BELL, GORDON, médecin, professeur, bactériologiste et sportif, né le 22 mai 1863 à Pembroke, Haut-Canada, fils de John Bell et de Mary Ann Wight ; le 19 août 1897, il épousa à Elton, Manitoba, Grace Campbell MacEwan, et ils eurent un fils et une fille ; décédé le 8 août 1923 à Winnipeg et inhumé dans cette ville au cimetière Elmwood.
Amant de la nature et féru de classiques, le père de Gordon Bell immigra d’Écosse et fonda une entreprise de bois d’œuvre à Pembroke. Sa mère était engagée dans la vie communautaire. Chez eux, il y avait beaucoup de livres. Gordon fit ses petites classes à l’école privée de Mme Margaret McDougall, auteure et poétesse. Il étudia ensuite dans des écoles publiques et secondaires de Pembroke, où il acquit une solide formation en mathématiques, en sciences et en humanités. D’un tempérament timide et réservé, il possédait un humour mordant et faisait preuve de compassion et de générosité envers autrui.
En 1886, Bell obtint une licence ès arts avec mention à la University of Toronto. Comme on lui disait grand bien du collège médical de Manitoba, fondé peu de temps auparavant à Winnipeg, il s’y inscrivit en 1887. Il recevrait son diplôme trois ans plus tard. Pendant sa deuxième année de collège, il contracta une typhoïde qui se compliqua d’une grave infection à la jambe droite. Amputé en 1889, il dut porter une jambe de bois et resta boiteux, mais ce handicap n’entama ni son moral ni sa volonté de poursuivre ses études. Bell adhéra au Collège des médecins et chirurgiens de Manitoba le 17 juin 1891 ; à l’époque, la cotisation annuelle était de 2 $. Il s’inscrirait au College of Physicians and Surgeons of the North-West Territories le 3 juillet 1905 et au College of Physicians and Surgeons of the Province of Alberta en 1906.
Après l’obtention de son diplôme, Bell avait été nommé surintendant et médecin chef de l’asile de Brandon. Au bout de trois ans, il démissionna et partit pour Vienne, où il fit des études supérieures en ophtalmologie, en pathologie, en histologie et en bactériologie, science alors toute neuve. Une fois de retour à Winnipeg, il exerça avec James Wilford Good, le premier spécialiste de l’œil dans l’Ouest canadien, à peu près de 1893 à 1897. Il fut aussi maître de conférences en histologie et en pathologie au collège médical de Manitoba en 1894 et démonstrateur d’anatomie dans ce même établissement en 1895. Il y enseignerait la bactériologie, la pathologie et l’histologie de 1896 à 1905, la pathologie de 1905 à 1916 et la bactériologie de 1916 à 1923. Un laboratoire attenant au collège de médecine fut construit à son intention en 1897 à l’angle de la rue Kate et de l’avenue McDermot. Souvent, il y réunissait des praticiens et des étudiants pour des discussions et des consultations sur des problèmes médicaux. Il expliquait le fonctionnement de son microscope à l’aide de bactéries et de tissus malades prélevés sur des patients.
Nommé bactériologiste de la province le 1er avril 1897 par le gouvernement de Thomas Greenway*, Bell s’employa à formuler des recommandations sur les mesures à prendre pour résoudre les grands problèmes de santé publique – par exemple la tuberculose, la fièvre typhoïde, la diphtérie et les maladies vénériennes –, sur les normes à imposer aux fournisseurs de lait et aux distributeurs d’aliments, sur le contrôle de l’élimination des eaux usées et sur l’approvisionnement en eau potable. Des lois vinrent assurer la mise en vigueur et l’application des normes à la définition desquelles il avait contribué. Bell fut à l’avant-garde du mouvement visant à doter Winnipeg d’un approvisionnement abondant en eau saine. Finalement, en 1913, on commencerait la construction d’un aqueduc entre le lac Shoal et la ville [V. Henry Norlande Ruttan].
En 1904, Bell fut délégué au congrès annuel de la Canadian Association for the Prevention of Tuberculosis à Ottawa. À cette occasion, il demanda de l’aide fédérale au premier ministre, sir Wilfrid Laurier*, pour construire des sanatoriums dans les provinces. Quatre ans plus tard avait lieu la fondation de la Winnipeg Anti-Tuberculosis Society, et Bell travaillait à la création d’un sanatorium. En 1909, on bâtit, à Ninette, le Manitoba Sanatorium. Bell appartiendrait au comité directeur et au conseil d’administration de cet établissement jusqu’en 1923.
En 1916, Bell devint, en tant que bactériologiste de la province, membre d’office du Bureau de santé provincial. À compter de ce moment et jusqu’à son décès, il fut président du bureau et officier principal de santé de la province. Ce fut notamment à son instigation que le Public Health Act fut modifié en 1916 [V. James William Armstrong] pour instaurer des soins infirmiers sanitaires au Manitoba. Au début, on engagea 5 infirmières sanitaires ; en 1922, leur nombre s’élevait à 53.
Pendant l’épidémie de grippe espagnole qui suivit la Première Guerre mondiale, Bell tenta sans succès de mettre au point un vaccin. Il conclut que les décès étaient dus à une surinfection au streptocoque. Il fut le premier dans l’Ouest à utiliser un antisérum pour traiter la morve, infection équine qui se communique parfois aux humains et engendre une maladie respiratoire fatale.
Conférencier recherché à cause de son sens de l’humour, Bell prit souvent la parole au dîner annuel du collège médical de Manitoba. Malgré son handicap physique, il allait à la pêche et faisait du canot. Avec plusieurs autres médecins, il bâtit un pavillon de chasse au lac Manitoba, près du marais Delta. Grand amateur de chasse au canard, il fut président du Fort Garry Gun Club et champion manitobain de tir au pigeon. Plusieurs étudiants en médecine avaient vanté à Bell les eaux limpides du lac Fox, près de Minaki, en Ontario. En 1912, avec un groupe d’amis, il forma le Namaycush Fishing Club et construisit un camp de pêche au lac. À la maison d’été qu’il érigea près de ce bâtiment, il défricha de ses mains un jardin d’un demi-acre où il cultiva une multitude de fleurs et de plantes, notamment des bleuets. Avec ses amis, il construisit un bateau, un moulin à vent, un barrage et une roue à aubes.
Au début d’août 1923, Bell étudiait des cas de streptococcies du pharynx à Brandon, au Manitoba, en compagnie du pathologiste Sidney J. S. Pierce. Après avoir recueilli des échantillons et consulté un collègue à Winnipeg, il se rendit au lac Fox, où il fut pris d’un mal de gorge accompagné de frissons et de fièvre. Moins de 48 heures plus tard, il succombait à une septicémie streptococcique.
La mémoire de Gordon Bell a été honorée de plusieurs manières. La Winnipeg Medical Society a lancé une conférence annuelle ; la première a été donnée le 11 avril 1924 par James Bertram Collip*, un des découvreurs de l’insuline. Une école secondaire à Winnipeg a reçu le nom de Bell. À l’inauguration officielle, le 12 novembre 1926, on a dévoilé une plaque, et un grand ami de Bell, le docteur Edward William Montgomery*, a prononcé un discours. Une nouvelle Gordon Bell High School a été bâtie à Winnipeg en 1960. Au lac Fox, ses amis ont posé une plaque sur le camp de pêche. Le collège médical de Manitoba et l’Hôpital Général de Winnipeg ont créé le Gordon Bell Memorial Fund pour financer la recherche et les études cliniques. En 1997, un buste en plâtre de Bell, exécuté dans les années 1920 par l’artiste winnipeguoise Marguerite Taylor [Judd*], a été remis à la faculté de médecine de l’université de Manitoba. Deux ans plus tard, il a été coulé dans le bronze et placé sur un piédestal.
Collège des médecins et chirurgiens de Manitoba (Winnipeg), Record of registration, 1891.— Elmwood Cemetery Company (Winnipeg), Burial records, sect. 14, lot 296.— Manitoba, Dept. of Finance, Consumer and Corporate Affairs, Vital statistics (Winnipeg), no 1897-001455.— Univ. of Manitoba, Faculty of Medicine Arch. (Winnipeg), 21.9, Gordon Bell file.— Univ. of Manitoba Libraries, Neil John Maclean Health Sciences Library (Winnipeg), L. G. Bell, « Fox Lake : an informal history » (texte dactylographié, Winnipeg, s.d.).— Winnipeg Free Press, 20 août 1960.— L. G. Bell, « My father – Gordon Bell », Winnipeg Clinic Quarterly, 23 (1970) : 77–93.— F. T. Cadham, « Memorable personalities – II : Gordon Bell – a friend of all the world », Univ. of Manitoba Medical Journal (Winnipeg), 21 (1949–1950) : 61–67.— Canadian Medical Assoc., Journal (Toronto), 13 (1923) : 772s.— Ian Carr et R. E. Beamish, Manitoba medicine : a brief history (Winnipeg, 1999).— Ross Mitchell, « Medical history : Dr. Gordon Bell, 1863–1923 », Manitoba Medical Rev. (Winnipeg), 39 (août–sept. 1959) : 521–523 ; Medicine in Manitoba ; the story of its beginnings ([Winnipeg, 1955 ?]).— E. W. Montgomery, Address delivered at the unveiling of a memorial tablet at the Gordon Bell School, Winnipeg, November 12, 1926 (s.l., 1926 ?) ; Gordon Bell, physician and naturalist ([Winnipeg, 1931 ?]).— Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell).— Univ. of Manitoba, The centennial program, 1883–1983, the Manitoba Medical College, 1883–1919, becoming the faculty of medicine, the University of Manitoba, 1919–1983 ([Winnipeg], 1983).
I. I. Mayba, « BELL, GORDON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/bell_gordon_15F.html.
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