Les fenians et la police secrète


La police secrète canadienne avait été fondée pendant la guerre de Sécession pour empêcher les confédérés du Sud d’utiliser le Canada comme base pour attaquer le Nord. Après la fin de la guerre, en 1865, cette force fut progressivement démantelée, mais la situation se renversa avec l’arrivée de rapports sur les projets des fenians d’envahir le Canada. Elle prit alors de l’expansion. Avec ses chefs Frederick William Ermatinger au Bas-Canada et Gilbert McMicken au Haut-Canada, qui rendaient tous les deux des comptes à John Alexander Macdonald, la police secrète entreprit d’infiltrer la Fenian Brotherhood, comme en témoigne le passage suivant tiré de la biographie de McMicken :

Ceux qui […] parvinrent [à infiltrer les rangs fenians] communiquèrent des informations alarmantes, ce qui obligea McMicken et Macdonald à les analyser pour distinguer les plans sérieux de ce qui était de l’ordre de la chimère. Sous le couvert de l’anonymat, McMicken lui-même se présenta à un important congrès fénien à Philadelphie. Ayant découvert qu’un « sénat » de 15 membres allait mettre au point, en secret, les détails d’une invasion prévue pour novembre [1865], il suggéra de trouver (et se mit à chercher) « une ou deux de ces femmes rusées dont les bonnes gens mettent la vertu en doute » et qui, en attirant « dans leurs filets des membres du « sénat » qui [étaient] sensibles [aux charmes féminins], leur arracheraient leurs secrets, comme Dalila [le fit] avec Samson ».

 

Bien que l’invasion feniane dans la péninsule du Niagara en juin 1866 prit la police secrète au dépourvu, les opérations de renseignement de cette dernière devinrent beaucoup plus efficaces par la suite. Thomas Billis Beach, dit Henri Le Caron, était l’un de ses principaux agents :

Le Caron put pénétrer dans l’état-major de l’organisation [fénienne]. Il abandonna ses études de médecine et un poste qu’il occupait dans l’Illinois pour prêter le serment des féniens. Il devint alors chef d’une section locale (poste de direction) et organisateur des opérations militaires ; par la suite, il accéda au grade de colonel […] Au printemps de 1868, il rencontra le commissaire de police canadien Gilbert McMicken et s’engagea à lui communiquer régulièrement des renseignements. Il vit de nouveau McMicken près de la frontière en 1870 et le prévint de l’imminence d’un raid contre le Canada. Le gouvernement canadien était donc prêt lorsque, le 25 mai, O’Neill attaqua Eccles Hill, près de Frelighsburg, dans la province de Québec. Le Caron, affecté aux munitions pendant le raid, fit son possible pour semer le désordre dans les rangs des féniens […]

“Le rapport de Le Caron sur le raid fénien de 1870 marqua le sommet de sa carrière d’agent secret. L’année suivante, il informa le gouvernement du Canada que William Bernard 
O’Donoghue* projetait de convaincre les féniens d’envahir le Manitoba.

 

Pour en apprendre davantage sur l’infiltration des fenians, nous vous invitons à consulter les biographies ci-dessous.