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RICHARDSON, JAMES, tailleur, homme d’affaires et homme politique, né en 1819 à Aughnacloy (Irlande du Nord), fils de Daniel Richardson et de Janet Armstrong ; le 1er mars 1845, il épousa dans le canton de Kingston, Haut-Canada, Roxanna Day (décédée en 1848), et ils eurent un fils, qui mourut très jeune, puis le 11 mars 1850, à Kingston, Susannah Wartman, nièce de sa première femme, et de ce mariage naquirent deux fils ; décédé le 15 novembre 1892 au même endroit.
En 1822 ou 1823, James Richardson immigra dans le Haut-Canada avec son père, sa sœur et sa demi-sœur Elizabeth. La famille s’établit dans le district d’Adolphustown, où Daniel Richardson mourut en 1826, laissant à Eliza, encore adolescente, la charge des deux enfants plus jeunes. En 1829, elle avait installé la famille à Kingston. Élevé dans cette ville par une sœur de son père, James reçut une instruction limitée. Très jeune encore, il vendit des journaux et fut apprenti auprès d’un tailleur, John Dawson. Ce contact eut d’importantes répercussions pour lui : Mme Dawson appartenait à la famille Wartman, tout comme les deux femmes qu’il allait plus tard épouser.
Richardson était en affaires dès 1841, l’année où William Sanderson et lui-même furent condamnés à une amende de £5 pour « colportage et revente sans permis ». Il s’associa pour une courte période à un certain Little dans la fabrication de vêtements sur mesure et, d’après une annonce parue dans le Chronicle & Gazette, il se lança à son compte comme marchand-tailleur en 1844. Il annonçait toujours ses articles dans la presse locale et, de toute évidence, ses affaires prospéraient. En 1848, à l’âge de 29 ans, il était propriétaire de l’immeuble occupé en partie par son entreprise ; il habitait en haut de sa boutique et avait plusieurs locataires. À un certain moment, comme ses clients le payaient à l’occasion avec du grain, il s’intéressa au commerce de ce produit. Le fait qu’il se porta garant pour la construction d’un nouveau bureau des douanes à Kingston en 1856 constitue un bon indice de sa réussite. L’entrepreneur, Thomas C. Pidgeon, s’avéra incapable de surmonter diverses difficultés, les deux autres garants, James O’Reilly* et Samuel Smyth, manquèrent à leurs engagements, et finalement c’est Richardson qui dut terminer le travail. En septembre 1858, c’était chose faite, mais cette aventure lui avait coûté plus de £1 700.
Le fardeau financier que dut supporter Richardson pour la construction du bureau des douanes l’avait apparemment forcé à trouver d’autres sources de revenus. Le 31 décembre 1856, il emprunta £750 à sa demi-sœur en hypothéquant sa propriété de la rue Brock. Tout en faisant le commerce du grain, il poursuivit ses activités dans la fabrication de vêtements et dans la construction jusque dans les années 1860. Il ne figure pas à titre de commerçant de grain dans les annuaires de Kingston parus avant 1865, mais une histoire de l’entreprise fait remonter à 1857 l’établissement du commerce familial de grain qui allait devenir plus tard la James Richardson and Sons. La première indication du nom de cette entreprise se trouve dans l’annuaire de Kingston de 1873–1874 sous l’entrée : « richardson & sons, Grain Dealers, Commercial Wharf, foot of Princess St ». Les deux fils de Richardson, George Armstrong et Henry Wartman, étaient alors associés à part entière.
Richardson commença à se tailler une réputation en affaires à l’époque où les citoyens de Kingston s’employaient résolument à donner à leur ville un rôle distinctif à l’échelle régionale et nationale. Il prit part aussi aux activités religieuses et municipales. Méthodiste wesleyen, il fréquentait le temple Sydenham Street où, non seulement il versait des dons généreux, mais enseignait à l’école du dimanche. Le 22 août 1851, il assista à la séance inaugurale du Board of Trade. Rien n’indique qu’il en fut membre actif, mais il participa, en mai 1872, à un comité formé de quatre hommes chargés d’étudier les améliorations portuaires ; ils recommandèrent de draguer le port de Kingston « pour la sécurité des navires de fort tonnage qui entr[aient] maintenant dans le port » ; et préconisèrent aussi la construction, au coût de 40 000 $, d’un brise-lames qui s’étendait à un demi-mille du rivage, près de la Murney Tower. Richardson commença à faire de la politique municipale dans les années 1860 : conseiller pour le quartier St Lawrence en 1860, il fut échevin du même quartier l’année suivante ; il fit de nouveau partie du conseil municipal, à titre d’échevin pour le quartier Victoria, de 1870 à 1874. Tory lui-même, Richardson était très lié au député de longue date de Kingston, sir John Alexander Macdonald. En 1889, le premier ministre fit remarquer à un collègue que « les Richardson [étaient] et [avaient] toujours été de [ses] amis puissants et influents ». La même année, il donna l’avertissement suivant à l’un de ses associés : « Ne me mettez pas dans l’embarras avec les Richardson. Ils sont mes piliers dans Kingston. »
L’intérêt grandissant de Richardson pour le commerce du grain coïncida avec la montée en flèche, au début des années 1860, des ventes de l’orge en provenance du Haut-Canada, surtout de celle qu’on cultivait dans les environs de la baie de Quinte. Cette céréale de haute qualité, que les fabricants américains achetaient en grande quantité au prix fort, demeura une importante denrée d’exportation jusqu’à ce que l’imposition de barrières tarifaires vienne anéantir ce commerce dans les années 1890. Au cours de cette période, Richardson monta une flotte de lac constituée de sloops et de schooners achetés ou loués et capables de transporter entre 1 000 et 20 000 boisseaux de céréales. Elle comprenait aussi des hourques, la fameuse « flotte de moustiques », qui sillonnaient les rives et les rivières à partir de la baie de Quinte jusqu’au canal Rideau. Une certaine quantité de grain était acheminée directement du lieu de collecte jusqu’à un port américain, souvent à Oswego ou Cape Vincent, dans l’état de New York ; les cargaisons étaient toutefois en grande partie déchargées au quai de Richardson à Kingston ou, par la suite, emmagasinées dans son silo pour être transbordées dans des navires à destination des États-Unis ou de l’Europe. Il construisit son premier silo en 1882 sur un terrain qu’il avait acheté en 1868 en bordure du lac, au pied de la rue Princess ; le Richardson n° 1, d’une capacité de 60 000 boisseaux, devint rapidement le centre de son commerce de grain. Un incendie le détruisit en 1897, cinq ans après la mort de Richardson, mais on ne tarda pas à le remplacer par un bâtiment d’une capacité de 250 000 boisseaux.
La région des Prairies ne produisait pas encore beaucoup de céréales à l’époque où vécut Richardson, mais ce dernier sut reconnaître son potentiel croissant. En 1923, son petit-fils, James Armstrong Richardson*, alors président de l’entreprise, dirait à un homme d’affaires de Liverpool, A. R. Bingham : « Le premier blé de l’Ouest canadien expédié de Fort William [Thunder Bay] [le] fut à l’automne de [18]83 et [...] ce blé, qui était le premier blé de l’Ouest canadien expédié de ce continent[,] fut envoyé par notre maison vers la côte atlantique à l’hiver de [18]84 et consigné à votre maison de Liverpool. » Jusqu’au xxe siècle, les activités commerciales de la firme Richardson dans l’Ouest demeurèrent sous la responsabilité d’Edward O’Reilley, résident de l’île Wolfe (près de Kingston) qui s’était installé au Manitoba au début des années 1880. Richardson exportait du grain non seulement en Grande-Bretagne et aux États-Unis, mais en Hollande, en Suisse, en France, en Norvège et en Argentine.
Richardson fit le commerce de produits autres que l’orge et le blé, dont la potasse, le foin, les fourrures, les pommes, le charbon, la lessive et le sirop d’érable ; il diversifia cependant ses activités bien au delà du commerce de denrées. Il fit l’acquisition d’un nombre substantiel de biens immobiliers dans la région de Kingston. Il investit dans la Kingston and Pembroke Railway Company, la Kingston Street Railway Company, les ateliers de construction de locomotives et l’usine de fabrication de lainages de la ville, la Kingston Hosiery Company et la Kingston Oil and Enamel Cloth Company. En 1881, il devint président de la Kingston Cotton Manufacturing Company. Richardson se tourna aussi du côté de l’exploration minière dans la région du bouclier canadien au nord de Kingston, activité que son entreprise poursuivrait durant une partie du xxe siècle. La mine de feldspath que la firme possédait dans le canton de Bedford fut probablement la plus productive et la plus importante de ses exploitations. La Richardson Mine, propriété de la Kingston Feldspar Mining Company, elle-même propriété de la famille, fut acquise dans les années 1880, mais on ne commença à l’exploiter qu’en 1900. Le témoignage d’un des fils de Richardson, George, devant la Royal Commission on Mineral Resources en 1889 indique que l’industrie minière de la région lui était familière. Il déclara « avoir vu presque toutes les mines de la section Frontenac et avoir manipulé le produit d’à peu près toutes les mines de phosphate de cette partie du pays ». Au début du xxe siècle, l’entreprise devait étendre son champ d’action à l’exploitation du mica et du zinc.
À la mort de James Richardson en 1892, ses deux fils étaient encore associés à part égale. Il légua la plupart de ses actions de l’entreprise à sa femme, mais une disposition du testament spécifiait qu’elles devaient aller à leurs fils après le décès de celle-ci. George Armstrong Richardson succéda à son père à titre de président de la compagnie (1892–1906), puis fut remplacé par Henry Wartman (1906–1918). James Richardson avait réussi à faire la transition entre le commerce traditionnel et l’investissement dans diverses entreprises issues de la nouvelle ère industrielle. En outre, les investissements qu’il fut incité à faire dans des entreprises de Kingston, au moment où cette ville approchait de sa période de suprématie commerciale, servirent de base à la création de l’une des entreprises les plus importantes du Canada au xxe siècle.
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Brian S. Osborne et Donald Swainson, « RICHARDSON, JAMES (1819-1892) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/richardson_james_1819_1892_12F.html.
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Auteur de l'article: | Brian S. Osborne et Donald Swainson |
Titre de l'article: | RICHARDSON, JAMES (1819-1892) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |