WELLS, STATIRA ELIZABETH (Frame), peintre, née probablement le 15 septembre 1858 à Granby, Bas-Canada, fille de John D. Wells et de Sarah Whitten Door ; vers 1892, elle épousa William Frame (décédé en 1941), et ils eurent au moins une fille ; décédée le 29 novembre 1935 à Vancouver.

Il existe peu de renseignements précis sur les jeunes années de Statira Elizabeth Wells. Après son mariage avec William Frame vers 1892, elle élut domicile à Vancouver, où elle vivrait jusqu’à sa mort. Au milieu des années 1890, son mari travaillait dans cette ville comme comptable au Hastings Saw Mill Store. Hormis quelques cours de modelage d’argile qu’elle suivit à la Vancouver Night School, Mme Frame fut à ses débuts une artiste autodidacte. Elle commença à exposer ses travaux avec le Studio Club en 1909. Sa recherche sur le postimpressionnisme, style qui définirait sa pratique artistique ultérieure, s’amorça en 1912 lorsque l’artiste Emily Carr* séjourna trois semaines chez les Frame peu après son retour de France. Elle venait de se familiariser avec le postimpressionnisme et le fauvisme, et fit sans doute part à ses hôtes de ces nouvelles possibilités esthétiques. Les deux femmes passèrent du temps à dessiner ensemble dans le grenier de la maison du couple.

En 1918, les expériences de Mme Frame sur la forme et la couleur, à la peinture à l’huile, firent l’objet d’une critique positive de la part de Robert Henri, membre éminent de l’Ashcan School de New York, à qui elle avait soumis ses petites toiles pour évaluation. Henri louangea son sens de la composition et de la forme, mais réserva ses compliments les plus vifs pour son maniement de la couleur. Selon lui, tandis que la plupart des gens ne voyaient que de la couleur et encore de la couleur, Mme Frame connaissait les rapports entre les couleurs et il l’encouragea à ne modifier aucun aspect de sa technique.

L’œuvre de Mme Frame évolua dans les années 1920. Vers 1919–1920, elle se rendit à Monterey, en Californie, pour étudier auprès de l’impressionniste américain Armin Carl Hansen ; ce fut le premier de ses deux seuls voyages importants à l’extérieur de Vancouver après son arrivée dans cette ville. Elle passa trois ou quatre mois avec Hansen qui, comme Henri, approuvait son style, mais qui l’incita fortement à augmenter la dimension de ses tableaux. Jusqu’alors, elle avait surtout utilisé des toiles de 7 pouces sur 12.

Au cours des années 1920, Mme Frame devint membre active de la British Columbia Society of Fine Arts et du Vancouver Sketch Club ; à l’occasion des expositions de ses œuvres avec ces deux organismes, les critiques la reconnurent comme peintre « moderne » présentant des « tableaux aux couleurs vives peints selon la plus nouvelle des nouvelles méthodes ». Lors d’une exposition parrainée par le club en juin 1920, on la cita dans le Vancouver Daily Province comme l’une des rares artistes qui représentaient ingénieusement le style impressionniste d’avant-garde.

En 1926, Mme Frame devint secrétaire-trésorière du Palette and Chisel Club, récemment fondé par des artistes cherchant à occuper un créneau entre le groupe des Sept et les peintres académiques. Même si, en fin de compte, les membres du club n’exposèrent pas d’œuvres plus modernes que celles de la British Columbia Society of Fine Arts, la présence de modernistes dans les deux organisations préfigurait un éloignement du conservatisme dans les milieux artistiques de Vancouver. Le public accepta peu à peu les coups de pinceau fluides, la sensibilité à la couleur, ainsi que le style plus libre et plus expressif de Mme Frame. Cette année-là, elle fit son deuxième et dernier voyage à l’extérieur de Vancouver, à Alert Bay, dans l’île de Vancouver, où elle passa un mois à peindre.

Du milieu des années 1920 au début des années 1930, Mme Frame continua à exposer dans la région. Elle se concentra presque exclusivement sur des scènes d’extérieur, à Vancouver et dans les environs, notamment le parc Stanley, l’inlet Burrard et la vallée du Fraser. Elle peignait ces paysages avec des taches de couleurs. Son œuvre se détache ainsi de la reproduction réelle d’un lieu pour se tourner vers l’expérience de la couleur et des émotions qu’elle nourrit. En particulier, ses tons clairs suggèrent qu’elle cherchait à illustrer le soleil et ses effets. La lumière imprègne ses toiles d’un élan de joie dont Emily Carr et un autre peintre de Vancouver, Harold Mortimer Lamb*, firent l’éloge pendant l’exposition rétrospective tenue à la Vancouver Art Gallery en avril 1936, moins de six mois après la disparition de Mme Frame.

Statira Elizabeth Frame joua un rôle important dans l’introduction du modernisme à Vancouver à une époque où l’aquarelle et les paysages de l’école académique britannique étaient les grands favoris. Après sa mort, sa production artistique fut reconnue comme étant progressiste et visionnaire.

Christian Monks

Des tableaux de Statira Elizabeth Wells (Frame) sont conservés à l’Art Gallery of Greater Victoria, à la Vancouver Art Gallery, aux BCA et dans des collections privées.

Il a été très difficile de recueillir de l’information sur les premières années de la vie de Mme Frame. Son certificat de décès (BCA, GR-2951, no 1935-09-508102), rédigé à partir de renseignements fournis par sa fille, mentionne les noms de ses parents et indique qu’elle serait née en 1863 au Bas-Canada ; nous n’avons cependant pu trouver aucun acte de naissance ou de baptême correspondant. Selon Académie royale des arts du Canada ; exhibitions and members, 1880–1979, E. de R. McMann, compil. (Toronto, 1981), elle serait née à Waterloo, au Québec, le 15 septembre 1870, lieu et date de naissance que citent par ailleurs de nombreuses sources secondaires. La seule mention de Mme Frame trouvée dans les registres de recensement conservés à BAC, Déclarations de recensement du Canada de 1911, Vancouver, subdist. 63 : 21, indique qu’elle serait née en septembre 1871. Ses nom et prénoms, ansi que ceux de ses parents, correspondent cependant exactement à l’acte de baptême d’une enfant née à Granby, au Bas-Canada, le 15 septembre 1858 (BAnQ-E, CE502-S42, 7 août 1859).

BCA, GR-2951, no 1941-09-589184.— Vancouver Daily Province, 22 sept. 1919 ; 5 juin 1920 ; 18 févr., 28 avril 1928 ; 29 nov. 1935.— Annuaire, Vancouver, 1896.— The collector’s dictionary of Canadian artists at auction, A. R. Westbridge et D. L. Bodnar, édit. (4 vol., Vancouver, 1999–2003), 1.— W. W. Thom, « The fine arts in Vancouver, 1886–1930 : an historical survey » (mémoire de m.a., Univ. of B.C., Vancouver, 1969).— Maria Tippett, By a lady : celebrating three centuries of art by Canadian women (Toronto, 1992).— Maria Tippett et Douglas Cole, From desolation to splendour : changing perceptions of the British Columbia landscape (Toronto, 1977).— Nicholas Tuele et al., British Columbia women artists : 1885–1985, Judith Alldritt-McDowell, édit. (catalogue d’exposition, Art Gallery of Greater Victoria, 1985).

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Christian Monks, « WELLS, STATIRA ELIZABETH (Frame) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/wells_statira_elizabeth_16F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2015
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