VIAU, Dalbé (baptisé Joseph-Dalbé), architecte, administrateur et homme politique, né le 29 septembre 1881, probablement à Sainte-Anne-de-Bellevue, Québec, et baptisé le même jour dans la paroisse Sainte-Geneviève (Montréal), fils d’Amable Viau, cultivateur, et de Philomène Desforges ; le 31 octobre 1910, il épousa dans la paroisse Saint-Jacques, à Montréal, Mathilde Lacas, et ils eurent trois fils et une fille ; décédé le 24 août 1938 à Québec et inhumé le 27 à Lachine (Montréal).

À l’âge de deux ans, Dalbé Viau souffre d’une forme de paralysie qui lui inflige un handicap permanent à une jambe. Il est formé au primaire à l’école modèle de Lachine, puis fait son cours commercial à l’école Saint-Henri, à Montréal, deux établissements tenus par les Frères des écoles chrétiennes.

Viau commence sa carrière comme commerçant, mais ne poursuit pas dans ce métier. De 1898 à 1900, il est dessinateur auprès de l’architecte montréalais Casimir Saint-Jean, alors responsable de la réalisation de plusieurs édifices religieux d’importance, comme la cathédrale Saint-Jean-Baptiste, à Nicolet, achevée en 1899, et l’église Saint-Jérôme, dans la ville du même nom, inaugurée en 1900. L’architecture de Saint-Jean est très ornementale, ce qui amène probablement Viau à perfectionner sa connaissance du vocabulaire architectural. Le 2 mai 1899, grâce à ce qu’il a appris dans ce bureau, Viau réussit l’examen d’immatriculation de l’Association des architectes de la province de Québec. Deux ans plus tard, Viau est engagé par Joseph-Arthur Godin, architecte montréalais réputé pour sa compréhension et son utilisation du béton en architecture aussi bien religieuse que résidentielle. Il y poursuit sa formation durant quatre ans. À l’hiver de 1904–1905, il suit un cours intensif de dessin d’architecture à la McGill University ; il est le seul Canadien français de sa cohorte. Ce cours le confirme dans sa vocation et lui permet, en 1905, de réussir l’examen d’admission à la profession de l’Association des architectes de la province de Québec.

Montréal et ses faubourgs connaissent alors une importante expansion démographique. De nombreux ruraux s’y installent pour profiter des salaires payés par les entreprises industrielles. L’essentiel du territoire de Montréal est loti et bâti entre 1875 et 1915, période à la fin de laquelle Viau se consacrera surtout à l’architecture résidentielle. De 1906 à 1912, Viau construit – à son propre compte, à partir de son bureau à Lachine ou à Montréal, mais aussi pour de petits commerçants et entrepreneurs – des maisons à logements multiples à Lachine, au centre-ville et dans le quartier Saint-Jacques de la métropole, à Saint-Louis (Montréal) et à Outremont (Montréal). Il travaille seul, mais partage, à l’occasion, des projets d’immeubles résidentiels avec l’architecte Alfred-Hector Lapierre, établi à Montréal. À cette époque, on crée des édifices de deux ou trois étages. Ces derniers comprennent souvent des magasins au rez-de-chaussée ; ils sont de plus caractérisés par leurs escaliers extérieurs et leurs façades ornées de jeux de brique ou de pierre, de vitraux et d’éléments en fer forgé. Viau a plus de 80 clients différents dans la construction résidentielle, et environ une vingtaine pour la réalisation ou la modification d’ateliers et de petites usines. Il continuera à œuvrer dans ces domaines pendant une grande partie de sa carrière.

Dès 1906, Viau est également actif dans le secteur de l’architecture scolaire, ce qui lui vaut une certaine notoriété dans la région montréalaise. Cette année-là, la commission scolaire Saint-Louis lui demande des plans pour la construction de l’académie du Boulevard, puis, en 1911–1912, pour l’école de l’Enfant-Jésus. Viau produit des édifices aisément reconnaissables et d’une architecture conforme aux normes des commissions scolaires. Il utilise des matériaux peu coûteux, comme la brique, et adopte la manière Beaux-Arts, qui comprend notamment une ornementation économique à faible relief (ses éléments ne sont pas sculptés, mais moulés, surtout pour l’extérieur). Pour la commission scolaire d’Hochelaga, Viau effectue en 1910 les plans de l’école Frontenac et ceux de l’école Baril. Jusqu’en 1914, il décrochera cinq des six contrats conclus par cette dernière commission scolaire. En 1912, la commission scolaire de la ville Saint-Laurent l’engage pour l’école Saint-Alfred, tandis que la commission scolaire de la ville Saint-Pierre-aux-Liens retient ses services pour l’académie Desrosiers.

En 1908, un incendie a détruit entièrement Trois-Rivières à partir de l’ouest, à l’exception de quelques pâtés de maisons. L’année suivante, comme certains de ses collègues montréalais, Viau propose ses services pour aider à reconstruire la ville ; il y ouvre même un bureau. Seulement cinq immeubles résidentiels, un entrepôt et un studio lui sont commandés. Mais Viau mène plusieurs affaires de front : il continue de concevoir des plans et de surveiller des chantiers de résidences à Montréal et à Lachine. Le nom de Louis-Zéphirin Gauthier* figure parfois à côté du sien, ce qui donne à penser qu’ils collaborent.

L’association de Viau avec Louis-Alphonse Venne, officialisée en 1912, le propulse toutefois à un autre niveau. Venne, qui a repris, à Montréal, la succession de Maurice Perrault*, a besoin d’un associé et il connaît Viau. Ce dernier apporte à la firme Viau et Venne ses contrats et son expertise, surtout dans le monde scolaire, mais il en assure principalement l’administration. Il s’occupe des affaires quotidiennes de l’agence, notamment la surveillance des chantiers, le respect des échéanciers, la gestion du personnel et des comptes. Son rôle plus effacé ne l’empêche pas de solliciter des contrats ni de prendre la responsabilité de quelques-uns dans son champ de spécialité.

Viau réside à Lachine, où il est conseiller municipal en 1923, puis maire de 1925 à 1933. Candidat du Parti conservateur à l’élection provinciale de 1931 dans la circonscription de Jacques-Cartier, il doit céder la victoire à Victor Marchand, qui récolte 216 voix de plus. Venne s’affirmant libéral, l’entreprise des deux architectes a des liens avec les deux côtés de l’Assemblée législative.

Après la mort de Venne en 1934, Viau obtient peu de contrats, situation surtout attribuable à la grande dépression. Il exécute quelques travaux pour les Sœurs des Saints-Noms de Jésus et de Marie, tels que la construction d’une école normale à Salaberry-de-Valleyfield (1933–1934), et les agrandissements de leur résidence à l’académie des Saints-Anges à Montréal (1938–1939) et du pensionnat du Saint-Nom-de-Marie à Outremont (1938). Son dernier gros contrat est l’érection de l’église Saint-Denis à Montréal, mise en œuvre en 1931, avant la mort de Venne. En 1935–1936, Viau est l’architecte-superviseur de l’annexe du Bureau des douanes à Montréal.

Dalbé Viau meurt le 24 août 1938 dans une chambre d’hôtel du château Frontenac, à Québec. Il est surtout reconnu pour sa participation aux travaux de la firme Viau et Venne, dont il a assumé l’administration jusqu’au décès de son associé. L’entreprise a été la plus importante de son époque dans la région montréalaise. Ses architectes ont obtenu et exécuté des contrats considérables, notamment ceux de l’oratoire Saint-Joseph, à Montréal, et de la maison mère des Sœurs des Saints-Noms de Jésus et de Marie, à Outremont [V. Louis-Alphonse Venne], particulièrement en raison de leurs relations privilégiées avec les pouvoirs institutionnels. Au moment où la région de Montréal était en plein développement, Viau a contribué à donner à l’architecture de la province de Québec une partie de son caractère en construisant des églises, des écoles et des édifices institutionnels.

Raymonde Gauthier

BAnQ-CAM, CE601-S28, 29 sept. 1881.— FD, Saint-Jacques-le-Majeur, cathédrale [Saint-Jacques] (Montréal), 31 oct. 1910.— Le Canada (Montréal), 25 août 1938.— La Presse, 5 nov. 1913, 23 juill. 1914.— Le Prix courant (Montréal), 1906–1918.— Le Soleil, 25 août 1938.— Annuaire, Montréal, 1892–1938.— BCF, 1926 : 237.— Communauté urbaine de Montréal, Service de la planification du territoire, Architecture civile (2 vol., Montréal, 1980–1981), 1 (les Édifices publics) ; 2 (les Édifices scolaires) ; Architecture religieuse (2 vol., Montréal, 1981–1984), 1 (les Églises) ; 2 (les Couvents).— Raymonde Gauthier, Construire une église au Québec : l’architecture religieuse avant 1939 (Montréal, 1994) ; la Tradition en architecture québécoise : le xxe siècle (Québec, 1989).— André Laberge, « Transcender le style et la fonction : l’architecture religieuse de Viau et Venne (1898–1938) » (thèse de ph.d., univ. Laval, 1990).— Montréal métropole, 1880–1930, sous la dir. d’Isabelle Gournay et France Vanlaethem ([Montréal], 1998).— Luc Noppen, les Églises du Québec (1600–1850) (Québec, 1977).— Who’s who and why, 1917–1921.— Who’s who in Canada, 1922–1929.

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Raymonde Gauthier, « VIAU, DALBÉ (baptisé Joseph-Dalbé) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/viau_dalbe_16F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2016
Année de la révision:    2016
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