TUGLAVINA (Tuglawina, Tukelavinia, baptisé sous le prénom de William), un des chefs inuit du Labrador, né vers 1738 ; il épousa, vers 1770, Mikak ; décédé le 4 octobre 1798 à Nain, au Labrador.

Tuglavina naquit et fut élevé alors qu’il n’y avait pas encore d’établissement européen dans la partie septentrionale du Labrador, et que les contacts entre les Européens et les Inuit de cette région étaient sporadiques et souvent hostiles [V. John Christian Erhardt*]. On connaît peu de chose de ses premières années ; la seconde partie de sa vie, toutefois, fait l’objet de maintes références dans les journaux des missions fondées, de son vivant, par les frères moraves à Nain (1771), à Okak (1776) et à Hoffenthal (Hopedale) (1782) [V. Jens Haven]. Quand les frères moraves firent mention de lui pour la première fois, en 1770, il était un angakok (chef religieux indigène) et le mari de Mikak, une Inuk bien connue des missionnaires en raison de son récent séjour en Angleterre. Mikak et Tuglavina servirent comme pilotes sur le sloop des frères moraves envoyé à la recherche d’un site convenable à l’établissement de la mission de Nain. Une fois celle-ci édifiée, il y fit de fréquentes visites. En 1775, il embarqua trois frères moraves sur son propre bateau, à la recherche d’un emplacement pour la mission de Hoffenthal ; cinq ans plus tard, il permit à l’un des missionnaires de l’accompagner dans son voyage aux camps de chasse au caribou, à l’intérieur des terres.

Dès le début de leur mariage, Tuglavina et Mikak eurent de fréquentes querelles. Ils se séparèrent par la suite, après que Tuglavina eut pris plusieurs autres épouses, dont la sœur de Mikak. En 1782, il se donna une quatrième femme, ce qui était une marque de prestige exceptionnelle à une époque où la polygamie était une forme de mariage commune et désirée chez les Inuit du Labrador, et alors que même les hommes les plus choyés par le succès n’avaient que deux ou trois femmes. Plus tard cette année-là, Tuglavina fit un voyage à la baie des Châteaux, dans le détroit de Belle-Isle, au sud du Labrador, y trafiquant dans quelques-uns des postes de pêche et de chasse aux phoques récemment ouverts dans cette région. Y ayant obtenu des mousquets et de la poudre, que les frères moraves n’avaient pas voulu fournir dans leurs propres magasins de traite, Tuglavina persuada plusieurs Inuit baptisés de quitter les missions moraves et de l’accompagner au sud dans ses voyages subséquents. Il devint un intermédiaire prospère, portant des marchandises de traite aux Inuit qui vivaient au nord des missions et redescendant, dans son grand sloop à deux mâts, de riches cargaisons de matières brutes, des fanons de baleine, par exemple. Malgré ses succès, plusieurs de ses compagnons l’abandonnèrent, et il devint obsédé par la crainte que ses ennemis ne complotent pour se venger de lui à cause de sa participation, dans le passé, aux meurtres de quelques Inuit.

Les voyages de Tuglavina vers le sud paraissent avoir cessé vers 1790, quand son sloop devint impropre à la navigation et qu’il n’eut plus qu’un chien pour tirer son traîneau. Cette année-là, avec la seule femme qui lui restât, il déménagea à la mission de Nain. Il avait été baptisé à la baie des Châteaux en 1783, alors qu’il était sérieusement malade, et, en 1793, il fut admis dans la congrégation de Nain. Il semble être devenu, dans ses dernières années, un puissant avocat du christianisme. Il mourut d’une pleurésie en 1798 et fut enseveli dans le cimetière de la mission.

J. Garth Taylor

Archiv der Brueder-Unitat (Herrnhut, République démocratique allemande), Hopedale diary, 1782–1784.—Moravian Church Archives (Londres), Hopedale diary, 1784–1798 ; Journal of the voyage of the Jersey packet to Labrador and Newfoundland taken from the papers of Jens Haven and Christian Drachard, 1770 ; Nain diary, 1771–1798 ; Okak diary, 1776–1798.— J. G. Taylor, Labrador Eskimo settlements of the early contact period (Ottawa, 1974) ; William Turner’s journeys to the caribou country with the Labrador Eskimos in 1780, Ethnohistory (Tucson, Ariz.), 16 (1969) : 141–164.

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J. Garth Taylor, « TUGLAVINA (Tuglawina, Tukelavinia), baptisé William », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/tuglavina_4F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
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