SOUPIRAN, SIMON, chirurgien barbier à l’hôpital de Québec, marguillier en charge de la paroisse Notre-Dame de Québec vers 1716, né dans la paroisse de Saint-Michel, à Saint-Sever en Gascogne, en 1670, du mariage d’Antoine Soupiran et de Catherine Laborde, décédé à Québec le 9 février 1724.
Fils d’un notaire royal, Soupiran est sans doute venu au Canada comme chirurgien à bord d’un navire. Les témoins de son mariage, qui fut béni à Québec le 26 août 1700, lui tinrent lieu de famille. Ils faisaient tous partie de l’équipage du Bien-Aimé qui se trouvait à l’ancre « en la rade devant Québec ». La nouvelle épouse de Soupiran, Marthe Bélanger, était veuve et mère de cinq enfants ; cinq autres enfants naquirent de ce mariage. De 1700 à 1712 la famille habita une maison louée rue du Cul-de-Sac à la basse ville de Québec, près du port.
En Nouvelle-France les chirurgiens, tel Soupiran, tombaient sous la surveillance du « lieutenant du premier barbier-chirurgien ordinaire de Sa Majesté ». Plus tard, au début du xviiie siècle, c’est le médecin du roi à Québec qui exerça cette surveillance. La chirurgie, qui avait été considérée jusque-là comme un métier, fut officiellement élevée au rang de profession en 1699, mais l’écart entre le rang social d’un médecin et celui d’un chirurgien demeurait grand. La profession chirurgicale comportait deux avantages particuliers : les chirurgiens n’étaient pas passibles de punitions corporelles pour la mort d’un malade et en cas de décès d’un patient ils jouissaient du privilège de créancier après l’église et l’apothicaire. Soupiran appartenait à l’ordre inférieur des chirurgiens, les chirurgiens barbiers. Ceux-ci, au lieu d’aller étudier au collège royal de chirurgie à Saint-Côme, recevaient au cours d’un stage d’apprentissage une formation fondée sur l’exemple et l’imitation.
On sait que Soupiran a transmis ses connaissances à quatre apprentis au moins, dont son fils aîné. Le stage d’apprentissage durait de deux à quatre ans au Canada tandis qu’en France il se limitait à deux ans. Toutefois, les apprentis canadiens en chirurgie n’étaient pas tenus à faire six ans de compagnonnage.
Les clients de la boutique de barbier de Soupiran pouvaient payer au jour le jour ou s’abonner pour l’année. À Québec, en 1714, on pouvait se faire raser tous les jours de l’année pour une somme annuelle de 10#. Soupiran était enclin à confier sa boutique de barbier à ses apprentis mais, quand il n’y avait pas de clients, il acceptait que les apprentis le suivent dans ses visites à domicile et à l’hôpital et qu’ils assistent aux saignées, aux purges, aux traitements et aux opérations. À cette époque, il fallait une forte constitution pour survivre non seulement à la maladie mais aussi aux soins des chirurgiens. Pierre Courreaud* de La Coste, qui était un assistant-apprenti sérieux, avait la permission d’aller à l’hôpital et de se servir des instruments chirurgicaux de son maître quatre jours par semaine. En échange de leurs services, les apprentis recevaient de leur maître la formation dans leur profession et la nourriture. Quelquefois le maître se chargeait aussi du renouvellement et de l’entretien de la garde-robe.
Au cours du xviiie siècle, les chirurgiens canadiens abandonnèrent peu à peu les métiers de barbier et de perruquier. Parallèlement, ils durent se soumettre à des règlements plus sévères. Le fils aîné de Soupiran, Simon Soupiran* fils (1704–1764), s’éleva jusqu’au rang de chirurgien-juré de l’Amirauté de Québec. Il transmit à son tour ses connaissances en chirurgie à son fils aîné, Charles-Simon Soupiran(1728–1784), mais, faute d’héritier mâle, cette courte dynastie de chirurgiens québécois s’éteignit après la troisième génération.
[Le lecteur trouvera un exposé concis et agréable à lire sur la médecine en France au xviie siècle dans W. H. Lewis, The splendid century : life in the France of Louis XIV (Garden City, N. Y., 1957). On pourra aussi consulter François Millepierres, La vie quotidienne des médecins au temps de Molière (Paris, 1964), et Marcel Marion, Dictionnaire des institutions de la France aux XVIIe et XVIIIe siècles (Paris, 1923), 92s., et les articles sur la chirurgie et les chirurgiens dans l’Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers de Diderot (Lausanne, 1778), 769–773, 777–782. Abbott, History of medicine, 12–32, et Arthur Vallée, Un biologiste canadien, Michel Sarrazin, 1659–1735 (Québec, 1927), sont deux bons ouvrages sur l’histoire de la médecine en Nouvelle-France. Dans le RAPQ et le BRH, on trouvera des commentaires d’É.-Z. Massicotte, de Raymond Douville et d’autres auteurs sur certains aspects de l’histoire de la médecine. Une étude complète et moderne s’impose dans ce domaine. p. n. m.]
AJQ, Greffe de Louis Chambalon, 25 août 1700, 9 juin 1703, 30 nov. 1706, 20 mars 1707, 11 mai 1716 ; Greffe de Pierre Rivet, 21 oct. 1715, 18 mai 1717 ; Registre d’état civil de Notre-Dame de Québec.— ASQ, Paroisse de Québec, 118.— Un engagement d’apprenti-chirurgien en 1715, BRH, XXXI (1925) : 51.— Un engagement d’un apprenti chirurgien en 1717, BRH, XXXII (1926) : 541.— Jug. et délib., IV : 1 017 ; VI : 126, 468.— Recensement de Québec, 1716 (Beaudet).— P.-G. Roy, La famille Soupiran, BRH, XLI (1935) : 129–160.
Peter N. Moogk, « SOUPIRAN, SIMON (1670-1724) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/soupiran_simon_1670_1724_2F.html.
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Auteur de l'article: | Peter N. Moogk |
Titre de l'article: | SOUPIRAN, SIMON (1670-1724) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1969 |
Année de la révision: | 1991 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |