Titre original :  Guelph Mayors - City of Guelph

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SLEEMAN, GEORGE, brasseur, sportif et homme politique, né le 1er août 1841 à St Davids, Haut-Canada, fils de John Sleeman et d’Ann M. Burrows ; le 7 septembre 1863, il épousa à Guelph, Haut-Canada, Sarah Hill, et ils eurent sept fils et cinq filles ; décédé le 16 décembre 1926 dans la même ville.

John Sleeman émigra de la Cornouailles en 1836 et s’établit à Guelph en 1847. Formé à St Davids et à Guelph, George Sleeman eut toujours de « grands projets » pour la petite brasserie de son père, la Silver Creek Brewery, dont il assuma la direction générale en 1859. Associé à compter de 1865, il augmenta la production en adoptant la machine à vapeur, en ajoutant une malterie et en construisant une cave d’entreposage. Il agrandit le territoire de distribution en ouvrant à Dundas un point de vente que tenait son frère William. Il se mit à brasser du porter, en plus de l’ale que produisait déjà son père, et vendit les deux bières moins cher que la principale concurrente de leur brasserie, la Guelph Brewery de Thomas Holliday.

Dès 1868, la Silver Creek Brewery, acquise par Sleeman à la suite du retour de son père à St Davids, dominait le marché de Guelph. Sleeman avait le génie de l’innovation. En 1874 par exemple, il commença à utiliser du bisulfate de soude (un stabilisateur et agent de conservation) et inventa un système de refroidissement qui facilitait le contrôle du brassage, diminuait les coûts de main-d’œuvre et lui permit de faire de la lager. En outre, il intégra toutes les étapes de la production et de la distribution. Dès 1890, il était, de tous les brasseurs ontariens, celui dont le capital était le plus élevé : il avait des débouchés dans 15 grandes et petites villes, de Sault-Sainte-Marie à Québec. Trois facteurs favorisèrent cette croissance : l’augmentation de la population de l’Ontario, la hausse de la consommation de bière (elle passa de 2,5 gallons par personne en 1871 à 5,1 en 1893) et l’expansion des chemins de fer. En 1900, Sleeman, sa femme et trois de leurs fils constituèrent juridiquement l’entreprise sous le nom de Sleeman Brewing and Malting Company Limited.

L’esprit d’initiative de George Sleeman n’était pas moindre dans le domaine sportif. Passionné de baseball, il devint lanceur au Maple Leaf Base Ball Club en 1863, l’année où ce jeu commença à se pratiquer à Guelph. Bientôt, l’équipe fit la fierté de la ville. Des centaines d’amateurs la suivaient pour assister à des matches dans le sud de l’Ontario et aux États-Unis [V. Thomas Goldie*]. En 1869, elle remporta le championnat canadien contre des équipes d’Ingersoll et de Woodstock à l’issue d’un tournoi de trois jours à London. Durant encore sept ans, elle resterait la meilleure équipe de l’Ontario. En tant qu’organisateur en chef et bailleur de fonds du club (il en fut élu président en 1874), Sleeman fut l’un des premiers à faire venir des joueurs américains ; il leur donnait une part des surplus de fin de saison. Ces changements marquèrent les débuts des sports d’équipe professionnels au Canada. Renforcée par la présence de ces joueurs étrangers, l’équipe des Maple Leafs gagna en 1874 à Watertown, dans l’État de New York, un tournoi que ses organisateurs appelaient « le championnat mondial non professionnel ». Deux ans plus tard, Sleeman commença à verser des salaires aux joueurs et à encourager les autres équipes d’un nouvel organisme dont il était président, la Canadian Association of Base Ball Players, à en faire autant. Ironie du sort, cette initiative ouvrit la voie à l’américanisation du baseball et fit en sorte que les clubs des petites localités se classèrent moins bien dans les compétitions. Après 1886, soit l’année où Toronto et Hamilton se joignirent à l’International League, l’équipe de Sleeman perdit de l’argent et fut démantelée. En 1999, Sleeman serait admis au Temple de la renommée du baseball canadien et musée.

Par ailleurs, Sleeman occupa une place importante au Guelph Turf Club, au Guelph Bicycle Club et à la Guelph Rifle Association (il fut président de ces trois organismes) et contribua à la fondation du Royal City Curling Club en 1888. Il fut l’un des premiers à associer la bière aux sports. Dans les années 1870, il commandita une équipe de baseball amateur nommée d’après sa brasserie, le Silver Creek Club, et y joua à l’occasion comme lanceur. Pendant les courses du club hippique, sa publicité proclamait que « la lager de Sleeman [était] la meilleure du continent ». Sleeman donna des trophées au club de curling, à l’association de tir et aux courses sur route qui avaient lieu à l’Action de grâce.

L’ambition, la reconnaissance apportée par le sport et la nécessité de protéger son marché contre la prohibition poussèrent Sleeman à se lancer en politique locale. En 1876, il fut élu conseiller du quartier Sud. Devenu maire en 1880, lorsque Guelph fut érigé en municipalité, il conserva ce poste jusqu’en 1882, puis l’occupa en 1892 et en 1905–1906. À la mairie, il contribua au développement industriel de Guelph et, pendant son troisième mandat, il intervint fermement pour qu’Ontario Hydro vienne dans la municipalité [V. sir Adam Beck]. Sleeman était un administrateur financier calme et efficace, et on le respectait en tant que tel, mais il pouvait être d’une combativité flamboyante quand ses intérêts d’homme d’affaires étaient en jeu. En 1877, en 1885 et en 1889, il avait dirigé les forces d’opposition aux campagnes pour le bannissement des ventes locales d’alcool. À la suite de leur victoire retentissante au référendum de 1877, les opposants défilèrent derrière un char sur lequel se tenait un homme déguisé en Gambrinus, le dieu grec de la bière. Sleeman dansa avec un balai en proclamant l’expulsion des prohibitionnistes hors du comté de Wellington. Les manifestations de ce genre, les sports et la politique n’étaient pas les seuls moyens par lesquels il attirait l’attention de ses concitoyens. Il était réputé également comme anglican, numismate et trésorier de la Progress Lodge de la société des Oddfellows.

L’attachement de Sleeman à sa ville et son amour de la technologie faillirent lui coûter sa brasserie. En 1894, de son propre chef, il fonda une entreprise de tramways électriques, la Guelph Railway Company, parce que Berlin (Kitchener) et Brantford avaient des services de ce genre. Dans la première année, il fit poser cinq milles de rails. Bien qu’il ait eu l’intention de prolonger la ligne jusque dans d’autres localités, personne d’autre n’était prêt à investir. Le réseau ne rapporta jamais assez pour compenser les frais de construction. En 1902, les banques prirent possession non seulement de la compagnie de tramways Silver Creek, mais aussi de la maison de Sleeman et de la brasserie. L’année suivante, la famille lança une petite entreprise rivale, la Springbank Brewery. Cependant, les banques découvrirent qu’elles ne pouvaient pas se passer de Sleeman pour administrer la grande brasserie (désormais syndiquée). En 1906, elles la revendirent à la George Sleeman and Sons Limited. Peu de temps après, Sleeman fusionna les deux brasseries. Il les exploita jusqu’à ce que la prohibition l’oblige, en 1916, à cesser de faire de la bière.

George Sleeman mourut le 16 décembre 1926 à la suite d’une opération pour une occlusion intestinale. Le parti porté au pouvoir dans la province deux semaines auparavant s’était engagé à réglementer le commerce de l’alcool. Au terme d’un mois au cours duquel brasseries et distilleries firent l’objet de transactions effrénées à Toronto, la Springbank Brewery Company Limited de Sleeman passa aux mains d’un cabinet juridique torontois, et un des fils de Sleeman, Henry Oscar, la remit en exploitation. En 1933, la Jockey Club Brewery Limited acheta la compagnie et la marque Sleeman disparut. En 1939, la brasserie cessa de fonctionner. En 1985, un arrière-petit-fils de Sleeman, John Warren Sleeman, la constitua de nouveau en société et relança la Cream Ale, brassée selon la recette mise au point par George Sleeman au xixe siècle.

Bruce Kidd

AO, RG 22-318, nº 10989 ; RG 80-8-0-1047, nº 36030 ; RG 80-27-2, 79 : 120.— Ontario Heritage Foundation (Toronto), Wellington County files, « Baseball in Ontario and the Guelph Maple Leafs ».— Univ. of Guelph Library, Arch. and Special Coll. (Guelph, Ontario), Sleeman coll.— Guelph Mercury, 16 déc. 1926.— Gordon Hogarth, « When Maple Leafs first faced curves of pitcher Cummings », Evening Telegram (Toronto), 31 oct. 1923 : 31.— Lisa Bowes, « George Sleeman and the brewing of baseball in Guelph, 1872–1886 », Historic Guelph : the Royal City (Guelph), 27 (1987–1988) : 44–57.— Canadian annual rev., 1906.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 1.— B. M. Durtnall, « Brewing beer and ale : working at Sleeman’s and Holliday’s », Historic Guelph : the Royal City, 38 (1999) : 35–50.— William Humber, Diamonds of the north : a concise history of baseball in Canada (Toronto, 1995).— L. A. Johnson, History of Guelph, 1827–1927 (Guelph, 1977).— Harold Koch, « George Sleeman as I remember him », Guelph Hist. Soc., Pubs. ([Guelph ?]), 14 (1974), nº 3 : 1–2.— Ontario Gazette (Toronto), 1900 : 371.— Jarrett Rudy, « Sleeman’s : small business in the Ontario brewing industry, 1847–1916 » (thèse de m.a., univ. d’Ottawa, 1994).— Tony Shaman, « Guelph’s master brewers and mal[t]sters », Historic Guelph : the Royal City, 38 : 23–32.— Sleeman Brewing and Malting, The family scrapbook (Toronto, s.d.).— « The Sleeman family », Guelph Hist. Soc., Pubs., 14, nº 2 : 1–2.— Steve Thorning, « Streetcars in Guelph : the history of the Guelph Radial Railway », Historic Guelph : the Royal City, 22 (1982–1983) : 4–40.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Bruce Kidd, « SLEEMAN, GEORGE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/sleeman_george_15F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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