VIGNEAU, PLACIDE, pêcheur, capitaine de goélette, gardien de phare et auteur, né le 29 août 1842 à Havre-aux-Maisons, Bas-Canada, fils de Vital Vigneau et d’Élise Boudreau ; le 9 janvier 1865, il épousa à Pointe-aux-Esquimaux (Havre-Saint-Pierre, Québec) Louise Cormier, et ils eurent un enfant, puis le 23 novembre 1869, au même endroit, Victoire Doyle, et de ce mariage naquirent sept enfants, dont trois atteignirent l’âge adulte, et finalement le 27 juin 1887, à Natashquan, Québec, Suzanne Chevarie, et le couple eut un enfant ; décédé le 1er mars 1926 à Pointe-aux-Esquimaux.
On sait peu de chose au sujet de l’enfance et de l’adolescence de Placide Vigneau, sinon que, grâce aux instituteurs de sa ville natale, aux îles de la Madeleine, il développe sa curiosité intellectuelle. Il suit les traces de son père, d’origine acadienne, et apprend le métier de pêcheur hauturier. En novembre 1858, sa famille, ainsi que quelques autres, se déplace des îles de la Madeleine vers la côte nord du Saint-Laurent et s’installe dans le village naissant de Pointe-aux-Esquimaux. Pêcheur, manœuvre et armateur, Placide fait équipe avec les membres de sa famille pour gagner péniblement sa vie. Sur la goélette de son père, il est d’abord mousse et transcripteur du journal de bord, puis devient le capitaine. Au printemps de 1880, après avoir travaillé au sein de nombreux équipages, il prendra possession de sa propre goélette, le Phoenix.
Lorsqu’il arrive à Pointe-aux-Esquimaux, Placide, qui souhaite que certains faits et discussions dont il est témoin ne sombrent pas dans l’oubli, commence à tenir un journal, où il consigne des détails tant de la vie quotidienne que du déroulement de ses expéditions de pêche. En 1862, il rencontre Louis Ouellet, premier instituteur du village, qui devient un ami fidèle et l’encourage – tout comme d’autres – à persévérer dans son projet d’écriture. Toute sa vie durant, Placide collectera quantités d’informations (chansons, statistiques, notes relatives à ses ancêtres, et autres) et amassera une collection de livres et d’objets (notamment des cartes marines et des objets récupérés de naufrages). Pierre-Étienne Fortin*, magistrat « stipendiaire » des pêcheries, s’arrête régulièrement à Pointe-aux-Esquimaux, où il se lie lui aussi d’amitié avec Vigneau. Ce dernier lui fournit des renseignements à inscrire dans ses rapports annuels, notamment sur les prises de phoques, de morues et de harengs. Les qualités intellectuelles de Vigneau l’amènent à occuper plusieurs fonctions au village : maître chantre à l’église, secrétaire-trésorier de l’école, juge de paix.
Au milieu des années 1880, la diminution des ressources marines amène une disette telle que plusieurs familles sont contraintes de trouver de nouveaux moyens pour gagner leur vie. Au printemps de 1892, après de multiples démarches, Vigneau devient pour sa part gardien du phare de l’île aux Perroquets, dans l’archipel de Mingan. Cet emploi, qu’il occupera jusqu’à ce que son fils Hector le remplace, en 1912, est devenu vacant à la suite de la noyade du gardien qui était en poste depuis quelques mois seulement. Parmi ses tâches figurent, outre la surveillance des mécanismes d’allumage, l’entretien des bâtiments et l’assistance aux marins.
À la veille de ses 50 ans, Placide Vigneau entame donc une carrière qui lui ménage plus de temps libre. La vie d’insulaire lui procure également l’isolement parfois nécessaire à l’écrivain. De plus, Vigneau jouit désormais d’une relative sécurité financière (son salaire annuel est d’environ 600 $, avec lequel il doit aussi payer son assistant). Tout en continuant à tenir son journal, il rédige sur des sujets de plus en plus divers (généalogie, folklore, pharmacopée naturelle, linguistique) et met par écrit nombre de récits (faits surnaturels, naufrages, visites de scientifiques). Au moyen de la télégraphie, il fournit de multiples dépêches d’ordre pratique au Family Herald and Weekly Star de Montréal. En prêtant ses manuscrits, il collabore, avec des auteurs tels que l’abbé Victor-Alphonse Huard, Paul Hubert et Mgr Charles Guay, à la production d’ouvrages sur l’histoire de la Côte-Nord, des îles de la Madeleine et de l’Acadie. Pour qui s’intéresse à l’histoire de ces régions ou à l’histoire maritime, la valeur du travail de Vigneau est inestimable.
Placide Vigneau est l’auteur de : « Histoire ou Journal de la Pointe aux Esquimaux », ANQ, Rapport ([Québec]), 1968 : 5–294 ; « les Morses dans le golfe Saint-Laurent », le Naturaliste canadien (Québec), 35 (1908) : 140–142 ; Un pied d’ancre ; journal de Placide Vigneau [...] (Sillery, Québec, 1969) ; et de Variétés de diverses farces et autres faits ridicules arrivés à la Pointe ou encore à des habitants de la Pointe, Guy Côté et Pierre Frenette, compil. ([Baie-Comeau, Québec], 1996).
ANQ-BSLGIM, P11 ; ZQ1-S321, 2 oct. 1842.— ANQ-CN, CE901-S3, 9 janv. 1865, 23 nov. 1869 ; CE901-S6, 27 juin 1887 ; P1 ; P19 ; P48 ; P53.— Arch. du séminaire de Chicoutimi (Chicoutimi, Québec), C-11 (fonds de l’abbé V. A.Huard), dossiers 328–331, 333.— Antoine Bernard, « Placide Vigneau et la Côte Nord », l’Évangéline (Moncton, N.-B.), 29 sept. 1931.— Le Soleil, 5 mars 1926.— Anthologie de textes littéraires acadiens, Marguerite Maillet et al., édit. (Moncton, 1979).— Georges Arsenault, Complaintes acadiennes de l’Île-du-Prince-Édouard ([Montréal], 1980), 119, 123s., 126–129.— René Bélanger, la Côte Nord dans la littérature ; anthologie (Québec, 1971), 71–75.— Antoine Bernard, Histoire de la survivance acadienne, 1755–1935 (Montréal, 1935), 5, 372–378 ; la Renaissance acadienne au xxe siècle (Québec, [1949]).— « Capture d’un morse », le Naturaliste canadien, 35 : 49–51.— Anselme Chiasson, les Îles de la Madeleine : vie matérielle et sociale de l’en premier ([Montréal], 1981) ; les Légendes des îles de la Madeleine (2e éd., Moncton, 1976).— Gérard Gallienne, « Placide Vigneau », Soc. canadienne de généalogie, Cahier spécial A (Québec), janv. 1969 : 3–24.— Charles Guay, Lettres sur l’île d’Anticosti à l’honorable Marc-Aurèle Plamondon, juge de la Cour supérieure, en retraite, à Artabaskaville (Montréal, 1902), 131–140.— V.-A. Huard, Labrador et Anticosti : journal de voyage, histoire, topographie, pêcheurs canadiens et acadiens, indiens montagnais (Montréal, 1897), 188s., 253s.— Paul Hubert, les Îles de la Madeleine et les Madelinots (Rimouski, Québec, 1926), 11, 111–117, 132s., 148–152.— Chantal Naud, Chronologie des îles de la Madeleine [...] (L’Étang-du-Nord, Québec, 1993), 61s.— La Paroisse acadienne de Havre-Saint-Pierre célèbre, dans l’action de grâce, son premier siècle d’histoire, 1857–1957 (s.l., 1957).— Carmen Roy, « les Acadiens de la rive nord du fleuve Saint-Laurent », Musée national du Canada, Contributions to Anthropology (Ottawa), 1961–1962, part. ii : 155–198.— Berchmans Scherrer, Un peu d’histoire : Havre-Saint-Pierre ([Gallix, Québec, 1996]).
Guy Côté, « VIGNEAU, PLACIDE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/vigneau_placide_15F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
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