WARD, JOHN, homme d’affaires, officier de milice, homme politique et juge de paix, né le 8 novembre 1753 à Peekskill, New York, probablement le fils d’Edmund Ward et d’Elizabeth Strange ; en 1777, il épousa Elizabeth Strange, et ils eurent quatre fils et deux filles ; décédé le 5 août 1846 à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick.
Pendant la guerre d’Indépendance américaine, John Ward combattit du côté des loyalistes. Nommé enseigne dans le Loyal American Regiment en 1776, il fut promu lieutenant le 7 octobre 1777. Lorsque le major John André s’embarqua à bord du Vulture en 1780 pour rejoindre le major général Benedict Arnold*, qui transmettait des renseignements aux Britanniques, c’est Ward qui commandait les troupes d’escorte ; après l’arrestation d’André par une patrouille rebelle, Ward conduisit Arnold en lieu sûr. Il commanda également les dernières troupes provinciales à quitter New York pour Parrtown (Saint-Jean) en 1783. Comme la saison était avancée, ses hommes furent contraints d’hiverner à cet endroit, sous la tente. Les Ward eurent un fils, John, en un glacial mois de décembre.
Ward quitta Parrtown en 1784 pour s’installer dans la localité qui devint plus tard Wards Creek. Mais comme il se trouvait trop loin du centre commercial de la nouvelle province du Nouveau-Brunswick, il revint bientôt à Parrtown. Il y fonda sa première entreprise commerciale, spécialisée dans la vente en gros des vins et spiritueux. Il fut le pionnier du commerce des boissons antillaises à Saint-Jean, qui contribua largement à la prospérité de la ville. L’établissement de Ward, situé au South Market Wharf, au cœur du secteur commercial de la ville, connut une expansion rapide et se transforma bientôt en magasin général, pour répondre aux besoins des navires qui arrivaient chaque jour au Market Slip et pour servir les résidents qui fréquentaient le Market Square. L’entreprise finit même par comprendre une scierie et une fonderie ; l’une de ses usines était située à la pointe Wolfe, qui fait aujourd’hui partie du parc national de Fundy.
Le 21 février 1812, Ward et cinq autres hommes d’affaires adressèrent une requête à la chambre d’Assemblée par laquelle ils obtinrent le droit exclusif, pour une période de dix ans, de fournir des services de transport par bateau à vapeur entre Saint-Jean et la capitale provinciale, Fredericton. La guerre contre les États-Unis retarda leur projet mais, en 1816, le groupe, auquel s’était joint Hugh Johnston*, réussit à lancer le General Smyth. Le navire partit pour la capitale le 20 mai, inaugurant ainsi le transport par vapeur sur le fleuve Saint-Jean. Par la suite, Ward fut de nouveau associé au lancement d’autres bateaux semblables qui naviguaient sur ce même cours d’eau. En 1814, la compagnie John Ward and Son (Caleb, l’aîné de ses fils vivants, s’était joint à l’entreprise) commanda le premier navire gréé en carré à être construit à St Martins. Lancé en 1815, le Waterloo, un bâtiment de 391 tonneaux dont elle avait confié la construction à James Moran, partit immédiatement à destination de Liverpool avec une cargaison de bois d’œuvre et de douves. Ward montra un intérêt constant pour la zone de construction navale de St Martins, puisqu’il s’était fait construire une maison dans la région. Entre 1830 et 1850, François-Lambert Bourneuf*, de Clare, en Nouvelle-Écosse, construisit plusieurs navires de la compagnie. Il ne fait aucun doute que l’entreprise connut beaucoup de succès. Il semble même qu’au moins pendant une courte période, aux alentours de 1837, la plupart des immeubles de South Market Wharf aient été entre ses mains.
Ward prit aussi part aux affaires publiques. En avril 1799, il fut élu conseiller municipal à Saint-Jean ; il conserva ce poste jusqu’en octobre 1809, c’est-à-dire jusqu’au moment où il devint député provincial de la circonscription qui regroupait le comté et la ville de Saint-Jean. Réélu en 1816 et en 1819, il siégea à la chambre d’Assemblée jusqu’à la dissolution du Parlement en 1820, après quoi il se retira de la politique. Son fils John représenta la même circonscription de 1827 à 1834. À lire les journaux de la chambre d’Assemblée, Ward père ne parait pas avoir apporté une contribution notable aux délibérations. Il n’y a pas de doute, cependant, qu’il profita de son poste de député pour favoriser les intérêts de sa compagnie. À compter du 9 juin 1818, par exemple, il fit partie de la commission chargée de faire le tracé de la route qui reliait Loch Lomond à la baie Quaco, l’emplacement de son chantier naval. Encore en 1818, on le nomma juge de paix et, finalement, il devint le doyen des magistrats de la ville et du comté de Saint-Jean. Pendant près de 40 ans, il fut commissaire responsable des phares de la baie de Fundy. Non seulement sa compagnie fournissait les matériaux de construction et l’équipement pour les phares, mais c’est elle qui s’occupait aussi des soumissions présentées.
Ward s’intéressa toujours aux choses militaires, même après son arrivée au Nouveau-Brunswick. Le 4 mai 1793, il avait été l’un des officiers fondateurs de la Loyal Company of Artillery de Saint-Jean ; le 12 novembre 1806, on le promut major. En août 1816, il commandait le lst Battalion of the Saint John County militia et, plus tard, il eut sous ses ordres toute la milice du comté, avant de prendre sa retraite le 23 juin 1830.
John Ward incarnait pour ses concitoyens les valeurs traditionnelles des loyalistes. En reconnaissance des services qu’il rendit à Saint-Jean, on lui décerna le titre de « père de la cité » et, à l’occasion des festivités qui marquèrent les cinquantième et soixantième anniversaires de l’arrivée des loyalistes, on le traita comme l’invité d’honneur. Après son décès, en août 1846, le New-Brunswick Courier publia ce poème :
Reçois cet hommage d’un barde,
Qui le juge mérité au mieux.
Paix à tes cendres, père Ward,
Écoute patriarche, adieu.
Le dynamisme et la détermination de Ward manquèrent sûrement à l’entreprise qu’il avait fondée, car celle-ci ne franchit pas le cap des années 1860. Un écrivain avait prédit en 1846 que le nom de Ward « passerait intact à la postérité et serait vénéré des générations futures ». Cette prophétie ne s’est pas réalisée : John Ward est presque oublié aujourd’hui, à Saint-Jean.
APNB, MC 1156 ; RG 4, RS24, S21-P16.— City of Saint John (Saint-Jean, N.-B.), City Clerk’s Office, Common Council, minutes, 1785–1846 (mfm à la Saint John Regional Library).— Musée du N.-B., A15 (John Ward) ; A141 (John Ward, account-book, 1785–1789) ; Ward family papers, packet 20, items 135, 139 ; packet 29, items 12, 16, 21–29.— N.-B., House of Assembly, Journal, 1809–1820.— Winslow papers (Raymond).— Morning News (Saint-Jean), 7 août 1846.— New-Brunswick Courier, 8, 29 août 1846.— J. B. M. Baxter, Historical records of the New Brunswick Regiment, Canadian Artillery (Saint-Jean, 1896).— A. G. Finley, « The Morans of St. Martins, N.B., 1850–1880 : toward an understanding of family participation in maritime enterprise », The enterprising Canadians : entrepreneurs and economic development in eastern Canada, 1820–1914, L. R. Fischer et E. W. Sager, édit. (St John’s, 1979), 37–54.— G. [B.] MacBeath et D. F. Taylor, Steamboat days : an illustrated history of the steamboat era on the St. John River, 1816–1946 (St Stephen[-Milltown], N.-B., 1982).— Richard Rice, « The Wrights of Saint John : a study of shipbuilding and shipowning in the Maritimes, 1839–1855 », Canadian business history ; selected studies, 1497–1971, D. S. Macmillan, édit. (Toronto, 1972), 317–337.— T. W. Acheson, « The great merchant and economic development in St. John, 1820–1850 », Acadiensis (Fredericton), 8 (1978–1979), nº 2 : 3–27.— J. R. Harper, « St. Martins’ men build a ship in 1814 », American Neptune : a Quarterly Journal of Maritime Hist. (Salem, Mass.), 21 (1966) : 279–291.
Harold E. Wright, « WARD, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/ward_john_7F.html.
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
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