WATSON, JOSEPH HENRY, chaudronnier, organisateur syndical et fonctionnaire, né vers 1854 en Angleterre ; il se maria et eut au moins six enfants ; décédé le 22 mai 1908 à Vancouver.

Joseph Henry Watson, chaudronnier de son métier, arriva à Vancouver en 1885. En juillet 1895, il fut délégué de l’American Railway Union au Trades and Labor Council de Vancouver. En mars 1898, il participa à la fondation de la loge de Vancouver rattachée à l’International Brotherhood of Boilermakers and Iron Ship Builders of America, et en fut le premier président ainsi que le secrétaire aux archives et aux finances. Il fut président du Trades and Labor Council du 22 juillet 1898 au 6 janvier 1899, et il occupa par la suite d’autres postes dans cet organisme. Il travailla aussi avec beaucoup de zèle comme organisateur de l’American Federation of Labor et du Congrès des métiers et du travail du Canada, formant près de 40 syndicats, la plupart dans les basses terres continentales de la Colombie-Britannique. Parmi ces syndicats se trouvaient ceux des pêcheurs de New Westminster et de Vancouver [V. Frank Rogers], qui participèrent à deux grèves majeures en 1900 et 1901.

À l’instar de Christopher Foley et d’autres leaders ouvriers, Watson défendait des idées qui plaisaient à beaucoup d’ouvriers spécialisés en cette fin du xixe siècle. Il parlait de virilité, d’indépendance et de respectabilité, tel qu’on concevait ces notions à la fin de l’époque victorienne, mettant l’accent sur la dignité du travail et l’essentielle égalité entre employeur et employé. Libéral-ouvrier, comme on l’aurait qualifié à l’époque, il inscrivit son action politique sous le signe de la modération.

Impressionné par les stratégies de réforme appliquées avec succès par le gouvernement libéral de la Nouvelle-Zélande dans les années 1890, en particulier par l’arbitrage obligatoire dans les conflits de travail, Watson soutenait qu’on pouvait faire ce genre d’innovations au Canada aussi. Il fut l’un des délégués de Vancouver au congrès de fondation de la British Columbia Liberal Association, qui eut lieu à New Westminster au début d’octobre 1897. L’année suivante, avec l’aide de George Ritchie Maxwell, député libéral-ouvrier à la Chambre des communes, il obtint un emploi au département des Douanes à Vancouver, emploi qu’il conserverait jusqu’à sa mort. Aux élections fédérales du 7 novembre 1900, il appuya Ralph Smith*, candidat libéral-ouvrier qui partageait ses vues.

Malgré ses tendances libérales, Watson préconisait une représentation ouvrière indépendante. Au printemps de 1900, il avait assisté à un congrès au cours duquel on proposa qu’il se porte candidat ouvrier aux prochaines élections provinciales. Cependant, la proposition fut mise aux voix et l’assemblée choisit deux autres candidats, Joseph Dixon et Francis Williams, pour la circonscription de Vancouver City. En 1902, Watson assista au congrès de Kamloops, où une coalition de divers syndicats et groupes politiques fondèrent un parti réformiste, le Provincial Progressive Party. Candidat défait à la présidence de cette nouvelle organisation, Watson fut toutefois élu à son comité de direction.

En 1902 également, Watson assista à l’assemblée du Congrès des métiers et du travail, qui eut lieu à Berlin (Kitchener, Ontario). Il était à l’époque organisateur spécial du congrès en Colombie-Britannique. S’élevant contre l’américanisation croissante des syndicats canadiens, il affirma : « Si nous voulons faire quelque chose pour le mouvement syndical au Canada, nous devons le faire tout de suite, sans quoi toutes nos organisations deviendront des organisations américaines, ce que, pour ma part, je ne souhaite nullement. » Son argument, de toute évidence, eut peu d’impact sur l’assemblée, qui opta plutôt pour un rapprochement avec l’American Federation of Labor.

Pendant l’année qui suivit, le désaccord entre Watson et d’autres syndicalistes de Vancouver devint un fait connu, en particulier durant la grève des travailleurs des chemins de fer membres de la United Brotherhood of Railway Employees, au printemps de 1903 [V. Frank Rogers]. Ce syndicat affilié au radical American Labor Union et dirigé par des socialistes symbolisait dans une large mesure ce que Watson rejetait. Comme beaucoup d’autres partisans du syndicalisme de métier, Watson détestait l’American Labor Union, qui préconisait la rupture avec la conservatrice American Federation of Labor et s’était lancé dans une campagne de double syndicalisation, c’est-à-dire dans la formation de nouveaux syndicats dans les secteurs où il en existait déjà. Opposé aux grèves de sympathie, Watson travailla dur pour empêcher que quiconque parmi les chaudronniers qu’il représentait n’appuie le débrayage des travailleurs des chemins de fer. Témoignant devant la commission royale sur les conflits industriels en Colombie-Britannique au mois de juin, il reconnut qu’il était de plus en plus impopulaire : « Je crois que personne dans cette ville n’a été injurié autant que moi simplement parce que j’ai voulu que les hommes agissent en hommes et se montrent à la hauteur de [l’]entente qu’ils ont conclue. Je suis de ceux qui croient que le travailleur qui signe une entente avec un employeur a le droit de respecter cette entente, et le droit de s’attendre que l’employeur fasse de même. » Le Trades and Labor Council de Vancouver, dont il avait déjà été président mais qui, à cette époque, était tombé aux mains de syndicats dirigés par des socialistes, écrivit au Congrès des métiers et du travail du Canada et à l’American Federation of Labor pour leur demander de cesser de l’employer comme organisateur. De son côté, Watson blâma les socialistes de la tension qui régnait dans le mouvement ouvrier de Vancouver et s’en prit sévèrement à eux dans les journaux de la ville.

Ailleurs, la collaboration réformiste implicite dans le terme libéral-ouvrier avait été couronnée de succès, mais en Colombie-Britannique, les dures grèves de la période 1901–1903 donneraient lieu à une forme de représentation ouvrière plus intransigeante. Après 1903, Joseph Henry Watson joua donc un rôle marginal quoique, à sa mort cinq ans plus tard, les journaux de la ville parlèrent de lui comme d’un des premiers chefs du mouvement syndical à Vancouver.

Jeremy Mouat

Univ. of B.C. Library, Arch. and Special Coll. Div. (Vancouver), M662 (Vancouver Trades and Labor Council records), minutes, 19 juill. 1895, 5 févr., 5, 19 mars 1903.— British Columbian, 13 oct. 1897.— Daily News-Advertiser (Vancouver), 23 juill. 1898, 7 janv., 8 juill., 21 déc. 1899, 23 mai 1908.— Independent (Vancouver), 19 mai, 23 juin 1900, 4–25 avril, 30 mai 1903.— Inland Sentinel (Kamloops, C.-B.), 15, 18 avril 1902.— Nanaimo Herald (Nanaimo, C.-B.), 5 oct. 1900.— Vancouver Daily World, 16 nov. 1898, 15 oct., 26 nov. 1900, 10, 12 mars 1903, 22, 27 mai 1908.— R. H. Babcock, Gompers in Canada : a study of American continentalism before the First World War (Toronto et Buffalo, N.Y., 1974).— Canada, Parl., Doc. de la session, 1904, no 36a : 688–695.— Congrès des métiers et du travail du Canada, Proc. of the annual convention (Ottawa), 18 (1902) : 37–41 ; 19 (1903) : 31s.— Electoral hist. of B.C.— Craig Heron, « Labourism and the Canadian working class », le Travail, 13 (1984) : 45–75.— Loosmore, « B.C. labor movement ».— A. R. McCormack, « Arthur Puttee and the Liberal party : 1899–1904 », CHR, 51 (1970) : 141–163 ; Reformers, rebels, and revolutionaries.— R. A. J. McDonald, « Working class Vancouver, 1886–1914 : urbanism and class in British Columbia », BC Studies, nos 69–70 (printemps-été 1986) : 33–69.— Robert MacIntosh, Boilermakers in British Columbia ([Vancouver], 1976).— P. A. Phillips, No power greater : a century of labour in British Columbia (Vancouver, 1967).— H. K. Ralston, « The 1900 strike of Fraser River sockeye salmon fishermen » (thèse de m.a., Univ. of B.C., 1965).— Robin, Radical politics and Canadian labour.— J. H. Tuck, « The United Brotherhood of Railway Employees in western Canada, 1898–1905 », le Travailleur, 11 (1983) : 63–88.

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Jeremy Mouat, « WATSON, JOSEPH HENRY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/watson_joseph_henry_13F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
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