YOU DE LA DÉCOUVERTE, PIERRE (Hiou, Hyou, il signait de Ladescouverte), officier, aide-major, marchand, né en 1658 à La Rochelle, paroisse du Saint-Sauveur, de Pierre You, tanneur, et de Marie-Renée Turcot, inhumé à Montréal le 28 août 1718.

Le premier document qui fait mention de Pierre You en Nouvelle-France est la concession faite aux Récollets, en 1677, par Cavelier* de La Salle : la dite concession est bornée par celle du sieur You, sergent de la garnison du fort Frontenac. Pierre You accompagnera par la suite La Salle dans ses expéditions de découvertes ; ce dernier écrit « qu’il fallait beaucoup de courage et d’adresse pour ces expéditions » et il estime que son compagnon habituel est « un fort brave garçon ». Recherchant le chevalier Henri Tonty en 1680, il n’emmène avec lui que le sieur Bourdon* d’Autray et deux Indiens. En mars 1682, après les fatigues et les périls de cette hasardeuse expédition, Pierre You eut l’honneur de signer le procès-verbal de la prise de possession du pays des Arkansas. L’année suivante, en vertu des privilèges accordés par le roi aux découvreurs, il prit le titre de sieur de La Découverte, titre qui lui fut attribué par la suite dans les actes officiels du gouvernement. En 1695, Buade* de Frontenac, dans sa harangue d’adieu aux chefs des tribus de l’Ouest, nomme les officiers dépendant du poste de Michillimakinac auxquels les Indiens doivent obéir comme à lui-même, et il cite le sieur de La Découverte. En 1697, on le retrouve à Montréal et, huit ans plus tard,.un terrain de 50 pieds de front au niveau de la rue Saint-Paul lui appartient. Sa maison est dune telle grandeur qu’elle ressemble à un entrepôt. En 1711, il achète, place du Marché, un autre terrain sur lequel il fait construire une maison de deux étages.

Avec ses activités d’explorateur et de marchand, La Découverte s’adonne au commerce des fourrures. En 1703, il obtient une concession près du fort de Senneville, à l’extrémité ouest de l’île de Montréal. Dès ce moment, il réside dans cette propriété éloignée qui favorise la traite clandestine et l’évasion dans les bois de ses fils qui, malgré les ordonnances, vont même trafiquer jusqu’en Nouvelle-Angleterre. À preuve, l’un deux, traduit devant le tribunal, avoue y être allé et y avoir acheté un nègre et de l’argenterie.

La Découverte gagne la confiance de Rigaud de Vaudreuil qui lui afferme Ille-aux-Tourtes, l’un de ses deux comptoirs de traite situé au confluent du Saint-Laurent et de la rivière des Outaouais. L’offre constante de l’eau-de-vie incite les Indiens à s’y arrêter avec leurs canots chargés de fourrures. Les marchands de Montréal se plaignent et La Découverte, fort de la protection du gouverneur, va même jusqu’à se montrer arrogant à leur égard. En 1709, Rocbert* de La Morandière, garde-magasin du roi à Montréal, se plaint à Jacques Raudot des injures que La Découverte lui a adressées ; dans le courrier d’automne, l’intendant signale ces plaintes à Pontchartrain, mais Vaudreuil, par la même occasion, louange son protégé : « Il a toujours servi, dit-il, avec distinction, il est même estropié d’un bras ayant été blassé dans la dernière guerre ». Le gouverneur n’attend point les grâces du ministre : il nomme La Découverte aide-major à Montréal pour assister le sieur de Clérin [Estienne Du Bourgué], aide-major en titre. En 1710, La Découverte sollicite lui-même une lieutenance ; le ministre répond qu’il n’y a pas de vacance mais qu’il pensera à lui le cas échéant, pourvu qu’il reçoive de bons rapports à son sujet.

Pierre You de La Découverte est inhumé le 28 août 1718 et l’acte le qualifie d’officier d’une compagnie du détachement de la marine. Simple soldat, il était devenu officier. La Découverte avait d’abord épousé, en avril 1693 à Chicago, une Indienne de la tribu des Miamis, nommée Élisabeth, et ils eurent une fille baptisée Marie-Anne ; cette dernière épousa en 1718 à Montréal, l’interprète Jean-Baptiste Richard. Il s’était ensuite marié, le 15 avril 1697, à Madeleine Just, native de Brèves en Bourgogne et veuve de Jean-Jérôme Le Gay de Beaulieu. De cette union naquirent cinq enfants dont deux survécurent à leur père : François-Madeleine d’Youville, décédé en 1730, et Philippe, mort célibataire six ans plus tard.

François-Madeleine d’Youville succéda à son père comme fermier à Ille-aux-Tourtes et il continua le même commerce de l’eau-de-vie. Non content des pelleteries des Népissingues, il raflait les fourrures des canots venant de l’Ouest. Il avait à sa disposition un sergent et six soldats pour intercepter les canots et les forcer d’aller traiter à l’île au détriment de Montréal. François-Madeleine d’Youville épousa à Montréal Marie-Marguerite Dufrost* de Lajemmerais, le 12 août 1722. Ils eurent six enfants dont deux seulement atteignirent l’âge adulte : Joseph-François et Charles-Marie-Madeleine*, qui devinrent prêtres. François-Madeleine d’Youville mourut, à peine âgé de 30 ans, le 5 juillet 1730. Il signait Youville sans le « d » comme on l’écrivait généralement à l’époque. L’abbé Étienne-Michel Faillon fit des recherches en France pour découvrir s’il s’y trouvait un lieu ou un domaine de ce nom. Il n’en trouva point, et il n’y en avait pas au Canada à l’époque. C’est lui qui adopta le « d » par euphonie sans doute. Le You acquiert ainsi la particule de noblesse sans en être.

Albertine Ferland-Angers

AJM, Greffe d’Antoine Adhémar ; Greffe de Joseph-Charles Raimbault, 27 juin 1729, 24 avril, 16 juin 1731 ; Greffe de Marien Tailhandier ; Registre d’état civil de la paroisse de Notre-Dame de Montréal, 1697, 1698, 1699, 1700, 1702, 1718, 1722, 1730.— AN, Col., B, 27 ; Col., C11A, 22, 24, 30, 45 ; Col., D2C, 222, f.187.— Découvertes et établissements des Français (Margry), II : 117–183 ; IV : 117.— La Potherie, Histoire (1753), IV : 67.— Le Tac, Histoire chronologique de la N.-F. (Réveillaud), 191.— Lettres et mémoires de Ruette d’Auteuil, RAPQ, 192223 : 3651.— [Étienne-Michel Faillon], Vie de Mme dYouville, fondatrice des sœurs de la Charité de Villemarie dans lÎle de Montréal en Canada (Ville-Marie [Montréal], 1852).— J.-B.-A. Ferland, Cours dhistoire du Canada, 1534–1759 (1re éd., 2 vol., Québec, 18611865), II : 145.— Désiré Girouard, Lake StLouis, Old and New (Montréal, 1893).— Parkman, La Salle and the discovery of the great west (Boston, 1887).

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Albertine Ferland-Angers, « YOU DE LA DÉCOUVERTE (Hiou, Hyou, de Ladescouverte), PIERRE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/you_de_la_decouverte_pierre_2F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1969
Année de la révision:    1991
Date de consultation:    1 décembre 2024