TREWORGIE (Treworgy, Trewerghey), JOHN, marchand, colonisateur, gouverneur de Terre-Neuve, né vers 1618 ; circa 1660.

Il était le fils de James Treworgie et de sa femme, Catherine, fille d’Alexander Shapleigh, négociant à Dartmouth. Shapleigh avait des intérêts dans le Maine, en Nouvelle-Angleterre, et John Treworgie s’y rendit vers 1635 comme agent de son grand-père maternel. Il y demeura jusque vers 1650, habitant Sturgeon Creek, Kittery, puis retournant en Angleterre pour un bref séjour en 1640, Au mois de janvier 1646, il épousait une demoiselle Spencer, de Newbury, dans le Massachusetts, et il naquit de cette union un fils, John, en 1649.

Treworgie connaissait les pêcheries de la Nouvelle-Angleterre et peut-être aussi celles de Terre-Neuve, car, ainsi que le révèlent les registres du port de Dartmouth, la famille Shapleigh pratiquait la pêche à Terre-Neuve depuis le début du siècle. C’est ce qui expliquerait qu’il ait été l’un des six commissaires de Terre-Neuve en 1651. Ceux-ci avaient pour mission de se saisir de Sir David Kirke, et de ses biens, d’enquêter sur ses prétendus délits, de réglementer la pêche et de percevoir les impôts prévus sur le poisson et l’huile pris par les étrangers. Pour la première fois, Terre-Neuve relevait directement du gouvernement, et celui-ci conserva ce pouvoir pendant tout l’interrègne, donnant ainsi encore un exemple de la tendance à accentuer la centralisation impériale. L’enquête sur la conduite de Kirke débuta en 1651. L’année suivante, Walter Sikes, Robert Street, William Pyle et Nicholas Redwood se rendaient dans l’île à titre de commissaires munis de directives fort semblables à celles qu’avaient reçues les commissaires de 1651.

Entre-temps, Treworgie avait dû rester à Terre-Neuve, car, au mois de mai 1653, lorsque la Commission pour les Affaires d’Irlande et d’Écosse étudia l’opportunité d’envoyer une nouvelle commission dans l’île, il fut décidé de confier la direction des affaires à Treworgie, qui vivait alors à Terre-Neuve. En juin, il reçut des instructions lui accordant le droit d’exercer son autorité tant sur les colons que sur les pêcheurs et lui ordonnant de percevoir les droits imposés aux étrangers, de défendre l’île et d’aviser aux moyens de la fortifier, d’entendre tous les griefs contre Kirke et de soumettre un rapport au conseil à la fin de la saison de pêche. Treworgie ne put s’acquitter de ces fonctions parce qu’il fut arrêté par James Kirke, en même temps que Sikes et Pyle, pour s’être emparé des domaines de Sir David Kirke. C’est en vain qu’ils montrèrent leurs commissions et qu’ils déclarèrent avoir déjà restitué les biens de Kirke à son épouse. On les déclara coupables, mais, en 1654, ils adressèrent à Cromwell une pétition dans laquelle ils réclamaient un nouveau procès.

On ignore quel fut le résultat de ces poursuites, mais il y a lieu de croire qu’ils furent graciés. Treworgie semble être resté gouverneur de l’île jusque vers 1659 ou 1660. En avril 1660, il demandait au Conseil d’État de lui accorder une nouvelle commission de gouverneur, ainsi que deux ou trois frégates qui lui permettraient de percevoir les taxes et de surprendre sur le fait les pêcheurs espagnols. Il invoqua, pour rentrer en Angleterre, une pénurie de provisions et le fait qu’on lui devait six années de solde. On déféra la requête de Treworgie au secrétaire des plantations d’outremer, mais la Restauration amena la reprise de la controverse entre Lord Baltimore [V. Calvert] et les Kirke au sujet des droits de propriété à Terre-Neuve et, pendant quelque temps, le gouvernement cessa d’exercer une autorité directe dans l’île.

Treworgie ne reçut pas sa commission, et il disparaît alors de l’histoire de Terre-Neuve. Il se peut qu’il soit le John Trewethy mentionné, en décembre 1663, comme « le serviteur de Sa Majesté [...] cessionnaire de Ralph, feu lord Hopton », dont il est question dans une pétition adressée au conseil à propos de terres en Virginie.

Il semble que Treworgie ait été un administrateur juste et habile, qui remporta un certain succès en gouvernant des planteurs et des pêcheurs indisciplinés. Le retour au régime de gouvernement par les propriétaires accentua la violence et la rancœur entre les deux groupes, et faillit ainsi provoquer la ruine et de l’industrie et de l’établissement.

Gillian T. Cell

Les documents officiels concernant la carrière de Treworgie à Terre-Neuve se trouvent au PRO, C.O. 1/12, nos 20, 21, 1/33, no 73 ; S.P., 25/29, pp.11–18, 22–24 ; 25/65, pp.243s., 25/69, pp.160, 197, 204–210, 25/75, p.278, 25/121, p.51 (résumés dans PRO, CSP, Col. 1574–1660, 1675–76). — V. aussi : BM, Egerton MS 2 395, f.262.— PRO, Acts of PC., col, ser., 1613–80.— Lounsbury, British fishery at Nfld.— Prowse, History of Nfld.— Sur ses relations avec le Maine, V. : PRO, H.C.A. 13/64, deposition of John Trewerghey, 19 March 1650/51.— Maine Hist. Soc., Documentary history of Maine, III ; IV ; VI ; Province and court records of Maine, I.— J. Savage, A genealogical dictionary of the first settlers of New England (4 vol., Boston, 1860–62), IV.

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Gillian T. Cell, « TREWORGIE (Treworgy, Trewerghey), JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/treworgie_john_1F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1966
Année de la révision:    1986
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