WEBSTER, THOMAS, instituteur, ministre méthodiste, rédacteur en chef et auteur, né le 24 octobre 1809 à Glendalough (république d’Irlande), fils de Robert Webster et d’une prénommée Elizabeth ; le 11 avril 1833, il épousa à London, Haut-Canada, Mary Bailey, et ils eurent une fille ; décédé le 2 mai 1901 à Newbury, Ontario.

Les Webster immigrèrent dans l’État de New York en 1812 pour échapper aux conflits religieux qui sévissaient en Irlande. Ils refusèrent de devenir citoyens américains pendant la guerre de 1812 et décidèrent en 1819 de se fixer dans le canton haut-canadien de London. Comme il le raconte dans ses mémoires, Thomas Webster fut « élevé dans le respect du Jour du Seigneur, alors que les autres garçons avaient le droit d’aller à la pêche et à la chasse en ce saint sabbat ». Dans sa jeunesse, il ne pouvait éviter de consommer de l’alcool, car on avait l’habitude de boire aux nombreuses corvées auxquelles il participait. Cependant, après avoir fait l’expérience de la conversion en 1828, il fit vœu d’abstinence. Avant d’entrer à la société de tempérance locale, il se mit à lire la Bible et nota tous les passages où il était question de vin et de spiritueux ; « mais, écrit-il, avant d’en arriver à la prophétie d’Isaïe, je conclus que m’abstenir de toute boisson alcoolisée [...] serait bien, au sens le plus strict du mot ».

À compter de 1830, Webster enseigna à l’école du dimanche et organisa des réunions de tempérance au temple méthodiste de sa localité. Il avait acquis une partie de sa formation à l’école et sa femme, Mary Bailey, contribua beaucoup à son éducation littéraire. Pendant l’épidémie de choléra de 1832, il fut légèrement atteint par cette maladie et commença aussi à souffrir d’accès de rhumatisme, ce qui l’empêcha d’exploiter la ferme qu’il venait d’acquérir dans le canton de London. En 1834, le couple ouvrit chez lui une école du dimanche qui attira bon nombre d’élèves ; l’année suivante, Webster enseigna dans une école ordinaire. En 1838, il devint prédicateur itinérant de l’Église méthodiste épiscopale en Canada dans la circonscription ecclésiastique de Nelson. Cette Église avait été fondée quatre ans plus tôt par des méthodistes épiscopaux qui refusaient de fusionner avec la Conférence wesleyenne britannique. Ordonné en 1840, il accéda au presbytérat deux ans plus tard.

Webster croyait fermement aux « droits égaux » pour toutes les confessions religieuses. Il fut mêlé aux controverses qui opposaient l’Église méthodiste épiscopale et l’Église méthodiste wesleyenne, plus conservatrice. Dans un opuscule fort bien documenté, il fit valoir que les prédicateurs laïques et les simples fidèles n’avaient pas été consultés au cours des négociations qui avaient abouti, en 1833, à la fusion. En conséquence, la fonction d’évêque et le diaconat avaient été éliminés. En outre, les principes de séparation de l’Église et de l’État, prônés par les épiscopaux, avaient été compromis puisque les wesleyens acceptaient l’aide gouvernementale pour l’éducation et les missions. En janvier 1845, pour défendre les principes et l’organisation unique des méthodistes épiscopaux, Webster et Joseph H. Leonard fondèrent à Cobourg, dans le Haut-Canada, un journal confessionnel, le Canada Christian Advocate. Webster en fut rédacteur en chef pendant les cinq premières années et écrivit des articles sur tout un éventail de thèmes religieux et de questions ecclésiastiques. De plus, il continua de jouer un rôle important dans les organisations nationales et locales de tempérance, dont les Fils de la tempérance.

Webster était un ardent défenseur de l’égalité des sexes. Dans Woman man’s equal, publié en 1873 à Cincinnati, en Ohio, et à New York, il concluait, d’une analyse de la Bible et de l’histoire, que ni l’infériorité ni la supériorité n’étaient « voulues » par Dieu et que toutes les distinctions entre les sexes étaient une « invention de l’homme ». Il trouvait fantaisiste l’idée victorienne selon laquelle les femmes auraient été de « doux [...] anges gardiens envoyés par Dieu, dans Sa sagesse, pour réconforter l’humanité [...] et les bien-aimées des cœurs et des foyers ». Favorable à la pleine participation des femmes à la vie sociale, il soulignait à quel point l’Église se montrait injuste en soutenant que « dans le chœur, la femme [pouvait] chanter le salut, mais [que] c’[était] dangereuse présomption de sa part d’en parler dans [...] l’église ».

En signant, en 1866, une pétition contre une union élargie des Églises méthodistes, Webster passa à l’avant-garde de la défense des principes chers aux épiscopaux. L’Église prospérait, et c’était là une raison suffisante pour conclure qu’elle était « une enfant hautement favorisée par la Providence ». Les discussions sur l’union l’encouragèrent à réexaminer les bouleversements qui avaient eu lieu dans les années 1830. S’appuyant sur d’abondantes recherches, il écrivit History of the Methodist Episcopal Church in Canada, publié à Hamilton, en Ontario, en 1870, et Life of Bishop Richardson [...], qui parut à Toronto en 1876. Ces livres, qui suscitèrent la controverse, établissaient la version épiscopale de l’histoire du méthodisme canadien, à l’encontre de l’interprétation wesleyenne exposée dans les ouvrages de John Saltkill Carroll* et d’Alexander Sutherland. Il accusait les wesleyens d’avoir causé « la dissension et le conflit, et un déclin correspondant dans la propagation de l’Évangile ».

Dans les années 1880, les méthodistes épiscopaux opposaient une résistance moins ferme aux pressions en faveur de l’union. Comme leur Église avait beaucoup construit et donné de l’expansion à ses missions du Nord-Ouest, elle était criblée de dettes. Thomas Webster proposa une série de réformes pour en assainir la situation financière et rendre ainsi la fusion inutile. Par exemple, il demanda que soit appliquée avec plus de rigueur la règle selon laquelle il fallait recueillir les deux tiers de la souscription avant de mettre une église en chantier. Il fut « très chagriné » lorsque l’évêque Albert Carman* fit entrer son Église dans l’union méthodiste, en 1884, car il estimait que les conditions acceptées allaient « détruire toutes les caractéristiques essentielles de [...] l’Église [...] et rendre futiles tout le labeur et les sacrifices qui [avaient] été consentis depuis les cinquante dernières années pour sa préservation ». Webster quitta la vie publique après cette défaite ; dans ses dernières années, il fut ministre retraité à Newbury, en Ontario.

David B. Marshall

Les papiers de Thomas Webster aux EUC-C, 3162, consistent en un exemplaire dactylographié de « My memoirs : a story of the early pioneer life in Canada West » (1871) et une collection de coupures de journaux réformistes. L’opposition de Webster à l’union peut être retracée dans deux autres collections des EUC-C : General Conference records of the Methodist Episcopal Church in Canada (6/1), 17 et 20 ; et Albert Carman papers (3022), dossier 8.

Outre les travaux mentionnés dans la biographie, les publications de Webster comprennent : The union considered, and the Methodist Episcopal Church in Canada defended (Belleville, [Ontario], 1842) ; « Early scenes in Canadian life », New Dominion Monthly (Montréal), 2 (1868) : 283–287, 348–354 ; et An essay on Methodist church polity ([Hamilton, Ontario], 1871). Il est aussi le compilateur de The book of laws [...] (Toronto, 1874) des Fils de la tempérance, section canadienne de l’Amérique du Nord.

J. W. Caldwell, « The unification of Methodism in Canada, 1865–1884 », EUC, Committee on Arch., Bull. (Toronto), n° 19 (1967).— Elizabeth Cooper, « Religion, politics and money : the Methodist union of 1832–1833 », OH, 81 (1989) : 89–108.— Église méthodiste (Canada, Terre-Neuve, Bermudes), London Conference, Minutes, 1901 : 78–79.— G. [S.] French, Parsons & politics : the rôle of the Wesleyan Methodists in Upper Canada and the Maritimes from 1780 to 1855 (Toronto, 1962).— David Mills, The idea of loyalty in Upper Canada, 1784–1850 (Montréal et Kingston, Ontario, 1988).— Neil Semple, « Ontario’s religious hegemony : the creation of the national Methodist Church », OH, 77 (1985) : 19–42.

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David B. Marshall, « WEBSTER, THOMAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/webster_thomas_13F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
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