BIRGE, CYRUS ALBERT, marchand, comptable et industriel, né le 7 novembre 1847 dans le canton de Trafalgar, Haut-Canada, fils de Herman P. Birge et de Helen M. Ainslie, fermiers ; le 30 août 1870, il épousa à Oakville, Ontario, Rebecca Jane Coote (décédée en 1898), et ils eurent un fils et une fille, puis le 19 février 1902, à Wingham, Ontario, Margaret Vanstone (décédée en 1904), et de ce mariage naquit un fils, et finalement en 1908 Mabel I. Sturt, de Brooklyn (New York) ; décédé le 14 décembre 1929 à Hamilton, Ontario.
Vers 1840, le père de Cyrus Albert Birge arriva de Hartford, au Connecticut, et s’installa dans la région d’Oakville. En 1842, il épousa Helen M. Ainslie, qui venait d’un canton voisin, celui de Nelson. Malgré la mort de son père en 1855, Cyrus Albert put passer plusieurs années dans des écoles locales, dont l’Oakville Grammar School. À l’âge de 18 ans, il commença à s’initier à la mercerie mais, trois ans plus tard, il décida de s’inscrire en médecine au Victoria College de Cobourg. Au bout d’une seule année, son état de santé l’amena à retourner à Oakville, où il travailla pour un marchand de nouveautés. Il ouvrit une épicerie à Stratford en 1870, puis une à Chatham. Deux ans après, il fut engagé comme comptable au service du génie de la Great Western Railway Company. Au début, il travaillait à Hamilton, mais il passa aussi quelque temps à London. En 1882, il partit diriger la Canada Screw Company. Cette entreprise de Dundas, achetée en 1876 par l’American Screw Company de Providence, dans le Rhode Island, connaissait des difficultés financières. Birge réussit à la remettre sur pied. Conformément à la tendance qui voulait que l’on embauche de la main-d’œuvre féminine dans les manufactures, l’entreprise engagea des jeunes femmes pour faire fonctionner le nouvel équipement de visserie, de fabrication américaine. En 1883, Birge s’associa à l’industriel américain Charles Alexander pour exploiter l’usine qui, en raison d’avantages fiscaux, fut installée à Hamilton en 1887. Il fut vice-président et administrateur délégué de 1883 à 1898, puis, cette année-là, il racheta les parts des investisseurs américains et accéda à la présidence. En 1907, sa société fusionna avec une autre grosse entreprise hamiltonienne, l’Ontario Tack Company, qui avait aussi été lancée par des investisseurs américains. La nouvelle entreprise, qui conserva le nom de Canada Screw Company et garda Birge comme président, s’installa dans une vaste usine très avancée sur le plan technique. Cette usine se trouvait dans un quartier en plein essor, le secteur industriel de l’extrémité est de Hamilton.
En raison de ses intérêts dans l’industrie du fer, Birge participait déjà à une autre entreprise d’envergure. En 1895, lui-même et un groupe d’hommes d’affaires de Hamilton – qui comprenait entre autres Andrew Trew Wood*, William Southam*, John Henry Tilden et John Milne – avaient fondé la Hamilton Blast Furnace Company Limited dans le but de prendre en charge les hauts fourneaux de la Hamilton Iron and Steel Company Limited. Constituée juridiquement en 1893, celle-ci avait été frappée par la très grave dépression du commerce du fer. Birge fit partie du conseil de la Hamilton Blast Furnace Company jusqu’en 1899, année où le regroupement de cette entreprise avec l’Ontario Rolling Mills Company, aussi de Hamilton, donna lieu à la création de la Hamilton Steel and Iron Company Limited. En 1910, une fusion d’une bien plus grande ampleur réunit des usines de fonte et des aciéries du centre du Canada (la Canada Screw Company de Birge, la Hamilton Steel and Iron, la Montreal Rolling Mills, la Canada Bolt and Nut de Toronto) au sein d’une nouvelle société, la Canadian Steel Corporation Limited. Rebaptisée immédiatement Steel Company of Canada Limited [V. Wilmot Deloui Matthews*], elle engloberait aussi la Dominion Wire Manufacturing de Montréal. Même si Birge était à la veille de la retraite, il avait participé aux négociations, et le capital imposant qu’il investit dans la nouvelle entreprise lui permit d’avoir la vice-présidence. Toutefois, il ne prit pas une part active à l’exploitation, qui fut confiée surtout à Robert Hobson.
Birge était alors un membre respecté du milieu des affaires de Hamilton. La Bank of Hamilton l’élut membre de son conseil d’administration en 1904, vice-président en 1914 et président en 1923. Cette année-là, elle fusionna avec la Banque canadienne de commerce, et Birge passa au conseil d’administration de celle-ci. Sous sa présidence, une autre société de Hamilton, la Mercantile Trust Company, fusionna avec la National Trust un an plus tard. Birge faisait donc partie des personnages qui appartenaient au réseau serré des conseils d’administration de plusieurs entreprises industrielles de Hamilton. Par exemple, il était entré au conseil de la Sawyer-Massey Company en 1910 puis à celui de la Hamilton Stove and Heater Company en 1913 et à celui de la Dominion Power and Transmission Company en 1916 (dans ces deux derniers cas à titre de vice-président). À l’instar de plusieurs autres hommes d’affaires de Hamilton, il avait aussi des relations et des investissements à l’extérieur de la ville. Il fut président de la Sovereign Fire Insurance, vice-président de la Turbine Steamship et membre du conseil d’administration de la British American Oil Company, de la Chinook Coal Company et de la Lake of the Woods Milling Company. Naturellement, il appartenait au Bureau de commerce de Hamilton et à celui de Toronto. En 1903, il fut l’un des délégués canadiens au cinquième congrès des chambres de commerce de l’Empire, à Montréal.
D’un tempérament rude et opiniâtre, Birge avait également atteint une position d’autorité dans le milieu national des affaires. Lorsque, en 1900, l’Association des manufacturiers canadiens se réorganisa de fond en comble pour exercer des pressions avec plus d’efficacité, il en était déjà membre depuis une vingtaine d’années et avait appartenu au comité directeur. La part qu’il prit à cette réorganisation ne dut pas être négligeable puisqu’il accéda à la vice-présidence de la section ontarienne en 1900, à la vice-présidence nationale en 1901 et à la présidence en 1902. À ces divers titres, il avait pour mission de promouvoir les intérêts des manufacturiers dans des domaines stratégiques : le tarif, la politique du transport et les relations industrielles. Pendant qu’il en était président, l’association adopta, sur recommandation d’un comité spécial, une position rigoureusement antisyndicale et combattit en particulier toute législation favorable aux travailleurs. Dans son allocution présidentielle en 1903, Birge proclama que l’employeur « [devait] être libre d’acheter sans ingérence la main-d’œuvre dont il a[vait] besoin » et dénonça le rapprochement entre les syndicats canadiens et américains. Par la suite, il fit partie d’un comité important de l’association, celui du tarif. En 1909, il entra au comité directeur de la section fondée cette année-là à Hamilton par l’association ; en 1912–1913, il en fut président.
De l’avis de Birge, un éminent homme d’affaires se devait de contribuer aux activités de son assemblée de fidèles. À l’église méthodiste Wesley de Hamilton, il fut surintendant de l’école du dimanche durant 17 ans ainsi qu’économe et administrateur durant 28 ans. En outre, il assista à la Conférence générale de l’Église méthodiste du Canada et appartint au comité d’étude sur l’union des Églises. Pourtant, la tendance progressiste – le mouvement Social Gospel – qui influençait le méthodisme canadien au début du xxe siècle commençait à lui déplaire. À la conférence générale d’octobre 1918, à Hamilton, seulement quatre délégués, dont lui, se prononcèrent contre un rapport qui réclamait que la vie économique ne soit plus « fondée sur la concurrence et le profit mais sur la coopération et l’entraide ». La charité paternaliste lui convenait davantage. En 1907, il avait donné 50 000 $ à la Victoria University de Toronto, soit l’équivalent de la dotation versée par l’industriel américain Andrew Carnegie à la bibliothèque du même établissement. En 1915, il devint président de la section hamiltonienne du Fonds patriotique canadien, qui venait en aide aux femmes et aux enfants des membres des forces armées. Par la suite, il appartint au comité directeur national de l’organisation.
Birge était membre de deux fraternités ouvertes à tout venant, la société des Oddfellows et l’Ancient Order United Workmen. Sa fortune et ses puissantes relations lui donnaient également accès à des cercles de loisirs réservés aux hommes de la haute société. Il se retirait au Hamilton Club, au National Club ou au Toronto Club ; pour pratiquer des sports de plein air, il fréquentait le Caledon Mountain Trout Club, le Tamahaac Club et le Hamilton Golf and Country Club. Il mourut subitement le 14 décembre 1929.
Issu d’un milieu rural plutôt modeste, Cyrus Albert Birge atteignit une position élevée dans les cercles d’affaires du Sud ontarien. Sa réussite reposait sans doute sur des compétences administratives acquises dans une grande société ferroviaire, sur des qualités d’entrepreneur développées au cours de la vague d’industrialisation de la fin du xixe siècle et sur sa participation aux projets collectifs d’autres capitalistes de Hamilton qui rassemblèrent les ressources nécessaires pour faire de la production en série. Dans cette ère nouvelle, Birge devint un investisseur plus passif, mais demeura néanmoins un citoyen respecté qui, grâce à sa fortune, appartint au conseil d’administration de nombreuses compagnies et qui, inspiré par sa foi méthodiste, œuvra pour le bien public.
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Craig Heron, « BIRGE, CYRUS ALBERT », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/birge_cyrus_albert_15F.html.
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
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