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WEGENAST, FRANKLIN WELLINGTON, enseignant, musicien, avocat, homme politique et auteur, né le 17 juin 1876 à Waterloo, Ontario, fils de Martin Smith Wegenast et de sa deuxième femme, Dinah Sauer ; le 14 août 1901, il épousa à Oxley, Ontario, Margaret Mary Bell (1878–1950), et ils eurent trois filles et deux fils, parmi lesquels seule une fille, Elsinor Louise, vécut au delà de la petite enfance ; décédé le 2 juin 1942 à Preston (Cambridge, Ontario) et inhumé au cimetière Oakwood de Simcoe, Ontario, aux côtés des quatre enfants morts avant lui.
Franklin Wellington Wegenast grandit dans un foyer germano-canadien qui entretenait des liens avec l’Evangelical Association, groupe méthodiste formé aux États-Unis en 1800 par des membres de la communauté germanophone de Pennsylvanie. Il deviendrait anglican ultérieurement. À une certaine époque, il fut pensionnaire dans une famille amish ; cette expérience, conjuguée à ses antécédents évangéliques, stimula un intérêt pour la foi mennonite qui ne le quitterait jamais. La musique fit très tôt partie de la vie de Franklin Wellington. On dit qu’il commença à subvenir à ses besoins à l’âge de 12 ans, mais il réussit tout de même à terminer ses études secondaires à Berlin (Kitchener), en Ontario.
En 1898, muni d’un brevet d’enseignement, Wegenast amorça sa carrière en pédagogie à Colchester South, dans le comté d’Essex. Il étudia également la musique et organisa des concerts à Harrow et Kingsville. En 1900, il habitait Simcoe et enseignait la musique dans les écoles publiques, donnait des leçons particulières de chant, continuait à organiser des concerts et exerçait la fonction de maître de chapelle à l’église presbytérienne St Paul. Il se prépara en outre au diplôme d’associé en chant au Toronto Conservatory of Music [V. Edward Fisher*], qu’il obtint avec la mention bien en 1902. Il demeurait alors à Woodstock et y dirigeait le chœur de l’église méthodiste Central.
L’intérêt de Wegenast pour le droit s’était développé au fil des années et, pendant qu’il vivait à Woodstock, il fit un stage auprès de l’attorney John Soper McKay. En 1905, il s’installa à Brampton et faisait la navette pour suivre des cours de droit à l’Osgoode Hall à Toronto. Afin de subvenir à ses besoins et à ceux de sa femme, il occupa le poste de maître de chapelle à l’église presbytérienne de Brampton ; il démissionnerait en 1915. Pendant deux ans, en 1906 et 1907, il fut directeur de la Brampton Choral Society et composa de la musique. Il termina ses études de droit en 1909 et remporta le Christopher Robinson Memorial Prize décerné par l’Osgoode Hall. L’année suivante, il passa les examens de la licence en droit à la University of Toronto et réussit avec la mention très bien.
En 1908, alors qu’il étudiait encore en droit, Wegenast avait demandé à la Commission des chemins de fer pour le Canada d’obliger le chemin de fer du Grand Tronc à inclure Brampton parmi les villes admissibles au service de navette à prix modique pour Toronto. La question finirait par être soumise, sans succès, à la Cour suprême du Canada ; Wegenast aida à présenter le dossier au nom de la ville de Toronto. Après avoir achevé ses études, il se joignit au cabinet juridique de Benjamin Franklin Justin, à Brampton, où il passa quatre mois. Il exerça ensuite à son compte quelques mois de plus, puis devint avocat de l’Association des manufacturiers canadiens (AMC), dont il mit sur pied le premier service juridique. Il travailla pour cet organisme pendant sept ans.
Au cours de sa carrière, Wegenast participa à une série de procès sur le droit constitutionnel et les droits respectifs des gouvernements fédéral et provinciaux. Par exemple, il représenta l’AMC dans la cause sur l’assurance de 1912 ; l’année suivante, la Cour suprême du Canada déclara inconstitutionnelle la tentative du gouvernement de sir Wilfrid Laurier* d’exiger que les sociétés d’assurance faisant affaire dans plus d’une province détiennent un permis fédéral. Il plaida également devant le comité judiciaire du Conseil privé de Londres ; son premier dossier, John Deere Plow Company c. Wharton, en 1914, l’opposa à Edmund Leslie Newcombe*, qui défendait le gouvernement fédéral. La guerre se déclencha pendant qu’il était en Angleterre, où il resta quelque temps dans l’espoir que ses connaissances pratiques de la langue allemande puissent aider la cause britannique.
Wegenast avait également représenté l’AMC pendant une enquête de trois ans sur la responsabilité des employeurs dans les accidents de travail. L’enquête, menée par le commissaire sir William Ralph Meredith*, commença en 1910. Par la suite, Wegenast ébaucha un avant-projet de loi sur l’indemnisation des travailleurs ontariens. Meredith rejeta le document, mais l’AMC réussit à gagner quelques concessions pendant que le propre projet de loi du commissaire était adopté au Parlement. Wegenast rédigea d’éventuels projets de loi dans le même domaine pour la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick ; les lois sur l’indemnisation qui en découlèrent, comme celles d’autres provinces, reposèrent en grande partie sur les textes qu’il avait préparés. En 1911, il publia à Toronto une brochure intitulée Workmen’s compensation for injuries […] et un livre, Extra-provincial corporations […]. Sous l’égide de l’AMC, il participa plus tard à la mise sur pied de groupes de sécurité dans les usines et serait un certain temps secrétaire de la Federation of Safety Associations (organisme précurseur de l’Industrial Accident Prevention Associations, créé en 1917). Son intérêt pour l’indemnisation des accidentés du travail donna à sa carrière une dimension nationale, tout comme le firent ses interventions en matière d’assurance. Selon un numéro de 1936 du Bench and Bar, « il a[vait] contribué à élaborer des lois sur l’assurance dans toutes les provinces ». En 1917, il fut admis au barreau du Manitoba.
Au début des années 1920, Wegenast exerça les fonctions de secrétaire et de conseiller juridique auprès de la commission d’enquête sur les activités de la Commission d’énergie hydroélectrique de l’Ontario [V. sir Adam Beck*]. Pendant cette décennie, il se consacra aussi à la rédaction d’un ouvrage sur le droit des sociétés. Margaret Paton Hyndman*, associée de son cabinet depuis 1920, travailla en étroite collaboration avec lui sur ce projet. Un soutien comme celui qu’apporta Wegenast à une jeune praticienne était inhabituel pour l’époque. Le livre, The law of Canadian companies, parut à Toronto en 1931. Deux ans plus tard, on nomma Wegenast conseiller du roi.
Membre de longue date de la Peel Liberal Association, Wegenast siégea au conseil municipal de Brampton pendant de nombreuses années à compter de 1909 ; il en fut conseiller général en 1923 et 1924, et occupa le poste de maire de 1925 à 1928, puis en 1930. Il embellit l’entrée sud du quartier commercial en redressant le ruisseau qui le parcourait et en le bordant de murs de soutènement. De 1914 à 1917, il présida le Bureau de commerce de la ville. Membre de la Brampton Horticultural Society, il aimait l’aménagement paysager et gardait des moutons, des canards et des chevaux dans sa propriété de 25 acres le long de l’autoroute 10 (rue Main). Même s’il avait moins de temps à consacrer à la musique, il réussissait à chanter à des concerts ; en 1940, il serait encore soliste à l’église presbytérienne de Brampton. Polyglotte qui maîtrisait le français, l’anglais et l’allemand, Wegenast étudia l’italien, puis le chinois. Comme il pouvait s’exprimer en gaélique, après l’avoir appris dans le cabinet juridique de McKay, beaucoup de gens à Brampton pensaient qu’il venait des Highlands.
Alvin Ratz Kaufman*, propriétaire de la Kaufman Rubber Company Limited de Kitchener [V. Jacob Kaufman*], était l’un des clients de Wegenast. Kaufman, enclin à la philanthropie, donnait à des œuvres de bienfaisance locales et fonda le Parents’ Information Bureau en 1931. Cet organisme déléguait des agents qui offraient des conseils sur la régulation des naissances, ainsi que des contraceptifs au prix coûtant. Ses services s’étendirent à l’extérieur de Kitchener ; en septembre 1936, une agente, Dorothea Palmer*, fut arrêtée à Eastview (Ottawa) et accusée d’« atteintes aux bonnes mœurs » en vertu du Code criminel. Kaufman était prêt à mettre toutes ses ressources en œuvre pour la défendre. Son intérêt pour la régulation des naissances découlait de sa préoccupation pour la grande prolificité dans les quartiers défavorisés, de son inquiétude devant le pouvoir de l’Église catholique et de ses préjugés contre les Canadiens français.
Certains scientifiques conclurent que Wegenast prit la cause en main parce qu’il partageait les idées eugénistes de Kaufman, mais aucune preuve n’appuie cette thèse. Wegenast ne voulait pas s’engager dans ce procès : il n’avait aucun intérêt pour les campagnes sur la contraception ni pour les mouvements de stérilisation qui avaient les mêmes objectifs. Plus tard, Kaufman affirma qu’il avait dû convaincre Wegenast, qu’on disait en mauvaise santé, de jouer un rôle dans cette poursuite. Après avoir accepté, Wegenast se concentra sur les questions juridiques entourant la régulation des naissances et sur les droits des femmes. Il élabora ses arguments de façon à prouver que la régulation des naissances servait le bien public. Il déclara abruptement : « Personne n’a le droit de se présenter devant ce tribunal et soutenir que l’objectif ultime de l’être humain est de donner naissance au plus grand nombre d’âmes possible afin qu’elles soient baptisées et louent le Seigneur pour toujours. » En mars 1937, il gagna la cause, ce qui créa un précédent juridique en matière de régulation des naissances. Apparemment, le procès suscita chez lui un vif intérêt pour l’eugénisme, car il adhéra ensuite à la Eugenics Society of Canada.
Au printemps de 1938, après que Franklin Wellington Wegenast eut subi une crise cardiaque, Kaufman lui offrit un voyage de repos de quatre mois en Europe, pendant lequel Wegenast nota ses impressions dans un journal. L’année suivante, après le déclenchement de la Deuxième Guerre mondiale, Wegenast dirigea, à Brampton, le service de recrutement du comité de soutien à une participation accrue à la guerre. Selon sa fille, avocate elle aussi, ses origines allemandes nuisirent tout de même à sa pratique professionnelle. En mai 1942, il s’installa à l’hôtel Preston Springs, l’un de ses refuges favoris. Plusieurs jours après son arrivée, il succomba à une insuffisance rénale. Sa femme mourut huit ans plus tard et on l’inhuma à ses côtés au cimetière Oakwood.
Des extraits du journal que Franklin Wellington Wegenast a tenu au cours de son voyage en Europe en 1938 ont été publiés sous le titre Liberty is dead : a Canadian in Germany, 1938, M. E. Derry, édit. (Waterloo, Ontario, 2012). Une version abrégée de son essai « The federal system », qui lui a valu le Christopher Robinson Memorial Prize, a paru dans le Canadian Law Times (Toronto), 30 (1910) : 11–38, 121–127. Son livre The law of Canadian companies a été réimprimé en 1979 (Toronto) avec une préface de M. P. Hyndman. Wegenast a également écrit A brief on workmen’s compensation ([Toronto, 1912 ?]), réimprimé par l’Assoc. des manufacturiers canadiens à partir de sir W. R. Meredith, Interim report on laws relating to the liability of employers to make compensation to their employees for injuries received in the course of their employment which are in force in other countries (Toronto, 1912). Bibliothèque et Arch. Canada, « Aurora : le catalogue de bibliothèque de BAC » : bac-lac.on.worldcat.org/discovery (consulté le 23 janv. 2019), répertorie certaines de ses compositions musicales.
Arch. of Ontario (Toronto), C 81-1-0-29 (entrevues avec Margaret Hyndman) ; RG 80-5-0-289, n° 5597.— Arch. privées, Margaret [E.] Derry (Caledon, Ontario), Wegenast family papers.— Univ. of Toronto Arch. and Records Management Services, A1973-0026/502 (89) (Wegenast, F. W.).— Univ. of Waterloo Library, Special Coll. & Arch. (Ontario), GA 58 (Parents’ Information Bureau fonds), GA 138 (Augustine, Ham, Kaufman family fonds) ; GA 172 (Parents’ Information Bureau Ltd fonds : accrual 2005) ; WA 17 (Palmer, Dorothea coll.).— Bench and Bar : the National Legal Newspaper (Montréal), mai 1936 : 3, 7.— Evening Telegram (Toronto), 3 juin 1942 : 24.— Globe and Mail, 1908–1942, particulièrement 3 juin 1942 : 4.— Peel Gazette (Brampton, Ontario), 4 juin 1942 : 1, 4.— Toronto Daily Star, 1908–1942, particulièrement 3 juin 1942 : 8.— Angus McLaren, Our own master race : eugenics in Canada, 1885–1945 (Toronto, 1990).— McKenzie Porter, « The legal lady », Maclean’s, 15 juill. 1949 : 15, 22–24.
Margaret E. Derry, « WEGENAST, FRANKLIN WELLINGTON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 17, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/wegenast_franklin_wellington_17F.html.
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Auteur de l'article: | Margaret E. Derry |
Titre de l'article: | WEGENAST, FRANKLIN WELLINGTON |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 17 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2019 |
Année de la révision: | 2019 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |