BENEDICT, ROSWELL GARDINIER, ingénieur civil et homme d’affaires, né le 9 décembre 1815, peut-être à Saratoga Springs, New York, fils de Daniel Davis Benedict et de Phoebe Hedges ; décédé le 5 février 1859 à New York.

Roswell Gardinier Benedict entreprit sa carrière d’ingénieur civil vers 1833 et, comme d’autres ingénieurs de cette époque, il acquit une formation pratique en travaillant à de nombreux chemins de fer dans les états de New York et de l’Ohio. Vers 1847, il alla s’établir dans le Haut-Canada et obtint un emploi dans le projet de reconstruction du canal Welland. Sur ce chantier, il fit la connaissance de Samuel Zimmerman, entrepreneur de la Pennsylvanie qui construisait plusieurs écluses et un aqueduc. Cette rencontre aboutit à une association professionnelle qui allait durer jusqu’à la mort prématurée de Zimmerman en 1857. Benedict contribua également à tracer les plans d’un chemin de fer entre Toronto et la baie Géorgienne (probablement le Toronto, Simcoe and Huron Union Rail-Road) et, en 1847, outre son travail au canal Welland, il devint l’assistant de Charles Beebe Stuart, un Américain d’origine qui était ingénieur en chef de la Great Western Rail-Road Company.

En janvier 1848, Stuart retourna dans l’état de New York, à la suite de sa nomination comme ingénieur en titre, et Benedict le remplaça à la Great Western ; il refit l’arpentage et modifia le parcours de certains tronçons du chemin de fer. À l’été, durant une suspension temporaire des travaux, il passa quelque temps à la construction d’un chemin de fer entre Lockport et Rochester, dans l’état de New York. Il conserva néanmoins son poste à la Great Western. Il était bien connu des principaux financiers américains du secteur ferroviaire, comme Erastus Corning et Lewis Benedict, un de ses parents éloignés, mais ce furent plutôt ses liens avec le groupe étroitement uni des entrepreneurs et des ingénieurs américains à l’œuvre au Canada qui constituèrent le facteur déterminant dans ses relations avec la Great Western.

En 1849, Benedict contribua à persuader le conseil d’administration d’accorder le contrat de construction de la section est du chemin de fer à la firme de James Oswald et de Samuel Zimmerman. Les travaux débutèrent en 1851. Plus tard cette année-là, surtout grâce à l’influence grandissante de Zimmerman et à l’enthousiasme avec lequel lui-même faisait la promotion du chemin de fer, Benedict fut nommé ingénieur en chef. En réalité, cette nomination assurait à Zimmerman la mainmise sur un service clé, puisque les sommes attribuées aux entrepreneurs dépendaient des devis de l’ingénieur en chef. Même si cette sorte d’association fondée sur une sympathie mutuelle était presque monnaie courante dans la construction des premiers chemins de fer en Amérique du Nord, elle souleva la colère des quelques ingénieurs canadiens qui estimaient avoir la compétence requise pour obtenir le poste et qui étaient cependant laissés pour compte. Particulièrement offensé, Walter Shanly* déclara : « Quant à travailler sous les auspices de Roswell Benedict – alias Sam Zimmerman – c’est une chose absurde, et il n’en sera pas question aussi longtemps que je pourrai trouver une place de porte-mire ailleurs. » Quelques mois seulement après sa nomination, Benedict avait fait venir dans son service plusieurs ingénieurs américains de ses amis, dont Ira Spaulding avec lequel il partageait une maison à Hamilton, Charles L. McAlpine et Silas Wright Burt.

En sa qualité d’ingénieur en chef, Benedict avait la haute main sur les conditions d’emploi, les devis, l’achat des approvisionnements, l’adjudication des contrats (sans spécification des coûts et quantités) et les questions strictement reliées au travail de l’ingénieur. En décembre 1851, l’étendue des pouvoirs décisionnels que Benedict détenait sans avoir à rendre des comptes, et qu’il partageait avec Zimmerman, éveillait de plus en plus la méfiance de Peter Buchanan et du conseil d’administration de la Great Western. La lenteur des travaux de construction incita finalement les investisseurs américains à réclamer la nomination d’un commissaire de surveillance et la tenue d’une enquête dans le service de Benedict. L’enquête révéla la négligence de ce dernier dans l’exécution de son travail d’ingénieur et l’ampleur de l’influence exercée par Zimmerman, à qui Benedict avait remis le contrat de construction de la section centrale. Dans un effort pour s’assurer la mainmise sur l’entreprise, Isaac Buchanan* et d’autres actionnaires et administrateurs obligèrent Benedict à démissionner en novembre 1852, sous prétexte qu’il avait grossièrement sous-estimé les coûts, et nommèrent Charles John Brydges* directeur général.

Benedict n’en continua pas moins de recevoir des offres d’emploi comme ingénieur. Au printemps de 1853, il fut engagé à titre d’ingénieur en chef par la Hamilton and Toronto Railway Company, qui avait été fondée par un certain nombre d’administrateurs de la Great Western en vue d’établir une liaison avec le Grand Tronc à ‘Toronto. Benedict, qui semblait avoir réparé quelque peu ses torts auprès des ingénieurs canadiens en engageant Francis Shanly* pour la construction de ce chemin de fer, ne resta pas longtemps avec la compagnie. À peine quelques mois plus tard, il était au service de la London and Port Stanley Railway Company, où il fut rejoint par la firme d’entrepreneurs Moore and Pierson qui avait travaillé pour lui à la Great Western. À l’automne de 1853, il avait également été nommé ingénieur en chef à la Woodstock and Lake Erie Rail-way and Harbour Company, laquelle ne tarda pas à engager Zimmerman comme entrepreneur. La construction prit fin en 1854, mais il est probable que Benedict demeura avec cette compagnie jusqu’en 1856.

Au milieu des années 1850, Benedict avait acheté une maison à Clifton (Niagara Falls), qui était le terminus du chemin de fer de la Great Western dans l’Est et l’endroit où l’on traversait la rivière pour se rendre dans l’état de New York, et il s’était lancé dans deux entreprises commerciales avec d’anciens associés des chemins de fer. Avec Ira Spaulding, il fit l’acquisition en 1856 d’une grande partie des vastes propriétés foncières de Zimmerman à Clifton. En société avec Charles Pierson, il fonda la R. G. Benedict and Company qui mit ensuite ces biens en valeur et donna des terrains pour la construction d’un marché public, d’un hôtel de ville et de plusieurs églises. À Niagara (Niagara-on-the-Lake), en 1857, Benedict et Pierson furent également associés dans la « fabrique de voitures de Niagara » qui, bien sûr, se spécialisait dans la production de voitures de chemin de fer.

Roswell Gardinier Benedict mourut dans un hôtel de New York en 1859, après quelques mois de maladie. Son testament, qui précisait les modalités de cession de ses propriétés de Clifton, en dit long sur le caractère de cet homme qui, semble-t-il, ne se maria jamais. Parmi les biens qu’il légua à divers membres de sa famille se trouvaient ses livres techniques et ses instruments, des pièces d’équipement sportif et des trophées, une vaste collection de photographies, de gravures et de peintures de genre de Cornelius Krieghoff*, un service d’argenterie offert par la Great Western, une trousse de « premiers soins » et deux chevalières, l’une portant l’inscription Let her rip (À pleins gaz !) et l’autre, I range free (Je cours en liberté).

Christopher Alfred Andreae

AO, MU 2756 ; RG 22, sér. 289, testament de R. G. Benedict.— APC, MG 24, D16, 3 : 1564 ; 5 : 2823–2831 ; 14 :11927–11928 ; 31 : 25789–25792 ; 94 : 65441–65467 ; D80, 1, 4 ; MG 29, B6, 1 : 2, 7.— McKinney Library, Albany Institute of Hist. and Art (Albany, N.Y.), Erastus Coming coll., Forbes à Coming, 11 sept. 1852.— S. W. Burt, « An engineer on the Great Western : a selection from the personal reminiscenses of Silas Wright Burt », A. G. Bogue et L. R. Benson, édit., Western Ontario Hist. Nuggets (London), nº 17 (1952) : 4.— Canada, prov. du, Assemblée législative, App. des journaux, 1849, app. QQQ (interrogatoire de R. G. Benedict au sujet de la construction du Great Western Rail-Road).— Daylight through the mountain : letters and labours of civil engineers Walter and Francis Shanly, F. N. Walker, édit. ([Montréal], 1957), 83, 177–178.— Daily Spectator, and Journal of Commerce, 19 mars 1857.— Hamilton Gazette, and General Advertiser (Hamilton, Ontario), 26 déc. 1853, 23 janv. 1854.— Mail (Niagara [Niagara-on-the-Lake, Ontario]), 9 févr. 1859.— Weekly Dispatch, St. Thomas, Port Stanley, and County of Elgin Advertiser (St Thomas, Ontario), 25 août 1853.— H. M. Benedict, The genealogy of the Benedicts in America (Albany, 1870), 313.— Canada directory, 1857–1858 : 102, 177, 472.— P. A. Baskerville, « The boardroom and beyond ; aspects of the Upper Canadian railroad community » (thèse de ph.d., Queen’s Univ., Kingston, Ontario, 1973).— Walter Neutel, « From « southern » concept to Canada Southern Railway, 1835–1873 » (thèse de m.a., Univ. of Western Ontario, London, 1968).— G. R. Stevens, Canadian National Railways (2 vol., Toronto et Vancouver, 1960–1962), 1 : 105.— P. A. Baskerville, « Professional vs. proprietor : power distribution in the railroad world of Upper Canada/Ontario, 1850 to 1881 », SHC Communications hist., 1978 : 47–63.— R. D. Smith, « The early years of the Great Western Railway, 1833–1857 », OH, 60 (1968) : 205–227.

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Christopher Alfred Andreae, « BENEDICT, ROSWELL GARDINIER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/benedict_roswell_gardinier_8F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
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