SMITH, MICHAEL, prédicateur baptiste, instituteur et auteur, né en 1776 dans le comté de Chester, à dix milles de Philadelphie ; il se maria « en 1806, dans un des États du Sud », et il eut au moins deux enfants ; décédé en 1816 ou après.
Compilateur ou auteur d’une précieuse description du Haut-Canada pendant les années qui précédèrent immédiatement la guerre de 1812, Michael Smith est par ailleurs un personnage plutôt effacé. Les seuls renseignements biographiques qu’on possède sur lui viennent des préfaces de ses divers écrits et d’une lettre adressée à William Halton, secrétaire du lieutenant-gouverneur Francis Gore*. Après avoir beaucoup voyagé à travers les États-Unis pendant près de dix ans, il décida « d’aller là où les terres pouvaient être obtenues à de bonnes conditions » ; il ne voulait pas « vivre dans le Sud, où l’esclavage florissait, », et fut incapable « d’acquérir de la terre en Pennsylvanie ». En janvier 1810, il partit pour le Haut-Canada, qui attirait « l’attention de beaucoup de monde en Pennsylvanie et au New Jersey », et où « n’importe qui pouvait acquérir 200 acres de terre à la condition de prêter le serment d’allégeance à George III et de payer 37,50 $ pour les faire arpenter ». Mais ne désirant nullement s’installer dans un nouvel établissement, Smith acheta 200 acres d’« excellente » terre près de la rive du lac Érié.
En juin 1811, Smith faisait l’école à trois milles de Niagara (Niagara-on-the-Lake). Le même mois, il sollicita de Gore la permission d’imprimer « une représentation géographique et politique de la province du Haut-Canada ». L’autorisation lui ayant été accordée, il « voyagea beaucoup, à cette fin, pendant environ un an ». À l’automne de 1812, après que la guerre eut éclaté, Smith et sa famille furent constamment harcelés et menacés par les Indiens de la région de Niagara, où ils séjournaient alors, sous le prétexte qu’ils étaient yankees. Le 9 novembre 1812, l’administrateur Roger Hale Sheaffe* ordonna « à tous ceux qui avaient antérieurement refusé de prêter le serment d’allégeance de demander un passeport pour les États-Unis ». Cette décision de Sheaffe avait été provoquée par les rapports d’officiers de milice, dont Richard Hatt, selon lesquels certaines personnes avaient refusé de prêter le serment requis par la loi sur la milice « parce qu’elles [étaient] citoyens américains ». Sheaffe précisait dans sa proclamation que quiconque omettrait de se présenter avant le 1er janvier 1813 aux commissions pour les non-naturalisés, établies à Niagara, à York (Toronto) et à Kingston, « serait considéré comme étranger ennemi [...] et passible d’être traité comme prisonnier de guerre ou comme espion, selon le cas ». Même si Smith affirma qu’il avait prêté le serment, lui et sa famille, « désireux de retourner aux États », se rendirent à Kingston, où ils comparurent le 26 décembre devant une commission formée de Richard Cartwright, d’Allan MacLean* et du lieutenant-colonel John Vincent* et reçurent leurs passeports. Le manuscrit de Smith fut confisqué. La famille se rendit à Prescott et traversa aux États-Unis à Ogdensburg, dans l’état de New York. Smith gagna sa subsistance en prêchant comme ministre baptiste à l’occasion, pendant qu’il descendait vers New York, et de là vers Richmond, en Virginie.
En cours de route, après avoir reçu l’offre d’une aide financière pour l’impression d’ « une représentation géographique du Haut-Canada », Smith se hâta de composer un texte, fondé en partie sur sa mémoire, en partie sur des « notes éparses [qu’il avait] conservées » et sur d’autres papiers qu’il avait laissés à Buffalo, dans l’état de New York. En 1813, une première édition de 3 000 exemplaires fut publiée à Hartford, au Connecticut, et une seconde impression de 10 000 exemplaires parut bientôt au même endroit. Il y eut par la suite d’autres réimpressions, à New York, à Philadelphie et à Trenton, au New Jersey. Une édition considérablement augmentée parut à Baltimore, au Maryland, en 1814, et une autre à Richmond en 1815. Cette année-là, Smith décida d’aller s’installer au Kentucky ; il arriva à Lexington en mars 1816, et une autre édition de son ouvrage vit le jour, laquelle fut plusieurs fois réimprimée en moins d’un an. À Lexington, il devint maître d’école et continua à exercer comme ministre baptiste, puis on perd sa trace.
Le succès remporté par les diverses éditions de l’ouvrage de Michael Smith permet de deviner le très grand intérêt des Américains pour le Haut-Canada pendant les années où les États-Unis s’efforçaient de conquérir cette province ; Joseph Sabin dit que, « dans une de ses préfaces, [Smith] affirma qu’en tout plus de trente mille exemplaires de ses livres avaient été imprimés ». Pourtant, son œuvre n’a point dû être d’une lecture très réconfortante pour les patriotes américains. Smith souligne que, lors de la déclaration de la guerre, les gens du Haut-Canada, en majorité d’origine américaine, étaient généralement neutres, vis-à-vis tant des Britanniques que des Américains. Puis, pendant la guerre, ils en vinrent à voir dans les Américains de cruels envahisseurs : « ils [crurent] de leur devoir de tuer tous [les Américains] qu’ils [pouvaient] pendant l’invasion, de façon à en décourager d’autres d’envahir la province ». Plus loin, Smith décrivait la guerre comme ayant été « portée au Canada, parmi des gens de [sa] propre nation et tout à fait inoffensifs ». Outre les passages concernant les attitudes face à la guerre, l’ouvrage contient l’exposé contemporain le plus complet sur la géographie, la population et les coutumes du Haut-Canada à l’époque de la guerre de 1812.
Trois des principaux ouvrages de Michael Smith sont : A geographical view, of the province of Upper Canada, and promiscuous remarks upon the government [...] (Hartford, Conn., 1813), A geographical view of the British possessions in North America [...] (Baltimore, Md., 1814), et A narrative of the sufferings in Upper Canada, with his family in the late war, and journey to Virginia and Kentucky, of M. Smith [...] (3° éd., Lexington, Ky., 1817). La liste la plus complète des diverses éditions, accompagnée de commentaires, se trouve dans Dictionary of books relating to America, from its discovery to the present time, Joseph Sabin, compil. (29 vol., New York, 1868–1936 ; réimpr., 29 vol. en 15, Amsterdam, 1961–1962), 20 : 433–438. Smith est également l’auteur de On the vanity of human actions ; a little sermon, by a big sinner (Hartford, 1813), Human sorrow and divine comfort, or a short narrative of the sufferings, travel, present feelings and situation of M. Smith [...] (Richmond, Va., 1814), et de Beauties of divine poetry ; or, appropriate hymns, and spiritual songs, selected, altered and original (Lexington, 1817).
APC, RG 5, A1 : 5504s. ; RG 8,1 (C sér.), 688B : 74–76, 87, 105, 127s., 187.— « Proclamations by governors and lieutenant-governors of Quebec and Upper Canada », AO Report, 1906 : 261s.— E. A. Cruikshank, « The county of Norfolk in the War of 1812 », OH, 20 (1923) : 9–40.
G. M. Craig, « SMITH, MICHAEL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/smith_michael_5F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
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