Troup, James William, capitaine de navire à vapeur, concepteur de bateaux et homme d’affaires, né le 5 février 1855 à Portland (Oregon), fils de William H. Troup et d’Eliza Jane Turnbull ; le 17 juillet 1879, il épousa au même endroit Frances Julia Stump (décédée le 19 août 1938), et ils eurent un fils et une fille ; décédé le 30 novembre 1931 à Victoria.

Le grand-père maternel de James William Troup, James Turnbull, avait mis sur pied un service de transport par bateaux à vapeur entre Portland et Vancouver (Washington) ; le père de Troup fut le chef mécanicien de l’entreprise et le capitaine d’un vapeur. Troup passa son enfance dans la maison familiale à Vancouver et à bord des navires de la famille, où il acquit des aptitudes en matière de commerce maritime. Son père espérait le voir entrer à la United States Naval Academy à Annapolis, au Maryland, mais des troubles de la vision compromirent apparemment son admission. Il travailla comme commissaire de bord et comme pilote ; à l’âge de 20 ans, il était déjà le capitaine du vapeur Wasp, qui naviguait sur le fleuve Columbia.

En mai 1883, Troup commença à travailler en Colombie-Britannique pour le capitaine John Irving, qui avait des intérêts dans plusieurs entreprises de transport maritime, y compris la Kamloops Steam Navigation Company et la Pioneer Line Company, qui appartenait à sa famille et était en train de fusionner avec la flotte de la Hudson’s Bay Company pour former la Canadian Pacific Navigation Company. Troup dirigea des vapeurs dans la région de Kamloops, sur le fleuve Fraser et le long de routes côtières. Ces navires transportaient des passagers, des marchandises et du courrier, et ils étaient souvent le seul lien entre des communautés éloignées et de plus grands centres. En raison de son habileté et de son expérience, Irving lui confia le R. P. Rithet, luxueux vapeur à roue arrière, et le Yosemite, le plus gros navire de la flotte de l’entreprise. Troup retourna aux États-Unis en 1886 pour diriger le service de vapeurs de l’Oregon Railroad and Navigation Company ; ces vapeurs sillonnaient le Puget Sound, ainsi que le fleuve Columbia. En 1888, il supervisa la construction du T. J. Potter, un des bateaux les plus rapides dans le nord-ouest du Pacifique. Le vapeur Victorian, construit en 1891, eut moins de succès, car ses gros moteurs peu performants rendaient son exploitation coûteuse ; Troup en tira des leçons qui lui permirent toutefois de développer ses connaissances dans le domaine de la construction et de la conception navales. Il acquit une grande renommée sur le fleuve Columbia en manœuvrant le Harvest Queen dans les rapides Tumwater et d’autres navires dans les rapides Cascades.

Troup retourna en Colombie-Britannique en 1892 pour administrer la flotte de la Columbia and Kootenay Steam Navigation Company Limited, dont le siège social se trouvait à Nelson, et dans laquelle son ami Irving avait des parts. Il y supervisa la production de nombreux vapeurs à roues arrière destinés au service des lacs et des fleuves. L’entreprise fut acquise par la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique en 1896–1897. Troup garda son poste, mais, à la demande des nouveaux propriétaires, il passa du temps à Vancouver, en Colombie-Britannique, afin de diriger la construction de bateaux à aubes pour le fleuve Stikine.

En 1900, Troup devint superviseur (et plus tard superviseur en chef) du service des lacs et des fleuves de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique, implanté à Nelson. À la suite de l’achat, par la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique, de la Canadian Pacific Navigation Company, il s’installa à Victoria l’année suivante afin de prendre la tête des opérations de navigation côtière ainsi récemment acquises. Il aborda cette fonction avec enthousiasme et détermination. La bonne gestion de ce qui fut bientôt connu sous le nom de British Columbia Coast Steamship Service serait la passion de sa vie. Il transforma une flotte de 14 vieux navires en l’un des meilleurs services côtiers de vapeurs au monde. Il incita la compagnie à construire des bateaux de qualité et de nouvelles installations portuaires ; il était convaincu qu’ils augmenteraient la circulation et justifieraient les dépenses. De plus, il plaida en faveur de normes élevées. Par exemple, en 1903, il écrivit à propos du vapeur Princess Victoria, construit depuis peu : « le bateau n’aura jamais de succès si le détail [des emménagements pour passagers] n’est pas pris en considération. C’est du détail que tout dépendra. » Le succès de l’entreprise durant ses dix premières années contribua au développement des affaires et du tourisme dans la région, et motiva en partie la construction de l’Empress Hotel à Victoria, en 1908.

Même s’il quitta l’école assez tôt, Troup fut un habile concepteur de bateaux. Ses papiers rendent compte de discussions détaillées et de débats avec des constructeurs de navires au sujet des exigences techniques et de la performance de ses bateaux. Parce qu’il était expérimenté et compétent, son jugement le trompa rarement. La conception et la performance du Princess Victoria, ainsi que celles d’autres vapeurs, mirent ses talents en évidence ; parmi ces bateaux, les plus importants furent les célèbres navires de ligne côtiers Princess Kathleen et Princess Marguerite, tous deux construits en 1925 et connus pour leur service rapide et luxueux. Tôt passionné par l’automobile (il obtint le deuxième permis de conduire délivré pour une voiture privée en Colombie-Britannique), Troup chercha un moyen de transporter des véhicules sur les vapeurs côtiers ; avec la construction du Motor Princess, en 1923, il fut aussi à l’avant-garde dans le domaine des traversiers à propulsion diesel pour automobiles sur la côte du Pacifique.

Pendant les années de service de Troup, la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique connut des drames. Le 15 août 1901, juste après son entrée en fonction comme superviseur, l’Islander heurta des glaces et coula au large de l’île Douglas, près de Juneau (Alaska), faisant 42 victimes. Le Princess Sophia échoua sur le récif Vanderbilt dans les eaux de l’Alaska au cours d’une violente tempête de neige le 24 octobre 1918 ; il coula le jour suivant, causant la mort de tous ceux qui étaient à bord (entre 343 et 353 personnes). La tragédie du Princess Sophia fut vivement ressentie tout le long de la côte ; la santé de Troup en fut ébranlée pendant un certain temps.

Troup était bien en vue dans les milieux d’affaires, et il investit dans le développement industriel terrestre et maritime. Il fut le propriétaire d’un vapeur d’excursion, basé à Victoria, et, plus tard, d’un yacht. Pendant la Première Guerre mondiale, en plus de son emploi à la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique, il fut directeur délégué à la construction de navires en bois pour la Commission impériale des munitions [V. sir Joseph Wesley Flavelle]. Le 26 avril 1921, il devint un citoyen naturalisé.

Très respecté dans de nombreux milieux, Troup déplaisait pourtant à d’autres groupes. Il était très doué pour le commerce côtier et menait ses affaires de façon méthodique. Il était aussi hautement qualifié : il possédait ses papiers de capitaine pour piloter des vapeurs en eaux intérieures et le long de la côte maritime au Canada et aux États-Unis, ainsi qu’un brevet de pilote pour le Puget Sound et probablement pour d’autres endroits. Il acceptait toutefois difficilement les prétextes ou les erreurs stupides de son personnel. Il pouvait être généreux et n’hésitait jamais à reconnaître le rôle des membres de son équipe et d’autres employés de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique dans le succès du service, mais il laissa le souvenir d’un superviseur exigeant. Earl John Marsh, qui avait travaillé dans le bureau de Troup dans les années 1920, ferait remarquer que son directeur agissait comme si les intérêts de l’entreprise étaient les siens.

Troup prit sa retraite le 1er septembre 1928, à l’âge de 73 ans, mais continua à conseiller la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique au sujet de l’acquisition de nouveaux bateaux. En 1930, la plupart des premiers navires avaient été remplacés depuis longtemps ; la flotte avait pris de l’expansion et comprenait 16 vapeurs principaux qui servaient au transport des passagers, plusieurs remorqueurs et barges, ainsi que deux cargos. Les vapeurs, tous nommés Princess, assuraient la principale liaison entre Victoria, Vancouver et Seattle, dans l’État de Washington, entre Vancouver et Nanaimo, en Colombie-Britannique, et desservaient beaucoup de zones côtières dans la province et au sud de l’Alaska. Ces routes de navigation – en fait, des lignes secondaires efficaces de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique – servaient à relier des endroits auxquels le chemin de fer n’avait pas accès. Durant l’année où Troup prit sa retraite, le service côtier transporta près de 798 000 passagers et plus de 30 000 véhicules routiers ; ses gains nets s’élevèrent à près de 1 300 000 $.

Troup était beau, avait une allure distinguée et des yeux perçants. Des photos le montrent en bonne forme physique tout au long de sa carrière. Jeune homme, il arborait une longue moustache ; plus âgé, il la gardait bien taillée. Il était anglican. En 1905, il fit construire une grande maison dans le quartier de Victoria West, d’après les plans de l’architecte Samuel Maclure*. Sa retraite fut de courte durée. À la fin de l’été de 1931, sa santé commença à décliner ; il succomba à une bronchite et à une insuffisance cardiaque à Victoria. Les navires du service côtier de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique s’immobilisèrent pendant deux minutes au moment de ses funérailles.

Un des bateaux de navigation intérieure de James William Troup, le Moyie, construit en 1898, fut méticuleusement restauré et devint un lieu historique national à Kaslo ; un deuxième, le Sicamous, achevé en 1914 et dont il influença considérablement la conception, est devenu un musée de la marine après avoir été restauré à Penticton. Il ne reste aucun de ses vapeurs côtiers. Troup eut une profonde influence sur le développement des services maritimes côtiers et intérieurs qui contribuèrent à l’industrie touristique, à l’essor industriel et à la colonisation. En tant que concepteur de navires pour ces services, il fut reconnu comme un maître rarement égalé. Sa vision, son imagination et ses qualités de gestionnaire le distinguent de la plupart de ses contemporains qui œuvrèrent dans le même domaine.

Robert D. Turner

Pendant les années 1980, Earl John Marsh, qui avait travaillé avec James William Troup, nous a permis de consulter les nombreux volumes de correspondance du British Columbia Coast Steamship Service, ainsi que des documents connexes, qu’il avait conservés. Cette documentation se trouve maintenant aux BCA, Acc. 93-7330.

BCA, GR-2951, nos 1931-09-451818 et 1938-09-546112.— Daily Colonist (Victoria), 19 août 1928, 20 août 1938.— Marine Digest (Seattle, Wash.), 5 déc. 1931.— Morning Oregonian (Portland, Oreg.), 18 juill. 1879, 27 août 1928.— Oregonian (Portland), 20 août 1938.— Victoria Daily Times, 18 août 1928 ; 30 nov., 3 déc. 1931.— BAC, « Registres de naturalisation, 1915–1951 » : www.bac-lac.gc.ca/fra/decouvrez/immigration/citoyennete-dossiers-naturalisation/registres-naturalisation-1915-1951/Pages/introduction.aspx (consulté le 24 juin 2014).— Canadian Railway and Marine World (Toronto), juillet 1921 : 412.— N. R. Hacking et W. K. Lamb, The Princess story : a century and a half of west coast shipping (Vancouver, 1974).— R. W. Troup, Steamboats and Princess ships : the storybook life of Captain James W. Troup (Roseburg, Oreg., 1978).— R. D. Turner, The Pacific Princesses : an illustrated history of the Canadian Pacific Railway’s Princess fleet on the northwest coast (Victoria, 1977) ; Sternwheelers and steam tugs : an illustrated history of the Canadian Pacific Railway’s British Columbia Lake and River Service (Victoria, 1984) ; Those beautiful coastal liners : the Canadian Pacific’s Princesses (Victoria, 2001).

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Robert D. Turner, « TROUP, JAMES WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/troup_james_william_16F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2015
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