BIGSBY, JOHN JEREMIAH, médecin et géologue, né le 4 août 1792 à Nottingham, Angleterre, fils de Jacob Bigsby ; il épousa, probablement en 1827, Sarah Beevor, de Newark-upon-Trent, Angleterre, et ils eurent deux enfants ; décédé le 10 février 1881 à Londres.

Comme son père, John Jeremiah Bigsby fit carrière en médecine après avoir obtenu en 1814 un doctorat dans cette discipline de l’University of Edinburgh. La même année, il publia sa thèse et se joignit à titre d’interne à l’Edinburgh Infirmary. Le 14 mars 1816, il entra dans l’armée britannique en tant que chirurgien adjoint et il servit pendant peu de temps en 1817 dans le corps médical à la colonie du Cap (République d’Afrique du Sud).

En août 1818, Bigsby arriva en Amérique du Nord britannique à titre de chirurgien adjoint d’état-major. En septembre, alors en garnison à Québec, il fut affecté au soin d’immigrants irlandais, victimes d’une épidémie de typhus, à Hawkesbury (Ontario) sur la rivière Outaouais. Pendant le voyage sur un bateau à vapeur, l’intérêt croissant de Bigsby pour la géologie de la région du Saint-Laurent se manifesta dans les remarques qu’il fit à Louis-Joseph Papineau*, son compagnon de route. Bigsby revint passer l’hiver à Québec et, au printemps de 1819, il reçut du corps de santé l’ordre d’étudier la géologie du Haut-Canada. Au cours de cet été-là, voyageant avec une maigre allocation de £26, Bigsby recueillit des spécimens géologiques sur un vaste territoire circonscrit par la rivière Outaouais et les lacs Nipissing, Huron, Erié et Ontario. À l’automne, en compagnie du chef du corps de santé, il se rendit de Québec à Baie-Saint-Paul, Kamouraska et La Malbaie où il étudia attentivement la flore et la faune.

À l’hiver de 1819–1820, Bigsby fut nommé secrétaire adjoint et médecin militaire de l’équipe britannique de la commission de la frontière internationale, dont la création avait été stipulée dans les clauses du traité de Gand (1814). Sa nomination semble avoir été le résultat d’un concours de circonstances, à savoir la démission du secrétaire britannique et l’impression favorable que Bigsby put avoir produite sur le représentant principal de l’équipe américaine, le major Joseph Delafield, lors d’une rencontre imprévue pendant la tournée estivale de 1819. Ainsi, au printemps de 1820, Bigsby partit avec le groupe britannique, qui comptait David Thompson* comme arpenteur en chef. En août, ils s’unirent à l’équipe de Delafield à l’île St Joseph, dans le nord du lac Huron, et, après avoir quitté les Américains, ils firent l’arpentage des îles Manitoulin et Drummond et celui d’autres îles avant que le temps rigoureux ne les forçât à rentrer à Montréal en novembre.

Au printemps de 1821, la commission se réunit dans la région du Niagara et Bigsby rencontra officiellement son conseil pour la première fois en mai. Cet été-là, il prit la direction de l’équipe britannique chargée de délimiter la frontière dans la région des lacs St Clair et Érié. Après avoir terminé l’arpentage, Bigsby entreprit en août une tournée de la rive nord du Saint-Laurent, à partir de La Malbaie, avant de revenir à Québec pour l’hiver. La commission demeura inactive à l’été de 1822 et Bigsby en profita pour visiter la région des chutes du Niagara avec un groupe international de touristes. L’été suivant, cependant, la commission reprit le travail, s’attaquant à son entreprise la plus ambitieuse, celle de dresser la carte de la vaste région située entre le fort William (maintenant partie de Thunder Bay) et le lac des Bois. La participation de Bigsby aux activités de la commission non seulement lui fournit un territoire immense où il put recueillir des spécimens géologiques, mais lui permit d’avoir des liens personnels avec les communautés scientifiques britanniques et américaines.

Les rapports de Bigsby concernant ses activités sur le terrain, rédigés en grande partie pendant les hivers, furent portés à l’attention du public de maintes façons. De 1820 à 1825, Bigsby présenta plusieurs comptes rendus de ses expériences dans les régions du Saint-Laurent et des Grands Lacs dans le prestigieux American Journal of Science, and Arts de Benjamin Silliman. Il prépara à l’intention du gouverneur Dalhousie [Ramsay*] un état de ses travaux dans la région du lac Huron, qui fut lu à la Geological Society of London en 1823 et publié l’année suivante dans les Transactions de la société. Bigsby écrivit aussi dans le Canadian Review and Literary and Historical Journal, momentanément publié à Montréal. En 1824, le journal fit paraître un article d’un auteur anonyme intitulé « On the utility and design of the science of geology [...] », qu’on peut attribuer à Bigsby à cause du style et du contenu ; cet essai, qui fait appel à des données recueillies sur le territoire canadien, est l’un des premiers ouvrages savants sur la géologie écrits en Amérique du Nord britannique. Il témoigne d’une connaissance des débats de l’époque sur les origines géologiques au sein des écoles de Georges Cuvier, James Hutton et William Buckland, mais son auteur n’y participe pas directement et incite plutôt le « géologue praticien » à se rendre compte de la nature et de la composition des éléments de la croûte terrestre par des travaux et des recherches approfondis sur le terrain. On y lit que le géologue devrait enregistrer les faits et assembler des spécimens et, en second lieu, voir en eux « la bonté et la sagesse du grand Architecte, et sa puissance dans les bouleversements et les ravages subséquents que les éléments ont causés de temps à autre ». Pendant ses années passées au Canada, Bigsby fut élu fellow de la Geological Society of London en 1823, membre honoraire de l’American Geological Society en 1824 et membre de l’American Philosophical Society of Philadelphia en 1825.

À la fin de 1826 ou au début de 1827, soit pour des raisons personnelles ou à cause du peu d’intérêt que démontrèrent les autorités pour l’exploitation des ressources minérales du Canada, Bigsby retourna en Angleterre. Il s’établit dans son Nottinghamshire natal et ouvrit un bureau de médecin à Newark-upon-Trent. Il y remplit les fonctions d’échevin et de maire entre 1827 et 1830 et devint en 1840 le doyen des médecins au Newark Hospital. Toujours à cause de son intérêt soutenu pour les conférences et la publication, il donna, entre 1827 et 1829, à la Geological Society of London, plusieurs conférences sur la géologie du Canada, lesquelles furent publiées dans le Philosophical Magazine.

Avec le revenu modeste provenant de sa clientèle et de son mariage, Bigsby put déménager à Londres en 1846 et consacrer plus de temps à ses occupations littéraires et scientifiques. En 1850, il publia un essai autobiographique en deux volumes intitulé The shoe and canoe [...] portant sur ses expériences avec la commission de la frontière internationale. Il s’agit d’un récit de voyage très intéressant qui évoque d’une façon charmante les péripéties et les accidents de l’arpentage et prête une attention spéciale à la couleur et aux circonstances locales ; des croquis du paysage de la main de Bigsby y sont inclus. De 1850 à 1864, Bigsby donna de nombreuses conférences sur la géologie de l’Amérique du Nord et les publia. Pendant son séjour à Londres, il rédigea aussi un répertoire détaillé de fossiles, dont la première partie parut en 1868 sous le titre Thesaurus Siluricus [...]. Il y fait allusion à plusieurs reprises aux découvertes de sir William Edmond Logan*, premier directeur de la Commission géologique du Canada, et reconnaît sa dette envers l’œuvre des Canadiens Elkanah Billings* et John William Dawson*. L’année suivante, Bigsby fut élu membre de la Royal Society et en reçut la médaille Murchison. En 1877, il fit don de la médaille Bigsby à la Geological Society of London, laquelle devait être décernée tous les deux ans à un étudiant en géologie américaine âgé de moins de 45 ans. Son deuxième répertoire des fossiles intitulé Thesaurus Devonico-Carboniferous [...] parut en 1878, alors qu’il était âgé de plus de 80 ans ; un troisième volume, « Permian Thesaurus », était presque terminé à l’époque de sa mort. Par testament, Bigsby légua sa bibliothèque et ses travaux en géologie au village de Nottingham pour l’usage des étudiants du nouvel University College.

Les contributions de Bigsby à la minéralogie et à la paléontologie canadiennes furent considérables malgré son bref séjour en Amérique du Nord britannique. Logan, un géologue qui, comme lui, attirait l’attention sur « les faits, ensuite les théories », éprouva du respect tant pour les faits établis par Bigsby que pour ses théories ; il déclara en 1857 que l’ouvrage que Bigsby écrivit en 1823 sur la géographie et la géologie du lac Huron était « le premier essai d’une quelconque importance sur les fossiles du Canada ». Le rapport de 1863 de la Commission géologique du Canada reconnaît le rôle essentiel de Bigsby dans la délimitation de l’emplacement de certains dépôts de minerai dans la région du lac Supérieur. George Mercer Dawson*, un autre directeur de la Commission géologique du Canada et récipiendaire de la médaille Bigsby en 1891, lui rendit hommage en 1878 en donnant son nom à l’inlet de Bigsby dans les îles de la Reine-Charlotte.

Anthony W. Rasporich

John Jeremiah Bigsby est l’auteur des ouvrages suivants : Localities of Canadian minerals, with notes and extracts, chiefly collected from the writings of John Bigsby [...] (Québec, 1827) ; « Notes on the geography and geology of Lake Huron », Geological Soc. of London, Trans. (Londres), 2e sér., 1 (1824) : 175–209 ; « On the utility and design of the science of geology, and the best method of acquiring a knowledge of it ; with geological sketches of Canada », Canadian Rev. and Literary and Hist. Journal (Montréal), 1 (1824–1825) : 377–395 ; The shoe and canoe, or pictures of travel in the Canadas, illustrative of their scenery and of colonial life ; with facts and opinions on emigration, state policy, and other points of public interest [...] (2 vol., Londres, 1850) ; Thesaurus Devonico-Carboniferous : the flora and fauna of the Devonian and carboniferous periods [...] (Londres, 1878) ; et Thesaurus Siluricus : the flora and fauna of the Silurian period [...] (Londres, 1868). Pour d’autres publications de Bigsby, V. Geologic literature on North America, 1785–1918, J. M. Nickles, compil. (2 vol., Washington, 1923–1924),1 : 100s.

APC, MG 18, H25, 2 : no 54 ; RG 8,1 (C ser.), vol. 0.— [Joseph Delafield], The unfortified boundary : a diary of the first survey of the Canadian boundary line from St. Regis to the Lake of the Woods, Robert McElroy et Thomas Riggs, édit. (New York, 1943).— Quebec Gazette, 29 mai, 23 oct., 26 nov. 1820, 26 nov. 1821.— Times (Londres), 15 févr., 13 avril 1881.— DNB.— Zaslow, Reading the rocks.— Robert Etheridge, « Memoir : John Jeremiah Bigsby », Geological Soc. of London, Quarterly Journal (Londres), 37 (1881), [2° partie] : 39–41.

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Anthony W. Rasporich, « BIGSBY, JOHN JEREMIAH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/bigsby_john_jeremiah_11F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
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