juge et administrateur colonial, né le 22 février 1771 au Massachusetts, enfant unique de Daniel Bliss et d’Isabella (Isabel) Murray ; le 7 août 1797, il épousa à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, Sarah Green Upham, et ils eurent deux fils et quatre filles ; décédé dans cette ville le 22 août 1834.

Le père de John Murray Bliss était un éminent avocat du Massachusetts ; loyaliste, il immigra au Nouveau-Brunswick avec sa famille après sa nomination au premier Conseil du Nouveau-Brunswick, en 1784. Son grand-père maternel était le colonel John Murray, autre avocat éminent qui avait été nommé conseiller au Massachusetts, bien qu’il n’ait jamais prêté le serment d’office. En 1797, John Murray Bliss épousa sa cousine germaine, Sarah Green Upham, fille du juge Joshua Upham*, membre lui aussi du Conseil du Nouveau-Brunswick ; en 1819, leur fils George Pidgeon Bliss se maria avec la fille de Thomas Wetmore, procureur général du Nouveau-Brunswick. Dès les années 1820, les Bliss, les Murray, les Upham et les Wetmore formaient donc un réseau de familles loyalistes intimement liées, et le patriarche reconnu de « cette puissante famille », comme le lieutenant-gouverneur sir Howard Douglas* la décrivait, était John Murray Bliss.

Bliss étudia le droit dans les cabinets de Jonathan Sewell* et de Jonathan Bliss. Il fut admis au barreau en 1792 et commença à exercer sa profession à Fredericton. En 1794, il devint juge-avocat des forces armées du Nouveau-Brunswick, poste qu’il allait conserver durant près de 20 ans. Jeune homme, il était connu pour son caractère emporté ; en 1800, il se battit en duel avec Samuel Denny Street, mais les deux hommes s’en tirèrent indemnes. Leur querelle ; qui survint à propos d’une affaire judiciaire, reflétait en partie l’intense rivalité qui existait entre les membres d’un barreau encombré à la recherche de la gloire et de l’argent. Au cours des années 1790, Bliss s’était senti si découragé par ses perspectives d’avenir qu’il avait sérieusement envisagé de retourner aux Etats-Unis, mais il persévéra et se constitua peu à peu une large clientèle. Après la mort de son père, Bliss acquit la propriété familiale de Lincoln, au Nouveau-Brunswick, et termina la construction de Belmont, considérée comme la plus belle maison de la colonie. En 1798, on lui avait confié le commandement d’une compagnie de milice et, après l’incorporation de la milice en 1808, il servit comme major ; durant la guerre de 1812, il devait agir à titre d’aide de camp provincial auprès de l’administrateur et commandant des forces armées, le major général George Stracey Smyth. Il succéda à Ward Chipman au poste de solliciteur général en 1809 et devint greffier de la chambre d’Assemblée deux ans plus tard. Après avoir subi la défaite aux élections législatives de 1809, il fut élu député de la circonscription d’York au cours d’une élection partielle ; il siégea pour la première fois à l’Assemblée le 26 janvier 1814. Le 17 mai 1816, il fut élevé au Conseil du Nouveau-Brunswick et, le 9 juillet, avec une certaine répugnance, puisqu’il affirmait gagner £1 500 par an dans le secteur privé, il devint juge suppléant de la Cour suprême, occupant ainsi le poste laissé vacant par la mort d’Edward Winslow*. En raison de la « santé délicate » du juge en chef Jonathan Bliss, des fréquentes absences du juge suppléant Ward Chipman et plus tard de celles de son fils, Ward Chipman*, et du refus du juge en chef John Saunders d’aller en tournée, Bliss accomplit une partie exceptionnellement importante du travail de la Cour suprême durant les deux décennies qui suivirent.

Du 21 février 1824 jusqu’à l’arrivée de sir Howard Douglas le 28 août, Bliss assuma aussi les fonctions d’administrateur du Nouveau-Brunswick. Sa décision la plus controversée fut de destituer George Shore* de ses fonctions d’arpenteur général, de receveur général et de vérificateur général des comptes, et de nommer son fils George Pidgeon Bliss à sa place. Douglas ne put confirmer cette nomination mais, pour apaiser l’ex-administrateur, il persuada les autorités londoniennes d’accorder le poste de receveur général au jeune Bliss. Tant que Douglas demeura dans la colonie, il parvint à maintenir l’équilibre du pouvoir et du favoritisme entre les familles loyalistes plus anciennes et une faction rivale qui gravitait autour de Thomas Baillie*, le puissant commissaire des Terres de la couronne dont la nomination avait beaucoup diminué la valeur du poste de receveur général. Après le départ de Douglas en 1829, Bliss amena le conseil à voter une réduction substantielle des émoluments de Baillie, mais le gouvernement britannique écarta sa recommandation. Selon Douglas, Bliss avait été « profondément blessé et mortifié » par la décision du ministère des Colonies d’interdire aux juges les fonctions d’administrateur ; au cours des années 1830, il joua un rôle moins actif dans les affaires politiques de la colonie, particulièrement après l’exclusion des juges du conseil en 1831. En 1834, il posa sa candidature au poste de juge en chef, mais elle fut repoussée en faveur de celle du jeune Ward Chipman qui, bien qu’il ait eu moins d’ancienneté que Bliss au tribunal, jouissait d’une plus grande influence à Londres. Bliss mourut plus tard la même année, pendant qu’il séjournait à Saint-Jean ; il fut enterré à Fredericton.

La notice nécrologique du New-Brunswick Courier mentionnait que John Murray Bliss avait été « vénéré et aimé » par les membres du barreau et que « la dignité de sa conduite et la courtoisie de ses manières » lui avaient « valu [...] le respect de tous ceux qui [avaient eu] des rapports avec lui ». Pourtant, ni comme avocat ni comme juge, il ne semble s’être élevé au-dessus du commun. En tant qu’attorney, il participa à un seul procès important, le célèbre procès type sur l’esclavage en 1800 ; il comptait au nombre des cinq avocats-conseils qui soutinrent sans succès sa légalité au Nouveau-Brunswick [V. Caleb Jones*]. Il ne semble pas avoir attiré d’étudiants dans son cabinet. Comme juge, il aurait prononcé des peines un peu moins sévères que celles de ses collègues, et sa clémence fut même une fois « un sujet général de conversation ». Il prit une part active aux affaires publiques de Fredericton où il siégea à différentes reprises en qualité d’administrateur du Collège of New Brunswick, de président de la filiale de la Society for Promoting Christian Knowledge et de président de la New-Brunswick Agricultural and Emigrant Society. Cependant, il ne devait pas son influence politique à sa carrière publique mais à ses nombreuses relations dans les familles loyalistes en vue. Comme un de ses fils était mort avant lui et que George Pidgeon Bliss mourut en 1836, sa propre famille déclina après sa mort.

Phillip Buckner

Les informations généalogiques contenues dans cette biographie ont été tirées des APNB, MC 1, L. D. Bliss, « Lines of descent in the ancestry of George Pidgeon Bliss and Sarah Armstrong » (stencil dactylographié, 1975) ; MC 1156, et du New-Brunswick Courier, 23 août 1834. On trouve quelques références éparses à John Murray Bliss aux APC, dans les papiers Sewell (MG 23, GII, 10, vol. 3 : 636640, 762769, 790793) ; dans les papiers Douglas (MG 24, A3, 3 : 4547, 57 ; 4 : 3233, 143145, 288290) ; et au PRO, CO 188/41 : 125 ; 188/50 : 48, 97 ; 323/158 : 226227. On trouve plusieurs mentions de Bliss dans la New-Brunswick Royal Gazette, particulièrement 9 févr. 1819, 16 janv. 1821, 2 sept., 14 oct. 1823, 24 févr. 1824, 20 juin 1826 ; et dans le New-Brunswick Courier, 11 oct. 1823, 27 juill. 1827, 3 mai, 11 oct. 1828. Les seules études valables sont : Lawrence, Judges of N.B. (Stockton et Raymond) ; et MacNutt, New Brunswick.

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Phillip Buckner, « BLISS, JOHN MURRAY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/bliss_john_murray_6F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
Année de la révision:    1987
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